Victime. Istanbul, le 19 juin. Des manifestantes protestent contre l’abandon de la Convention d’Istanbul, le traité européen contre la violence à l’égard des femmes. Elles dressent un portrait de Deniz Poyraz, tuée le 17 juin.
Ferveur. Le 9 avril 2017, Erdogan organise un meeting géant à Istanbul pour présenter son projet de réforme constitutionnelle. Le public le salue en faisant le signe des Loups gris.
Pardon. Jean-Paul II est venu visiter Mehmet Ali Agca à la prison de Rebibbia, à Rome, le 27 décembre 1983.
lepoint.fr | Par Guillaume Perrier | Publié le 23/06/2021
Le mouvement ultranationaliste – violent, antisémite, antikurde, antiarménien –, pilier du régime turc, s’infiltre discrètement au sein des États membres.
Deniz Poyraz avait 20 ans. Elle a été assassinée, le 17 juin, après une attaque armée contre les locaux du parti prokurde de Turquie (HDP) à Izmir, où elle travaillait. L’assaillant, Onur Gencer, a fait feu sur la jeune femme qui s’est trouvée sur son chemin parce qu’il « haïssait le PKK [Parti des travailleurs du Kurdistan, auquel le HDP est accusé d’être lié, NDLR] depuis son enfance ». Le terroriste, âgé de 27 ans, a ensuite essayé d’incendier le bâtiment, avant d’être maîtrisé par la police.
Sur les réseaux sociaux, il se présentait comme un militant nationaliste turc,amateur de slogans patriotiques et de postures viriles, arme de guerre en main. L’an dernier, il s’affichait « en service » dans le nord de la Syrie, au côté des soldats turcs et de leurs supplétifs islamistes. Près de Manbij, dans la région d’Alep sous contrôle turc, il posait fièrement devant le drapeau rouge orné d’un croissant et d’une étoile, bras tendu et doigts joints pour former une tête de loup.
« Patriotes » et « idéalistes ». Ce signe des Loups gris, version turque du salut fasciste, témoigne de l’appartenance au mouvement « idéaliste » (ülkücü), un courant d’extrême droite violent, militariste, nationaliste, antisémite, antikurde et antiarménien fondé dans les années 1960 par le colonel Alparslan Türkes, un admirateur des régimes fascistes européens. Ses militants sont appelés Loups gris par leurs adversaires mais eux se définissent comme « patriotes » et « idéalistes ». L’idéal en question est celui d’une grande Turquie, d’une union des peuples touraniens, les peuples de sang, de race et de langue turcs. En France, Ahmet Cetin, le provocateur de Décines, se réclamait de ce courant idéologique. « En Turquie comme dans la diaspora en Europe, les « idéalistes » occupent un espace de plus en plus important, y compris parmi les étudiants de l’université de Strasbourg », juge un enseignant-chercheur spécialiste de la Turquie, sous couvert d’anonymat. « C’est un mouvement extrêmement discipliné qui, en 2016, a suivi son chef, Devlet Bahçeli, lorsque celui-ci a scellé une alliance avec le président Recep Tayyip Erdogan », poursuit-il. Depuis 2016, la « maison mère » des Loups gris, le MHP (Parti d’action nationaliste), forme une coalition avec le parti islamiste présidentiel, l’AKP. Son influence n’a cessé de croître au sommet de l’État. « On le sait aussi très proche des services secrets turcs et de la mafia », poursuit le professeur d’université. Cela permet à ce mouvement d’agir, le plus souvent en toute impunité. La menace est telle qu’elle inquiète de nombreux pays membres de l’UE, et le Parlement européen réclame son interdiction.
