Mercredi 12 mai 2021 à 12h01
Bagdad, 12 mai 2021 (AFP) — L'ONU dénonce mercredi "arrestations arbitraires", procès injustes et "intimidation des journalistes, militants et manifestants" au Kurdistan irakien, sous le feu des critiques pour la condamnation sévère de cinq journalistes et militants.
"Durant l'année écoulée, les journalistes, les militants des droits humains et les manifestants qui ont critiqué l'action des autorités kurdes ont été intimidés, menacés, harcelés ou arrêtés arbitrairement et détenus", affirme l'ONU dans un rapport.
Au total, selon l'ONU, en un an, "33 hommes, journalistes ou militants, ont été arrêtés sans savoir pourquoi, sans accès à un avocat et avec des familles informées longtemps après".
Parmi ceux finalement relâchés, "au moins cinq ont été aussitôt arrêtés pour d'autres chefs d'accusation", rapporte l'ONU, faisant penser que "le système judiciaire est instrumentalisé" pour les obliger à "l'autocensure".
Cinq hommes en particulier ont été au coeur de toutes les attentions: les journalistes Ayaz Karam, Kohidar Zebari et Sherwan Sherwani et les militants Shivan Saïd et Harwian Issa, dont la peine de six ans de prison pour "espionnage", "incitation à manifester et déstabiliser le Kurdistan" a été confirmée en cassation début mai.
Et cela, pour des accusations basées, selon Human Rights Watch (HRW), sur des publications sur les réseaux sociaux et des "informateurs secrets" que la défense n'a jamais pu interroger.
"Ces hommes ont été condamnés du fait d'une volonté politique partiale", avait affirmé à l'AFP Belkis Wille, chargée de l'Irak chez HRW. M. Sherwani, par exemple, est connu pour ses enquêtes sur la corruption et venait de critiquer sur Facebook le Premier ministre kurde, Masrour Barzani, avant son arrestation.
Pour de nombreux militants, le tour de vis sécuritaire a débuté avec l'arrivée de cet ancien patron des services de sécurité et de renseignement à la tête du gouvernement.
Ils en appellent aujourd'hui à son cousin, le président du Kurdistan Netchirvan Barzani, pour qu'il accorde une grâce aux journalistes et militants emprisonnés.
La cour de cassation a notamment retenu l'"espionnage" en arguant que les cinq hommes avaient visité les consulats allemand et américain.
"Référence absurde", a répondu le consulat allemand, tandis que le rapport annuel du département d'Etat américain accuse des "hauts responsables kurdes d'apparemment influencer des cas politiquement sensibles".
Les autorités kurdes, elles, maintiennent que les condamnés font partie "d'un complot et d'une entreprise de sabotage".
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.