Samedi 9 juin 2007 à 17h14
BAGDAD, 9 juin 2007 (AFP) — Les autorités irakiennes ont accusé samedi, dans une note de protestation officielle, la Turquie d'avoir bombardé des provinces kurdes du nord de l'Irak, où sont repliés des rebelles kurdes turcs.
Dans un communiqué à Bagdad, le ministère des Affaires étrangères affirme avoir "envoyé une lettre au chargé d'affaires turc pour protester contre des bombardements dans les provinces de Dohouk et d'Erbil, qui ont causé des dégâts importants, un incendie et la panique parmi la population".
A Ankara, le ministère turc des Affaires étrangères a confirmé avoir reçu un courrier de Bagdad évoquant la chute d'obus turcs en territoire irakien, mais n'a pu fournir d'informations sur la réalité de ces allégations.
"Les autorités irakiennes ont convoqué notre chargé d'affaires à Bagdad et lui ont remis une note", a déclaré à l'AFP un diplomate de haut rang parlant sous le couvert de l'anonymat, insistant sur le fait qu'il ne s'agissait pas d'une lettre de protestation.
"Elles constatent dans cette note que la Turquie a mis en oeuvre certaines dispositions contre le terrorisme à la frontière irakienne et expriment leur inquiétude après que des obus sont tombés du côté irakien, semant la panique dans la population", a-t-il poursuivi.
Interrogé sur la réalité de ces allégations, le diplomate a dit ne pas être en mesure de répondre.
Selon Jabar Yawar, porte-parole des forces de sécurité kurdes irakiennes (peshmergas), "l'artillerie turque a bombardé samedi à l'aube pendant 45 minutes à proximité des villages de la province de Dohouk".
"Les bombes sont tombées à proximité des villages de Kashan, Batuwa, Mullakantili, Nzuri and Kisti", situés près de Zakho, non loin de la frontière turque, a-t-il précisé sans faire état de victime.
Les autorités irakiennes ne précisaient pas, dans leur communiqué, la date de ces bombardements ni s'ils avaient été effectués depuis la Turquie ou par les forces turques stationnées dans le nord de l'Irak.
L'armée turque dispose d'un contingent de 1.500 soldats à quelques km de profondeur en territoire irakien, dans la province de Dohouk, pour empêcher les infiltrations des rebelles séparatistes du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) dans une zone escarpée sur une longue frontière poreuse de 384 km.
"De telles activités doivent cesser immédiatement" car elles "vont éroder la confiance entre les deux pays et conduire à l'instabilité dans la région", insistent les autorités irakiennes, qui appellent au "dialogue", selon des extraits de leur note.
La Turquie accuse les Kurdes d'Irak de tolérer, voire de soutenir, le PKK et estime à plusieurs milliers le nombre de rebelles établis dans le nord irakien.
Après avoir longtemps fait pression sur les Etats-Unis et l'Irak pour qu'ils interviennent contre le PKK, elle menace depuis plusieurs semaines de lancer des opérations transfrontalières contre les bases des rebelles. Dans les années 1990, l'armée turque avait lancé plusieurs opérations contre le PKK en Irak mais sans jamais réussir à déloger les rebelles.
"L'Irak rejettera toutes les guerres par procuration menées sur son territoire, contrairement à l'ancien régime", ont affirmé les autorités dans la lettre. "La position du gouvernement à l'égard du PKK est claire, ils sont illégitimes et nous les rejetons".
Mercredi, l'Irak, la Turquie, les Etats-Unis et même le PKK avaient démenti des informations selon lesquelles plusieurs milliers de soldats turcs avaient pénétré dans le Kurdistan irakien, afin de neutraliser le PKK.
Le débat sur une intervention en Irak s'est intensifié en Turquie depuis plusieurs mois avec la recrudescence des activités du PKK dans le sud-est et un attentat à la bombe imputé aux rebelles, qui a fait sept morts et 121 blessés en mai à Ankara.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.