Dimanche 24 juin 2007 à 16h44
SOULEMANIYAH (Irak), 24 juin 2007 (AFP) — De nombreux Kurdes d'Irak sont descendus dans la rue pour exprimer leur joie dimanche après la condamnation à mort du cousin de Saddam Hussein, "Ali le chimique", pour le génocide kurde en 1988, tandis que les premières réactions politiques étaient partagées.
"Ali le chimique" et deux anciens responsables de l'ancien régime, jugés avec trois autres, ont écopé de la peine capitale pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis lors d'une campagne d'exécutions de masse et de bombardements chimiques menée au Kurdistan irakien (nord) et baptisée opération "Anfal".
"Le contraste entre les méthodes utilisées par ces loyalistes de Saddam pour appliquer la 'justice' et la légalité avec laquelle ils ont été jugés ne pouvait être plus fort", a estimé le gouvernement régional du Kurdistan dans un communiqué.
Cette procédure est "un triomphe pour l'Etat de droit et les pratiques démocratiques absentes sous l'ancien régime, mais que les autorités judiciaires s'efforcent de remettre en place dans l'Irak d'aujourd'hui", a-t-il ajouté.
Au Kurdistan irakien, nombre d'habitants sont descendus dans la rue pour exprimer leur joie, certains en agitant des banderoles et d'autres en dansant au son de la musique traditionnelle, a rapporté un correspondant de l'AFP.
"Aujourd'hui, je renais après avoir vu l'accusé Ali le chimique terrifié dans sa cage en écoutant le verdict. Je voudrais qu'il soit amené à Halabja ou dans n'importe quelle ville kurde pour être pendu", a confié Fatima Rasoul, 45 ans, dont 20 membres de la famille ont été tués dans ce génocide.
Quelque 5.000 Kurdes, en majorité des femmes et des enfants, avaient été tués à Halabja, dans une attaque chimique menée par l'armée irakienne.
"J'aurais aimé danser mais pour ceux d'entre nous qui ont perdu leurs frères et leurs êtres chers, la tristesse ne s'achèvera pas avec leurs exécutions", a déclaré Nergis Aziz, une femme de 57 ans, qui a perdu son mari et trois frères dans ce génocide.
Ari Hearson, un ancien peshmerga (combattant kurde) de 40 ans, blessé au cours de l'opération Anfal, estime qu'"Ali le chimique" ne devrait pas être exécuté mais "enfermé seul pour écrire ses mémoires sur les crimes d'Anfal et la manière dont il les a commis. Des crimes contre des enfants et des citoyens sans armes", a-t-il rappelé.
Pour sa part, le député kurde Mahmoud Othman a affirmé que ce procès était "incomplet parce qu'à aucun moment il n'a été dit qui a aidé Saddam à fabriquer les armes chimiques, quels pays et quelles sociétés l'ont aidé à les utiliser contre nous".
Le parlementaire, un médecin qui avait soigné des victimes lors des campagnes Anfal, redoute par ailleurs que ce procès n'accentue encore les divisions intercommunautaires dans le pays, comme ce fut le cas après l'exécution de Saddam Hussein.
De son côté, le député sunnite Ayad al-Samarrai a estimé que la condamnation d'"Ali le chimique" était "juste".
"Mais je ne pense pas que les officiers de l'armée auraient dû être punis. Tout officier militaire en Irak doit obéir aux ordres", a estimé ce parlementaire, de même obédience que les ex-dignitaires condamnés dans ce procès.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.