Idéologie. Le 4 novembre 2020, la France a été la première à prendre des sanctions. Un décret a prononcé la dissolution du « groupement de fait dénommé Loups gris ». Le mouvement y est qualifié de « paramilitaire et ultranationaliste ». Le décret précise qu’il est « présent dans plusieurs pays européens, s’identifie au travers de symboles communs, tels que sa dénomination, ses slogans, le drapeau aux trois croissants ainsi qu’un geste de la main symbolisant le loup, signe de ralliement des sympathisants de l’extrême droite nationaliste turque ». Mais le texte reste flou sur les structures associatives et les « foyers » qui propagent cette idéologie. La Turquie a dénoncé « une décision provocatrice »« prise à la hâte », enfreignant « la liberté d’expression ». « Il n’existe pas de groupement appelé Loups gris », se défend le ministère turc des Affaires étrangères, qui met en cause « les menaces de la diaspora fanatique arménienne ». Actif depuis un demi-siècle et organisé autour d’une hiérarchie stricte, souvent camouflé derrière des associations à but culturel, le mouvement ultranationaliste possède des représentations à travers le continent. « Mais l’appartenance à cette mouvance est très difficile à caractériser, juge l’universitaire turcologue. Ils sont très discrets et leurs idées sont insaisissables pour un observateur extérieur non averti. »
L’Euope en alerte.
Le débat français trouve un écho dans d’autres pays de l’UE. En Allemagne, qui compte la plus forte communauté turque d’Europe (2,7 millions de personnes), le « mouvement idéaliste » (ülkücü hareketi) est bien décrypté. Implanté depuis 1978, il chapeaute plus de 170 associations réparties sur tout le territoire. Depuis 2016, il s’est fait le relais de la politique d’Ankara au sein de la diaspora. Il fait la promotion d’un « nationalisme ethnique incitant à la haine […] en particulier contre les Kurdes, les Arméniens, les alévis et les juifs », souligne un rapport publié en avril par le Comité juif américain (AJC) de Berlin. Ses militants, souligne le Comité, sont responsables de nombreux assassinats en Turquie et en Allemagne depuis les années 1970. Le député Cem Özdemir (Verts), d’origine turque, dénonce leur action néfaste depuis de longues années. Sous son impulsion, un groupe d’élus a déposé une motion au Bundestag en novembre pour interdire les extrémistes turcs, au nom de la lutte « contre le racisme et le nationalisme ». « Les gouvernements ont longtemps traité les organisations « idéalistes » comme un innocent mouvement folklorique. Or on peut observer qu’elles diffusent en Allemagne des opinions radicales qui ne peuvent plus être tolérées », estime la députée Irene Mihalic (Verts). L’Office fédéral de protection de la Constitution (BfV) – le service de renseignement intérieur allemand – alerte chaque année dans son rapport sur la présence de militants turcs radicaux, structurés et regroupés dans des dizaines d’associations. Selon une estimation prudente, ils seraient au moins 18 500, ce qui en ferait le mouvement d’extrême droite le plus puissant d’Allemagne, plus nombreux que les militants néonazis, souligne l’universitaire Kemal Bozay, auteur du rapport pour l’AJC. La Belgique et les Pays-Bas aussi s’interrogent après avoir longtemps laissé l’extrême droite turque peser sur l’échiquier politique local. Un élu du Parti socialiste francophone belge, Emir Kir, bourgmestre de la municipalité bruxelloise de Saint-Josse, tenait auprès de ses électeurs turcophones des discours aux accents identitaires et nationalistes, et il entretenait, au pays, des relations politiques troubles avec les Loups gris. Il fut exclu de son parti en 2020. L’Autriche, elle, a banni les signes d’appartenance à la nébuleuse nationaliste, en 2019, sans toucher aux associations. Mais aujourd’hui, le Parlement européen veut aller plus loin en préconisant aux États membres d’inscrire les « idéalistes » sur la liste des mouvements terroristes.
Infiltrés. L’organisation quadrille tout le territoire européen. En France, le mouvement extrémiste s’est installé sans bruit, à pas de loup. « Je me suis intéressé aux organisations nationalistes il y a une trentaine d’années, se souvient l’historien Étienne Copeaux. J’ai assisté, dans une salle paroissiale de Colmar, à un meeting des Loups gris camouflé en fête de mariage. Les discours étaient enflammés mais ils arrivaient à dissimuler leurs idées politiques aux regards extérieurs. » Discrètement, les « foyers idéalistes » ont essaimé partout où se sont installées des communautés turques : à Strasbourg, mais aussi à Metz, Lyon, Bordeaux, Grenoble, Nantes… Ou encore dans de plus petites villes, Brive-la-Gaillarde, Annecy, Montereau-Fault-Yonne…
Malgré l’interdiction des Loups gris l’an dernier, ces structures n’ont pas été dissoutes. Leur nom français ne laisse rien apparaître de leur idéologie radicale. Difficile de s’imaginer que l’Association de l’amitié franco-turque de Gagny, qui vient d’organiser sa kermesse annuelle avec la bienveillance des autorités municipales, est en réalité l’un des principaux foyers de Loups gris en région parisienne. Le 19 juin, à l’heure du déjeuner, quelques familles étaient venues prendre un thé ou déguster un gözleme (épaisse crêpe salée) dans la cour du pavillon qui sert de siège associatif et de salle de prière. Des fanions du MHP accrochés à un mur et la banderole de la Fédération turque étaient les seuls symboles politiques.
