Après des mois de tractations entre les communautés chiite, sunnite et kurde irakiennes, le Parlement irakien a, le 18 septembre, finalement approuvé le projet de Constitution qui sera soumis à référendum le 15 octobre. Le vice-président de l'assemblée, Hussein al-Chahristani, a déclaré aux journalistes que la mouture votée par les députés ne serait plus modifiée. « Il n'y aura absolument plus aucun changement désormais », a déclaré Al-Chahristani. « Le projet va être présenté aux Nations unies et sera bientôt soumis au peuple irakien. »
Le projet définitif a repris l'essentiel des modifications apportées au texte quand il a été présenté aux Nations unies le 14 septembre à Bagdad. La seule modification d'importance depuis lors concerne l'article 3, dans lequel est supprimée la mention que le « peuple arabe (de l'Irak, ndlr) fait partie de la nation arabe ». Les Arabes sunnites ont jugé que cette précision sous-entendait que l'Irak ne faisait pas partie de la nation arabe. L'article 3 mentionne, comme prévu dans la version remise, que l' « Irak est un membre fondateur et actif de la Ligue arabe », pour tenter de satisfaire à la fois les Arabes sunnites et l'organisation panarabe. Par ailleurs, le texte final supprime l'article 44, relatif aux « conventions et accords internationaux relatifs aux droits de l'Homme », en consacrant ainsi la suprématie de la Constitution irakienne sur les conventions internationales. On a ajouté dans le nouveau texte que le Premier ministre sera secondé par deux vice-Premiers ministre durant la première législature. Les deux autres modifications portent sur le partage équitable des ressources en eau.
Le texte adopté sera soumis sans amendement, le mois prochain, à l'approbation du corps électoral. L'Onu n'a plus que quelques semaines pour en imprimer cinq millions d'exemplaires en vue du référendum. Le responsable onusien du référendum constitutionnel, Nicholas Haysom, a estimé que malgré le retard pris pour adopter le texte, les premiers exemplaires seraient distribués d'ici cinq jours. « Nous sommes tout à fait confiants en notre capacité à le faire », a-t-il indiqué. « Nous avons beaucoup de demandes émanant de groupes de citoyens, de partis politiques et autres pour obtenir une copie du projet de Constitution et le voir distribuer », a-t-il précisé.
Les sunnites, minoritaires après avoir été choyés sous Saddam Hussein, se sont longtemps opposés à plusieurs mesures contenues dans le texte, retardant son adoption. Nombre d'entre eux ont d'ores et déjà annoncé qu'ils voteraient « non » au référendum. Les sunnites sont hostiles à une autonomie accrue pour le Sud chiite et le Kurdistan et craignent de voir leur perte d'influence consacrée dans le texte.
Le ministre irakien des Affaires étrangères a estimé le 16 septembre que le processus démocratique était en marche en Irak après la finalisation du projet de Constitution. Selon Hoshyar Zebari, la Constitution, rédigée au terme de « difficultés et de négociations difficiles », est « le meilleur accord pour toutes les communautés » du pays, même si chacune n'a pas eu tout ce qu'elle voulait. « Nous avons finalisé un projet de Constitution et le peuple irakien aura le dernier mot » sur le texte, a-t-il déclaré aux journalistes qui l'interrogeaient en marge du 60e sommet des Nations unies. « Tous ceux qui ont participé à la rédaction de ce document (...) ont fait des compromis mutuels et sont parvenus à quelques consensus », a-t-il poursuivi. « Ils ne pouvaient pas s'accorder sur chaque élément mais vraiment, ce sur quoi nous nous sommes mis d'accord était ce qui était réalisable, ce que nous pensons être le meilleur accord pour toutes les communautés ».
Le chef de la diplomatie irakienne a souligné qu'il y aura toujours des possibilités de réviser et d' « améliorer ce texte à l'avenir ». Mais pour l'heure, « nous cherchons tous à compléter ce processus, à améliorer la sécurité » en Irak, a-t-il ajouté.
Une source proche de la principale autorité religieuse des chiites d'Irak a affirmé le 23 septembre que le grand ayatollah Ali Sistani va publier une fatwa appelant les Irakiens à voter « oui » au projet de Constitution.
De nombreux sunnites, dont le Comité des oulémas musulmans, la principale association de religieux sunnites, pro-baasistes, ont appelé à voter « non ». Ils s'opposent au fédéralisme qui débouchera selon eux sur une partition du pays. Si les deux tiers des électeurs dans trois des 18 provinces d'Irak rejettent le projet - et la communauté sunnite dispose de ce potentiel -, celui-ci sera abandonné et tout le processus de négociation constitutionnelle devra être repris à zéro par une nouvelle assemblée transitoire à élire en décembre prochain.
Le Parlement du Kurdistan d'Irak a, le 27 septembre, voté à l'unanimité une motion appelant les Kurdes à voter « oui » au projet de Constitution qui sera soumis à référendum le 15 octobre. « Les citoyens du Kurdistan doivent se rendre aux urnes et voter oui au projet de Constitution, car il offre des droits fondamentaux et établit les bases d'une société démocratique qui respecte les droits de l'Homme », a affirmé Adnan Moufti, le président de l'Assemblée lors d'une session extraordinaire. « La Constitution établira un Irak fédéral, que nous appelons de nos vœux », a-t-il ajouté, assurant que le texte sera un outil pour « maintenir un Irak uni ». « Ce projet de Constitution permettra (...) au Kurdistan de jouir du fédéralisme, pour lequel nous nous sommes battus et pour lequel beaucoup d'entre nous sont morts », a ajouté de son côté le vice-président de l'Assemblée Kemal Kirkouki. Le Parlement avait approuvé le 24 août le projet de Constitution en y voyant « un acquis important ». Les Kurdes ont pesé de tout leur poids durant les négociations sur le texte pour défendre l'idée d'une structure fédérale de l'Etat irakien, rejetée par la communauté sunnite du pays.
Le secrétaire général de l'Onu, Kofi Annan, a, le 7 septembre, assumé ses responsabilités pour les erreurs commises dans la gestion du programme « pétrole contre nourriture » en Irak, tout en affirmant vouloir rester à son poste. Le chef de la commission d'enquête indépendante, l'ex-banquier fédéral américain Paul Volcker, a affirmé que les responsabilités devaient être « largement partagées », y compris par le Conseil de sécurité. « Le rapport est critique à mon égard et j'accepte cette critique », a déclaré M. Annan au Conseil, qui venait de recevoir le rapport principal de M. Volcker. « La commission a établi que la gestion du programme était caractérisée par de faibles pratiques administratives et des contrôles et audits inadéquats. Pour cela, en tant qu'administrateur, je dois assumer la responsabilité », a ajouté M. Annan. Mais, a-t-il poursuivi, « au début de l'année, la commission avait conclu que je n'avais pas influencé, ou tenté d'influencer, le processus d'attribution des contrats. Je suis heureux de constater que cette conclusion est réaffirmée ». Kofi Annan, son adjointe et le Conseil de sécurité ont cependant tous une part de responsabilité dans la situation qui a permis à Saddam Hussein de détourner plus de 10 milliards de dollars dans le cadre de ce programme.
Le rapport souligne que la commission n'a trouvé « aucune preuve » que M. Annan avait tenté d'influencer le processus de décision dans l'attribution en 1998 d'un contrat à la compagnie suisse Cotecna, qui employait son fils Kojo. M. Annan a cependant admis n'avoir pas été « assez diligent ou efficace » dans la recherche de la vérité lorsqu'il avait été révélé que la Cotecna avait obtenu un contrat dans le cadre du programme. « Je regrette cela profondément », a-t-il indiqué. Parlant à la presse peu après, M. Annan a exclu de démissionner. « Je ne m'attends pas à ce que qui que ce soit démissionne. Nous continuons notre travail », a-t-il souligné.
M. Volcker a déclaré pour sa part que les responsabilités pour les erreurs constatées dans la gestion du programme doivent être « largement partagées », à commencer par les Etats membres et par le Conseil de sécurité. Tel qu'il était conçu, « le programme laissait trop d'initiatives à l'Irak », a-t-il estimé. « C'était comme un pacte avec le diable et le diable avait les moyens de manipuler le programme à son avantage ». M. Volcker a également affirmé que la structure administrative et les pratiques du Secrétariat et de certaines agences de l'Onu « n'étaient pas à la hauteur du défi extraordinaire » que représentait ce programme d'une valeur de plus de 100 milliards de dollars, dont 64 milliards pour les achats de pétrole. « Hélas, ces faiblesses ont été aggravées par des comportements corrompus et contraires à l'éthique au sommet du programme et dans le département des acquisitions », a-t-il ajouté. « Surfacturations, dessous-de-table et contrebande ont permis à Saddam Hussein et à son régime de se fournir en devises en l'absence de tout contrôle de la part du secrétariat et du Conseil de sécurité », poursuit-t-il dans son rapport - le quatrième d'une série qui devrait en compter cinq.
Dans un rapport précédent, la commission avait accusé l'ancien directeur du programme, le Chypriote Benon Sevan, de corruption pour avoir touché 147.184 dollars de pots-de-vin d'une compagnie pétrolière qu'il avait aidée à obtenir un contrat. La commission Volcker avait également accusé Alexander Yakovlev, un ancien fonctionnaire russe du département des acquisitions de l'Onu, d'avoir touché des pots-de-vin. « Les preuves d'une corruption réelle parmi un petit nombre de personnels de l'Onu est également profondément décevant », a encore déclaré M. Annan. « Les conclusions de l'enquête illustrent l'importance vitale de réformes administratives qui ont été proposées », a-t-il poursuivi.
Un Sommet de trois jours destiné à adopter une profonde réforme de l'Onu à partir du 15 septembre réunissant quelque 170 chefs d'Etat ou de gouvernement n’a cependant pas abouti à des résultats concrets.
