9 novembre 2005 Marie-Laure Le Foulon, à Stockholm
A Stockholm, un journal gratuit fabriqué par des jeunes des banlieues se veut «la solution d'une génération»
AVEC QUELQUES COPAINS, Zanyar Adami a lancé Gringo, un mensuel gratuit et indépendant, en août 2004. Tiré à 400 000 exemplaires, le journal est distribué une fois par mois, avec le quotidien gratuit Metro, dans les trois plus grandes villes suédoises. Adami, un jeune Kurde iranien de 23 ans, est non seulement rédacteur en chef mais aussi propriétaire de la société éditrice. Arrivé en Suède à l'âge de 5 ans, il a toujours habité en banlieue de Stockholm, «au lieu-dit La vallée des Arabes» jusqu'à l'an dernier.
«J'en ai eu marre de la description de la banlieue par les médias, explique-t-il. Nous sommes soit des menaces potentielles, soit des victimes et dans le meilleur des cas des êtres exotiques. La profession des journalistes est très homogène et nous représentons des points de vue qui ne s'expriment pas ailleurs.»
A l'écouter, le journal Gringo n'est «ni un journal de banlieue ni un journal ethnique mais le plus suédois des journaux suédois.» «Il s'agit d'aborder l'identité suédoise, de remettre à jour l'image que la société a d'elle-même. Nous sommes 2 millions à être nés à l'étranger ou avoir un de nos parents à l'avoir été, dans un pays de 9 millions d'habitants ! Ce journal, c'est la solution de notre génération», affirme-t-il.
Dans le numéro de lundi dernier, le dossier du mois est consacré au parcours type du néo-nazi avec une interview faite depuis la prison où il est incarcéré d'un raciste qui a tué un immigré au début des années 90. Gringo se veut aussi amusant avec des définitions de nouveaux mots du verlan local. Un signe : certains professeurs d'université lisent Gringo pour mieux comprendre leurs étudiants.