L’actualité du Kurdistan d’Iran a été marquée ce mois-ci par une intensification de la répression contre les activistes kurdes et surtout par le terrorisme d’État du régime, avec la frappe par plusieurs roquettes le samedi 8 septembre du siège des deux branches du Parti démocratique du Kurdistan d’Iran (PDKI) près de la ville de Koya, au Kurdistan d’Irak, qui a fait 17 morts et plus de 40 blessés (un bilan révisé plus tard à 50). Le même jour a eu lieu dans la prison de Rajai Shahr à Karaj l’exécution par pendaison de 3 prisonniers politiques kurdes, Ramin Panahi et ses deux cousins Moradi.
Par ailleurs, les forces de répression du régime poursuivent leurs meurtres des porteurs kurdes transfrontaliers ou kolbars. Les mauvaises conditions économiques contraignent de plus en plus de Kurdes à recourir à ce métier dangereux pour à peine survivre, puisqu’ils ne gagnent guère qu’une dizaine de dollars par jour et risquent sans cesse d’être abattus de sang-froid par les forces de répression qui les considèrent comme des contrebandiers. Ils ne constituent pourtant aucune menace, n’étant pas eux-mêmes armés. Le 4, l’un d’eux, originaire de Baneh et père d’un enfant, a été tué près de Piranshahr. Le 10, selon le Washington Kurdish institute (WKI), deux porteurs ont été visés par des tirs près d’Ouroumieh, l’un tué, l’autre grièvement blessé. Puis 1 autre a été abattu le 18 près de Mariwan. Le 22, l’association de défense des droits humains Hengaw a rapporté un autre assassinat du même type près de Chaldiran, non loin de la frontière turque. Dans un rapport récemment publié couvrant les provinces kurdes de l'Azerbaïdjan occidental, du Kurdistan et de Kermanshah, Hengaw chiffre les victimes de ces tirs à 14 blessés et un mort en seulement une semaine, et à 21 morts et 45 blessés durant les six derniers mois. L’organisation recense aussi 11 morts et 27 blessés par d’autres causes (accidents, problèmes de santé…), parmi lesquels 2 tués et 8 blessés par des mines anti-personnel relèvent également de la répression: s’il reste des mines de la guerre Iran-Irak, les pasdaran (Gardiens de la Révolution) en ont posé d’autres récemment, visant kolbars et combattants des partis kurdes d’opposition…
Le 7, les pasdaran ont annoncé avoir tué 6 membres d’un groupe du parti kurde PJAK qui avait attaqué le 20 juillet un poste-frontière avec l’Irak, tuant 10 d’entre eux (Reuters). Le 10 dans l’après-midi, le PDKI a annoncé que les pasdaran avaient franchi la frontière irakienne, tandis que d’autres témoignages locaux parlaient d’une concentration de troupes côté iranien. Quoi qu’il en soit, les bombardements d’artillerie incessants de la semaine précédente ont provoqué de nombreux incendies de forêt et fait fuir près de 200 familles de la région de Balakayetî. Selon Rûdaw «L’Iran a installé une base d’artillerie dans la vallée de Maidan, qui vise irrégulièrement les terres agricoles kurdes près de la frontière, sous prétexte de la présence de partis d’opposition kurdes armés».
Mais c’est le samedi 8 qu’a eu lieu l’attaque la plus grave contre les militants kurdes d’opposition. Alors que la branche dissidente du PDKI tenait un Congrès à son siège de Koya, au Kurdistan d’Irak, il a été visé par des roquettes qui ont selon un premier bilan fait 15 morts et 30 blessés, dont des enfants. L’actuel secrétaire général du Parti ainsi que son prédécesseur ont été blessés. Dans le communiqué faisant suite à l’attaque, le PDKI a blâmé la communauté internationale pour son «absence de pression sur le régime iranien», accusant également les pasdaran d’avoir exécuté deux pechmergas prisonniers en contravention avec la Convention de Genève. Le lendemain, les pasdaran ont officiellement confirmé le tir de sept missiles. Le ministère des Affaires étrangères irakien a qualifié l’attaque de «violation de sa souveraineté territoriale». Le Gouvernement régional du Kurdistan (GRK), promettant d’apporter son assistance aux victimes, l’a aussi condamnée, tout comme le Vice-président américain Mike Pence dans un appel téléphonique au Premier ministre du GRK.
