Jeudi 10 janvier 2013 à 15h46
PARIS, 10 jan 2013 (AFP) — Aussitôt annoncé le meurtre de trois militantes kurdes à Paris, des centaines de Kurdes se sont pressés jeudi devant les lieux du crime dans un quartier où ils sont fortement implantés, scandant des slogans pro-PKK et anti-turcs.
Arrivée peu à peu en début de matinée, après avoir appris la nouvelle, la foule, très majoritairement masculine, s'est d'abord massée sur le trottoir, rue Lafayette près de la gare du Nord, avant de déborder sur la chaussée et d'interrompre la circulation, sous la surveillance de policiers et de gendarmes en tenue anti-émeute.
Encadrés par des membres d'associations kurdes de France ayant formé un service d'ordre équipé de gilets de couleur, les manifestants scandaient des slogans comme "Les martyrs ne meurent jamais! Elles ne sont pas mortes!", "Nous sommes tous PKK!", "Turquie assassin, Hollande complice!" ou "Honte à la justice française!".
Ils agitent des drapeaux du PKK et d'autres à l'effigie de son chef charismatique emprisonné en Turquie, Abdullah Öcalan.
La colère et l'indignation se lisent dans tous les regards. Devant une porte cochère, des femmes aux yeux rougis par les larmes se soutiennent mutuellement, avant que l'une d'elles se mette à hurler: "Turquie fasciste!"
"C'est une vraie tragédie pour les Kurdes", assure Edip Gultekin, 32 ans, en France depuis douze ans. "Depuis des années, on nous assassine, on nous massacre. Ces personnes qui ont été tuées, ce n'est pas n'importe qui, ce sont des réfugiées politiques. Si elles sont assassinées aujourd'hui, ça nous inquiète. Ca veut dire que même dans un pays comme la France, on n'est plus protégé".
Gule Contay, émue aux larmes, était amie avec la plus jeune des victimes. "Je ne sais pas quoi dire, je suis effondrée, je n'arrive pas à comprendre", dit-elle. "C'étaient des personnes qui se dévouaient pour les Kurdes. Elles étaient la voix des Kurdes en France et en Europe".
Dans un communiqué distribué sur place, la Fédération des associations kurdes en France à appelé "tous les Kurdes d'Europe à se rassembler à Paris pour dénoncer cette attaque".
Vite récupérées sur internet, les photos des trois victimes ont été imprimées sous forme de vignettes que les manifestants épinglent sur leurs poitrines.
Les cris et les slogans ont redoublé d'intensité quand les trois corps, drapés dans des housses bleues, ont été évacués des locaux du Centre d'information de Kurdistan, au 1er étage d'un immeuble sans plaque, vers l'institut médico-légal de Paris à bord d'une fourgonnette mortuaire de la ville de Paris.
Derrière une banderole sur laquelle était écrit, en kurde: "Nous nous vengerons", les manifestants sont partis en cortège vers le siège de la fédération des associations kurdes de France, dans la rue d'Enghien voisine, où ils se sont rassemblés et ont écouté des responsables de la communauté qui s'adressaient à eux dans des porte-voix, avant de se disperser dans le calme vers 13H00. Quelques centaines d'entre eux restaient cependant dans et autour de l'établissement où est installée l'académie des arts et cultures du Kurdistan.
Devant la presse, Songül Karabulut, présidente de la commission des affaires étrangères du Congrès national du Kurdistan, "sans accuser la France", s'est interrogée sur le fait que le crime ait été commis en plein coeur de Paris. "Je me suis posé la question. Je voudrais aussi que la France se pose la question: Pourquoi?", a-t-elle insisté, en soulignant que cette attaque était également dirigée contre la France.
Les responsables ont appelé à une manifestation samedi midi place de la Bastille.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.