Jeudi 18 août 2011 à 11h40
ANKARA, 18 août 2011 (AFP) — L'aviation turque a pilonné mercredi soir les repaires des rebelles kurdes dans le nord de l'Irak après une embuscade sanglante dans le sud-est de la Turquie qui a coûté la vie à neuf personnes, signe d'une escalade dans le conflit kurde.
Ces raids sont les premiers menés par la Turquie en Irak depuis un an.
Les chasseurs turcs ont pilonné 60 positions du PKK dans les montagnes irakiennes, en riposte à l'attaque survenue quelques heures auparavant qui a coûté la vie à huit soldats et un milicien kurde à Cukurca (sud-est), à la frontière irakienne, a annoncé jeudi l'armée turque.
L'état-major a averti que ces raids se poursuivront si nécessaire.
Selon Ankara, 2.000 rebelles sont retranchés en Irak, d'où ils s'infiltrent en Turquie pour mener des attaques.
M. Erdogan, excédé par l'intensification depuis juillet des attaques du PKK qui ont tué plus de 40 soldats et policiers, a réagi avec virulence au guet-apens de mercredi: "Notre patience est à bout", a-t-il dit, promettant de sévir contre le PKK malgré le mois musulman du ramadan, traditionnellement synonyme d'accalmie.
Il a aussi signalé un durcissement de son gouvernement vis-à-vis de la question kurde, évoquant "une nouvelle ère" et averti que "ceux qui ne s'écartent pas du terrorisme vont en payer le prix", un message adressé sans doute aux politiciens kurdes jugés trop proches du PKK.
Ces attaques interviennent en effet dans un contexte de tensions politiques avec les Kurdes.
Trente-cinq députés kurdes (sur 550 au total) refusent toujours de prêter serment au Parlement depuis les législatives de juin, pour protester contre le maintien en détention provisoire de cinq des leurs, accusés de collusion avec le PKK.
Lancée en 2009, la politique d'"ouverture" du gouvernement d'Ankara envers la communauté kurde souffre de ces tensions.
Mais M. Erdogan a assuré que "la lutte contre le terrorisme sera menée sans porter atteinte à la démocratie".
"Le projet de paix du gouvernement n'était pas assez fort et global (...) C'est pour cette raison qu'il subit des revers", souligne Nuray Mert dans le journal libéral Milliyet.
Cette commentatrice exhorte toutefois le gouvernement d'Ankara à ne pas répondre à la violence par la violence, insistant sur le respect des valeurs démocratiques pour un pays souhaitant adhérer à l'Union européenne.
Nihat Ali Ozcan, un expert en sécurité, prédit une nouvelle escalade armée entre Ankara et le PKK. "Les attaques du PKK vont se poursuivre et la Turquie va y riposter", a-t-il dit à l'AFP, précisant que la Turquie était habituée à cette situation depuis 1984, l'année où le PKK a entamé sa lutte armée contre Ankara.
Les autorités politiques et militaires turques doivent discuter mercredi, dans le cadre d'une réunion ordinaire du Conseil national de sécurité (MGK), d'une réorganisation des moyens militaires et policiers engagés contre le PKK.
Parmi les mesures envisagées figurent le déploiement dans les zones de combat d'unités spéciales de la police et de troupes militaires entièrement professionnelles, rapporte la presse.
Mehmet Tezkan, de Milliyet, estime que derrière la multiplication des attaques du PKK pourrait se trouver la Syrie voisine, qui abrite aussi une communauté kurde.
Les rapports turco-syriens, autrefois excellents, se sont dégradés après les fortes critiques d'Ankara concernant la répression en Syrie.
"Les attaques s'intensifient tant qu'Ankara avertit Damas", pour qu'elle mette fin aux opérations contre la population civile, commente M. Tezkan.
Les Etats-Unis, qui considèrent le PKK comme une organisation terroriste, ont indiqué qu'il continueraient de fournir leur soutien à Ankara pour combattre les rebelles.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.