Nugeen, 45 ans, une combattante du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) - © Sipa
Elle.fr | Par Valérie Toranian
Tekoshin est kurde, elle a 27 ans et se bat dans les montagnes du nord de l’Irak, aux côtés de ses frères d’armes (PKK) pour déloger les barbares de Daesh, l’Etat islamique qui fait régner la terreur en Irak et en Syrie*.
De loin, rien ne la distingue de ses compagnons masculins : même uniforme, même silhouette musclée et aguerrie, même fusil d’assaut. Seuls ses cheveux longs, tirés en arrière par une queue-de-cheval, attestent de sa féminité. Ces femmes kurdes ont commencé à se battre pour la création d’un Etat kurde autonome dans l’est de la Turquie dans les années 90. Aujourd’hui, elles ont conscience que leur combat est celui de la liberté des femmes. De toutes les femmes de la région. Qu’elles soient kurdes, syriennes, irakiennes, musulmanes, chrétiennes, yézidis. Elles ne veulent pas rompre devant un ennemi qui a résolu de les condamner à une aliénation médiévale et à l’esclavage sexuel.
Narin a 14 ans, elle est yézidi, elle habitait le nord de l’Irak. Elle a été capturée alors qu’elle fuyait devant l’avancée des djihadistes, dont la folie radicale menace de mort les femmes non musulmanes qui ne se convertiraient pas. Les hommes ont été séparés des femmes et exécutés. Les jeunes filles vierges ont été séparées des femmes mariées et offertes en butin à des membres de l’Etat islamique pour leur servir d’épouses ou de concubines. Narin et sa cousine ont réussi à dissimuler un couteau de cuisine sous leur abaya, à faire sauter les verrous de leur geôle et à fuir, pour finalement regagner Erbil, au Kurdistan, au bout d’un long périple.
Contre la malédiction des femmes qui doivent choisir entre la disparition et l’invisibilité, Tekoshin, Narin et tant d’autres se battent avec un courage qui force le respect. En Syrie à la frontière irakienne, les femmes kurdes représentent pas moins de 40 % des Unités de défense du peuple. Un chiffre phénoménal qui affole même les djihadistes qui pensent qu’ils iront en enfer s’ils sont tués par une femme.
Ces femmes en armes ne représentent pas seulement un atout militaire dans la lutte antidjihadiste. Elles forgent la légitimité qui leur permettra au sortir de la guerre de faire respecter leurs droits. Du moins on l’espère.
Messieurs les Présidents Hollande et Obama, il faut soutenir les résistantes en Irak mais aussi en Syrie. Elles méritent doublement l’aide des démocraties. Parce qu’elles combattent la barbarie à l’instar des hommes. Parce qu’elles sont debout pour dire que rien n’est jamais écrit dans l’histoire des femmes. Et que la longue et chaotique bataille pour leur liberté partout sur la planète ne fait que commencer. C’est l’honneur de l’ensemble du monde libre de ne pas l’oublier.
La marche des femmes ne s’arrêtera jamais.
* Source « L’Orient-Le Jour » et « The Washington Post ».
P.S. Je quitte le magazine ELLE que j’ai dirigé pendant treize ans. Ma gratitude, ma reconnaissance et mes remerciements à la rédaction et à toutes les équipes, à qui je souhaite du fond du cœur de nouveaux succès. Vive ELLE !