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Une femme, chef spirituel en Islam et poétesse, éditée en français


Lundi 2 juillet 2007 à 06h52

PARIS, 2 juil 2007 (AFP) — Malek Jan Ne'mati, une Kurde d'Iran devenue chef spirituel et vénérée comme une sainte, a laissé de nombreux textes et poèmes publiés pour la première fois, dans une traduction française, 14 ans après son décès en France.

"Je l'ai rencontrée lorsque j'avais 12 ou 13 ans au Kurdistan. J'en ai gardé une très forte impression", raconte Leili Anvar, traductrice de sa poésie manuscrite et auteur de sa première biographie. L'ouvrage, "Malek Jan Ne'mati", porte en sous-titre une pensée de cette femme morte à 87 ans: "La vie n'est pas courte mais le temps est compté".

Le livre (Editions Diane de Selliers), dit cette spécialiste de littérature et de poésie persanes, permet d'"en savoir plus sur ce qu'est une femme mystique, un maître spirituel femme, une poétesse dans ce pays", et "sur le statut de sainteté en islam".

Surnommée "Sainte Janie", elle vient d'une famille très religieuse adepte d'une branche ésotérique de l'Islam. Née à Jeyhounabad, village de l'ouest iranien, son père, Haji Nematollah, est un poète prolifique, mystique, qualifié de saint. Son frère Ostad Elahi, décédé en 1974, est un philosophe, musicien et juriste tout aussi respecté.

La communauté Elahi est considérée en Iran comme l'une des deux principales sectes soufies, ont indiqué à Téhéran des spécialistes à l'AFP. Ses disciples ont été persécutés par les autorités islamiques il y a trois ans ainsi que l'an dernier dans la ville sainte de Qom, aux côtés de fidèles d'autres courants mystiques.

Très jeune, Malek Jan pratique l'ascétisme. "Dès l'enfance, selon le voeu de mon père, elle portait une robe et une calotte blanches (tenue des derviches), de sorte que les gens ne savaient pas si c'était une fille ou un garçon", témoigne Ostad Elahi, cité dans la biographie.

Haji Nematollah voulait pour les filles une éducation comparable à celle des garçons, alors que dans l'Iran traditionnel, "des condoléances accueillent la naissance d'une fille", dit Leili Anvar.

Malek Jan devient aveugle à l'adolescence, mais poursuit sa lancée mystique, entrant dans un état spirituel et une passion qu'elle ne dominait pas à cet âge, dit encore Ostad.

Dans le même temps "elle était disponible pour tous, prompte à aider les pauvres", raconte à l'AFP Bahram Elahi, fils de ce dernier élevé par Malek Jan et aujourd'hui chirurgien installé en France.

"Comme le corps de l'Homme est le même partout, la médecine est universelle. Et comme l'âme est universelle, la spiritualité est sa médecine", dit-il pour résumer la démarche de cette femme. "Elle avait un respect absolu des croyances sans y adhérer".

Tout ceux qui l'ont approchée attestent de sa sagesse, transmise oralement et dans des poèmes dictés ou qu'elle imprimait avec des caractères de cire.

"Son enseignement spirituel se faisait en persan et sa poésie en kurde d'Iran", dans son dialecte régional, explique Leili Anvar.

"Sainte Janie" a vécu en Iran mais est décédée en 1993 à Paris après une opération à coeur ouvert.

"Morte en Iran, les autorités islamiques auraient empêché ses partisans d'ériger un mausolée -une tradition- parce qu'elle s'était opposée à eux de manière parfois brutale", explique Leili Anvar. "Ils ont détruit le mausolée d'Ostad. Elle l'a fait reconstruire. Mais cela a été une vraie bataille".

"Sainte Janie" a aussi son mausolée, mais à Baillou, une petite ville du Loir-et-Cher (centre), qui attire tous les ans une foule de pèlerins.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.