Mardi 6 juin 2023 à 11h38
Strasbourg, 6 juin 2023 (AFP) — Deux anciens co-présidents du HDP, parti politique pro-kurde de gauche, et opposants au président turc Erdogan ont fait condamner mardi Ankara devant la Cour européenne des droits de l'Homme pour violation de leurs droits lors d'une détention provisoire.
Actuellement écroués en Turquie, Selahattin Demirtas et Figen Yuksekdag Senoglu avaient saisi la Cour pour contester la surveillance dont ils avaient fait l'objet lors de leur placement en détention provisoire en novembre 2016.
Un juge avait ordonné l'enregistrement audiovisuel de leurs entretiens avec leurs avocats et la saisie de tout document échangé, les empêchant ainsi de préparer leur défense.
La Cour, qui veille au respect de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme au sein des 46 pays qui l'ont ratifiée, a estimé qu'en empêchant les deux hommes d'échanger avec leurs avocats, les autorités turques avaient violé la Convention.
Les magistrats européens, qui siègent à Strasbourg, ont rappelé la jurisprudence bien établie selon laquelle "la confidentialité des conversations entre un détenu et son défenseur constitue un droit fondamental pour un individu et touche directement les droits de la défense".
La Turquie a donc été condamnée à verser 5.500 euros aux deux plaignants, pour "dommage moral".
Figure de proue du HDP, principal parti pro-kurde de Turquie, Selahattin Demirtas est incarcéré depuis fin 2016 pour "propagande terroriste" et encourt jusqu'à 142 ans de prison.
Il est accusé de plusieurs dizaines de crimes et délits dont celui d'insulte au président et d'être lié au PKK, classé comme organisation "terroriste" par Ankara et ses alliés occidentaux. Fin mai, il a annoncé se retirer de la vie "politique active".
Il a toujours nié ces accusations et le Conseil de l'Europe a régulièrement réclamé sa libération, conformément à un précédent arrêt de la CEDH.
Le HDP demande aussi la libération de Figen Yuksekdag Senoglu, son ancienne co-présidente, de Gulten Kisanak et de Selcuk Mizrakli, tous deux anciens maires de Diyarbakir (sud-est).
Les Kurdes représentent environ un cinquième des 85 millions d'habitants de la Turquie. Peuple sans Etat, le Kurdes sont répartis entre la Turquie, l'Irak, la Syrie et l'Iran.
Dans une autre affaire, la CEDH a condamné mardi Ankara pour violation de la liberté d'expression, après la sanction infligée à la secrétaire générale du Syndicat des juges turc pour un entretien accordé à un quotidien national.
La cour a considéré que les propos tenus dans l'interview relevaient "d'un débat sur des questions d'intérêt public et appelaient un niveau élevé de protection".
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.