Le programme « pétrole contre nourriture » avait permis à l'Irak de vendre sous contrôle, de 1996 à 2003, des quantités limitées de pétrole et d'acheter en échange des biens pour sa population, alors que le pays était soumis à un embargo international. Mais le gouvernement irakien avait perverti le système et plusieurs milliards de dollars avaient été détournés. Le scandale, révélé en janvier 2004, a terni l'image des Nations unies. Entre l'entrée en vigueur du programme pétrole contre nourriture, en 1996 et la chute de son régime en 2003, Saddam Hussein a détourné 10,2 milliards de dollars, selon le rapport de Volcker. Sur ce total, 1,8 milliard provenait de sources liées à la mise en oeuvre du programme et 8,4 milliards ont été tirés de la vente illicite de brut à la Jordanie, à la Syrie, à l'Egypte et à la Turquie, au su des membres du Conseil de sécurité chargés de veiller au respect des sanctions internationales.
Le rapport révèle en outre que les autorités irakiennes ont proposé un million de dollars à Boutros Boutros-Ghali, secrétaire général de l'Onu lors de la création du programme, pour s'attirer ses bonnes grâces. Rien n'indique en revanche qu'il ait été informé des intentions de Bagdad ou qu'il ait accepté de l'argent, mais l'enquête se poursuit. La commission épingle en outre Louise Frechette, adjointe du secrétaire général, à laquelle M. Annan a fini par confier la direction du programme. La diplomate canadienne, « apparemment incertaine de son rôle, n'a pas pris l'ampleur de l'autorité et du contrôle requis par ce programme complexe », souligne le rapport.
Par ailleurs, Serge Boidevaix, ancien ambassadeur de France en Allemagne de 1986 à 1992 et ex-secrétaire général du Quai d'Orsay, a été mis en examen pour « trafic d'influence et corruption » dans le dossier visant le programme de l'Onu sur l'Irak « pétrole contre nourriture ». C'est le juge d'instruction parisien Philippe Courroye, chargé de cette information judiciaire ouverte en 2001, qui a notifié ces poursuites à l'intéressé le 8 septembre. Serge Boidevaix est soupçonné d'avoir perçu des « coupons » du régime de Saddam Hussein représentant 32,6 millions de barils de pétrole, et d'avoir reversé une partie de l'argent à des officiels à Bagdad. Aujourd'hui reconverti dans les affaires - il préside la chambre de commerce franco-arabe - Serge Boidevaix a mené auparavant une grande carrière diplomatique, travaillant notamment au cabinet de Jacques Chirac à Matignon entre 1974 et 1976. Son nom figure sur une liste de bénéficiaires des largesses du régime irakien, elle-même annexée au rapport d'enquête de l'Onu, versé au dossier français et visant les malversations commises en marge du programme onusien « pétrole contre nourriture » entre 1996 et 2003. Les « coupons » étaient revendus via des intermédiaires à des sociétés pétrolières, qui pouvaient in fine importer le pétrole irakien malgré l'embargo.
Quatre cadres de Total, dont Alain Le Chevalier, chargé de l'exploration et de la production pour une partie du Moyen-Orient, ont déjà été mis en examen par le juge Courroye dans ce dossier, ainsi que Bernard Guillet, bras droit de l'ancien ministre de l'Intérieur Charles Pasqua. Le nom de ce dernier figure aussi parmi d'autres sur la liste des bénéficiaires du rapport de l'Onu, mais l'ex-ministre, actuellement sénateur et couvert pas l’immunité parlementaire, n'a pas été interrogé à ce jour.
Le président irakien Jalal Talabani a laissé éclater le 5 septembre sa colère contre les pays arabes, leur reprochant leur peu d'intérêt pour les victimes de la récente bousculade meurtrière à Bagdad et leur réticence à se faire représenter par des ambassadeurs en Irak. Le coup de colère de M. Talabani intervient à la veille d'une réunion des chefs de diplomatie des pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG - Arabie saoudite, Koweït, Emirats arabes unis, Bahreïn, Qatar et Oman) qui ont l'intention de demander des éclaircissements sur le projet de Constitution irakienne qui ignore, selon eux, l'appartenance de ce pays à l'aire arabe. « L'Irak ne va pas mourir de faim en raison de l'absence d'aide des pays arabes », a déclaré M. Talabani, à la presse en écho à d'autres responsables irakiens qui se sont émus de l'absence de réponse humanitaire arabe à la catastrophe de la bousculade du pont Al-Aïmah à Bagdad, le 31 août, qui avait fait un millier de morts parmi des pèlerins chiites.
Peu de pays arabes ont annoncé des aides humanitaires pour les victimes, tandis que le Koweït a fait don de 10 millions de dollars. « Les pays arabes font peu pour l'Irak où ils ne se font pas représenter par des ambassadeurs », a poursuivi le président irakien. « Cela contredit l'intérêt qu'ils prétendent avoir pour l'arabité de l'Irak », a-t-il dit en référence aux critiques d'un article du projet de Constitution ne soulignant l'appartenance à la « nation arabe » que des Arabes irakiens. Mais M. Talabani a évoqué des aménagements des articles du texte jugés inacceptables par les Arabes sunnites, évoquant la possibilité de mentionner dans l'un de ces articles que l'Irak est « membre fondateur de la Ligue arabe ».
Après ce coup de colère, les ministres des affaires étrangères des pays arabes ont approuvé l'ouverture d'un bureau de la Ligue arabe à Bagdad. Réunis le 8 septembre au Caire, les ministres « ont salué l'annonce par le secrétaire général (Amr Moussa) d'ouvrir un bureau de la Ligue arabe à Bagdad», ont-ils déclaré dans un communiqué séparé sur la question irakienne. Le chef de la diplomatie saoudienne Saoud al-Fayçal avait déclaré peu avant le début de la réunion que les ministres devaient discuter de la question du relèvement du niveau des représentations diplomatiques des pays arabes en Irak. « Il n'y a pas d'obstacles à l'envoi d'un ambassadeur en Irak, mais c'est une question de sécurité», avait-il expliqué.
Dans leur communiqué final, la Ligue appelle « les pays arabes concernés à annuler ou réduire la dette irakienne conformément à la décision du Club de Paris ». Les responsables irakiens affirment avoir hérité d'une dette de 125 milliards de dollars du régime de Saddam Hussein.
Par ailleurs, le Conseil de Coopération du Golfe (CCG) a appelé le 6 septembre à la sauvegarde de l'identité arabe de l'Irak, à l'ouverture à Djeddah d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de ses six pays membres. L'appel a été lancé par cheikh Mohammed ben Moubarak Al-Khalifa, le chef de diplomatie de Bahreïn, président en exercice du CCG qui groupe aussi l'Arabie saoudite, le Koweït, les Emirats arabes unis, Qatar et Oman. Cheikh Mohammed a demandé que « la Constitution irakienne réponde aux aspirations de tout le peuple irakien et sauvegarde son identité arabo-islamique pour que l'Irak demeure un membre actif dans son environnement arabe et islamique ».
Les eurodéputés ont apporté le 28 septembre, à l'issue d'un débat animé, un soutien réservé à l'ouverture des négociations d'adhésion de la Turquie à l'UE, mettant la pression sur Ankara pour la reconnaissance de Chypre et du génocide arménien. Dans une résolution non contraignante adoptée à 356 voix pour, 181 contre et 125 abstentions, les eurodéputés ont constaté que la « Commission (européenne) et le Conseil (les Etats membres) estiment que la Turquie a rempli formellement les dernières conditions nécessaires à l'ouverture des négociations d'adhésion le 3 octobre ». Mais, jugeant que la « mise en œuvre » de ces conditions reste à « achever », ils ont rappelé à l'ordre les Turcs sur toute une série de dossiers. Les élus européens « déplorent sincèrement » qu'Ankara ait accompagné fin juillet la signature du protocole étendant son union douanière aux dix nouveaux membres de l'UE, dont Chypre, d'une déclaration affirmant que son paraphe ne valait pas reconnaissance des autorités de Nicosie. Et ils demandent à la Turquie de reconnaître Chypre « dans les meilleurs délais ». « Il n'est pas possible qu'un membre entre dans l'UE sans reconnaître un autre Etat membre », a estimé le chef du groupe socialiste au PE, Martin Schulz. L'eurodéputé allemand, défendant pourtant fermement l'ouverture du processus, a même estimé que cette reconnaissance « ne peut se faire à l'issue de 15 ans de négociations ». Elle doit intervenir « après un ou deux ans », faute de quoi les négociations devront selon lui être « suspendues ». « Si dans un certain délai après l'ouverture des négociations, la Turquie n'a pas fait des progrès sensibles sur le chapitre des droits de l'Homme, alors il faudra que le processus soit interrompu », a renchéri le chef du Parti populaire européen (PPE, droite), Hans-Gert Poettering. M. Poettering a rappelé le soutien de son groupe au lancement de négociations « ouvertes », sans garantie d'une adhésion effective de la Turquie au bout du compte. « Si au terme de ce processus la Turquie devait ne pas entrer dans l'UE, alors nous nous efforcerions de lui proposer une alternative de coopération et d'amitié », a-t-il ajouté.
Le Parlement européen, qui pose aussi pour la première fois la reconnaissance du « génocide des Arméniens » comme préalable à l'accession, a d'ailleurs rappelé dans son ensemble que les négociations avaient pour « objectif » l'adhésion mais n'y conduisaient « pas a priori automatiquement ». Les eurodéputés ont donc refusé de donner un chèque en blanc à la Turquie. A tel point que certains, comme l'eurodéputée Emma Bonino, au nom des Libéraux et Démocrates (centre droit), ont jugé le PE « très dur » dans les « exigences posées ». Le co-président du groupe des Verts, Daniel Cohn-Bendit, a de son côté appelé à éviter « tout ressentiment » dans les débats. « Après le 11 Septembre, il est important pour les intérêts européens de donner une chance d'adhésion à la Turquie (...) Il faut répondre à la question sur cette base et pas sur celle d'un ressentiment religieux ou raciste », a-t-il déclaré, accusant certains opposants à l'entrée du pays dans l'UE de « surfer sur une vague raciste ».
