Vincent Lindon
Les comédiens Vincent Lindon (g) et Firat Ayverdi dans le film de Philippe Lioret "Welcome".
AFP | 11 février 2009
BERLIN (AFP) — Les drames liés à l'immigration clandestine sont un thème fort de la 59e Berlinale, au coeur du poignant film français "Welcome", mais aussi d'"Eden à l'Ouest" du franco-grec Costa-Gavras, qui clôt le festival.
Très remarqué au sein de la section Panorama qui fête ses 30 ans cette année, "Welcome" de Philippe Lioret met en scène Vincent Lindon dans le rôle de Simon, un ex-champion de natation devenu maître nageur.
Dépressif depuis son divorce, Simon s'attache à Bilal (Firat Ayverdi) un adolescent irakien qui a traversé le continent pour rejoindre sa petite amie Mina (Derya Ayverdi), émigrée à Londres.
Arrivé à Calais, Bilal a échoué dans sa tentative de passer la Manche caché dans un camion de marchandises. Car une phobie l'empêche de se couvrir la tête du sac en plastique grâce auquel les immigrants déjouent les contrôles de la police - laquelle mesure le gaz carbonique rejeté dans l'air.
Il décide alors de traverser la Manche à la nage, un dangereux périple que Simon, qui lui donne des leçons de natation, veut le dissuader d'entreprendre.
Connu pour son polar "Je vais bien, ne t'en fais pas" et ses comédies "Tombés du ciel" ou "Tenue correcte exigée", Lioret signe un film social fort, émouvant et maîtrisé, où les acteurs non professionnels jouent remarquablement.
"Welcome" fait la lumière sur les risques pris par les clandestins déterminés à tout pour gagner la Grande-Bretagne et sur leurs conditions de vie précaires depuis la fermeture du camp de Sangatte, fin 2002.
Lioret montre aussi l'attitude ambigüe des autorités françaises qui tolèrent l'aide apportée par les ONG aux migrants, mais appliquent la législation qui sanctionne tout citoyen ayant hébergé une personne en situation irrégulière.
Sur le même thème "Eden à l'Ouest", projeté en sélection officielle hors compétition samedi soir, veille de la clôture du festival, rate sa cible.
Signé par Costa-Gavras - l'auteur de films politiques tels que "Z", "L'aveu" ou "Missing", président du jury de la Berlinale 2008 -, ce long métrage se présente comme "l'odyssée filmée" du jeune Elias (Riccardo Scamarcio) à travers l'Europe, avec Paris en point de mire.
Mais là où Lioret signait une fiction subtile, incarnée par des personnages de chair, uniques et émouvants, Costa-Gavras distille une vision manichéenne du monde, sur le ton d'une impérieuse dénonciation idéologique.
Sur sa route, Elias rencontre des archétypes de personnages, désincarnés, à l'instar de la bourgeoise qui lui donne une veste puis l'abandonne sur le pallier de son appartement car "on ne peut pas accueillir toute la misère du monde", le patron profiteur, la touriste allemande au fort appétit sexuel, etc.
Enfin le documentaire "Coyote" tourné par l'Espagnol Chema Rodríguez et présenté dans la section Panorama, suit les passeurs qui aident les émigrants à traverser la frontière mexicaine pour entrer illégalement aux Etats-Unis.
Déjà invité à la Berlinale 2006, Rodríguez a choisi trois émigrants guatémaltèques et leur "coyote" - le surnom des passeurs en Amérique centrale -, puis les a filmés pendant leur traversée du Mexique, vers la frontière.
Parmi eux, un seul a réussi à obtenir l'autorisation de résider aux Etats-Unis car il était mineur, et vit aujourd'hui à New York. Les deux autres ont été arrêtés puis expulsés vers le Guatemala.