Vendredi 16 août 2024 à 20h55
Ankara, 16 août 2024 (AFP) — Les députés turcs ont refusé vendredi soir d'examiner une motion de l'opposition sur la restitution du mandat d'un député en prison après une violente bagarre qui a fait au moins deux blessés plus tôt dans la journée.
L'examen de la décision de la Cour constitutionnelle sur la restitution du mandat de Can Atalay a été rejeté par les votes des députés des partis composant la majorité au pouvoir, l'AKP (islamo-conservateur) du président turc Recep Tayyip Erdogan et du MHP (nationaliste).
La session parlementaire avait plus tôt été suspendue à la suite d'une échauffourée qui a fait au moins deux blessés.
La bagarre a éclaté lorsqu'un député AKP, Alpay Ozalan, a donné un coup de poing au député d'opposition Ahmet Sik, alors que ce dernier critiquait le gouvernement à propos du député détenu, Can Atalay.
D'autres députés sont alors intervenus, provoquant une violente bagarre entre des dizaines de membres du parlement pendant presque une demi-heure.
Au moins deux députés de l'opposition, un élu du CHP (social démocrate) et une élue du DEM (pro-kurde), ont été légèrement blessés par des coups au niveau des yeux.
D'autres députés de l'AKP ont donné des coups au député d'opposition Ahmet Sik alors qu'il était tombé au sol, a vu un journaliste de l'AFP sur place.
Des gouttes de sang ont éclaboussé le sol, a constaté l'AFP.
"J'ai honte d'avoir été témoin de cette situation", a réagi le dirigeant du CHP, principal parti de l'opposition, Ozgur Ozel.
"Les députés de l'AKP, qui ne reconnaissent pas la loi et n'appliquent pas les décisions de la Cour constitutionnelle, transforment le Parlement en une arène de violence (...). Nous condamnons fermement cette agression", a réagi de son côté le parti pro-kurde DEM.
Une sanction de "condamnation" a été décidée pour les deux députés à l'origine de la bagarre, a annoncé le président du parlement Numan Kurtulmus.
-Bataille judiciaire-
Elu en mai 2023 depuis sa cellule de prison, M. Atalay a été déchu en janvier de son mandat parlementaire.
L'avocat, élu sous la bannière du Parti des travailleurs de Turquie (TIP, gauche), avait été condamné en avril 2022 à 18 ans de prison, accusé d'avoir cherché, avec le philanthrope Osman Kavala - condamné à la prison à vie - à renverser le gouvernement en 2013 à travers une vague de manifestations sans précédent.
Le député de la province d'Hatay (sud), qui rejette ces accusations, est depuis plusieurs mois au coeur d'une bataille judiciaire opposant deux des plus hautes juridictions de Turquie.
La Cour constitutionnelle a ordonné par deux fois la remise en liberté de l'élu, âgé de 47 ans, arguant que son droit à la "liberté" et à la "sécurité individuelle", ainsi que celui d'être "élu et de mener des activités politiques", avaient été "violés".
Les avis de la Cour constitutionnelle, rendus en octobre, ont été contestés par la Cour de cassation.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan avait alors pris le parti de cette dernière en accusant la Cour constitutionnelle "d'accumuler les erreurs".
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.