Samedi 12 novembre 2022 à 18h52
Paris, 12 nov 2022 (AFP) — La tension restait vive entre Paris et Téhéran après l'annonce samedi par la cheffe de la diplomatie française que deux autres Français étaient détenus en Iran, la France dénonçant le "chantage" de la République islamique.
Dans le même temps, quatre dissidentes iraniennes qualifiaient de "sans précédent" leur rencontre vendredi avec le président Emmanuel Macron, au risque d'irriter plus encore les autorités de Téhéran.
Paris reconnaissait jusqu'à présent la présence de cinq Français dans les prisons iraniennes. Mais samedi, Catherine Colonna a reconnu que la liste s'était allongée de deux personnes, dont l'identité n'a pas été révélée.
"Nous avions des inquiétudes sur deux autres compatriotes et il ressort des dernières vérifications faites qu'ils sont également détenus", a-t-elle déclaré au quotidien Le Parisien.
"Il est plus important que jamais de rappeler à l'Iran ses obligations internationales. Si son objectif était de faire du chantage, ça ne doit pas fonctionner. C'est la mauvaise façon de s'y prendre avec la France", a-t-elle ajouté.
"Nous demandons leur libération immédiate, l'accès à la protection consulaire (...). Mon homologue iranien, avec qui j'ai eu une conversation longue et difficile, a pris l'engagement de respecter ce droit d'accès. J'attends qu'il soit concrétisé".
Vendredi, le quotidien français Le Figaro avait déjà fait état de ces deux détenus français supplémentaires, citant une source diplomatique et une source iranienne. Ils seraient emprisonnés depuis plusieurs mois, donc avant le démarrage des manifestations qui ébranlent le régime iranien depuis le 16 septembre.
Le Quai d'Orsay n'a donné à l'AFP aucun détail supplémentaire.
- "Légitimité du combat" -
Parmi les sept détenus français en Iran figurent la chercheuse franco-iranienne Fariba Adelkhah, arrêtée en juin 2019 puis condamnée à cinq ans de prison pour atteinte à la sécurité nationale, Benjamin Brière, arrêté en mai 2020 et condamné à huit ans et huit mois d'emprisonnement pour espionnage, et deux syndicalistes, Cécile Kohler et Jacques Paris, arrêtés en mai dernier.
Début octobre, Téhéran avait diffusé une vidéo présentée comme des "aveux" de ces derniers et selon laquelle ils travaillaient pour les services secrets français. Paris avait dénoncé une "mise en scène indigne" et évoqué pour la première fois des "otages d'Etat".
Le Quai d'Orsay a depuis appelé les Français de passage en Iran à "quitter le pays dans les plus brefs délais compte tenu des risques de détention arbitraire auxquels ils s'exposent".
Plus d'une vingtaine de ressortissants de pays occidentaux, binationaux pour la plupart, sont détenus ou bloqués en Iran, ce que des ONG condamnent comme une politique de prise d'otages pour obtenir des concessions des puissances étrangères.
Au moins 326 manifestants ont été tués dans la répression du mouvement de contestation qui secoue l'Iran, affirme Iran Human Rights, une ONG basée à Oslo.
Le pays est le théâtre de manifestations depuis la mort le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, arrêtée trois jours plus tôt par la police des moeurs pour avoir enfreint le strict code vestimentaire de la République islamique.
Samedi, les quatre dissidentes iraniennes qui s'étaient entretenues avec le président Macron vendredi ont salué une rencontre "sans précédent".
"En 43 ans (depuis la révolution islamique de 1979 ndlr), pas un dissident iranien n'avait rencontré de président français sous un statut officiel", a indiqué Ladan Boroumand, cofondatrice du groupe de défense des droits de l'Homme basé à Washington, Abdorrahman Boroumand Center.
"Ce qui compte le plus, c'est l'impact psychologique de la reconnaissance de la légitimité du combat actuel en Iran. Nous devons pousser le gouvernement à agir".
Les dissidentes ont présenté une liste de requêtes aux autorités françaises, dont le rappel de l'ambassadeur de France en Iran et la mise en place de sanctions contre les responsables de la répression des manifestations.
Emmanuel Macron avait affirmé mi-octobre que la France se tenait "aux côtés" des manifestants iraniens. Téhéran avait dénoncé une "ingérence".
Mais les opposants à Téhéran avaient aussi critiqué la décision de Macron de rencontrer le président iranien Ebrahim Raïssi, en marge de l'assemblée générale de l'ONU en septembre.
Il espérait notamment relancer les discussions pour raviver l'accord de Vienne de 2015 sur le programme nucléaire iranien.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.