Dimanche 24 juin 2007 à 11h28
BAGDAD, 24 juin 2007 (AFP) — L'opération Anfal, menée à la fin des années 1980 sous le régime de Saddam Hussein, a entraîné dimanche la condamnation à mort de trois des six responsables jugés pour ces massacres, point culminant de décennies d'hostilité entre les Kurdes et l'ancien régime irakien.
Les juges irakiens ont qualifié l'opération Anfal de génocide contre le peuple kurde, tandis que l'ancien régime l'a défendue comme une opération destinée à contrer l'insurrection en temps de guerre, lors du conflit qui opposait alors l'Irak à l'Iran.
Selon diverses estimations, plus de 100.000 personnes ont été tuées, quelque 182.000 selon l'accusation, et plus de 3.000 villages détruits pendant cette campagne, qui a provoqué aussi un déplacement massif de la population kurde.
De 1987 à 1989, de nombreux assauts sont lancés contre les Kurdes dans le nord du pays, avec notamment le gazage de la population de Halabja en 1988, qui fait 5.000 morts.
Le cas de Halabja n'a cependant pas été retenu dans le procès, car cette opération ne faisait pas partie des huit opérations officielles qui constituent la campagne Anfal.
L'armée irakienne avait gazé Halabja en représailles à la prise de la ville par des combattants kurdes (peshmergas) soutenus par les Gardiens de la révolution iraniens.
Du nom d'une sourate du Coran signifiant "butin", Anfal a consisté en des bombardements systématiques, des gazages et des assauts menés contre diverses parties de la région autonome du Kurdistan en 1988.
Vers 1986, de larges secteurs de la région kurde ont été libérés du contrôle du gouvernement central, soumis à des pressions croissantes en raison de la guerre avec l'Iran.
Début 1987, Saddam Hussein charge son cousin, Ali Hassan al-Majid, dit "Ali le chimique", de ramener la région kurde sous le contrôle du gouvernement central.
M. Majid institue alors des "zones interdites" dans la région et considère tous leurs habitants comme des insurgés. Les villageois sont transférés vers des zones pouvant être facilement contrôlées par Bagdad, alors que les "zones interdites" sont bombardées, puis envahies.
Selon l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW), basée aux Etats-Unis, ces campagnes étaient destinées à exterminer le peuple kurde et ne constituaient pas seulement de simples opérations visant à contrer l'insurrection, comme le prétendait l'ancien régime.
"Il faut souligner que les meurtres n'ont pas été commis pendant les opérations de contre-insurrection: les détenus étaient tués plusieurs jours ou semaines après que les forces armées eurent atteint leurs objectifs", avait affirmé HRW, dans un rapport détaillé sur la campagne Anfal datant de 1993.
"Finalement, la question de l'intention est au coeur de la notion de génocide", soulignait ce rapport, qui détaillait des documents et témoignages démontrant l'existence de cette intention, selon l'organisation.
Le personnage d'"Ali le Chimique" est central dans cette affaire. Il a fait l'objet de nombreuses accusations, notamment d'utilisation de gaz toxiques, d'exécutions massives et d'établissement de camps de détention pour soumettre le Nord kurde.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.