Avec cette attaque, la République islamique poursuit ses assassinats d’opposants à l’étranger, comme ceux perpétrés contre 7 dirigeants du PDKI en Autriche et en Allemagne en 1989 et en 1992. Une attaque en préparation contre une réunion des Moudjahiddine du Peuple en France a été déjouée en Belgique récemment, et fin septembre, une autre tentative pourrait bien avoir eu lieu au Kurdistan d’Irak contre Loghman Shahabi. Ce Kurde d’Iran, policier à Derbandikhan depuis 12 ans, est en effet hospitalisé après avoir été grièvement blessé le 25 d’une balle dans la tête par un homme muni d’un pistolet à silencieux. Sa sœur a accusé l’Iran et témoigné que son frère avait reçu plusieurs appels téléphoniques menaçants. Déjà, en juillet dernier, on avait retrouvé dans une rivière près de Penjwîn le corps d’Iqbal Moradi, un défenseur des Droits de l'homme et activiste politique… et père de Zaniyar Moradi, l’un des trois prisonniers politiques pendus le 8.
Le 11, l’Iran a demandé à Bagdad et Erbil de lui «livrer» ou d’«expulser» les «criminels» des groupes kurdes iraniens se trouvant encore sur leur territoire, et le 13, le général commandant les pasdaran a menacé les «ennemis de l’Iran» avec ses «missiles d’une portée de 2.000 kilomètres», capables de frapper «les puissances étrangères arrogantes» (AFP) – on comprendra les États-Unis… Le GRK a rejeté les demandes iraniennes, indiquant que la plupart des opposants kurdes d’Iran étaient des réfugiés enregistrés au HCR.
Le jour même de l’attaque de Koya, l'agence Fars annonçait l’exécution de Ramin Hossein Panahi et de deux de ses cousins Zanyar et Loqman Moradi. Panahi était accusé d'appartenir au parti kurde Komala, et les cousins Moradi à un «groupe terroriste séparatiste» non précisé. Des aveux avaient été extorqués à Panahi par la torture, et une accusation montée de toutes pièces contre les cousins Moradi, convaincus d'avoir tué quatre personnes, dont le fils de l'imam de la prière du vendredi de Mariwan. Le régime préparait cette exécution depuis des semaines en publiant régulièrement des articles dans sa presse aux ordres, et a fait fi de toutes les demandes d’annulation des organisations internationales. Amnesty International a réagi à cette triple exécution en exprimant son «horreur», rappelant l’iniquité des procès, tout comme la Commissaire des Nations-Unies aux Droits de l’homme, Michelle Bachelet (WKI). Le 10, l'Association des droits de l'homme du Kurdistan a rapporté qu’un autre activiste kurde, Kamal Ahmad Nazhat, de Miandoab (Azerbaïdjan occidental), avait aussi été exécuté pour appartenance à un parti kurde. Selon les chiffres de l’organisation Hengaw, l'Iran a pendu au cours des six derniers mois 44 de ses citoyens kurdes et condamné à mort 11 autres militants politiques. Amnesty International a compté en 2017 au moins 507 exécutions, dont 31 au moins publiques (Kurdistan 24).
Le 12, un responsable du Ministère des pechmergas du GRK a indiqué que l’armée iranienne était entrée de près de 20 km au Kurdistan d’Irak sous prétexte de rechercher les opposants kurdes armés, installant des batteries d’artillerie et de roquettes sur le mont Surîn (2000 m) au nord de Suleimaniyeh (Middle East Monitor). Un activiste kurde, Soran Balani, a ajouté que les frappes sur Koya auraient même été faites depuis ces batteries…
Mais l’attaque et les exécutions barbares du 8 septembre, loin de faire plier les opposants kurdes, ont au contraire renforcé leur détermination. Le Kurdistan d’Iran a répondu le 12 par une grève générale très suivie, en particulier dans les villes de Baneh, Bokan, Kermanshah, Mariwan, Mahabad, Piranshahr, Sanandaj, Shno (Oshnavieh), Sardasht, Saqqez etc. Selon le Komala c’est l’action de désobéissance civile la plus importante depuis les manifestations de décembre-janvier. Hengaw a parlé de «participation massive», ajoutant que le régime avait envoyé l’armée quadriller les villes kurdes et y avait coupé ou limité l’accès à Internet. Il y a eu des dizaines d’arrestations, notamment à Mariwan, où deux activistes ont été emmenés au bureau du renseignement (WKI), alors que les 2/3 des boutiques fermaient et que 20 à 30% des fonctionnaires faisaient grève. À Sanandaj, 90% des boutiques sont resté fermées, et des arrestations ont aussi été rapportées, notamment celles de 2 femmes activistes le 13 (une autre, Hejar Sayêdî, arrêtée le 5, a été mise au secret). Simultanément, au Kurdistan d’Irak, les Kurdes d’Iran ont manifesté devant les bureaux des Nations-Unies à Erbil, et en France et en Grèce, des pierres ont été jetées sur les ambassades d’Iran – des actions dénoncées par le PDKI, qui a déclaré ne pas vouloir «agir comme le régime». Le 17, une nouvelle attaque contre l’ambassade d’Iran en Grèce a été lancée par le groupe anarchiste Rubicon «en solidarité avec les Kurdes» (AFP). Enfin, le parti «pro-kurde» HDP a condamné en Turquie l’attaque sur Koya, et ses deux coprésidents Pervin Buldan and Sezai Temelli ont envoyé aux deux tendances du PDKI une lettre de solidarité.
