SEMDINLI (Turquie), 12 nov 2005 (AFP) - 13h17 - La vie revenait à la normale samedi dans la bourgade de Semdinli, dans l'extrême sud-est de la Turquie, où la population, à majorité kurde, ne décolère toujours pas après trois jours de violences venant à la suite d'un attentat meurtrier.
Certaines échoppes ont rouvert dans le centre-ville alors que d'autres restaient fermées. Une personne avait été tuée et six autres blessées mercredi par l'explosion d'une bombe dans une librairie. Des habitants de Semdinli, une ville aux confins de l'Iran et de l'Irak, avaient tenté de lyncher une personne qu'ils accusaient d'avoir posé l'engin et qui a finalement été placée en garde à vue. Trois fusils-mitrailleurs avaient été découverts dans sa voiture, endommagée par une foule en colère qui s'est également attaquée aux forces de sécurité. La police avait tiré en l'air pour disperser les manifestants. Une personne avait été tuée et une dizaine d'autres, dont le maire de Semdinli, avaient été blessées. Deux des quatre personnes interpellées lors de ces heurts ont été inculpées pour meurtre et tentative de meurtre, a annoncé samedi le sous-préfet local, Mustafa Cihat Seslihan. Il a précisé que l'un d'eux était un "membre de l'armée" et que le deuxième était un "civil", sans autres précisions. Selon la chaîne d'information NTV, ces deux personnes sont un sous-officier de la gendarmerie et un "repenti", un ex-rebelle kurde qui aide l'armée dans la traque de ses anciens camarades. Près de 10.000 personnes se sont réunies vendredi soir dans cette ville pour assister aux funérailles de l'homme tué mercredi par l'explosion de la bombe dans la librairie (appartenant selon les médias à un ancien rebelle kurde) et de la personne abattue lors des heurts avec la police. La foule a brandi des drapeaux du Parti des travailleurs du Kurdistanséparatiste) et scandé des slogans contre l'Etat turc et en faveur du PKK, considéré comme un groupe terroriste par Ankara, l'Union européenne et les Etats-Unis. Des représentants locaux de partis politiques pro-kurdes ont appelé la population au calme et aucun incident majeur n'a été signalé lors des obsèques. Par ailleurs, des heurts sont intervenus samedi à Van (est) entre des centaines de manifestants qui protestaient contre les événements à Semdinli et la police, a rapporté l'agence Anatolie. Les vitres de plusieurs magasins ont été brisées par la foule qui a aussi brûlé une voiture. La police a procédé à trois interpellations. Les violences de Semdinli soulignent la montée des tensions dans le sud-est anatolien après une période de calme relatif consécutive à l'annonce par le PKK d'un cessez-le-feu unilatéral, maintenu de 1999 à 2004. Le gouvernement turc a promis de faire toute la lumière sur l'attentat. Il n'écarte cependant pas que l'attentat et les heurts aient été orchestrés par le PKK pour le discréditer. Une commission d'enquête parlementaire et des délégations de députés, mises sur pied par les partis d'opposition, sont par ailleurs arrivés samedi à Semdinli pour rencontrer les responsables locaux.