DIYARBAKIR (Turquie), 9 nov 2005 (AFP) - 16h49 - Plusieurs dizaines de manifestants kurdes ont incendié jeudi un point de contrôle de la police à Semdinli, une ville du sud-est anatolien à majorité kurde frappée par deux attentats mercredi et la semaine dernière, ont rapporté des sources locales.
Les manifestants, qui scandaient des slogans favorables aux rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), se sont réunis vers 08H00devant le point de contrôle, qu'ils ont incendié après avoir constitué une barricade avec des poteaux électriques, ont affirmé ces sources.
La police n'est pas intervenue et aucun blessé n'a été déploré au cours de l'incident, ont-elles précisé, ajoutant que les forces de sécurité avaient établi des barricades dans la ville en proie à de fortes tensions, pour prévenir de nouveaux débordements.
Une personne a été tuée et six autres ont été blessées mercredi par l'explosion d'une bombe dans une librairie située dans un complexe commercial.
Des habitants de Semdinli, une ville aux confins de l'Iran et de l'Irak, ont tenté de lyncher une personne qu'ils accusaient d'avoir posé l'engin et qui a finalement été placée en garde à vue par la police.
Trois fusils-mitrailleurs ont été découvert dans sa voiture, sérieusement endommagée par une foule en colère qui s'est également attaquée aux forces de sécurité.
La police a tiré en l'air pour disperser les manifestants. Une personne a été tuée et une dizaine d'autres, dont le maire de Semdinli, ont été blessées lors de ces incidents, selon la presse de jeudi, qui s'interrogeait par ailleurs sur la nature de l'attentat.
"Des bombes de provocation", titrait le quotidien libéral Radikal, reprenant des accusations portées par le député d'opposition Esat Canan, du Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), qui évoquait la possibilité d'un attentat perpétré par "l'Etat profond", expression désignant en Turquie une collusion entre les services secrets et la mafia.
Le président de la commission parlementaire des droits de l'homme Mehmet Elkatmis a indiqué jeudi qu'une délégation parlementaire se rendrait prochainement à Semdinli pour mener une enquête, a rapporté l'agence de presse Anatolie.
Dans la nuit du 1er au 2 novembre, un attentat attribué par les autorités au PKK avait déjà frappé la ville. Une voiture bourrée d'explosifs avait explosé près de la gendarmerie locale, faisant 23 blessés.
Mustafa Erkal, le gouverneur de Tunceli, une autre province du sud-est anatolien, a par ailleurs affirmé jeudi qu'un rebelle du PKK avait été tué par l'explosion d'une mine qu'il tentait de poser dans sa province, selon l'agence de presse Anatolie.
Le sud-est anatolien a été le théâtre d'un conflit sanglant entre les forces de sécurité turques et les rebelles kurdes du PKK qui a fait près de 37.000 morts depuis 1984.
Le PKK, considéré comme une organisation terroriste par Ankara, l'Union européenne et les Etats-Unis, a multiplié ses opérations dans la région au cours des derniers mois après avoir observé un cessez-le-feu unilatéral de 1999 à juin 2004.
Le groupe a mis fin début octobre à une nouvelle trêve de six semaines.