De rares affrontements à Bagdad dans deux quartiers sunnites, et pas la moindre manifestation d'envergure en sa faveur dans le monde arabo-musulman. Saddam Hussein ne fait plus figure de héros, et sa condamnation à mort, hier, n'a pas mobilisé les populations arabes. Fini le démiurge qui recevait le soutien des principales capitales arabes hormis Damas pendant la longue guerre contre l'Iran. Abandonné le demi-dieu qui, faisant tirer des missiles sur Israël lors de la guerre du Golfe, enthousiasmait Le Caire ou Gaza. Même si l'ensemble du monde arabe considère son procès comme inique, téléguidé par Washington, et comme la revanche des chiites et des Kurdes sur les sunnites, c'est un dictateur déchu qui n'inspire plus de crainte, un dirigeant vaincu sans troupes derrière lui que le Haut Tribunal a puni de mort. Seul le Hamas a regretté le verdict, mais la direction du Fatah n'a pas bronché, alors que l'ex-président avait été le champion de la cause palestinienne. L'éditorialiste saoudien Khaled al-Dakhil résumait hier le sentiment général dans la région en qualifiant le procès de «farce politique et judiciaire, pas si différente des procès d'opposants du temps de Saddam Hussein». Il ajoutait qu'il «était clair que la vengeance était la principale motivation du procès et de la peine de mort».
Liesse. C'est donc davantage la main américaine qui est dénoncée, plus que le regret de ce que fut le régime de Saddam. En Irak, bien sûr, c'est différent. Chiites et Kurdes se sont félicités de sa condamnation à mort, et des scènes de liesse se sont produites dans plusieurs quartiers de la capitale. Chez les sunnites, le sentiment est autre, et les autorités irakiennes ont dû fermer deux chaînes de télévision privées sunnites, accusées d' «incitation à la violence et au meurtre», après leur couverture du verdict. Cela reste une réaction plutôt faible, au regard d'un homme qui a dirigé l'Irak pendant trente-cinq ans, qui confirme bien que l'ex-dictateur est sorti du jeu politique. Dès le début, la rébellion, d'inspiration islamiste ou islamo-nationaliste, s'est bien gardée d'utiliser son nom comme étendard, alors que Saddam n'a cessé devant les juges de brandir le Coran et d'émailler sa défense de versets.