Mardi 14 janvier 2025 à 15h22
Londres, 14 jan 2025 (AFP) — Le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani a été reçu mardi au Palais de Buckingham par le roi Charles III, coup d'envoi de sa première visite au Royaume-Uni axée sur la coopération économique, sécuritaire et la lutte contre l'immigration clandestine, dossier sensible pour Londres.
Cette visite de trois jours intervient dans un contexte régional fragile au Moyen-Orient, alimenté par la guerre à Gaza entre l'armée israélienne et le Hamas palestinien, une trêve fragile au Liban, mais aussi le retour prochain à la Maison Blanche de Donald Trump, artisan d'une politique de "pression maximale" envers l'Iran durant son premier mandat.
Allié de Téhéran et partenaire incontournable de Washington, l'Irak pratique depuis des années un exercice d'équilibriste pour préserver ses rapports avec les deux camps, tout en tentant de diversifier ses relations avec ses voisins arabes du golfe mais aussi les Occidentaux.
Le Premier ministre irakien, porté au pouvoir par une coalition de partis pro-Iran, a rencontré mardi matin le roi Charles III. Ils ont évoqué les "moyens d'établir un partenariat productif" notamment dans le domaine économique, mais aussi la "coopération" dans la culture et "la lutte contre les défis du changement climatique", selon les services du dirigeant irakien.
Il doit encore s'entretenir avec son homologue Keir Starmer et plusieurs protocoles d'entente et un "accord de partenariat stratégique" seront signés à cette occasion.
Des réunions avec des chefs d'entreprise, notamment des représentants du géant pétrolier BP, sont au programme.
C'est "une nouvelle ère dans la coopération entre le Royaume-Uni et l'Irak qui apportera des avantages mutuels, du commerce à la défense", s'est félicité lundi soir Keir Starmer dans un communiqué.
Les dirigeants doivent également annoncer des accords commerciaux à hauteur de 12,3 milliards de livres sterling (plus de 14 milliards d'euros). Les échanges commerciaux vont être multipliés par dix par rapport à l'année dernière entre les deux pays, selon Downing Street.
- Expulsions de migrants -
Les deux dirigeants vont "entamer les discussions" concernant un "nouvel accord sur des retours de migrants", dévoilé fin novembre dans le but de "soutenir la lutte contre l'immigration illégale".
"Une fois entériné, l'accord garantira que ceux qui n'ont pas le droit d'être au Royaume-Uni pourront être renvoyés rapidement" en Irak, selon le communiqué de Downing Street.
Le texte évoque des exportations d'équipements d'une valeur de 66,5 millions de livres sterling (plus de 79 millions d'euros) pour "renforcer les frontières de l'Irak et démanteler les gangs" de passeurs.
Keir Starmer a fait de la lutte contre l'immigration illégale une de ses priorités.
Londres tente depuis plusieurs années d'endiguer les arrivées de migrants par la Manche sur de petits bateaux. Elles sont reparties à la hausse l'an dernier: 36.816 personnes sont parvenues à rejoindre le Royaume-Uni, soit 25% de plus qu'en 2023.
- Volet sécuritaire -
Les discussions comprennent un volet sécuritaire: les autorités irakiennes vont amorcer dès septembre 2025 le retrait progressif des forces de la coalition internationale antijihadistes, lancée en 2014 sous la houlette de Washington et dont le Royaume-Uni fait partie, tout comme la France.
"Il y aura un communiqué commun concernant la coopération sécuritaire" bilatérale, a dit M. Soudani lundi soir à l'AFP, évoquant les nouvelles "dispositions" prises par son pays en vue de "la fin de mission de la coalition internationale".
Le retrait de la coalition internationale engagée contre les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) ouvre la voie à des partenariats bilatéraux avec chaque pays, explique l'Irak.
Cette "fin de mission" de la coalition a été négociée par M. Soudani avec Washington alors que des groupes armés irakiens pro-iraniens avaient lancé à l'hiver 2023 des dizaines de frappes de drones et de tirs de roquettes contre les militaires.
Les conseillers militaires de la coalition devront commencer dès septembre 2025 à se retirer des bases de l'Irak fédéral. Une deuxième phase de retrait, qui doit débuter en septembre 2026, se fera depuis le Kurdistan autonome (nord).
En 2003, malgré la forte opposition de l'opinion publique britannique, le Royaume-Uni s'était joint à l'intervention militaire menée par les Etats-Unis pour renverser le dictateur Saddam Hussein - une opération déclenchée sans mandat de l'ONU, qui devait ouvrir une des pages les plus sanglantes de l'histoire irakienne.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.