Organisation tentaculaire. Rompus à la dissimulation, les Loups gris sont organisés comme une armée romaine, avec à leur tête un « guide suprême » (basbug). À la mort du fondateur révéré Alparslan Türkes, en 1997, c’est Devlet Bahçeli qui a endossé ce costume. En dessous de lui, des chefs de meutes (reis), des centurions et des légionnaires. Dévotion et obéissance structurent cette pyramide. Au sommet de la hiérarchie européenne, l’Avrupa Türk Konfederasyon (confédération turque d’Europe) a son siège à Francfort, où se trouve aussi l’imprimerie, chargée de la propagande militante et de l’édition européenne du journal du mouvement nationaliste, Türkiye (la Turquie), distribué dans toute la diaspora. À l’échelon inférieur, la Türk Federasyon, ou Fédération turque, possède une direction dans chaque pays. Localement, elle gère des dizaines d’associations, des « foyers idéalistes » (ülkü ocaklari) qui constituent les cellules militantes. Ces associations disposent parfois d’une salle de prière ou d’une mosquée. Elles organisent les mariages, des camps de jeunesse, maintiennent un lien étroit avec la mère patrie et avec l’idéologie nationaliste et panturquiste… Elles font venir les députés turcs du MHP, relais de l’influence d’Ankara, et organisent des meetings, exclusivement en turc. Les murs des foyers sont ornés de slogans, de drapeaux ottomans aux trois croissants de lune, un symbole des ultranationalistes, et des portraits d’Alparslan Türkes, que les nazis surnommaient « le Führer du panturquisme ». Ces associations (dernek) ont une double fonction, politique et sociale, pour les familles sympathisantes.
Façade. Le siège de la Fédération turque de France (FTF), vitrine en diaspora du MHP, est un bureau discret dans une tour de verre à Pantin (Seine-Saint-Denis). À sa tête, Orhan Ilhan, 51 ans, un entrepreneur en maçonnerie venu de Metz. Depuis le décret Darmanin de novembre, il tient ses troupes pour éviter des mises en accusation. « Nous exhortons nos associations, nos adhérents et nos citoyens à ne pas répondre aux provocations et à éviter toute attitude ou tout comportement susceptibles de troubler la paix et l’ordre social », écrit-il le lendemain dans un communiqué. Les Loups gris font profil bas. Cela n’a pas empêché des descentes de gros bras menaçants et des affrontements, parfois violents, à Lyon et en région parisienne, avec des militants kurdes pro-PKK. Selon son président, Orhan Ilhan, la Fédération turque agit « en harmonie avec les lois françaises ». « L’ensemble de nos activités et de nos actions a été mené dans un environnement démocratique », assure-t-il. Mais dans ses principes mêmes, l’organisation porte une contradiction majeure. Elle défend avant tout les intérêts de la Turquie. C’est même une profession de foi pour le mouvement nationaliste turc : « La patrie d’abord ! »« Cela ne peut que provoquer les démocraties occidentales », juge Habib Yalçin, écrivain nationaliste turc et fin connaisseur des réseaux idéalistes de la diaspora. C’est écrit noir sur blanc. « L’article 6 du statut de la Fédération turque d’Allemagne stipule que, « si les intérêts des États turc et allemand se heurtent, la Fédération turque prend position en faveur de la Turquie ». C’est le même principe dans tous les pays », écrit Habib Yalçin.