Les propos de M. Cohn-Bendit n'ont pas manqué de provoquer la colère d'eurodéputés, dans un hémicycle divisé sur un dossier lui-même souvent tabou dans l'opinion publique européenne. Autre signe de la sensibilité du sujet : le nouveau report du vote du PE sur le protocole étendant l'union douanière. Ce vote est nécessaire pour l'entrée en vigueur du protocole, pas pour l'ouverture des négociations. Son report a été décidé à l'initiative du PPE, qui a justifié son geste par le refus réitéré d'Ankara de reconnaître Chypre et de laisser les bateaux et avions chypriotes accéder à ses ports et aéroports. La Turquie avait également jugé « partiale » la déclaration de l'Union européenne adoptée le 21 septembre, qui fait de la reconnaissance de Chypre un « élément nécessaire » l'entrée de la Turquie dans l'UE.
Par ailleurs, l'ouverture prévue des pourparlers d'adhésion de la Turquie est menacée par l'Autriche, qui, le 30 septembre, a bloqué l'adoption du cadre de négociation avec Ankara, Vienne semblant vouloir un geste de l'UE en faveur de la Croatie pour donner son feu vert. «Sans aucun doute, il y a un risque de ne pas commencer les négociations d'adhésion », a estimé le ministre turc des Affaires étrangères, Abdullah Gul. « D'un autre côté, des efforts intenses sont faits pour parvenir à une solution », a-t-il ajouté, soulignant qu'il y avait «encore du temps pour résoudre les problèmes ». Pour sortir de cette nouvelle crise européenne, après des semaines de palabres sur la nécessité que la Turquie reconnaisse Chypre avant de rejoindre l'UE, la présidence britannique de l'Union européenne a annoncé une réunion extraordinaire des ministres des Affaires étrangères à Luxembourg.
Les ambassadeurs des 25 à Bruxelles ne sont, une nouvelle fois, pas parvenus le 29 septembre à s'entendre sur le document qui doit fixer les principes directeurs et les procédures des négociations d'adhésion, à cause de l'Autriche, selon des sources diplomatiques concordantes. Le texte accepté par 24 États membres prévoit que l'objectif des pourparlers est l'adhésion, dans un processus ouvert et sans garantie de succès. Mais Vienne, qui avait pourtant accepté comme ses pairs en décembre l'ouverture des négociations d'adhésion, a demandé à l'UE de réfléchir à l'ajout explicite d'une solution alternative à une accession pleine et entière.
Une des plus meurtrières attaques contre des chiites en Irak depuis la chute du régime de Saddam Hussein au printemps 2003 a eu lieu le 29 septembre à Balad, ville à majorité chiite située à 80 km a nord de Bagdad. Trois voitures piégées ont explosé presque simultanément près d’une banque, d’un marché aux légumes et d’un autre lieu en centre-ville faisant au moins 99 morts et 124 blessés, selon des sources hospitalières. La plupart des 99 morts sont des civils, alors qu'au moins cinq policiers, dont le chef de la police locale, font partie des blessés. La communauté chiite avait été lourdement touchée le 31 août lorsque près de mille pèlerins chiites sont morts dans une bousculade sur un pont de Bagdad, dans la tragédie la plus meurtrière de l'Irak de l'après Saddam Hussein, provoquée, pour beaucoup, par des rumeurs sur la présence de kamikazes dans la foule, lancées par des insurgés. Au lendemain de ce drame, le gouvernement a annoncé les premières exécutions de condamnés à mort pour implication dans les violences et le Premier ministre a ordonné la formation d'une commission d'enquête présidée par un juge et le versement d'une compensation équivalente à 2.055 dollars pour chaque mort. Toutes les personnalités et les mouvements politiques d’Irak se sont émus de l'ampleur du drame. Certains, comme le grand ayatollah Ali Sistani, figure emblématique des chiites en Irak, a appelé le gouvernement à en clarifier ces circonstances.
L'organisation d'Al-Qaïda en Irak a décrété le 14 septembre une « guerre totale » à la communauté chiite. Elle a mis ses menaces à exécution le même jour dans Bagdad, dans une série d'attentats à la voiture piégée, là aussi très bien coordonnée, qui a fait près de 160 morts et plus de 570 blessés, la plupart dans cette communauté. Le 15 septembre, trois attentats suicides à la voiture piégée visant des policiers irakiens ont frappé Bagdad en faisant au moins 23 morts en riposte aux opérations de Tall Afar, base importante située près de la frontière syrienne et un centre de distribution d'armes aux insurgés de la zone. Au cours d'une offensive d'envergure, les troupes irakiennes et américaines y avaient tué plus de 150 rebelles et arrêté plus de 400 suspects depuis le lancement de l’opération le 9 septembre. Les forces irakiennes et américaines ont également porté un coup dur à Al-Qaïda en tuant le 26 septembre Abdallah Mohammed al-Jouari, alias Abou Azzam ou encore Abdallah Nahim, le numéro deux présumé de l'organisation en Irak lors d'une opération américano-irakienne à Bagdad.
Des insurgés irakiens ont également assassiné Faris Nasir Hussein, député irakien et membre de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), avec son frère et le conducteur de sa voiture lors d'une embuscade le 17 septembre alors que le député se rendait à Bagdad pour une session du Parlement. Un autre député de l'UPK, Haidar Shanoun, a été blessé dans une attaque perpétrée près de la ville de Dujail, à 80km au nord de Bagdad. Le lendemain, les députés ont respecté une minute de silence en hommage à Faris Nasir Hussein. « Les terroristes ont lancé une guerre (...) contre tous les Irakiens (mais) nous sommes prêts à cela », a déclaré Hussein Al-Shahristani, le vice-président de l'Assemblée nationale.
Par ailleurs, la totalité des exportations de pétrole transitant par l'oléoduc reliant les champs pétrolifères de Kirkouk au terminal turc de Ceyhan, sur la Méditerranée, a été suspendue le 3 septembre à la suite d'un attentat à la bombe. Selon un rapport d'avril 2005 établi par les services du Congrès américain, l'oléoduc Kirkouk-Ceylan consiste en deux conduits parallèles, le premier d'une capacité théorique de 1,1 million de barils par jour (bpj) et d'une capacité réelle de 900.000 bpj, le second d'une capacité de 500.000 bpj. Les exportations par le Kurdistan irakien peuvent atteindre jusqu'à 350.000 (bpj) mais l'oléoduc ne fonctionne que ponctuellement à raison de trois jours par semaines à cause des capacités limitées de stockage à Ceyhan et des fréquentes attaques contre les infrastructures pétrolières. Selon les responsables irakiens, les exportations du pays, y compris celles ponctuelles par le Kurdistan, ont augmenté de près de 15% entre juin et juillet pour atteindre 1,6 million de barils/jour (mbj) en juillet, contre 1,44 mbj en juin.
Le ministre irakien des Affaires étrangères, Hoshyar Zebari, a accusé le 21 septembre la Syrie de ne pas coopérer dans la lutte contre le terrorisme. Damas viole ses obligations vis-à-vis de l'Irak aux termes des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. « Nous avons le fort sentiment que la Syrie n'a pas la volonté politique de remplir ses engagements à l'égard de l'Irak », a-t-il déclaré lors d'une réunion sur l'Irak au Conseil de sécurité. « Malheureusement, la plupart des combattants étrangers et des terroristes qui s'infiltrent en Irak le font par la frontière syrienne et le gouvernement syrien ne coopère pas sérieusement pour nous aider à stopper leur transit », a-t-il ajouté. « Nous demandons de nouveau à nos voisins de déraciner les éléments terroristes et de nous rejoindre dans une coopération stratégique. Les pays voisins ont des responsabilités vis-à-vis de l'Irak qu'ils ont acceptées lors de réunions bilatérales et qui sont définies dans la résolution 1618 du Conseil de sécurité », a-t-il rappelé. La résolution 1618, adoptée le 4 août dernier, condamnait une série d'attentats très meurtriers commis peu auparavant en Irak et priait instamment tous les Etats membres « d'empêcher le transit de terroristes à destination ou en provenance de l'Irak ».
Le président George W. Bush a exclu le 22 septembre un retrait américain d'Irak tout en prévoyant un regain de violence à l'approche du référendum d'octobre sur la Constitution irakienne et l'élection générale fixée à décembre. Mais le président américain a exclu tout retrait des troupes américaines d'Irak. « Certains Américains veulent que nous retirions nos troupes pour qu'elles échappent à la violence », a souligné M. Bush, « ils ont tort ». Le président américain a expliqué l'augmentation du nombre d'attentats en Irak par la proximité du référendum sur le projet de Constitution. Le président irakien Jalal Talabani avait déclaré le 13 septembre que l'Irak n'établirait pas un calendrier pour le retrait des troupes américaines d'Irak. « Nous ne fixerons pas de calendrier pour le retrait. Un calendrier aiderait les terroristes, les encouragerait dans l'idée qu'ils peuvent vaincre une superpuissance mondiale ainsi que le peuple irakien », a déclaré M. Talabani lors d'une conférence de presse à l'issue de discussions avec le président américain George W. Bush à la Maison Blanche. « Nous espérons que nos forces de sécurité seront en mesure, d'ici fin 2006, de prendre la responsabilité des mains des troupes américaines dans le cadre d'un accord global avec les Américains », avait indiqué M. Talabani. M. Talabani a indiqué dans une interview publiée le même jour par le Washington Post que les Etats-Unis pourraient retirer d'Irak 50 000 soldats d'ici fin 2006, affirmant que les forces irakiennes seraient prêtes à assumer le contrôle des villes dans le pays.
Par ailleurs, le secrétaire général de l'Otan, Jaap de Hoop Scheffer, a inauguré le 27 septembre à Bagdad en présence du Premier ministre irakien Ibrahim Jaafari une académie militaire de formation d'officiers irakiens par l'Alliance atlantique.
D’autre part, l'armée américaine a annoncé avoir libéré le 26 septembre 507 détenus de la prison d'Abou Ghraib, environ 500 autres devant être libérés dans le courant de la semaine suivante. Cette dernière vague de libérations intervient alors que l'ONG Human Rights Watch (HRW) a fait état la semaine précédente de mauvais traitements infligés à des détenus dans une base américaine en 2003 et 2004. HRW a publié un rapport intitulé « Manquement du commandement: Témoignages directs de torture de détenus irakiens par la 82ème Division aéroportée », dans lequel deux sergents et un capitaine racontent les brimades quotidiennes et les coups portés aux prisonniers de la base Mercury, près de Falloujah. Ces sévices ont été pratiqués, selon ces témoignages, souvent sur ordre ou avec l'approbation d'officiers supérieurs. L'armée américaine a annoncé qu'une enquête était en cours après ces accusations.
