Mardi 16 mai 2023 à 15h45
Dresde (Allemagne), 16 mai 2023 (AFP) — Plus de trois ans et demi après le spectaculaire casse du musée de Dresde (est), cinq membres d'un sulfureux clan berlinois ont été condamnés mardi en Allemagne à des peines de prison, bénéficiant toutefois d'une certaine clémence de la justice en échange de leurs aveux et de la restitution partielle des joyaux dérobés.
Le cambriolage dans l'un des plus vieux musées d'Europe, le "Grünes Gewölbe" ("Voûte verte"), a été décrit par des spécialistes comme le plus important vol d'oeuvres d'art des temps modernes.
Une partie importante du butin, des joyaux du XVIIIe siècle assurés pour plus de 113 millions d'euros, a été retrouvée en décembre, après des négociations entre la défense et le parquet en marge du procès.
"Sans cette entente, ces bijoux considérés comme irremplaçables ne seraient jamais retournés dans la +Voûte verte+", a déclaré le juge Andreas Ziegel pour justifier l'accord passé avec une partie des accusés.
Les objets rendus sont estimés à 60 millions d'euros, même si "l'ensemble de la collection est pour toujours détruit", a-t-il reconnu.
Nombre des joyaux restitués sont incomplets ou ont été "endommagés" lors de leur tentative de nettoyage, probablement pour effacer des traces.
- "Clan Remmo" -
Des dommages ont également été causés par un stockage dans l'eau, une experte décrivant des cassures, des rayures, de la rouille et de nombreux diamants manquants. Et d'autres pièces manquent toujours, comme la broche d'Amélie Auguste, reine de Saxe (1752-1828).
Cet accord passé avec les suspects a fait grincer des dents dans le milieu judiciaire. D'autant plus que les cambrioleurs sont loin d'être des inconnus des services de police: ils appartiennent tous "au clan Remmo".
Ce groupe kurde d'origine libanaise, enraciné dans le quartier populaire berlinois de Neukölln, avait déjà été impliqué dans le vol d'une pièce d'or géante de 100 kilos, d'une valeur d'environ 3,75 millions d'euros, dérobée en 2017 au Bode Museum de la capitale allemande.
Le président de l'association des procureurs de Berlin, Ralph Knispel, a regretté que les accusés n'aient pas été obligés de révéler le nom de leurs complices en échange de peines plus légères. "La question est de savoir quel message cela envoie aux autres criminels, a déclaré M. Knispel à la radio RBB.
Mardi au tribunal, le juge Ziegel a estimé que les possibilités d'un accord étaient valables "aussi bien pour M. Remmo que M. Müller ou M. Meier".
Jugés notamment pour "vol aggravé en bande organisée", les prévenus, actuellement âgés de 24 à 29 ans, tous frères ou cousins, risquaient 10 années de réclusion.
- Un an de préparation -
Dans le détail, les peines prononcées mardi vont de quatre ans et quatre mois de prison à six ans et trois mois de prison.
Un sixième accusé, qui avait un alibi la nuit du cambriolage, a été acquitté.
Tout avait commencé le 25 novembre 2019, quand deux cambrioleurs s'étaient introduits dans la "Voûte verte", sis dans le Palais des princes de Saxe, à Dresde, surnommée la Florence de l'Elbe.
L'émoi était immense: la directrice des collections d'art d'Etat de Dresde, Marion Ackermann, avait parlé d'un préjudice d'une valeur historique et culturelle "inestimable" et non chiffrable.
Un an plus tard, la police allemande avait arrêté les trois premiers suspects, mais sans les bijoux, malgré d'importantes promesses de récompenses.
C'est seulement en plein procès, le 17 décembre 2022, qu'une partie des joyaux dérobés - en tout 31 pièces complètes ou fragments - réapparaît. Et quelques semaines plus tard, plusieurs auteurs du cambriolage lèvent une partie du voile sur la préparation de leur forfait, qui a duré, expliquent-ils, un an.
Une quarantaine d'autres suspects sont toujours recherchés pour leur implication dans le casse.
Et le sort des bijoux intrigue encore les enquêteurs: qu'en ont fait les cambrioleurs durant trois ans ? Où sont les pièces manquantes ?
Les parures sont tellement connues qu'elles sont invendables en l'état, sauf à extraire et retailler les diamants, donnant bon espoir au musée de les voir réapparaître un jour.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.