Il a beau être un opposant syrien, risquer sa peau s'il retourne dans son pays, il est actuellement dans le centre de rétention de Vincennes, sous le coup d'un arrêté d'expulsion. Arrêté le 13 octobre lors d'un contrôle d'identité, Zaher A.*, immigré clandestin en possession d'un passeport syrien, s'est vu notifier une obligation de quitter le territoire par la préfecture de police de Paris. Un recours, déposé par son avocate, Maître Seve Aydin-Izouli, devant le tribunal administratif, a été rejeté ce lundi 17 octobre.
Dans les manifestations parisiennes
Dans le jugement, il est notamment reproché à Zaher A., entré avec un visa en septembre 2008 sur le sol suisse, d'être passé clandestinement en France courant 2009 et de ne pas avoir cherché, depuis, à régulariser sa situation. Zaher A. n'a pas fait de démarches en France, où il vivait de menus travaux, car il cherchait à passer en Angleterre où résident des membres de sa famille, explique Maître Seve Aydin-Izouli, qui juge que, quoi que l'on puisse reprocher à ce Syrien, il n'en reste pas moins que cette décision est "absolument inadmissible".
"Il a participé à plusieurs manifestations anti-Bachar à Paris, il risque la mort s'il est renvoyé en Syrie", s'insurge l'avocate qui défend d'autres opposants syriens récemment attaqués à Paris par des inconnus suspectés d'être à la solde du régime de Bachar al-Assad. Zaher A. est originaire de Deera, une ville syrienne où la répression a été particulièrement féroce. Chauffeur dans l'armée, il aurait quitté la Syrie car il y était menacé de représailles par le régime après avoir refusé de continuer à se rendre complice de trafics illégaux à la frontière jordanienne, explique son avocate, sur la base de son propre témoignage.
Compte à rebours
Pendant que la France, par la voix de son ministre des affaires étrangères Alain Juppé, affiche son soutien à l'opposition syrienne et qualifie de "crime contre l'humanité" la répression sanglante exercée par le régime de Bachar al-Assad qui a déjà fait quelque 3.000 morts, place Beauvau, Claude Guéant menacerait de renvoyer chez lui l'un ces opposants sans lui accorder le moindre traitement particulier ? Absurde. Et pourtant, c'est bel et bien ce qui semble se passer dans cette affaire. Maître Seve Aydin-Izouli a une autre formulation pour résumer la situation : "Le Préfet vit sur la lune". Contacté par "Le Nouvel Observateur", le Quai d'Orsay n'était pas en mesure, ce lundi soir, de commenter l'information, ni même de la confirmer.
Il reste à Zaher A. un dernier espoir d'échapper au retour en Syrie : le statut de réfugié politique. Il en a fait la demande ce lundi auprès de l'Ofpra, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Son avocate, qui a en outre déposé un recours – non suspensif – devant la Cour administrative d'appel, compte adresser une lettre à l'Ofpra mardi matin pour qu'il entende au plus vite le Syrien.
Car le compte à rebours a commencé : dans 5 jours, il sera présenté au juge des libertés, qui va décider de son maintien en rétention pendant 15 jours renouvelables. Pendant cette période, à n'importe quel moment, Zaher A. pourra être mis dans l'avion.
*Nous ne donnons pas le nom intégral de Zaher A. à la demande de son avocat.