Selon l'Institut international de recherches pour la paix à Genève (GIPRI), les coûts humains, politiques et économiques de la guerre en Irak sont de plus en plus élevés. Le conflit va se prolonger et il sera très difficile d'y mettre fin, avertit une étude publiée le 22 septembre par le GIPRI. Depuis 2003, la guerre a coûté 200 milliards de dollars et a fait officiellement 2000 victimes parmi les soldats de la coalition et les décès de 27 000 civils irakiens ont été répertoriés. Mais ce bilan ne tient pas compte des mercenaires et paramilitaires tués, du côté de la coalition, ni des militaires irakiens morts ainsi que des civils irakiens rapidement enterrés. Il a jugé crédibles les estimations de la revue The Lancet, selon laquelle environ 100 000 Irakiens seraient décédés directement ou indirectement des suites du conflit depuis 2003.
L'Iran menace de refuser toute inspection de ses installations nucléaires, après l'adoption par l'AIEA d'une résolution visant à soumettre à une date qui reste à fixer son dossier atomique au Conseil de sécurité de l'Onu. Le ministre iranien des Affaires étrangères, Manouchehr Mottaki, a qualifié d'illégal le texte adopté le 24 septembre par le Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique.
L'Iran respecte actuellement le protocole additionnel au traité de non-prolifération nucléaire (TNP) exigeant de lui qu'il laisse les experts de l'Onu procéder à des inspections surprise de ses installations. Le protocole n'a pas encore été ratifié par le parlement iranien, dominé par les conservateurs. « L'Iran ne s'est pas engagé au plan légal à continuer à appliquer le protocole additionnel », a déclaré M. Mottaki. « La résolution est illégale, illogique, et sous-tendue par des considérations politiques ». Mais M. Mottaki a souligné que Téhéran n'avait pas l'intention de se retirer du TNP même si la République islamique était condamnée par le Conseil de sécurité. « L'Iran compte respecter le TNP et continuera à collaborer avec l'AIEA », a-t-il indiqué. Selon M. Mottaki, l'Iran ne cèdera pas aux pressions internationales visant à lui faire renoncer à ses activités nucléaires mais il est disposé à poursuivre les discussions dans le cadre du TNP. « Nous n'exclurons jamais la possibilité d'un dialogue. Mais l'Iran invitera de nouveaux pays à y participer », a-t-il souligné.
La résolution appelle l'Iran à suspendre ses activités d'enrichissement de l'uranium et à reprendre langue avec la « troïka » européenne composée de la France, de la Grande-Bretagne et de l'Allemagne. Les tractations en cours depuis deux ans avec la troïka ont abouti à une impasse le mois dernier et l'Iran a repris certaines activités nucléaires sensibles. La Russie, la Chine et les pays non alignés, comme l'Inde, s'opposent à la saisie du dossier par le Conseil de sécurité. Ils redoutent aussi d'éventuelles sanctions internationales, de crainte que cela n'engendre une escalade de la confrontation. De son côté, le président Ahmadinejad a affirmé que l'Iran ne changerait pas sa position et ne craignait pas le Conseil de sécurité. Il a dénoncé le 17 septembre un « apartheid nucléaire » entre les États qui possèdent cette technologie et ceux qui en sont empêchés. Il avait aussi demandé que l'Afrique du Sud participe désormais aux discussions menées par la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne.
Le président iranien a même fait monter les enchères dans la confrontation sur les ambitions nucléaires iraniennes en proposant de partager ses connaissances en la matière avec d'autres nations islamiques au Proche-Orient et en Afrique. En marge du sommet mondial des Nations unies à New York, à l'issue d'une rencontre avec le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, Mahmoud Ahmadinejad a, le 15 septembre, déclaré que l'Iran est également prêt à fournir de la technologie nucléaire à d'autres nations islamiques. « La République islamique ne cherche jamais à se procurer des armes de destruction massive », a-t-il déclaré selon l'agence de presse officielle iranienne Irna. « En fonction des besoins des pays islamiques, nous sommes prêts à transférer notre savoir-faire nucléaire à ces pays ».
Lors d'une conférence de presse le 11 septembre, le ministre iranien des Affaires étrangères avait déclaré que l'Iran lancera un appel d'offre international pour la construction de deux nouvelles centrales nucléaires. « Le parlement a passé une loi pour la construction de vingt centrales nucléaires et la production de 20.000 mégawatts d'électricité. La décision de lancer un appel d'offre est un premier pas du gouvernement pour appliquer la décision du parlement », a affirmé M. Mottaki, sans donner d'autres détails. La première centrale nucléaire iranienne est en construction à Bouchehr (sud) par les Russes, et devra entrer en fonction fin 2006. Récemment, des responsables nucléaires iraniens ont affirmé que des négociations étaient en cours avec la Russie pour la construction de nouvelles centrales. Téhéran justifie son programme d'enrichissement d'uranium par ses besoins de combustibles pour ses futures centrales nucléaires.
Des députés conservateurs ont pressé le 18 septembre le gouvernement de reprendre ses activités d'enrichissement de l'uranium. « C'est une résolution injuste. Nous exhortons le gouvernement à annuler progressivement la suspension volontaire des travaux nucléaires pacifiques de l'Iran », peut-on lire dans une déclaration signée par 180 députés.
Selon un rapport de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) divulgué le 2 septembre, l'Iran a produit près de sept tonnes du gaz utilisé dans l'enrichissement d'uranium depuis la reprise de ses activités nucléaires le mois dernier, une quantité suffisante pour fabriquer une bombe atomique. « L'agence n'est toujours pas en mesure d'éclaircir certaines questions en suspens après deux ans et demi d'inspections et d'enquêtes », précise le document. « Une transparence totale de l'Iran est indispensable et n'a que trop tardé ». Le rapport de l'AIEA confirme que les traces d'uranium hautement enrichi découvertes sur des sites iraniens ont été retrouvées sur des équipements pakistanais achetés au marché noir. Cependant, prévient-il, « il n'est toujours pas possible à cet instant d'établir une conclusion définitive » notamment sur les origines d'autres traces d'uranium.
Mais le document, rédigé par le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique, Mohammed El-Baradeï, affirme que l'Iran a produit environ 6.800 kilogrammes d'hexafluorure d'uranium, un gaz qui permet d'obtenir de l'uranium enrichi. Selon le degré d'enrichissement, la substance obtenue peut être utilisée comme source d'énergie ou pour fabriquer des armes nucléaires. Selon l'ancien inspecteur nucléaire de l'AIEA David Albright, cette quantité est suffisante pour fabriquer une bombe atomique.
Dans un rapport publié le 6 septembre à Londres, l'Institut international des études stratégiques (IISS), a, pour sa part, estimé que l'Iran pourrait se doter d'ici cinq ans du combustible nécessaire à la fabrication d'une arme nucléaire s'il y consacre tous ses efforts. « Si l'Iran renonçait à toute prudence et cherchait à obtenir une capacité nucléaire aussi vite que possible, il pourrait être capable de produire assez d'uranium hautement enrichi pour une seule arme nucléaire d'ici la fin de la décennie », a déclaré John Chipman, directeur de l'IISS, en présentant le rapport à la presse. « L'option nucléaire iranienne n'est pas imminente. Pour des raisons purement techniques, l'Iran semble être encore à plusieurs années au moins de produire assez de matières fissiles pour une arme nucléaire. Et on ne sait pas si l'Iran a l'expertise pour fabriquer une arme nucléaire avec ce matériel », a-t-il poursuivi.
Mais les experts de l'IISS, un centre de recherches respecté installé à Londres, estiment que Téhéran pourrait opter pour la prudence, pour ne pas risquer l'isolement international, sans pour autant se fermer la voie nucléaire à long terme. « Plutôt que se précipiter sur la bombe, l'Iran pourrait chercher à acquérir graduellement une capacité de production nucléaire plus importante, sur une décennie ou plus, avant de décider s'il utilise l'option de l'arme », a estimé M. Chipman. Les Iraniens ont actuellement le sentiment que garder l'option leur permet de « surnager dans une mer d'Etats nucléaires » et de « renforcer leur position de négociation face à des Etats plus puissants comme les Etats-Unis », a-t-il expliqué. Mais il pourrait être difficile pour les dirigeants futurs de résister à la tentation une fois qu'ils en auront l'option, a-t-il observé. Pour la diplomatie internationale, le défi est délicat: « il sera important de faire pression et de trouver des récompenses pour persuader l'Iran de ne pas développer une maîtrise du cycle du combustible qu'il pourrait ultérieurement transformer en programme d'armements », selon lui.
L'Iran a annoncé le 8 août la reprise de ses activités de conversion d'uranium --une étape vers l'enrichissement-- une décision qui risque d'entraîner un recours au Conseil de sécurité de l'Onu et de possibles sanctions. Les marges de manoeuvre de la communauté internationale sont d'ailleurs réduites. « L'Iran est maintenant beaucoup moins inquiet d'une attaque américaine à cause de la situation en Irak. Ils tâtent le terrain », a déclaré lors de la conférence de presse Gary Samore, auteur du rapport « Les programmes d'armes stratégiques iraniens - une évaluation ».
L'IISS qui a publié dans le passé des rapports similaires sur les programmes d'armes de destruction massive de l'Irak (septembre 2002) et de la Corée du Nord (janvier 2004), relève que l'Iran est une société « plus ouverte » et a davantage intérêt à éviter la condamnation internationale que l'Irak ou la Corée du Nord.
