PARIS, 7 nov 2005 (AFP) - 14h07 - Le romancier turc Orhan Pamuk, 53 ans, cible des nationalistes turcs pour sa défense des causes arméniennes et kurdes, a reçu lundi le prix Médicis du roman étranger pour "Neige", tandis que l'Américaine Joyce Carol Oates a été distingué du Femina étranger pour "Les chutes".
Ce sont les deux principales distinctions françaises récompensant un roman étranger.
Roman à suspense et livre politique, "Neige" est un plaidoyer pour la laïcité, une réflexion sur l'identité de la société turque et la nature du fanatisme religieux.
Cette fiction, parue en Turquie en 2002, raconte l'histoire d'un jeune poète-journaliste turc, Kerim, quittant son exil allemand pour enquêter dans la petite ville d'Anatolie de Kars sur "plusieurs cas de suicide de jeunes femmes portant le foulard".
Dans cette ville en pleine effervescence en raison de l'approche d'élections à hauts risques, Kerim enquête. Jusqu'au soir où la représentation d'une pièce de théâtre dirigée contre les extrémistes islamistes se transforme en putsch militaire et tourne au carnage.
Cité pour le Nobel, Orhan Pamuk, dont l'oeuvre est traduite en une vingtaine de langues, a été inculpé par une cour d'Istanbul pour "insulte délibérée à l'identité turque" pour des propos tenus dans un magazine suisse sur le massacre des Arméniens en 1915. Son procès doit débuter le 16 décembre. Il risque de six mois à trois ans de prison, selon son éditeur turc Iletisim.
Il est menacé d'un nouveau procès pour avoir nui à l'image de l'armée dans un entretien en octobre au journal allemand Die Welt.
Né en 1952 dans une famille bourgeoise et francophile d'Istanbul, Orhan Pamuk, fervent défenseur de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, a reçu de nombreux prix étrangers dont le prestigieux Prix de la paix des libraires allemands en octobre 2005.
"Avec Orhan Pamuk est honoré un écrivain qui, plus qu'aucun autre poète contemporain, suit les traces historiques de l'Occident dans l'Orient et celles de l'Orient dans l'Occident", selon l'Association des libraires allemands.
Il a notamment écrit "La maison du silence", "Le château blanc", "Le livre noir" et "Mon nom est rouge", subtile réflexion sur la confrontation entre Orient et Occident dans l'Empire Ottoman à la fin du XVIe siècle.