Liaisons dangereuses. En France, les réseaux nationalistes turcs restent largement méconnus. Avec L’Empire des loups, titre d’un polar à succès paru en 2003, Jean-Christophe Grangé fut l’un des premiers à s’intéresser au monde souterrain des mafias turques d’extrême droite. Dans le quartier du faubourg Saint-Denis, à Paris 10 e, des policiers enquêtent sur des meurtres commis dans des ateliers clandestins. La réalité n’est guère éloignée de ce décor de roman. Depuis les années 1970, les Loups gris naviguent en eaux troubles, entre politique et crime organisé. Ils forment l’avant-garde de « l’État profond », une nébuleuse nationaliste liée aux services de sécurité et chargée des opérations clandestines contre les « ennemis de l’État ». Cette relation sera mise en évidence par le scandale de Susurluk en 1996. Dans la Mercedes accidentée d’un député, chef d’un clan féodal lié au trafic d’héroïne et seul rescapé, on retrouve le corps d’un haut responsable de la police d’Istanbul avec celui d’Abdullah Catli, membre des Loups gris et parrain de la mafia en cavale. Dans le coffre, des armes issues de l’arsenal de la police, de la drogue et des faux papiers signés de la main du ministre de l’Intérieur de l’époque. Catli était en service commandé, comme le confirmera ensuite une commission d’enquête parlementaire turque.
Les attentats de Paris. Treize ans plus tôt, en 1983, Abdullah Catli avait participé à une vague d’attentats à Paris contre des militants arméniens. « On était dans un contexte hyperviolent », se souvient Ara Toranian, l’une des cibles, alors porte-parole d’un groupe arménien. Les assassinats de diplomates turcs par l’Asala, l’Armée révolutionnaire arménienne, se multipliaient. Le chef Loup gris fut envoyé en opération secrète. « Il y a eu deux épisodes en 1983. Le premier, le 21 mars, j’ai senti quelque chose frotter sous la voiture, je suis descendu et j’ai vu un paquet attaché, c’était une bombe de 2 kilos. Neuf mois plus tard, c’était en sortant de notre journal, dans le 11 e arrondissement de Paris. J’ai tourné le contact et le capot a volé. Heureusement, la bombe n’était pas très puissante », raconte Toranian. À l’époque, les militants arméniens soupçonnent un règlement de comptes interne à leur communauté. « C’est pour cela qu’on n’en a pas parlé à l’époque, explique Henri Papazian, dirigeant du parti rival, lui aussi visé par un attentat. Ce n’est qu’après le scandale de Susurluk qu’on a su la vérité, grâce à des documents des services turcs. » La commission parlementaire sur Susurluk révélera en effet la liste des méfaits commis par Abdullah Catli, au nom de l’État turc. Il est célébré par les Loups gris comme un « martyr », un héros patriote. C’est sur sa tombe que le Franco-Turc Ahmet Cetin, condamné après les incidents de Décines, s’affichait sur les réseaux sociaux.
Tueurs à gages. Les activistes ultranationalistes n’hésitent pas à prendre les armes pour aller défendre « l’honneur et le sang » nationaux. Ce fut le cas dans les années 1990 puis en 2020 au Haut-Karabakh contre les Arméniens, en Irak, aux côtés des Turkmènes, et aussi en Syrie face aux Kurdes. Couverts par les services turcs, les Loups gris ont largement infiltré la brigade Sultan Murad, branche extrémiste de la rébellion syrienne qui occupe une position stratégique, proche de la frontière turque, et qui s’est alliée aux djihadistes d’Idlib. En 2015, l’un de leurs chefs, Alparslan Celik, un Turc, militant du MHP, fils d’un élu du parti, avait abattu les deux pilotes d’un avion de chasse russe. On ne compte plus les crimes et les assassinats politiques auxquels la mouvance « idéaliste » a été mêlée en Turquie. À plusieurs reprises, les tueurs à gages et les hommes de main des milices « idéalistes » ont aussi sévi en Europe. L’un d’eux, Mehmet Ali Agca, déjà inculpé pour l’assassinat du journaliste turc Abdi Ipekçi, tenta de tuer Jean-Paul II à Rome en 1981, sans qu’on sache vraiment qui étaient les commanditaires. L’un de ses disciples, Ömer Güney, lié aux services de renseignement turcs (MIT), assassina trois militantes kurdes en 2013 près de la gare du Nord, dans le quartier de L’Empire des loups. La piste des Loups gris fut même avancée par la police thaïlandaise, après un attentat à la bombe qui fit 20 morts à Bangkok, en 2015.