Le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a, le 20 septembre, annoncé la prolongation d'une trêve décidée le mois dernier jusqu'au 3 octobre, date prévue du lancement de négociations d'adhésion entre Ankara et l'Union européenne. Le Kongra-Gel, considéré comme l'aile politique du PKK, explique dans un communiqué cité par l'agence pro-kurde MHA que cette prolongation vise à prouver que les combattants ne cherchent pas à nuire au processus d'adhésion de la Turquie à l'UE, comme l'affirme le gouvernement. « Nous appelons le gouvernement et le Premier ministre à faire usage de cette période jusqu'au 3 octobre pour une solution démocratique » au conflit kurde, déclare le Kongra-Gel. « Nous n'avons pas l'intention de saboter le processus d'adhésion de la Turquie à l'UE », ajoute-t-il. « Nous avons toujours soutenu l'entrée dans l'UE d'une Turquie démocratique qui aura résolu sa question kurde ».
Le PKK avait proclamé le 19 août un cessez-le-feu unilatéral courant jusqu'au 20 septembre, mais les accrochages entre ses militants et l'armée turque se sont poursuivis dans le Kurdistan de Turquie, où il concentre ses activités. La trêve faisait suite à un discours du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan assurant que la question kurde en Turquie se résoudrait avec « davantage de démocratie » et à une multiplication des appels de la société civile en faveur d'un arrêt des combats. Le PKK accuse dans son communiqué M. Erdogan d'avoir échoué à mettre en oeuvre ses propos et l'armée d'avoir lancé « des opérations d'annihilation de grande envergure » contre ses combattants dans les montagnes. Il déplore également que le gouvernement ne soit pas parvenu à atténuer l'isolement de son chef emprisonné Abdullah Öcalan, une de ses demandes récurrentes.
Le Parlement turc s'est réuni le 19 septembre en session extraordinaire pour débattre de la montée de la violence entre le PKK et l'armée dans le Kurdistan. Le parti républicain du peuple (CHP-opposition), qui avait appelé à la convocation des députés, théoriquement en vacances jusqu'au 1er octobre, est parvenu, avec le soutien de petites formations parlementaires à atteindre le quorum de 184 députés exigé pour la tenue d'une session extraordinaire. Le gouvernement du Parti de la justice et du développement (AKP) s'était opposé à la tenue de cette réunion, estimant qu'elle nuirait à l'image de la Turquie alors qu'Ankara doit débuter le 3 octobre des négociations d'adhésion avec l'Union européenne. Ses députés ont finalement rejoint, une fois le quorum atteint par l'opposition, un hémicycle survolté où Deniz Baykal, le chef du CHP, a notamment accusé, le gouvernement de manquer de « volonté politique » dans sa lutte contre le PKK. « Il n'y a pas besoin de nouvelles conditions pour lutter contre le terrorisme. Ce qui compte, c'est de démontrer une volonté politique, pour l'heure absente en Turquie », a affirmé M. Baykal, estimant que le développement actuel du « terrorisme » créait « les bases pour un conflit généralisé ». Lors d'une visite à Diyarbakir M. Erdogan avait affirmé que son gouvernement n'autoriserait pas de « régression dans le processus démocratique » et assuré que la « question kurde » se résoudrait avec « davantage de démocratie ». Le gouvernement a défendu son action par la voix du ministre de l'Intérieur Abdulkadir Aksu, qui a déclaré qu'il n'était « pas possible d'atteindre un succès absolu dans la lutte contre le terrorisme sans supprimer la situation et les conditions qui le nourrissent ».
Les violences dans le Kurdistan ont repris en juin 2004 après une pause de cinq ans, lorsque le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), estimant qu'Ankara ne faisait pas assez pour accorder aux Kurdes les libertés qu'ils réclament, a mis un terme au cessez-le-feu qu'il observait unilatéralement. Les attaques du PKK dans la région ont sensiblement augmenté depuis avril. Des violences, notamment des tentatives de lynchage, se sont produites début septembre dans l'ouest du pays entre partisans et opposants du chef d’Abdullah Ocalan, suivis d'appels à la modération de l'ensemble de la classe politique. Les autorités turques ont également imputé au PKK plusieurs attentats à la bombe à Istanbul et dans des stations balnéaires de l'ouest de la Turquie, l'organisation rejetant cette accusation et évoquant l'action d'un groupe radical incontrôlé.
Le 29 septembre lors d'affrontements avec les forces de sécurité turques, trois combattants kurdes du PKK ont été abattus. Deux d'entre eux ont été tués dans la province de Sirnak et le troisième dans celle de Bitlis. La veille, les forces de sécurité turques ont tué deux combattants kurdes dans un accrochage survenu à Bismil dans les premières heures du matin. Dans un autre affrontement qui a eu lieu le 26 septembre à Hakkari, des combattants du PKK ont attaqué des « gardiens de village », des miliciens locaux kurdes armés par l'Etat turc pour combattre le PKK, tuant deux d'entre-eux.
Les forces de sécurité turques ont abattu le 23 septembre un Kurde, soupçonné de participation dans le meurtre de deux policiers, tandis qu'un soldat périssait dans l'explosion d'une mine. Un membre supposé du PKK a été tué lors d'affrontements à Gürpinar, dans la province de Van, au cours d'une opération de police lancée après la mort de deux policiers dans une attaque du PKK contre un commissariat de police la semaine dernière. Un soldat a par ailleurs perdu la vie et deux autres ont été blessés dans la province de Siirt par l'explosion d'une mine, au passage de leur véhicule. Deux autres militaires ont été blessés dans la province de Diyarbakir par l'explosion d'une bombe à retardement en cours de désamorçage devant un point de contrôle, selon les services du gouverneur de la province. Des responsables de la province de Sirnak ont par ailleurs affirmé que six combattants, dont un ancien garde du corps d'un des dirigeants du PKK, Cemil Bayik, s'étaient rendus aux autorités. Le 19 septembre, un employé du cadastre a été tué et deux ouvriers blessés dans la province de Bingöl par l'explosion d'une mine. Les services du gouverneur de Bingöl ont imputé au PKK l'incident, survenu près de la ville de Genc lors d'une opération de relevés du cadastre.
Deux policiers turcs ont été abattus le 17 septembre : un policier dans la ville de Van par des coups de feu tirés par de présumés militants du PKK, qui ont également blessé trois autres membres des forces de l'ordre et un autre policier a été tué dans la ville d’Urfa lorsque deux hommes non identifiés ont ouvert le feu sur une voiture de police en patrouille. Deux autres soldats turcs avaient été tués et six autres blessés le 15 septembre lorsque leur véhicule avait sauté sur une mine. L'incident s'était produit lors d'une patrouille en campagne près de la petite ville de Semdinli.
Le 11 septembre, cinq soldats turcs ont été tués et trois autres blessés dans des accrochages. Un premier incident a eu lieu dans la province de Bingol. Des militants du PKK ont attaqué le poste de Yeniyazi, tuant un militaire et blessant deux autres, selon les autorités turques. Il s'agit de la première attaque contre un poste de l'armée depuis plusieurs années dans cette région qui a été le théâtre d’une guerre de basse intensité. Deux autres accrochages se sont produits à Sirnak. Quatre soldats, dont un sous-officier, ont été tués et un officier a été blessé.
Selon le communiqué du bureau de gouverneur de la province de Tunceli, les forces de sécurité ont abattu le 9 septembre quatre membres du PKK, dont une femme lors d'une opération dans la région rurale de Cicekli. Les forces de sécurité turques avaient tué le 4 septembre deux combattants kurdes présumés dans un affrontement dans une zone rurale près de la localité de Bilgili dans cette même province. Le 6 septembre, un manifestant kurde grièvement blessé lors d'incidents avec la police à Siirt a succombé le lendemain à ses blessures à l'hôpital à Diyarbakir. Abdullah Aydan, âgé de 35 ans, avait été touché à la tête par des tirs de la police au cours d'une manifestation de quelque 500 personnes qui réclamaient l'amélioration des conditions carcérales d’Abdullah Ocalan. La police a affirmé avoir tiré en l'air pour disperser les manifestants qui ont jeté des pierres aux agents de sécurité. Outre la victime, neuf autres personnes, dont un policier, ont été blessées dans les incidents. Le même jour, deux soldats turcs ont été tués et deux autres blessés dans l'explosion d'une mine. L'incident s'est produit alors que les soldats patrouillaient sur un chemin de campagne près de la ville de Cukurca.
Et puis, Abdulkerim Kilic, maire de la bourgade de Catalca Köyü, province de Hakkari a été enlevé le 17 septembre à son domicile par un groupe du PKK, selon le communiqué du gouvernorat. Le PKK a déjà enlevé un maire de village et un soldat en permission dans le Kurdistan de Turquie au cours de l'été, avant de les relâcher.
D’autre part, près de 200 personnes ont été blessées lors de violent heurts qui ont débuté au cours de la nuit du 4 septembre à Bozuyuk (nord-ouest) entre la population locale et des partisans d’Abdullah Ocalan. De nombreux militants kurdes voyageant à bord de plusieurs autocars ont été attaqués par les habitants de Bozuyuk au moment où ils regagnaient les provinces kurdes, après avoir été empêchés par les autorités de se rendre dans la ville turque voisine de Gemlik. Ils voulaient participer à rassemblement de protestation contre les conditions de détention d'Abdullah Ocalan à Gemlik mais ont dû rebrousser chemin. Les militants kurdes, dont le nombre était estimé à quelque 2.000, ont déployé des pancartes et banderoles en faveur d'A. Ocalan, ce qui a exaspéré les habitants de Bozuyuk, selon la chaîne d'information NTV. Les habitants ont brisé les vitres des autocars avec des pierres et de violents affrontements ont opposé les deux parties avant que les forces de sécurité, appuyées par les gendarmes, n'interviennent, selon l'agence de presse turque Anatolie. Dix-sept policiers, sept soldats et un médecin ont été blessés dans ces heurts qui ont duré plusieurs heures, a déclaré le gouverneur local Musa Colak qui a accusé les militants kurdes d'avoir « provoqué » les habitants. Quatre blessés seraient dans un état grave, selon NTV. Environ 25 personnes ont été blessées lorsque les heurts se sont étendus le 5 septembre à Diyarbakir et 20 autres ont été arrêtées par la police. Dans la ville de Van, dix personnes, dont trois policiers, ont été blessées et 80 manifestants arrêtés.
