Vendredi 13 avril 2012 à 21h31
BAGDAD, 13 avr 2012 (AFP) — L'arrestation surprise du président de la commission électorale irakienne (IHEC), Faraj al-Haïdari, a accentué vendredi la crise politique, les kurdes comme le courant laïque accusant le Premier ministre Nouri al-Maliki de détruire le processus politique.
Joint par téléphone au poste de police où il est détenu, M. Haïdari a déclaré à l'AFP avoir été arrêté la veille dans un tribunal de Bagdad avec son collègue Karim al-Tamimi après une plainte déposée par Hanane al-Fatlawi, députée de la formation de l'Etat de droit, dirigée par M. Maliki.
"L'affaire concerne trois ou quatre employés de l'IHEC auxquels ont été versées, de manière tout à fait normale, une prime de 100.000 dinars (83 dollars) pour des heures supplémentaires", a-t-il expliqué.
"J'ai déjà été interrogé au Parlement sur cette affaire par Mme Fatlawi. Le juge avait rejeté ses accusations mais elle a de nouveau porté plainte et cette fois le juge a changé d'avis", a-t-il dit. "Je ne pense pas que ce soit dirigé contre moi mais c'est contre l'IHEC, contre tout le processus démocratique".
Cependant, le porte-parole du Conseil supérieur de la justice, Abdel Sattar Bayraqdar, a affirmé que les deux hommes avaient été arrêtés pour prévarication.
"Ils sont suspectés d'avoir payé avec l'argent de l'IHEC des employés du cadastre pour enregistrer des terrains en leurs noms. L'utilisation frauduleuse de l'argent public est punie de sept ans de prison", a-t-il ajouté, précisant que les deux hommes restaient en détention pour les besoin de l'enquête.
A la tête de l'IHEC depuis 2007, M. Haïdari, un Kurde chiite de 64 ans, est la bête noire de la liste de l'Etat de droit car il avait refusé lors des élections législatives de mars 2010 le nouveau décompte des voix dans tout le pays que réclamait M. Maliki, alors Premier ministre sortant.
Ce dernier refusait d'accepter que la liste laïque d'Iraqiya d'Iyad Allawi soit arrivée en tête avec 91 sièges, contre 89 à sa liste.
La formation de M. Maliki avait demandé l'audition au Parlement de M. Haïdari, puis le 30 juillet 2011 un vote de défiance pour corruption, mais sans succès du fait de l'opposition des autres partis.
Dans un communiqué, la présidence de la région autonome du Kurdistan irakien a parlé "d'une violation claire du processus politique démocratique".
L'arrestation des deux hommes "vise à remettre en cause l'indépendance de la commission électorale et à tuer le processus politique en s'emparant d'une institution indépendante", selon elle.
"Il semble que ceux qui contrôlent le gouvernement veulent poursuivre leur oeuvre entamée depuis longtemps: accroître la centralisation, violer la Constitution et détruire les bases sur lesquelles a été construit le nouvel Irak", a-t-elle ajouté.
La présidence kurde appelle "à reconsidérer immédiatement ces arrestations et demande à tous les partis démocratiques de prendre conscience des risques avant qu'il ne soit trop tard".
L'un des principaux députés d'Iraqiya, Haïdar al-Mullah, a mis en cause M. Maliki. "C'est le le chef de la formation de l'Etat de droit qui est derrière (ces arrestations). Il veut faire passer le message que les élections doivent être truquées ou les autorités se vengeront contre la commission" électorale.
"C'est aussi une indication que la justice est devenue un instrument entre les mains de Maliki", selon lui.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.