BAGDAD (Reuters) - Le ministre turc des Affaires étrangères, Ali Babacan, est arrivé à Bagdad afin d'évoquer avec les autorités irakiennes les moyens de lutter contre la rébellion kurde dans le nord de l'Irak.
La Turquie, résolue à éliminer les rebelles séparatistes kurdes réfugiés en Irak, a assuré lundi vouloir épuiser les recours diplomatiques avant de lancer une opération militaire au-delà de sa frontière, comme le parlement l'y a autorisé.
Babacan doit rencontrer le président irakien Djalal Talabani, le Premier ministre Nouri al Maliki et son homologue Hoshiyar Zebari. Talabani et Zebari sont tous les deux kurdes.
Alors que près de 100.000 soldats turcs sont rassemblés le long de la frontière irakienne, le Premier ministre turc Tayyip Erdogan a annoncé lundi qu'il attendrait quelques jours, afin de laisser aux Etats-Unis le temps d'agir de leur côté contre les séparatistes kurdes.
"Si les développements attendus n'interviennent pas dans les prochains jours", nous devrons intervenir, a prévenu Erdogan lors d'une visite en Grande-Bretagne. Le Premier ministre turc doit rencontrer son homologue Gordon Brown ce mardi.
Erdogan subit la pression de l'opinion publique et de l'état-major turcs, excédés par la mort d'une quarantaine de soldats aux mains du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) au cours du mois écoulé.
Dans une série d'accrochages durant le week-end, une douzaine de soldats turcs ont encore été tués par le PKK. Les images des obsèques des militaires ont été largement diffusées et des manifestations anti-kurdes ont eu lieu dans plusieurs villes du pays.
BUSH "PREOCCUPÉ"
Le président américain George Bush a exprimé sa "profonde préoccupation" face aux attaques lancées par le PKK et il a déclaré que le président turc Abdullah Gül et les Etats-Unis continueraient d'exhorter le gouvernement irakien à intervenir contre les rebelles, a déclaré la Maison blanche.
Bush s'est aussi entretenu avec Nouri al Maliki et les deux hommes sont convenus de coopérer avec la Turquie pour empêcher les rebelles de lancer des attaques à partir du territoire irakien.
Les Etats-Unis et l'Irak s'efforcent donc de convaincre la Turquie de renoncer à une opération militaire au Kurdistan, province irakienne dotée d'une grande autonomie. La région est par ailleurs l'une des rares d'Irak à être restées relativement stables depuis l'invasion américaine de 2003.
Dans un communiqué transmis dans la soirée au bureau de Reuters à Bagdad, le PKK se dit prêt à "tendre la main" et à "dialoguer". "Mais, si la Turquie continue à se montrer hostile à l'égard du peuple kurde, nous nous défendrons et nous défendrons notre peuple", ajoute-t-il.
La Turquie estime à 3.000 le nombre de combattants du PKK en Irak. Selon Ankara, l'armée américaine en Irak pourrait, si elle le voulait, capturer les dirigeants du mouvement et couper ses voies d'approvisionnement.
Pour Washington, il convient toutefois de ne pas déstabiliser la région et de ne pas nuire au gouvernement local en donnant l'impression qu'il soutient les Turcs contre ses concitoyens kurdes.
En plus des 100.000 soldats massés à la frontière irakienne, Ankara a envoyé des chars, des chasseurs F-16 et des hélicoptères d'assaut.
Un journaliste de Reuters a rapporté avoir vu des camions transportant des pièces d'artillerie et d'autres armements en direction de la frontière et il a entendu des tirs nourris d'artillerie dans les montagnes de la province de Sirnak.