Nous avons la profonde tristesse de faire part du décès de Mme Hélène Ghassemlou, le vendredi 10 mars, à son domicile d’Issy-les-Moulineaux, à l’âge de 89 ans.
Née le 16.12.1933 à Prague dans ce qui était alors la Tchécoslovaquie, Hélène Krulich a rencontré à l’université de Prague Abdul Rahman Ghassemlou. En l’épousant en 1952, elle a épousé la cause kurde avec son cortège d’adversités, de clandestinité, d’exils.
Des années de clandestinité en Iran lorsque Abdu Rahman Ghassemlou est rentré en Iran pour y organiser l’opposition kurde contre la monarchie du chah, exil à Bagdad, retour à Prague où elle enseigne l’anglais à l’université tandis que Ghassemlou, devenu professeur, enseignait l’économie politique. Après l’accord de paix de mars 1970 entre la résistance kurde de Barzani et le gouvernement irakien, elle s’est installée à Bagdad où Ghassemlou, devenu secrétaire général du Parti Démocratique du Kurdistan d’Iran, travaillait comme directeur général du Plan. En mars 1974, à la suite de la reprise des hostilités kurdo-irakiennes, Ghasemlou quitte Bagdad pour rentrer à Prague où rapidement le régime lui a fait comprendre qu’il n’était pas le bienvenu car il comptait de nombreux amis parmi les partisans d’Alexandre Dubcek, le leader réformiste du Printemps de Prague. Expulsé de Prague en février 1975, il est venu s’installer à Paris où il a trouvé un poste de professeur de kurde à l’INALCO et Hélène l’a rejoint quelques mois plus tard. Elle est restée à Paris quand Ghassemlou est parti clandestinement en Iran en automne 1978 pour organiser le mouvement kurde de contestation du régime du chah. Après la révolution iranienne et la libération de la plupart des villes kurdes, le Kurdistan iranien a connu une éphémère période de liesse et de liberté à laquelle l’ayatollah Khamenei mit fin en déclarant le djihad contre les Kurdes en août 1979. Devenu chef de la résistance politico-militaire du PDKI, et une figure respectée de l’opposition iranienne laïque Abdul Rahman Ghassemlou a été assassiné le 13 juillet 1989 à Vienne, en Autriche, au cours des « pourparlers de paix » avec les émissaires, devenus assassins, du président iranien.
Installée en France, naturalisée française, Hélène est restée très proche du Parti Démocratique du Kurdistan d’Iran, de l’Institut kurde et de la communauté kurde où elle était connue comme « Xwiska Nesrîn » (sœur Nasrine). Sœur de combat pour la liberté du peuple kurde, une mère bienveillante pour les nombreux jeunes qui lui rendaient visite, mémoire vivante de plus de 60 années de l’histoire politique des Kurdes d’Iran, elle est restée jusqu’à ses derniers jours très alerte, curieuse et solidaire.
Tous ceux qui ont eu le privilège de la rencontrer gardent d’elle le souvenir d’une grande dame discrète, combattive et bienveillante.
Deux cérémonies d’hommage sont prévues pour celles et ceux qui souhaitent lui rendre un dernier hommage :
Hélène avait publié en 2011 avec beaucoup de pudeur, un livre de mémoire intitulé « Une Européenne au pays des Kurdes » (éditions Karthala)
Voir aussi le reportage de Radio Prague International
« Nasrine » : mariée à Abdul Rahman Ghassemlou, une Tchèque au cœur du drame kurde