Par ailleurs, 88 militants kurdes qui protestaient à Istanbul contre l'interdiction de la manifestation à Gemlik en faveur d'A. Ocalan, ont été arrêtés le 4 septembre après des affrontements avec la police. Les autorités avaient interdit la manifestation, affirmant que celle-ci était organisée par le PKK. La télévision CNN-Turk a montré des images de manifestants lançant des cocktails Molotov sur des boutiques du quartier Alibeykoy, dans la partie européenne de la métropole. Dans d'autres quartiers, une banque a également été visée par un cocktail Molotov, un autobus a été incendié et un commissariat attaqué à coups de pierres, toujours selon la télévision. Les forces de l'ordre ont fait usage de matraques et de gaz lacrymogènes contre les protestataires. Des policiers ont tiré en l'air pour disperser quelque 150 manifestants qui bloquaient une autoroute dans le quartier de Kadikoy, sur la rive asiatique du Bosphore, selon l'agence turque Anatolie. La police et des unités paramilitaires de gendarmerie ont établi des points de contrôle à toutes les entrées de Gemlik et arrêté une soixantaine de cars qui transportaient des militants kurdes venus de différentes localités du pays. Des centaines de manifestants obligés de descendre de leurs cars ont dû attendre pendant six heures avant d'y remonter pour rentrer chez eux, sans qu'aucun d'entre eux n'ait pu pénétrer dans Gemlik.
Le 1er septembre, sept personnes ont été blessées, dont une grièvement, par l'explosion d'une bombe de faible puissance visant vraisemblablement une réunion d'un parti pro-kurde dans la ville de Semdinli. Un engin placé à proximité d'une tente dressée par le Parti de la démocratie (DEHAP, pro-kurde) à l'occasion de la « journée mondiale de la paix », célébrée le 1er septembre en Turquie, a explosé. La plupart des blessés, dont des femmes, souffrent de contusion mais l'une des victimes est dans un état grave.
Au grand dam d'Ankara, Washington a refusé de prendre des mesures militaires contre le PKK en Irak, mettant en avant l'instabilité de cette région. La Turquie presse pourtant depuis longtemps les Etats-Unis à agir contre des combattants du PKK qui ont trouvé refuge dans le Kurdistan irakien après 1999. Washington reconnait les griefs d'Ankara dans ce domaine mais laisse entendre que la principale cible de ses soldats déployés en Irak demeure les insurgés irakiens et encourage Ankara à chercher une solution politique à la question kurde en Turquie.
La sous-secrétaire d'Etat américaine Karen Hughes a, le 28 septembre, affirmé à Ankara que les Etats-Unis sont déterminés à faire davantage pour combattre « la menace terroriste ». « Je veux que cela soit très clair, les Etats-Unis condamnent absolument le PKK tout comme nous condamnons (le réseau terroriste) Al-Qaïda », a indiqué la diplomate américaine qui effectue une tournée qui l'a menée en Egypte, Arabie Saoudite et en Turquie. « Nous savons que les Turcs souffrent chaque semaine, les Turcs sont tués par des terroristes du PKK », a-t-elle encore déclaré. L'ambassadeur Tuygan a pour sa part souligné la nécessité d'un dialogue « plus structuré » sur les questions d'actualité dans les relations turco-américaines, citant notamment l'Irak et le Proche-Orient. Mme Hughes s'est par la suite brièvement entretenue avec le chef de la diplomatie Abdullah Gül.
Les état-majors turc et américain se sont entretenus le 9 septembre des moyens de combattre le PKK dans le Kurdistan irakien, sans toutefois établir de calendrier ni définir des étapes concrètes pour passer à l'action. Selon un communiqué de l'état-major turc, le général américain James Jones, chef des forces terrestres américaines en Europe, et le général turc Hilmi Ozkok, chef des forces armées turques, ont eu des entretiens qui ont « souligné le besoin d'une détermination commune et d'une coopération dans la lutte contre » le parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK). Les deux généraux sont tombés d'accord sur le fait que le PKK constitue « une menace pour la Turquie comme pour l'Irak et la région », et que des mesures doivent être prises pour faire cesser le soutien reçu par le PKK dans le Kurdistan irakien et prévenir les infiltrations de combattants en Turquie.
Le général Jones, qui est également commandant suprême des forces de l'Otan, a déclaré à la presse après la réunion que l'entretien avait essentiellement porté sur les moyens de coopérer pour chasser le PKK du Kurdistan irakien. « Le commandement central américain a participé à des discussions fructueuses avec l'état-major turc pour réaffirmer l'esprit de coopération et parler concrètement de ce qui doit être fait avec les forces armées turques » dans le Kurdistan irakien, a-t-il déclaré.
Interrogé pour savoir si les forces américaines pourraient entreprendre une action militaire contre le PKK, le général Jones a assuré la Turquie de la détermination des Américains à régler son compte au PKK, classé comme un groupe « terroriste » par les Etats-Unis et l'Union européenne. « Les discussions doivent représenter une garantie auprès de l'opinion turque, montrer que le combat contre le terrorisme est réel, que les participants sont engagés et que le problème sera résolu avec succès », a ajouté le général Jones. .
En Allemagne, des perquisitions ont été lancées le 6 septembre après la décision d’interdiction d’une société d’édition et de presse par le ministre allemand de l'Intérieur, Otto Schily. Dans les locaux de la société E. Xani, qui édite le journal en langue turque Özgür Politika, publié à 10 000 exemplaires à Neu-Isenburg, près de Francfort, la police a saisi 22.000 euros, 70.000 francs suisses (près de 45.000 euros) et plusieurs tonnes de matériels de propagande attribués principalement au PKK, selon le ministère. Des opérations policières ont commencé dans huit Etats régionaux dans le cadre de cette décision, a ajouté le ministère dans un communiqué. « Il est prouvé que l'édition européenne en langue turque du quotidien Özgür Politika est liée à l'organisation du PKK », a affirmé M. Schily.
La Cour de sûreté de l'Etat en Syrie, un tribunal d'exception, a, le 25 septembre, condamné deux Kurdes à des peines de deux ans et demi de prison pour appartenance à « une organisation secrète », a indiqué l'avocat et militant des droits de l'Homme Anouar Bounni. Les deux Kurdes, Chahine Mohammad et Hachem Ahmad, membres du Parti de l'Union démocratique, une formation kurde syrienne interdite, sont accusés d'appartenance à « une organisation secrète visant à faire annexer une partie des territoires syriens par un pays étranger ».
Les responsables kurdes de Syrie se défendent de toutes visées sécessionnistes et assurent qu'ils veulent uniquement la reconnaissance de leur langue et de leur culture, ainsi que de leurs droits politiques. Environ 1,5 million de Kurdes vivent en Syrie. « Les autorités syriennes resserrent l'étau contre la société civile, notamment contre les Kurdes », a souligné Me Bounni en indiquant que les autorités ont interdit récemment plusieurs réunions de groupes des droits de l'homme.
D’autre part, une Kurde syrienne a été tuée le 15 septembre en s'opposant à la police qui détruisait des maisons construites illégalement dans une localité à l'ouest de Damas, a annoncé Me. Anouar al-Bounni. Selon ce dernier, la femme a été tuée dans un affrontement entre la police et des Kurdes, à al-Dimas, à 25 km à l'ouest de Damas. « L'affrontement s'est produit lorsque les bulldozers de la police ont procédé à la démolition de maisons habitées par des pauvres ouvriers en majorité kurde et construites illégalement ». D'après Lokman Ousso, dirigeant d'une formation kurde syrienne non autorisée, la femme a été « battue mortellement par les policiers alors qu'elle s'opposait à cette opération de destruction ». Deux autres femmes ont été blessées.
Le 28 septembre, des exilés syriens ont ouvert à Paris une réunion de l'opposition politique au régime de Damas, mais ont souligné que de nombreux participants potentiels étaient restés en Syrie par crainte de représailles. Certains opposants basés en Syrie ont renoncé à se rendre à Paris pour assister à la réunion de deux jours, présentée comme la première du genre, ont indiqué les organisateurs. On dénombrait toutefois une trentaine de participants, principalement des Kurdes syriens. « Le régime syrien a menacé de jeter de nombreux participants en prison s'ils assistaient à la réunion », a déclaré Fahad Al Masri, un organisateur, membre du Rassemblement pour la Syrie, un parti regroupant des exilés.
La réunion a pour but d'unir l'opposition syrienne et de rallier la communauté internationale à sa cause. Les exilés demandent la création d'un système judiciaire indépendant, la liberté de la presse et le pluralisme politique en Syrie.
Cent vingt policiers ont été tués et 64 autres blessés dans des affrontements avec des combattants kurdes dans l'ouest de l'Iran en moins de six mois, a indiqué un responsable local, cité le 3 septembre par l'agence Isna. « Depuis le début de l'année 1384 (débutant le 20 mars 2005), 120 policiers sont tombés en martyrs en combattant le PEJAK, le PKK, le Parti démocratique kurde et le Komaleh », a indiqué Hojatoleslam Akbar Feyz, le chef de la justice de la province de l'Azerbaïdjan occidental, cité par l'agence estudiantine Isna.
Lors des derniers mois, des journaux avaient fait état d'attaques régulières par des groupes kurdes iraniens, dont le PEJAK --un groupe lié au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK)-- et d'autres partis kurdes interdits qui sont actifs aux confins de l'Irak et de la Turquie. Téhéran et Ankara sont liés par un accord selon lequel l'Iran s'engage à combattre le PKK et la Turquie à lutter contre les Moudjahidine du Peuple, un mouvement d'opposition iranien basé en Irak. Des sources officielles avaient fait état jusqu'à présent de 12 morts, dont huit soldats depuis mi-juillet dans ces violences, mais selon des organisations non-gouvernementales, le bilan serait plus lourd.
M. Feyz a ajouté, toujours selon Isna, que lors du dernier mois, 190 personnes originaires de villes à dominante kurde de la province avaient été arrêtées, dont neuf seraient toujours derrière les barreaux. Les juges de la province ont été armés « pour se protéger suite à des menaces de mort », proférées par des groupes kurdes, selon lui.
