Un onzième jeune suspect a été arrêté dans l'enquête sur la tuerie de Malatya

 21 avril 2007 | ISTANBUL CORRESPONDANCE

TURQUIE L'ASSASSINAT DE TROIS CHRÉTIENS DANS LE SUD

n onzième suspect, âgé comme les autres de moins de 20 ans, a été arrêté, vendredi 20 avril, à Istanbul, dans le cadre de l'enquête sur le meurtre de trois chrétiens évangéliques à Malatya, un crime dont la violence a choqué la Turquie. Le quotidien Hürriyet a cité un chirurgien qui a tenté de sauver la seule victime retrouvée vivante et décédée à l'hôpital : les dizaines de coups de couteau sur son corps étaient "des signes évidents de torture", a-t-il dit. Ou alors des signes que cette victime, l'un des deux Turcs convertis, avait tenté de résister, a estimé l'un de ses proches.

La troisième personne tuée, un Allemand, a été enterrée, vendredi, dans un cimetière arménien en lisière de Malatya, ville à majorité kurde mais où les nationalistes et les islamistes dominent, et où il ne resterait plus de chrétiens des Eglises traditionnelles d'Anatolie. Trois cents personnes s'y sont retrouvées pour dénoncer la tuerie. Ils étaient 2 000 à l'avoir fait après l'assassinat, en mars, à Istanbul, du journaliste arménien Hrant Dink, selon le correspondant du Turkish Daily News.

Selon Jerry Mattix, un pasteur évangélique qui a assisté à l'enterrement, "la police locale a été d'un très bon secours, mais le maire et le gouverneur de la ville ont préféré se faire représenter aux obsèques, de crainte sans doute d'être perçus comme voulant aider des chrétiens. En fait, nous étions pratiquement seuls à cet enterrement, nous les quelques chrétiens locaux". Les médias turcs ont été nombreux à dénoncer cette intolérance, en titrant "Le cauchemar continue", "Trahison" ou "Comment un tel fanatisme peut-il prospérer dans notre pays ?". Une des réponses, donnée par Hürriyet, est que c'est la faute de "tous ces journaux libéraux et politiciens soi-disant sociaux-démocrates" qui se sont joints aux islamo-nationalistes pour "dénoncer les activités missionnaires et accuser le gouvernement de fermer les yeux (...) Ce meurtre est le résultat de l'insensibilité du peuple turc".

D'autres journaux préfèrent parler d'un possible complot, hypothèse que le nonce du pape en Turquie, Mgr Antonio Lucibello, n'a pas écartée. "En période électorale, ce sont des choses qui se sont déjà produites", a-t-il déclaré au quotidien italien Il Messaggero, critiquant, sans les nommer, les évangéliques, qui "ne sont pas toujours prudents" et "usent parfois de méthodes agressives".

Sophie Shihab
Article paru dans l'édition du 22.04.07