19 juillet 2006
L'attaque du 15 juillet marque une intensification de l'action du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Le gouvernement turc adopte en conséquence une ligne plus dure, avec le renforcement de la législation antiterroriste et des velléités d'action militaire contre les bases du PKK situées au nord de l'Irak.
"Insupportable". C'est le terme qu'a utilisé le Premier ministre turc, Recep Tayip Erdogan, dimanche 16 juillet, pour décrire la violence des attaques du Parti des travailleurs du Kurdistan, le PKK, rapporte le quotidien turc Turkish Daily News. En trois jours, l'organisation de guérilla indépendantiste d'extrême gauche rebaptisée Kongra-gel a causé la mort de quinze policiers et soldats turcs.
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Mais, aujourd'hui, le quotidien turc juge que le gouvernement "perd patience" et adopte une "ligne plus ferme". Lors d'une réunion d'urgence qui s'est tenue le lundi 17 juillet, le gouvernement a "promis de mobiliser toutes les ressources du pays pour lutter contre le terrorisme". Il appelle notamment "les Etats-Unis et l'Irak à agir contre les bases du PKK situées dans les montagnes du nord de l'Irak", affirme le Turkish Daily News. Mais Washington ne semble pas déterminé à aider le Premier ministre turc. "Le gouvernement américain a affirmé qu'une opération militaire contre le groupuscule kurde ne figurait pas sur l'agenda des forces américaines en Irak, qui sont déjà très occupées dans tout le reste du pays", rappelle le journal.
Qui plus est, selon le quotidien britannique The Independent, "l'armée turque risque de provoquer la rage des Américains si elle met à exécution son plan pour attaquer les Kurdes du nord de l'Irak". En effet, la Turquie affirme que le droit international lui permet de franchir la frontière pour se défendre, mais la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, a mis en garde à plusieurs reprises Ankara contre une opération unilatérale dans "la seule région vraiment stable d'Irak". Le directeur de l'institut de politique étrangère de l'université d'Ankara indique dans le quotidien britannique que "le gouvernement turc est dans une impasse. D'un côté, il ne veut pas que les relations avec les Américains se détériorent ; de l'autre, le peuple demande des actes."
Une action unilatérale de la Turquie serait également très mal vue par les membres de l'Union européenne, qui font pression sur le pays afin qu'il garantisse à la minorité kurde la totalité de ses droits culturels. Dans tous les cas, The Independent précise que l'opération, si elle a lieu, ne devrait pas se faire avant août, "quand l'actuel chef d'état-major sera remplacé par un officier considéré comme un partisan de la manière forte".
Le gouvernement turc veut également accroître les moyens pour lutter contre le PKK au niveau national. "Le président laïciste Ahmet Nedcet Sezer a approuvé lundi 17 juillet la loi antiterroriste, même s'il a demandé à la Cour constitutionnelle d'annuler certains articles", rapporte le quotidien Hürriyet. Le nouveau projet comporte en effet des modifications qui augmentent le nombre de comportements considérés comme terroristes.
Selon le quotidien turc, "faire du chantage, empêcher quelqu'un de faire des études, permettre à des personnes recherchées par la police de s'enfuir, encourager les soldats à la désobéissance civile ou encore inciter quelqu'un à ne pas faire son service militaire" sont désormais des comportements terroristes. En outre, une personne qui a commis un acte considéré comme terroriste pourra désormais être détenue vingt-quatre heures sans voir d'avocat, et son avocat ne pourra avoir accès au dossier de son client à sa guise. Le Turkish Daily News note que "plusieurs personnes pensent que cette loi est trop draconienne".