mis à jour le Mercredi 23 octobre 2024 à 17h53
Les élections pour le renouvellement du Parlement du Kurdistan se sont déroulées le 20 octobre dans le calme, sans incidents particuliers.
2.899.578 électeurs étaient appelés aux urnes. Le taux de participation a été de 72%, bien plus élevé qu’en 2018 (58%) et même en 2013 (67%), en démentant les prévisions de certains reportages de presse évoquant la désillusion ou la fatigue démocratique de la population. Pour la première fois dans l’histoire de ces élections, les électeurs, tous munis de cartes d’identité biométriques, ont pu voter électroniquement. De ce fait le processus de dépouillement et de comptage qui en 2018 avait pris près d’un mois a pu être finalisé en 24h.
Les quelques plaintes adressées à la Haute Commission électorale portaient sur des questions mineures comme actes de propagande la veille ou le jour du scrutin dans telle ou telle localité ou l’ouverture tardive d’un bureau de vote.
Après avoir traité ces plaintes la Haute Commission électorale a, le 21 octobre, annoncé les résultats officiels des élections. Sans surprise, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK), fondé en 1946 par Moustafa Barzani, est arrivé en tête avec 809.172 voix, soit 39% des suffrages exprimés, il obtient 39 sièges sur les 100 sièges du Parlement, dont 5 sièges réservés aux minorités. En 2008, il avait obtenu 688.070 voix et 45 sièges sur 111. Malgré une hausse de 121.182 voix, il enregistre donc une perte de 6 sièges en raison de la réduction du nombre de sièges du Parlement et de la nouvelle loi électorale divisant le Kurdistan autonome en 4 provinces électorales, au lieu d’une circonscription globale unique. Dans l’ancien système électoral, le PDK aurait obtenu 46 sièges affirme une analyse de la chaine de télévision Kurdistan 24. Il est suivi par son rival historique l’Union Patriotique du Kurdistan (UPK), fondé en 1975 par Jalal Talabani, qui avec 408141 voix, soit 22% des suffrages exprimés s’assure 23 sièges, contre 21 sièges en 2018. Il a ainsi en 4 ans gagné environ 90.000 voix et 2 sièges, une avancée due à l’effondrement du Mouvement Goran (Changement), né d’une scission de l’UPK qui avait en 2018 récolté 186.903 voix et 12 sièges et qui se trouve en 2024 avec 11.621 voix et un seul siège.
Cependant, l’essentiel de l’ex-électorat de Goran et de tous les mécontents du statuquo, ont voté pour le Mouvement Nouvelle Génération, un parti populiste antisystème et attrape tout, fondé par un richissime homme d’affaires Shahswar Abdulwahid, proche du Bagdad, qui enregistre d’une élection à l’autre une forte avancée, obtenant 290.991 voix soit 16% des suffrages exprimés et 15 sièges, contre 8 sièges en 2018.
Les deux partis religieux, l’Union islamique du Kurdistan et le Groupe pour la Justice obtiennent respectivement 7 sièges (5 sièges en 2018) et 3 sièges (7 sièges en 2018). L’influence électorale globale de ces deux partis stagne, voire recule en peu, passant de 12 sièges en 2018 à 10 sièges en 2024.
Un nouveau parti, Halwest (Position Nationale), issu de Goran a pu récupérer une partie de ses électeurs déçus en réalisant un score notable avec 55.775 de voix et 4 sièges. Le Front du Peuple, formé par Lahur Talabani, ex-coprésident de l’UPK et exclu de cette formation par son cousin Bafel Talabani, obtient 33.365 voix, soit 2% des suffrages exprimés et 2 sièges. Enfin, l’Alliance régionale du Kurdistan regroupant le Parti Social-Démocrate du Kurdistan, le Parti Communiste du Kurdistan et le Parti des travailleurs du Kurdistan, qui avait présenté 84 candidats n’a obtenu que 12.929 voix et un seul siège.
30 femmes ont été élues au Parlement du Kurdistan.
Plusieurs centaines de candidats indépendants s’étaient présentés au scrutin, aucun n’a eu suffisamment de voix pour être élu.
Sur les 5 sièges réservés au minorités ethno-religieuses, 2 candidats Assyro-Chaldéens, 2 Turkmènes et 1 Arménien ont été élus.
Le 22 octobre, le Front du Peuple et l’Alliance régionale du Kurdistan ont tenu une conférence de presse commune pour contester les résultats du scrutin. La Haute Commission électorale devrait statuer sur leur recours sous peu.
Cependant, les échanges pour la formation d’un gouvernement de coalition ont déjà commencé. Une coalition PDK-UPK disposera de 62 sièges, une majorité suffisante qui pourrait s’élargir à d’autres formations. Les négociations s’annoncent ardues et longues si l’on se réfère au précédent processus de 2018.