Kurde de Syrie
AFP
PARIS — Face au désaveu des juges et aux critiques des associations sur le transfert en centres de rétention des Kurdes débarqués en Corse, Nicolas Sarkozy a confirmé lundi la volonté de la France de combattre l'immigration clandestine en les reconduisant à la frontière.
"Je le dis très simplement, nous soignons ces personnes, nous les nourrissons, nous les réconfortons (...) et nous les raccompagnerons chez eux", a déclaré le chef de l'Etat sur TF1, visant les personnes auxquelles ne serait pas reconnu le droit d'asile.
"Parce que si nous ne faisons pas ça, alors les esclavagistes du monde entier et les réseaux criminels du monde entier tireront la conclusion qu'on peut faire débarquer n'importe comment des pauvres gens sur les plages de France. Le message est très clair", a-t-il expliqué.
Des déclarations qui interviennent alors que les juges ont ordonné de remettre en liberté la totalité des 123 Kurdes clandestins découverts vendredi en Corse et enfermés dans des centres de rétention administrative (CRA).
Le PS a vu dans ces décisions un "revers" pour le gouvernement, tandis que l'ancien Premier ministre Michel Rocard évoquait une politique de l'immigration "qui n'est pas à l'honneur de la France".
Après avoir ferraillé deux jours durant avec les associations de défense des immigrés sur la légalité de cet enfermement, le ministre de l'Immigration Eric Besson a annoncé lundi l'annulation des reconduites à la frontière pour ceux qui déposeront une demande d'asile.
Pour sa défense, il a qualifié de "grotesques" les critiques des associations et a jugé "irresponsable et démagogique de prétendre qu'on peut accorder instantanément le statut de réfugié à tout étranger arrivé en France sans que l'on sache d'où il vient, quelle est son identité, pourquoi il est persécuté".
Déterminé à poursuivre sa croisade contre les filières de l'immigration irrégulière, M. Besson s'est rendu, fait exceptionnel, à l'Etat-major de la Marine nationale, où il a rencontré lors d'une réunion l'ensemble des chefs de service de l'Etat luttant contre cet "esclavage moderne" qui "menace l'Europe".
A son issue, il a annoncé une série de mesures visant à empêcher l'arrivée de clandestins dans l'Union européenne, comme la création d'un groupe de "renseignement contre les filières d'immigration clandestine", la généralisation de patrouilles conjointes entre pays riverains de l'UE en Méditerranée ou l'adoption de nouvelles règles d'engagement maritime tournées vers l'interception et la reconduite.
Il a aussi annoncé un projet de loi pour faire face à des "situations d'urgence" et des "afflux massifs" comme à Bonifacio, cas "peu fréquent" pour la France.
Le projet prévoit notamment une interdiction pour 5 ans de retour dans l'UE de tout clandestin expulsé et une clarification des rôles du juge administratif et du juge judiciaire.
Il s'agit de se prémunir contre des filières "fortement organisées", a fait valoir M. Besson.
Le ministre souhaite ainsi identifier les passeurs "le plus en amont dans les pays d'origine" et "remonter au pays source", a-t-il dit, dénonçant notamment la Turquie.
Voisine de la Grèce qui comptabilise 50% des entrées irrégulières dans l'UE, la Turquie est un pays de transit pour les migrants afghans, pakistanais, irakiens, iraniens, albanais, voire maghrébins. Autres portes principales empruntées par les migrants du sud: Malte et Chypre.
En France, une arrivée massive comme celle de Bonifacio est la première depuis qu'en 2001 un vieux vraquier rouillé avait échoué sur le littoral varois avec 910 passagers à bord, des Kurdes d'Irak et de Syrie, qui ont trouvé asile en Europe.