DIYARBAKIR (Turquie), 13h05, 16 nov 2005 (AFP) - Deux personnes ont été tuées par balles mardi lors d'incidents avec la police à Yüksekova (extrême sud-est de la Turquie), a révélé mercredi une autopsie pratiquée sur leur corps tandis que de nouveaux incidents ont éclaté entre manifestants kurdes et la police.
Les autopsies réalisées à l'institut médico-légal de Diyarbakir, chef-lieu du sud-est peuplé majoritairement de kurdes, montrent que le corps de la troisième victime porte des traces d'écrasement, a-t-on indiqué de source locale.
A Ankara, le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a convoqué une réunion d'urgence mercredi avec ses ministres de la Justice et de l'Intérieur ainsi que du chef des services des renseignements pour discuter de ces récentes violences.
On ignorait cependant si les traces de balles retrouvées sur deux corps provenaient des tirs des forces de sécurité ou de manifestants. Le rapport d'autopsie devait être communiqué au parquet.
Les cadavres devaient être rapatriés dans la journée à Yüksekova pour y être enterrés.
A Hakkari, à une cinquantaine de km à l'ouest de Yüksekova, plusieurs centaines de manifestants kurdes se sont violemment heurtés aux forces de l'ordre. Au moins six personnes, dont deux policiers ont été blessés, a-t-on précisé de sources de sécurité locales.
La police anti-émeutes a tiré en l'air pour disperser les manifestants et a fait usage de canons à eau et de bombes lacrymogènes, a-t-on ajouté de même source.
Trois personnes ont été tuées et seize autres, dont sept policiers, ont été blessées la veille lors de manifestations tournant à l'affrontement avec les forces de sécurité à Yüksekova, à environ 600 km de Diyarbakir.
Les heurts sont survenus alors qu'une foule s'était rassemblée devant le bureau du Parti démocratique du peuple (Dehap, pro-kurde) pour protester contre des incidents survenus la semaine dernière dans la ville voisine de Semdinli, qui avaient fait deux morts et une quinzaine de blessés.
Certains manifestants se sont retournés contre la police, qu'ils ont attaquée à coups de pierre, les policiers ripostant en faisant usage de gaz lacrymogène et en tirant en l'air.
Contacté mercredi au téléphone par l'AFP, une porte-parole de la municipalité de Yüksekova a fait état d'une "tension" dans la petite ville entre la population et les forces de sécurité.
Les magasins sont restés fermés, les commerçants entendent ainsi protester contre les événements de la veille et d'importantes mesures de sécurité ont été prises dans la ville, a rapporté l'agence Anatolie.
Des véhicules blindés ont été déployés devant les bâtiments publics par crainte de nouveaux incidents, selon la chaîne d'information NTV.
Un attentat à la bombe a été commis le 9 novembre dans une librairie de Semdinli faisant un mort. Il a entraîné la répression des manifestations qui ont suivi l'explosion, au cours de laquelle une nouvelle personne a perdu la vie. Cela a causé un vif émoi dans le sud-est peuplé majoritairement de Kurdes.
Les dernières violences de Semdinli soulignent la montée des tensions dans le sud-est anatolien après une période de calme relatif consécutive à l'annonce par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, séparatistes) d'un cessez-le-feu unilatéral, maintenu de 1999 à 2004.
Le conflit entre le PKK, considéré comme une organisation terroriste par la Turquie, l'UE et les Etats-Unis, et les forces de sécurité turques a fait quelque 37.000 morts depuis 1984.