Ces Kurdes dont on n'a cure

mis à jour le Samedi 28 decembre 2024 à 15h51

LeCanardEnchaine.fr - Par David Fontaine

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmed al-Charaa a pris le pouvoir à Damas, les milices liées au PKK, parti autonomiste kurde de Turquie, se sentent menacées. Les Kurdes de Syrie risquent de perdre leurs villes-refuges comme Kobané.

Sur qui les pays occidentaux ont-ils compté pour combattre au sol les miliciens sanguinaires de l’Etat islamique (EI) ? pour contrer la répression sanglante de Bachar El Assad ? ou, plus tard, pour garder sous clé les familles de djihadistes occidentaux que les pays européens ne sont pas pressés de voir revenir ?

Chaque fois, ce sont les milices syriennes liées au PKK, parti autonomiste kurde de Turquie, qui ont fait le boulot, au sein des Forces démocratiques syriennes (FDS). Elles sont, une fois de plus, menacées d’être lâchées, depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmed al-Charaa a pris le pouvoir à Damas, avec l’aide du grand frère musulman voisin, la Turquie.

Le chef des renseignements turcs, Ibrahim Kalin, a été dépêché sur place par Erdogan dès le 12 décembre, quatre jours après la chute de la ville ... Puis c'est le ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan, qui est allé y parader, ce 22 décembre, pour affirmer, en parfait colon, qu'« il n'y a['vait] pas de place pour les Kurdes de Syrie dans la nouvelle organisation politique du pays ». Le nouveau grand chef syrien Charaa a ajouté que les armes des FDS seraient récupérées, et leurs prisonniers djihadistes transférés. Pendant ce temps-là, les miliciens islamistes proturcs de l 'Armée nationale syrienne (ANS, à distinguer de l'armée régulière) expulsent les Kurdes des zones frontalières proches de l'Irak et de la Turquie. Et assiègent même Kobané, ville martyre, dont la résistance héroïque en 2014-2015, menée par les milices kurdes, a marqué la première défaite de l'EI. .. 

« Aujourd'hui, la chute de cette ville sonnerait comme une revanche des djihadistes, explique Alain_ Frachon, journaliste au "Monde" (19/12). Car les supplétifs turcs de l' ANS comptent nombre d'anciens de l'EI ou d' AI-Qaida particulièrement avides de casser du Kurde - et d'enlever des femmes kurdes. Kobané ces trois syllabes devraient susciter un minimum de gratitude de l'Europe à l'adresse des Kurdes.»

Aujourd'hui, les FDS n'ont plus pour rempart protecteur que les quelque 900 soldats américains encore déployés dans le nord de la Syrie. A la merci d'un retrait unilatéral dont pourrait décider Trump, même s'il a qualifié la victoire des rebelles à Damas de « prise de pouvoir inamicale » par Ankara. 

Pendant ce temps, l'Union européenne est aux abonnés absents, l'Allemagne panse ses plaies et la France se cherche un gouvernement. 

C'est très absorbant.