Jeudi 6 juin 2024 à 12h24
Qamichli (Syrie), 6 juin 2024 (AFP) — L'administration autonome kurde du nord de la Syrie a annoncé jeudi le report jusqu'en août d'élections municipales prévues le 11 juin et qui étaient contestées aussi bien par son principal ennemi, la Turquie voisine, que par les Etats-Unis qui la soutiennent.
Ces élections concernent sept cantons où vivent des Kurdes et des Arabes et illustrent le morcellement du pays en raison de la guerre civile qui a éclaté en 2011.
La Commission des élections a annoncé dans un communiqué avoir décidé "le report jusqu'au mois d'août (...) en réponse aux demandes des parties et alliances politiques participant au scrutin", qui s'étaient plaintes que la campagne électorale était trop courte.
Dans une déclaration à l'AFP, Saleh Muslim, qui copréside le Parti de l'Union démocratique (PYD), principale formation de l'administration autonome, a assuré que les causes du report étaient "internes" et répondaient aux demandes des partis.
"Mais la Commission électorale a peut-être également pris en compte les circonstances politiques", a-t-il ajouté.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan avait menacé la semaine dernière de lancer une nouvelle opération militaire pour empêcher la tenue du scrutin.
"Nous avons déjà fait ce qu'il fallait faire face au fait accompli, et nous n'hésiterons pas à agir de nouveau si nous nous retrouvons dans la même situation", a averti M. Erdogan.
Jeudi, la chaîne publique turque TRT s'est félicitée du report des élections. "La position exprimée par la Turquie a porté ses fruits", a-t-elle estimé sur X, en citant des "sources de sécurité".
La Turquie considère comme "terroriste" le PYD dont la branche armée a été le fer de lance de la lutte contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI), au grand dam d'Ankara.
Ankara a mené depuis 2016 plusieurs offensives sur le sol syrien contre les forces kurdes dans le nord, qui lui ont permis de contrôler une bande frontalière côté syrien.
- Mécontentement américain -
Les Etats-Unis, pays allié de la Turquie au sein de l'Otan et principal soutien des Forces démocratiques syriennes (FDS, dominées par les Kurdes), ont eux aussi appelé l'administration autonome à revenir sur sa décision, estimant que "les conditions pour la tenue de telles élections n'étaient pas réunies".
Si le gouvernement syrien à Damas ne voit pas d'un bon oeil la tenue de ces élections, il s'est gardé de tout commentaire officiel sur l'organisation du scrutin.
Les Kurdes syriens, qui ont souffert de décennies de marginalisation et d'oppression de la part du pouvoir central, ont profité du chaos généré par la guerre pour établir une autonomie de facto.
En novembre 2013, le PYD avait établi une administration autonome de transition.
S'il ne s'agit pas du premier scrutin organisé par l'administration autonome depuis, c'est le premier à inclure toutes les zones qu'elle contrôle.
Après la défaite de l'EI, les forces kurdes ont progressivement étendu leur contrôle en Syrie où elles tiennent près du quart de la superficie du pays.
Le coprésident de la Haute Commission électorale, Rokun Mulla Ibrahim, a indiqué à l'AFP que "le nombre de candidats dépasse les 5.000" et estimé le nombre d'électeurs à plus de deux millions".
Les sièges des conseils municipaux sont répartis à parts égales entre femmes et hommes.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.