Lundi 21 avril 2025 à 18h54
Qaraqosh (Irak), 21 avr 2025 (AFP) — Dans le nord de l'Irak, les cloches des églises de Mossoul et de ses environs ont sonné lundi pour pleurer la mort du pape François, plus de quatre ans après sa visite historique dans une région autrefois dévastée par les jihadistes.
Sous les élégantes arches en marbre gris de l'église syriaque catholique d'al-Tahira, des dizaines de fidèles étaient réunis pour une messe de Pâques qui coïncidait avec les funérailles d'un habitant de cette petite localité de la région de Qaraqosh.
Mais cette messe a aussi été l'occasion de se remémorer la visite du pape en 2021 dans la bourgade chrétienne, traumatisée par les exactions du groupe Etat islamique (EI).
L'imposant fauteuil en bois sur lequel le souverain pontife s'était installé dans l'église a été préservé. Désormais à jamais inoccupé.
Sur les bancs, des femmes toutes de noir vêtues, le visage triste et les bras croisés, écoutent les liturgies.
"C'est un grand drame pour les chrétiens, en particulier au Moyen-Orient. Il gardait toujours un oeil vigilant sur la région comme un père sur ses enfants", a confié à l'AFP Kadouun Yohanna à la sortie de la messe.
Le sexagénaire se souvient encore de la liesse qui a marqué la venue du pape: "Nous débordions d'amour, nous étions extrêmement heureux: il est venu dans ce petit village où le nombre de chrétiens a diminué avec l'exil de milliers de personnes".
Forte de plus d'1,5 million de personnes avant la chute de Saddam Hussein en 2003, la communauté chrétienne d'Irak s'est réduite à quelque 400.000 âmes, beaucoup ayant fui par vagues successives les violences qui ont ensanglanté le pays.
- "Rapprochement des religions" -
La montée en puissance en 2014 des jihadistes de l'EI, qui un temps avaient conquis Mossoul pour en faire leur "capitale" du nord de l'Irak, avait constitué une nouvelle tragédie pour la communauté: des villages entiers ont été désertés et les lieux saints chrétiens saccagés.
Boutros Mazen, un assistant médical, salue "la fraternité et l'amour" insufflés par le pape François.
"Il a légué quelque chose de bon au peuple irakien, sa cohésion et son unité", lance-t-il.
Lors de son déplacement en Irak, le pape avait rencontré le grand ayatollah Ali Sistani, plus haute autorité religieuse pour des millions de chiites d'Irak et du monde.
"Il était sincère et humble, il aimait le rapprochement entre les religions", poursuit M. Mazen.
A Qaraqosh, mais aussi dans les églises de Mossoul, fraîchement rénovées après la déroute de l'EI en 2017, les cloches ont sonné à la mémoire du pape.
Originaire de Mossoul, Sanaa Abdel Karim a, comme de nombreux chrétiens, trouvé refuge au Kurdistan autonome quand les jihadistes ont envahi le nord de l'Irak.
La mort du pape, "une tragédie" et "une perte inimaginable", souffle-t-elle. "Quand il est venu en Irak, on a vu son humilité", se souvient-elle.
"Il faisait partie de ceux qui encourageaient le retour des chrétiens d'Irak. C'était très émouvant pour nous."
A Najaf, ville sainte chiite du sud de l'Irak, l'ayatollah Sistani a lui aussi salué le rôle du pape François "au service de la paix et de la tolérance" ainsi que "sa solidarité exprimée avec les opprimés et les persécutés du monde entier."
Il a rappelé que sa rencontre historique avec le pape avait constitué "une étape extrêmement importante" pour "renforcer la culture de coexistence pacifique", "le rejet de la violence et de la haine" et "le respect mutuel entre les religions."
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.