Une conférence d'historiens turcs sur la situation des Arméniens dans l'empire ottoman, et sur les massacres qui ont visé cette population, s'est enfin ouverte le 24 septembre à Istanbul après avoir été reportée à deux reprises en raison de l'extrême difficulté d'aborder certains sujets dans la Turquie d'aujourd'hui. À leur arrivée à l'université privée de Bilgi, les participants à la conférence ont été accueillis par une pluie d'oeufs et de tomates lancés par des manifestants irrités à l'idée qu'ils puissent discuter du génocide perpétré par les Turcs ottomans en 1915. Les manifestants, arborant des drapeaux turcs, ont scandé des slogans accusant les participants à la conférence de trahir leur pays. Avancer l'idée que les Turcs pourraient avoir commis un génocide contre les Arméniens ne contredit pas seulement la ligne officielle - et peut conduire à des poursuites -, il offense une partie non négligeable de la population qui considère l'empire ottoman comme le symbole de la grandeur turque.
Il s'agit d'une première dans l'histoire de la Turquie moderne. Pour la première fois en effet, des historiens peuvent publiquement débattre d'un « passé qui ne passe pas » en particulier au sein de la diaspora arménienne dont les membres réclament depuis des décennies à Ankara la reconnaissance du premier génocide du XXe siècle qui a fait plus d'un million de morts dans les années 1915. Le groupe d'universitaires à l'origine de la conférence est devenu emblématique de cette partie de la population turque désireuse d'avancer vers la modernité démocratique selon Halil Berktay de la faculté d'histoire de l'université Sabanci d'Istanbul en soulignant qu'ainsi on agissait « pour la démocratie turque, pour la liberté de parole, pour la liberté académique ». Les organisateurs de cette conférence avaient d'abord été accusés en mai dernier par le ministre de la Justice lui-même de « porter un coup de poignard dans le dos du peuple ». Le 22 septembre, les opposants à cette initiative avaient réussi à obtenir le report de la conférence par un tribunal d'Istanbul, ce qu'avait d'ailleurs critiqué le chef du gouvernement qui a estimé que ce genre de censure n'était pas digne d'une démocratie. La presse turque parle de victoire pour la démocratie et se félicite pour sa part du simple fait qu'elle ait lieu. « Un nouveau tabou a été détruit. La conférence a commencé, mais le jour du jugement n'est pas venu », écrit le 25 septembre le quotidien Milliyet. Le quotidien Radikal, se réjouit lui aussi de ce développement. « Même le mot génocide a été prononcé lors de la conférence, mais la terre continue à tourner et la Turquie est toujours là », affiche en une du journal. « Libres discussions, libres manifestations », s'enflamme le quotidien Hürriyet, le plus gros tirage de la presse turque, mettant en exergue la liberté d'expression qu'exercent à la fois les participants à la conférence et ses détracteurs.
Dans un message adressé à la conférence, le ministre turc des Affaires étrangères, Abdullah Gül, a exprimé la position officielle de son pays en déclarant que de nombreux citoyens de l'empire ottoman avaient terriblement souffert pendant la guerre, mais que la thèse d'un génocide contre le peuple arménien était fausse et sous-tendue par des considérations politiques. « Le peuple turc est en paix avec lui-même et avec l'Histoire », a-t-il assuré.
Par ailleurs, la Commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants américains a récemment voté à de larges majorités (35 voix contre 11 puis 40 voix contre 7) pour des projets de résolution invitant la Turquie à reconnaître le « massacre » d'Arméniens entre 1915 et 1917. En 2000, la Chambre des représentants avait failli voter la reconnaissance du « génocide arménien », mais le texte dans ces termes avait été retiré à la dernière minute de l'ordre du jour d'une séance plénière.
La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a, le 20 septembre, condamné la Turquie dans des arrêts concernant des requêtes formulées par près d'une trentaine de Kurdes. Les juges de Strasbourg n'ont pas reconnu toutes les violations que leur reprochaient les requérants, mais Ankara n'est pas sorti indemne dans les arrêts rendus.
La cour a ainsi retenu la violation des articles 3 (torture et traitements inhumains ou dégradants) et 13 (droit à un recours) s'agissant de Baki Karayigit. Soupçonné d'appartenir au PKK, il avait été arrêté le 6 février 1999 par la section antiterroriste de la Direction de la sûreté d'Istanbul et a subi des sévices physiques et mentaux. La Cour lui a alloué 15.000 euros pour dommage matériel.
Dans un autre arrêt, la Cour a conclu à l'ineffectivité d'une enquête menée après que Mesut Dündar, domicilié à Cizre eut été retrouvé étranglé le 6 septembre 1992, tué, selon son père, par les forces de sécurité près du village de Sulak. La Cour a alloué 10.000 euros à ses héritiers et 3.500 euros au requérant, son père.
Les juges de Strasbourg ont aussi donné gain de cause à Hayrettin Sevgin et Cevat Ince, résidant à Diyarbakir. Sevgin, placé en garde à vue à la Direction de la gendarmerie de Sagirsu, aurait été torturé pendant 18 jours. Les deux hommes ont été contraints à signer de faux aveux concernant leur appartenance au PKK. La Cour a alloué 6.000 euros à chacun des requérants pour dommage matériel.
La Cour européenne des droits de l’homme avait également condamné, le 14 septembre, la Turquie pour violation des droits de l’homme quant à l’organisation d’une opération de police contre des membres présumés du Parti des travailleurs du Kurdistan. Les juges de Strasbourg avaient critiqué « l’enquête inadéquate » des autorités sur les circonstances de deux décès pendant cette opération menée en 1996.
Par ailleurs, une journaliste turque poursuivie pour « propagande séparatiste kurde » a fait condamner la Turquie le 27 septembre pour « atteinte à la liberté d'expression » par la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg. Asli Günes était rédactrice en chef de la revue politique Hedef (La cible) lorsqu'elle avait cosigné en mars 1992 un article dans lequel elle critiquait les opérations militaires contre les combattants kurdes. L'article appelait à « refuser de combattre au sein des troupes turques qui vont assombrir l'avenir des Kurdes ». Mme Günes avait été condamnée en décembre 1995 à un an et quatre mois d'emprisonnement. La cour de sûreté de l'Etat prononça ensuite le sursis à exécution de la peine et déclara en 2003 sa condamnation non avenue à l'expiration de la période de sursis de trois ans. Pour condamner Ankara pour violation de l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme (droit à la liberté d'expression), les juges de Strasbourg ont fait valoir que l'article incriminé ne développait pas un discours de haine, ce qui, à leurs yeux est « l'élément essentiel à prendre en considération ». Ils ont également estimé que le sursis a exécution a eu pour effet de « limiter grandement son aptitude à exposer publiquement une critique » pendant trois ans. Par ailleurs, les juges des droits de l'homme ont relevé que la durée de la procédure s'est étendue sur environ six ans et sept mois, ce qu'ils ont jugé excessif au regard de l'article 6 de la Convention. Les autorités d'Ankara devront verser un total de 8.500 euros à Mme Günes au titre de dommage moral et frais et dépens.
La nouvelle sous-secrétaire d'Etat américaine chargée de la diplomatie publique, Karen Hughes, a entamé le 18 septembre une tournée dans trois pays du Moyen-Orient alliés de Washington, l'Egypte, l'Arabie Saoudite et la Turquie. Mme Hughes, une ancienne journaliste texane proche du président Bush, officiellement chargée de redresser l'image des Etats-Unis à l'étranger et de lutter contre le sentiment d'anti-américanisme, s’est rendue au Caire, à Djeddah, à Ankara et à Istanbul.
Début septembre, Mme Hughes avait estimé que les Etats-Unis devaient réagir « plus rapidement et de façon plus agressive aux informations erronées » qui circulent sur leur politique. Selon une étude diffusée en août, et réalisée avant les attentats terroristes de Londres en juillet, les Américains se disent préoccupés par leur réputation dans le monde, notamment dans les pays musulmans, et ont peu d'idées pour y remédier. Trois Américains sur quatre disent s'inquiéter tant du manque de confiance qu'ils inspirent à l'étranger que de la haine suscitée par les Etats-Unis dans les pays musulmans, selon ce sondage publié par la revue Foreign Affairs et l'Institut de recherches Public Agenda.
La sous-secrétaire d'Etat américaine a encaissé au cours de ses visites les griefs du monde arabo-musulman vis-à-vis de l'Amérique. Les reproches ont été adressées sur un ton poli, plein de déférence, lors de rencontres « d'échanges de vues » entre la diplomate et « la société civile » de ces pays, alliés des Etats-Unis: étudiants et enseignants en Egypte, étudiantes voilées et journalistes en Arabie Saoudite.
Mme Hughes, spécialiste en communication qui a contribué à forger l'image du président américain, officiellement chargée de redorer le blason des Etats-Unis après la guerre en Irak, est arrivée le 27 septembre à Ankara pour la troisième étape de son voyage « d'écoute », qu'elle a terminé par un arrêt à Istanbul. « C'est confirmé, il s'agit d'un défi énorme », a-t-elle déclaré aux journalistes qui l'accompagnaient, dans l'avion reliant Djeddah à Ankara, en parlant de sa mission, qualifiée de « mission impossible » par des analystes égyptiens notamment. Très proche de George W. Bush, elle se rendait pour la première fois dans cette région du monde.
Le général Ali Habib, le chef d'état-major de l'armée syrienne, a achevé le 29 septembre à Moscou une visite de quatre jours axée sur la participation de la Russie à la modernisation de l'arsenal syrien. Comme le veut la tradition, sa visite a fait l'objet de peu de publicité et les sources officielles n'ont livré que des généralités. Ainsi, la rencontre du général Habib la veille avec le ministre russe de la Défense Sergueï Ivanov a porté « sur l'entretien et la modernisation des équipements militaires syriens par des spécialistes russes, la formation de militaires syriens dans les académies militaires russes et enfin sur d'éventuels achats d'armements russes », selon un communiqué russe. Le type d'armes concerné n'a pas été précisé, mais il pourrait s'agir de missiles antichars. En effet, le général syrien a visité le 27 septembre à Toula un établissement spécialisé précisément dans la fabrication de missiles à grande précision de tir. Le Bureau d'études et de fabrication d'instruments de Toula est l'un des leaders du secteur en Russie et se classe à la septième place parmi les exportateurs d'armements. Outre les missiles antichars de troisième génération baptisés Kornet-E, son produit phare, il fabrique aussi des armes légères et des systèmes de « blindage actif ».
