Jeudi 11 novembre 2010 à 21h16
BAGDAD, 11 nov 2010 (AFP) — Le président irakien d'origine kurde Jalal Talabani, reconduit jeudi à la magistrature suprême pour un nouveau mandat de quatre ans, est un homme malade et affaibli par une contestation croissante dans son fief du Kurdistan.
Le visage rond, doté un solide sens de l'humour, les yeux malicieux, s'appyant sur une canne à cause de son embonpoint, cet ancien guérillero kurde, qui fête vendredi son 77e anniversaire, a pris un tel plaisir à son poste qu'il a refusé de la laisser au chef laïc Iyad Allawi comme le lui demandait avec insistance le président américain Barack Obama pour sortir de la crise.
"+Nous allons partir et vous allez tomber sous l'influence de l'Iran+, lui a dit M. Obama après lui avoir rappelé que son pays avait été le protecteur du Kurdistan. +L'Iran ne nous dérange pas et vous pouvez partir demain+, lui a répondu furieux Jalal Talabani", a affirmé à l'AFP un député de son parti.
Si M. Talabani, qui a subi plusieurs opérations aux Etats-Unis, a toujours rendu hommage aux sacrifices des soldats américains qui ont chassé son ennemi Saddam Hussein, il a toujours eu des contacts étroits avec la Syrie et surtout l'Iran, où il a vécu et dont il parle couramment la langue.
Mais celui que ses camarades surnomment affectueusement "Oncle Jalal" a perdu de son prestige. Ses détracteurs fustigent la corruption qui règne dans son fief de Souleimaniyeh dans le Kurdistan (nord) et dénoncent l'enrichissement de ses proches.
Le 1er juin, il avait ouvert le 3e Congrès de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), son parti menacé par la montée en puissance de la nouvelle formation d'opposition Goran, composée de ses anciens amis politiques, qui a remporté d'importants succès électoraux.
Il est aussi en nette perte de vitesse face à son rival de toujours Massoud Barzani, le chef du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), qu'il a combattu les armes à la main dans les années 1990.
Mais ce dernier, en choisissant de rester au Kurdistan pour en devenir président, a pris aujourd'hui l'avantage et c'est lui qui a été l'hôte des réunions ayant permis de sortir de l'impasse politique en Irak.
Né en 1933 à Kalkan, village perché dans la montagne à 400 km au nord-est de Bagdad, M. Talabani a rejoint très jeune la politique, par admiration pour Moustafa Barzani, figure légendaire du combat nationaliste kurde.
Elève à Kirkouk, il rêve à 15 ans de devenir médecin mais opte finalement pour le droit afin de se consacrer à la politique. Sa participation en 1952 à une manifestation anticolonialiste à Bagdad l'oblige à interrompre ses études, qu'il reprendra après la chute de la royauté en 1958.
Il effectue entre-temps son service militaire dans l'artillerie et les blindés. Il rejoint le PDK, fondé en 1946, et combat dans les montagnes pendant la première grande révolte kurde de 1961.
Mais lorsque le chef charismatique Barzani signe en février 1964 un accord de paix avec Bagdad ne mentionnant pas l'autonomie du Kurdistan, Jalal Talabani entre en dissidence et part pour l'Iran.
Après la rupture définitive avec le PDK, il annonce en juin 1975 à Damas la création de l'UPK, qui se veut plus à gauche que son rival.
La rivalité UPK/PDK marquera dès lors la vie politique kurde.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.