Courants divers. Dans la diaspora, les réseaux ultranationalistes se sont parfois déchirés. « Il y a une branche athée, dont le nationalisme se fonde sur la race et le sang. Une autre plus religieuse, plus adepte de la synthèse turco-islamique et donc plus favorable à un soutien à Erdogan », constate Samim Akgönül, historien et politologue à l’université Marc-Bloch de Strasbourg. « À Strasbourg et à Lyon, les nationalistes sont assez visibles. Certains ont même soutenu Sedat Peker », poursuit-il, en référence au parrain de la mafia nationaliste turque qui multiplie les accusations compromettantes sur les réseaux sociaux. Les plus laïcs du courant Loups gris ont fait scission du MHP pour s’associer aux kémalistes, au sein de l’IYI Parti. Un autre groupe extrémiste, les foyers Alperen, est issu, lui, d’une scission religieuse du MHP, dans les années 1990, et possède quelques succursales en Allemagne et dans l’Hexagone, notamment à Mulhouse. L’AKP d’Erdogan a tenté de monter un réseau sur le même modèle, avec les « foyers ottomans ». L’ancien Loup gris de Strasbourg Ali Gedikoglu a, lui, fondé le Conseil pour la justice, l’égalité et la paix (Cojep), avec des militants islamistes franco-turcs pour devenir une voix de l’AKP en Alsace. L’organisation a été rattrapée par divers scandales. Ahmet Cetin, le meneur de la descente raciste de Décines, était le président du Cojep Jeunesse. Mais aussi Veysel Filiz, son ancien vice-président, attrapé en décembre 2020 à la frontière bulgare avec 100 kilos d’héroïne dans son coffre. Pour compléter le tableau, la députée allemande Irene Mihalic souligne l’apparition de gangs et de clubs de motards nationalistes liés au mouvement ülkücü, qui se sont développés notamment en Allemagne. L’un de ces groupes violents, Osmanen Germania, a été dissous en 2018, ses membres reconnus coupables de meurtres, d’extorsion de fonds et de trafic de drogue. La justice allemande a constaté que leur leader avait reçu au moins 20 000 euros d’un député proche d’Erdogan.
Bras armé. Les nationalistes turcs ont longtemps été dans l’opposition face à Erdogan, jugé trop pro-occidental. Le parti de Devlet Bahçeli était fondamentalement opposé aux négociations d’adhésion avec l’UE, aux réformes démocratiques pour garantir l’État de droit, aux négociations de paix avec les « terroristes » sur la question kurde… Tout a changé après la tentative de putsch en Turquie en juillet 2016. Une fois que le pouvoir, occupé à lutter pour sa survie, a abandonné ces objectifs, les nationalistes ont scellé l’union sacrée autour du chef de l’État. Avec cette alliance, toutes les nuances de Loups gris se sont rangées au service de Recep Tayyip Erdogan et de ses ambitions. Leur influence n’a jamais été aussi forte sur les décisions politiques. Erdogan gouverne sur une ligne ultranationaliste, antikurde et antiarménienne. En 2020, il a accordé à Bahçeli la libération anticipée du parrain de la mafia Alaattin Cakici, figure des « idéalistes », responsable de plus de 40 assassinats. Comme dans les années 1980-1990, les « foyers idéalistes » et leurs excroissances redeviennent le bras armé de la Turquie, jusqu’au sein de la diaspora en Europe occidentale§
Le jour où les Loups gris ont voulu tuer Jean-Paul II
Petit voyou et homme de main des Loups gris, Mehmet Ali Agca assassina, en 1979, Abdi Ipekçi, rédacteur en chef du quotidien Milliyet. Il est surtout resté célèbre pour avoir tiré sur Jean-Paul II, à Rome, le 13 mai 1981. Après vingt-neuf années d’emprisonnement, en Italie puis en Turquie, il est libéré en 2010. Il a aujourd’hui 63 ans.
Leurs signes distinctifs
La tête de loup avec la main.
Les trois croissants de lune, symbole ottoman devenu l’emblème du MHP.
Le mot Türk en alphabet de l’Orkhon, ancienne écriture remontant au VIe siècle.
L’emoji loup figure dans les pseudos de nombreux militants sur les réseaux sociaux.