Aucun accord important n'a été annoncé à l'issue de la visite du général syrien, une source au ministère russe de la Défense annonçant, selon Interfax, un achat de munitions russes et aussi l'augmentation du nombre d'officiers syriens formés en Russie, ce nombre devant passer prochainement d'environ 30 à plus de 50.
Le général Habib, qui a rencontré aussi son homologue russe Iouri Balouïevski, devait également avoir des entretiens à Rosoboronexport, l'organisme officiel chargé des ventes d'armes. La Russie est l'un des principaux fournisseurs d'armes de la Syrie. La vente annoncée de missiles antiaériens russes de courte portée a déclenché de violentes protestations d'Israël au printemps dernier
L'Iran va signer un pacte de libre-échange avec la Syrie pour promouvoir les échanges de commerce bilatéral, a rapporté le 13 septembre, l'agence de presse iranienne officielle IRNA. L'ambassadeur iranien en Syrie, Mohammad Reza Baqeri, a déclaré le 12 septembre à Damas que l'achèvement de l'accord sur le libre-échange entre les deux pays se trouvait en phase finale. « Nous espérons que les deux pays témoigneront du développement de leurs échanges bilatéraux suivant la signature de l'accord de libre-échange », a déclaré M. Baqeri.
L'Iran a réalisé, en Syrie, différents projets économiques coûtant environ 700 millions de dollars, et la coopération économique irano-syrienne pourrait augmenter de 3 milliards de dollars dans les prochaines années, a-t-il ajouté. L'Iran et la Syrie, subissant tous les deux les sanctions économiques dirigées par les Etats-Unis, sont accusés par Washington de financer des terroristes. Le premier ministre syrien, Mohamed Naji Otri, a appelé en février, les deux côtés, à faire front pour faire face aux sanctions économiques, et les médias iraniens ont catalogué la Syrie comme allié stratégique.
La mission d'assistance de l'Onu pour l'Irak (Unami) a publié le 8 septembre un rapport alarmant sur les droits de l'Homme, condamnant les actes de violence et critiquant le comportement des forces de l'ordre locales. Le rapport évoque la situation du 1er juillet au 31 août. Il en brosse un sombre tableau et appelle les autorités locales à respecter leurs obligations en matière des droits humains. Il souligne l' « inquiétude (de l'Onu) pour le manque de protection des droits civiques, culturels, économiques, politiques et sociaux » des Irakiens. « Les insurgés continuent de prendre pour cible les civils innocents, dont les enfants, les policiers, les hommes politiques, les diplomates, les défenseurs des droits de l'Homme et ceux qui sont liés à la Force multinationale ou perçus comme tels », constate le texte. « Des corps continuent à émerger à Bagdad et ailleurs, la plupart portant des signes de torture et semblent résulter d'exécutions extra-judiciaires », ajoute le document qui rappellent les principaux incidents et attaques meurtries dont la bousculade de Bagdad, qui a fait près d'un millier de morts le 31 août. Il rappelle également les découvertes de corps, dont plus de 30 ont été signalés récemment au sud de Bagdad, en indiquant que des familles avaient accusé de ces exécutions des « forces liées au ministère de l'Intérieur ». Le document fait état d'information sur un « usage excessif de la force » de la part des policiers irakiens agissant seuls ou avec la Force multinationale.
Le rapport indique que de nombreuses rencontres avaient eu lieu avec les responsables irakiens à ce sujet et affirme que l'Onu s'attend à ce que ces violations fassent l'objet d'enquêtes. Selon l'Onu, des instructions ont été données au niveau du ministère de l'Intérieur pour respecter les droits de l'Homme mais « il est trop tôt pour en évaluer les résultats ». « Les Nations unies sont prêtes à assister les autorités irakiennes pour s'assurer que les mesures prises pour contrer le terrorisme et l'insurrection ne contredisent pas leurs engagements en matière des droits de l'Homme, des droits des réfugiés et des lois humanitaires », souligne le texte. Il s'inquiète du traitement réservé aux ressortissants arabes, obligés de renouveler tous les mois leurs permis de séjour, de l'exécution de trois condamnés à mort en dépit des protestations de l'Onu et du programme de la télévision publique Iraqia qui continue d'exhiber des suspects faisant, avant d'être jugés des « aveux » sur leur participation à des actes de violences. Il fait également cas de plainte de sévices contre des minorités, comme celle des Turcomans, de plaintes de femmes qui estiment que leur liberté est menacée et annonce des stages sur les droits de l'Homme à Erbil, au Kurdistan irakien et à Bassorah, dans le sud de l'Irak.
Une campagne massive a été lancée en Turquie pour scolariser les quelque 520.000 fillettes qui, selon les estimations, ne vont pas en classe. Baptisée « Allez les filles, on va à l'école! », la campagne a été lancée en 2003 à Van, province kurde bordant l'Iran. Elle s'est étendue depuis à 53 provinces. En deux ans, environ 120.000 petites Turques et Kurdes ont rejoint les bancs de l'école, dont quelque 20.000 à Van. L'UNICEF, l'agence des Nations unies pour la protection de l'enfance, a apporté une contribution de 420.000 dollars (349.000 euros). Dans certaines provinces pauvres, les autorités estiment que la moitié des filles ne vont pas à l'école, pourtant obligatoire pour tous les enfants jusqu'à 14 ans dans la laïque Turquie. Mais ces estimations, fondées sur la comparaison entre la scolarisation des filles et celle des garçons, sont vraisemblablement très en dessous de la réalité.
Une grande partie des fonds sert à resserrer le maillage scolaire. Dans un village proche de Van, l'école ne compte que deux salles avec un enseignant pour 185 élèves. Avec l'aide de la Banque mondiale, la Turquie offre à présent aux parents les plus pauvres 39 livres (25 euros) par mois s'ils envoient leurs filles à l'école et 28 livres (17,5 euros) pour les garçons. Cette allocation doit servir à acheter les fournitures scolaires, que nombre de parents ne peuvent offrir à leurs enfants. L'un des éléments clés de la campagne a été la mobilisation des imams -qui en Turquie sont payés par l'Etat- pour vaincre les réticences religieuses.
La campagne se heurte également à la résistance de certains Kurdes qui refusent une éducation en turc. La Turquie ne reconnaît pas ses 18 millions de Kurdes comme minorité et toutes les écoles publiques dispensent l'enseignement en turc.
Par ailleurs, une organisation non gouvernementale américaine a dénoncé des pratiques « inhumaines » et relevant parfois de la « torture » dans le traitement des malades mentaux en Turquie, dans un rapport rendu public le 28 septembre à Istanbul. « Nous avons identifié une pratique de la torture: l'utilisation de traitements par électrochocs sans anesthésie », en violation de la Convention européenne pour la prévention de la torture, a déclaré Eric Rosenthal, le président de l'ONG Mental disability rights international (MDRI), lors d'une conférence de presse présentant le rapport. « Nous avons trouvé des enfants dans des orphelinats et des centres de réhabilitation attachés à leur lit, se voyant refuser l'accès à des traitements médicaux, laissés sans réhabilitation et sans le soutien dont ils ont besoin pour obtenir de la nourriture pour les maintenir en vie », a-t-il poursuivi. M. Rosenthal a également insisté sur le sort de « nombreuses personnes pouvant n'avoir aucun handicap » et pourtant enfermées, en l'absence de loi définissant les conditions d'internement des déficients mentaux, « par ce qu'ils sont sourds ou nés là, d'une mère handicapée ».
La présentation de ce rapport, fruit de deux ans d'enquêtes dans des institutions spécialisées turques, intervenait à quelques jours du lancement prévu, le 3 octobre, de négociations d'adhésion entre Ankara et l'Union européenne. Le président de MDRI a assuré que celui-ci ne visait pas à nuire au processus européen de la Turquie, dès lors que celle-ci assumait ses responsabilités. « Je veux souligner qu'il n'y a aucune raison pour que ces abus se mettent en travers du chemin de l'adhésion de la Turquie, car la Turquie a toute latitude pour mettre fin aux abus les plus graves dès demain », a-t-il affirmé, ajoutant ne pas demander autre chose à Ankara que ce qui a été exigé d'autres pays souhaitant adhérer à l'UE. Le rapport évalue à 9.000 places la capacité des institutions publiques turques spécialisées dans l'accueil des handicapés mentaux.
Le journaliste dissident Akbar Ganji, le plus emblématique des prisonniers politiques iraniens, a été reconduit en prison après avoir quitté l'hôpital où il avait mis fin à sa grève de la faim. Akbar Ganji est sorti de l'hôpital le 3 septembre et est retourné en prison, a affirmé le ministre de la Justice Jamal Karimi-Rad, sans plus de précisions. Il « a été reconduit à la prison d'Evine après avoir quitté l'hôpital et purgera sa peine », a déclaré plus tôt le vice-procureur de Téhéran en charge des prisons, Mahmoud Salarkia, cité par l'agence estudiantine Isna.
Akbar Ganji, âgé de 46 ans, avait été condamné en 2001 à six ans de prison après un article mettant en cause plusieurs dignitaires dans une série de meurtres d'intellectuels et d'écrivains. Il avait entamé une grève de la faim le 11 juin qui a duré près de deux mois pour protester contre ses conditions de détention et obtenir une libération sans condition. Akbar Ganji, transféré le 17 juillet de sa prison à l'hôpital Milad officiellement pour une opération du ménisque, avait été admis en soins intensifs par la suite. L'épouse de M. Ganji avait indiqué fin août que son mari pourrait être libéré « dans les prochains jours ».
La justice et le procureur de Téhéran, Saïd Mortazavi, ont été crispés par l'attitude de défi du dissident, sous le nom duquel des déclarations très virulentes contre le régime ont continué à être publiées, et par la mobilisation en sa faveur. Le président américain George W. Bush, l'Union européenne et le secrétaire général des Nations unies Kofi Annan ont réclamé la libération d'Akbar Ganji, défendu par le cercle d'avocats du Nobel de la paix Shirin Ebadi.