Jeudi 27 janvier 2022 à 22h26
Hassaké (Syrie), 27 jan 2022 (AFP) — Des dizaines de jihadistes sont encore retranchés jeudi dans une prison en Syrie, dont les forces kurdes ont annoncé avoir repris le contrôle la veille, près d'une semaine après une attaque du groupe Etat islamique (EI) ayant fait plus de 235 morts.
Les Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les Kurdes et fer de lance de la lutte contre l'EI en Syrie, avaient déclaré mercredi avoir repris le contrôle total de la prison de Ghwayran à Hassaké, une ville du nord-est, mettant fin à six jours d'intenses combats.
Mais jeudi, de nouveaux affrontements sporadiques au sein de la prison ont émaillé les opérations de ratissage toujours en cours, effectuées par les FDS, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), une ONG dont le siège est au Royaume-Uni et au vaste réseau de sources en Syrie.
Douze combattants de l'EI ont été tués dans ces combats, d'après l'OSDH. Les corps de cinq autres jihadistes ont également été retrouvés, selon l'ONG.
Les opérations de ratissage ont permis de débusquer 60 à 90 jihadistes encore dissimulés dans une aile de la prison, ont expliqué les FDS, annonçant la reddition d'environ "3.500 membres de l'EI".
Pas moins de 173 jihadistes, 55 combattants kurdes et sept civils ont été tués dans les violences à Hassaké depuis le début de l'attaque contre la prison le 20 janvier, a affirmé l'OSDH.
Un couvre-feu est en vigueur dans cette ville depuis quatre jours, les forces kurdes -soutenues par une coalition emmenée par les Etats-Unis- en bloquant tous les accès pour empêcher les jihadistes en fuite de se rendre vers d'autres régions.
- 120 blessés -
Selon l'OSDH, 25 à 40 jihadistes étaient terrés dans les sous-sols de la prison, sans nourriture depuis près d'une semaine. "Une partie d'entre eux ont été tués au cours du raid aérien (mercredi) soir pendant qu'ils tentaient de fuir", a raconté l'ONG.
Le bilan des combats risque encore de s'alourdir car "le sort de dizaines de personnes est toujours inconnu", avertit-elle, ajoutant que "120 combattants des FDS et membres de la police ont été transportés à l'hôpital, certains grièvement blessés."
L'EI a de son côté, dans un communiqué diffusé sur ses chaînes Telegram, affirmé avoir tué ou blessé huit membres des forces kurdes "malgré l'annonce des apostats de leur contrôle de la prison".
L'attaque déclenchée le 20 janvier par l'EI contre cette prison où étaient détenus des milliers de jihadistes est la plus importante offensive de l'EI depuis sa défaite territoriale en Syrie en 2019 face aux forces kurdes. L'administration autonome kurde contrôle de vastes régions du nord et nord-est de la Syrie.
La coalition antijihadiste menée par les Etats-Unis effectue des raids aériens visant des membres de l'EI, en soutien aux forces kurdes.
Depuis jeudi dernier, les affrontements ont poussé à la fuite par un temps glacial environ 45.000 personnes qui vivaient dans les secteurs proches de la prison, d'après l'ONU.
- Centaines de mineurs -
L'ONU et des organisations de défense des droits de l'Homme ont alerté sur la présence de centaines de mineurs enfermés dans cette ancienne école reconvertie en centre de détention.
"Nous sommes extrêmement préoccupés par les centaines d'enfants piégés dans un terrifiant siège" de cette prison, a ainsi déclaré jeudi le secrétaire général adjoint des Nations unies pour les Affaires humanitaires, Martin Griffiths. "Il est d'une importance cruciale que tous les enfants soient évacués pour être placés en sécurité et aidés", a-t-il ajouté au cours d'une session du Conseil de sécurité consacrée au volet humanitaire du dossier syrien.
"La reprise de la prison par les forces dirigées par les Kurdes met fin à cette épreuve meurtrière, mais la crise plus large impliquant ces prisonniers est loin d'être terminée", a de son côté rappelé mercredi l'ONG Human Rights Watch.
Les prisonniers qui se sont rendus ont été transférés vers des installations plus sûres, ont assuré les FDS. Les Kurdes réclament en vain depuis des années le rapatriement de quelque 12.000 jihadistes de plus de 50 nationalités -de pays européens entre autres- détenus sur leur sol.
Mais la plupart des gouvernements occidentaux refusent de rapatrier l'ensemble de leurs citoyens détenus dans les prisons et les camps sous contrôle des Kurdes, se contentant de rapatriements au compte-gouttes.
Des experts voient dans l'assaut jihadiste une étape vers la résurgence de l'EI, qui s'est replié dans le désert de Syrie après sa défaite dans ce pays.
Les civils payent le prix des violences dans un pays où la guerre complexe aux multiples protagonistes a fait environ 500.000 morts depuis 2011.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.