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Irak: les peshmergas montent la garde à la frontière, sans appréhension


Mardi 23 octobre 2007 à 10h43

IBRAHIM KHALIL (Irak), 23 oct 2007 (AFP) — Au poste d'Ibrahim Khalil, entre le Kurdistan irakien et la Turquie, les peshmergas se sont transformés en gardes-frontière. Et malgré la tension avec leur puissant voisin du nord, leur routine n'a pas changé.

Les combattants kurdes, connus pour avoir tenu tête à l'armée de Saddam Hussein dans les montagnes du nord de l'Irak, ont maintenant la mission d'assurer que personne ne viendra remettre en question l'autonomie de la région, dont ils ont le contrôle depuis 1991.

Mais pour le moment, la seule activité dont ils se préoccupent, sur un pont qui sert de lien routier entre le sud de la Turquie et le nord de l'Irak, c'est de vérifier que les centaines de véhicules qui y transitent sont en règle.

"Malgré les événements, la frontière est ouverte 24 heures sur 24", explique à un journaliste de l'AFP un officier des peshmergas, entouré d'une escouade de ses hommes en tenue camouflage, béret rouge sur le crâne, kalachnikov en bandoulière et pistolet à la ceinture.

Au dessus du bâtiment qui marque l'entrée au Kurdistan, flotte le drapeau régional rouge-blanc-vert frappé d'un large soleil jaune. "Bienvenu au Kurdistan d'Irak", peut-on lire sur une pancarte. Au delà du pont, un immense drapeau turc rouge frappé du croissant se découpe sur le ciel: c'est de là que le danger pourrait venir.

Les combattants kurdes d'Irak qui ont acquis une réputation de redoutables guerriers des montagnes en luttant contre les Britanniques, le pouvoir de Bagdad et les clans et partis rivaux, ont dû se transformer en auxiliaires militaires du pouvoir régional né avec l'appui des Etats-Unis après la guerre du Golfe de 1991.

Aujourd'hui, ils forment une véritable armée de quelque 100.000 hommes équipés de véhicules blindés. Et le pouvoir régional auquel ils obéissent s'est dit prêt à les mobiliser en cas d'incursion turque contre des bases d'un groupe rebelle, le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), établies dans les montagnes escarpées de cette zone.

Mais avant que l'ordre de mobilisation ne vienne, ils suivent attentivement des yeux les centaines de poids lourds, en majorité des énormes camions-citernes, qui forment un ballet incessant entre la Turquie, et la ville toute proche de Zakho, la première localité kurde.

"Tout est calme ici. Le commerce doit continuer malgré tout", explique avec le sourire un vendeur de fruits et légumes installé près du poste frontière, sur le bas coté de la route poussiéreuse. Des taxis jaunes immatriculés en Turquie attendent d'éventuels passagers qui voudraient franchir la frontière.

Par précaution, les peshmergas ont dressé des barrages et fouillent les voitures et les camions. Et sur la route qui conduit d'Erbil, la capitale régionale, à la frontière, des convois de ces forces complètement autonomes du pouvoir central irakien se déplacent vers des zones reculées de cette région difficile d'accès.

Présence incongrue dans cet environnement dominé par les Kurdes, une base militaire turque est installée dans le secteur de Bamarni, à bonne distance d'Ibrahim Khalil. Elle abrite quelques centaines de soldats, qui campent ici depuis dix ans dans le cadre d'un accord avec Massoud Barzani, alors chef du PDK (Parti democratique du Kurdistan), devenu depuis président de la région autonome du Kurdistan d'Irak.

"Ils doivent partir", explique Nejian, un jeune du village. "Nous avons peur, car si quelque chose arrive, nous serons en plein coeur des événements".

Un de ses amis, Fami, renchérit en indiquant que l'artillerie turque bombarde chaque soir des petits villages kurdes dans la montagne.

"Les villageois vont devoir quitter leur terre et leur maison si cela continue", souligne un ancien du village --qui a déjà vécu les vagues d'exode qui ont depuis des décennies marqué la vie des Kurdes.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.