Mardi 6 juillet 2021 à 16h49
Hassaké (Syrie), 6 juil 2021 (AFP) — Des centaines de femmes ont manifesté mardi dans le nord-est de la Syrie sous contrôle kurde pour dénoncer les "crimes d'honneur" et les violences dont elles sont victimes, après les meurtres de deux adolescentes tuées par des proches à quelques jours d'intervalle.
Brandissant les drapeaux d'une association féministe kurde, certaines manifestantes défilant dans les rues de la ville de Hassaké avaient revêtu des tee-shirts sur lesquels était écrit "non à la violence", a constaté un journaliste de l'AFP.
Les participantes se sont notamment rassemblées devant le domicile d'une adolescente de 16 ans, tuée la veille par son père, selon des témoignages locaux que l'AFP n'a pas pu confirmer de sources officielles.
Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, la victime a été étranglée par son père qui la gardait enfermée après qu'elle avait été violée il y a plus d'un an.
"Nous condamnons ces actes commis au nom des traditions ou de la religion, ou pour +laver la honte+", a fustigé Evin Bacho, militante de l'association féministe Kongra Star.
"Notre rassemblement devant la maison de cette dernière victime, c'est un rassemblement contre toute famille qui se donne le droit de priver une femme de sa liberté", ajoute-t-elle.
"Le meurtre est un crime de non-honneur", "Arrêtez de tuer les femmes", pouvait-on lire sur certaines pancartes.
La semaine dernière, le meurtre d'une autre adolescente par ses proches, rapporté dans les médias, avait provoqué l'émoi. Le mot-dièse arabe "la fille de Hassaké" a été très repris sur les réseaux sociaux.
Des vidéos présentées comme montrant son exécution par balle ont circulé en ligne, mais l'AFP n'était pas en mesure de confirmer leur authenticité.
L'Observatoire a confirmé l'assassinat, mené par plusieurs hommes armés appartenant à la tribu de la jeune fille après qu'elle a tenté de s'enfuir avec un partenaire.
Un tel crime n'est permis par "aucune religion et aucune morale", s'indigne la manifestante Intissar al-Hamadi, réclamant "que des comptes soient rendus".
Les autorités kurdes locales criminalisent les "crimes d'honneur". A Damas, le parlement syrien avait aboli en 2020 un article juridique permettant un allègement des peines pour les auteurs de tels crimes.
Mais dans les différentes régions d'une Syrie morcelée par la guerre depuis 2011, les communautés tribales et les milieux ruraux sont encore régis par des traditions conservatrices, souvent au détriment des femmes qui restent confrontées à des restrictions drastiques de leurs libertés, aux violences domestiques et aux mariages précoces.
Les années de guerre ont exacerbé les souffrances des femmes, soumises par les belligérants à toute forme de violences documentées par des ONG, dont des violences sexuelles et des viols.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.