Le jour des manifestations, le Secrétaire général du PDKI, Mustafa Hijri, a promis dans une intervention télévisée publiée sur le site du parti d’«intensifier la résistance». Rappelant que les attaques antérieures contre les Kurdes n’avaient jamais pu mettre fin à celle-ci, il a prévenu qu’il en serait de même cette fois-ci.
Le 22 au matin, des hommes armés ont ouvert le feu lors d’un défilé militaire commémorant le début de la guerre Iran-Irak à Ahvaz, capitale du Khouzistan, principale province pétrolière du pays et majoritairement arabophone, à ce double titre très sensible. L’attaque, qui a fait au moins 25 morts, dont 12 pasdaran, et 60 blessés, a été rapidement revendiquée par Daech ainsi que par un groupe séparatiste, mais l’Iran a accusé «un régime étranger» soutenu par Washington – une allusion à l’Arabie Saoudite.
Enfin, d’autres Kurdes accusés d’activisme ont subi de lourdes condamnations. Le 23, Mohiddin Ibrahimi, arrêté en novembre 2017, a été condamné à mort à Ouroumieh pour «appartenance au PDKI», au terme d’un procès inique tenu en août durant lequel, selon Hengaw, il n’a pas eu accès à un avocat. Ibrahimi, 40 ans, originaire d’un village près de Shno, avait été blessé par balles et arrêté par les forces de sécurité alors qu’il transportait des marchandises comme kolbar. Il avait déjà été emprisonné 14 mois en 2010 sous la même accusation d’appartenance à des partis kurdes d’opposition (UNPO).
Hengaw fait état d’une intensification de la répression contre les activistes kurdes durant ce mois, avec au moins 80 citoyens kurdes arrêtés contre 44 le mois précédent, soit un bond de 82%. C’est la province d’Ouroumieh qui a connu le plus d’arrestations avec 43, suivie par Sine (Sanandaj) avec 36. Selon Hengaw les causes des arrestations sont: 40 pour des activités de défense des droits civiques, 18 pour la défense des droits au travail, 17 pour activisme politique, et 1 pour des raisons religieuses.
Le 22 septembre, les familles, exilées au Canada, de deux prisonniers politiques kurdes mis au secret dans les locaux des Services de renseignement à Sanandaj ont exprimé leur inquiétude pour ceux-ci. En effet, après l’arrestation de Hochmand Alipour et Mohammad Ostad-Ghader le 3 août, la télévision iranienne a diffusé le 8 août deux vidéos les montrant prétendument confesser leur participation à des attaques contre l’armée. Ces aveux probablement obtenus par la menace voire la torture pourraient justifier des exécutions similaires à celles du 8 septembre… (CHRI, Center for Human Rights in Iran).
Hengaw a aussi relevé le 27 la condamnation à mort d’un membre kurde des Gardiens de la Révolution (pasdaran), Arsalan Khodkam, ancien pechmerga qui avait rejoint les pasdaran dans les années 90 après s’être rendu. Khodkam est accusé de coopération avec le PDKI et d’espionnage.
Les manifestations dans le Sud du pays contre le manque de services publics et la corruption se sont intensifiées. Le 2 septembre, près de 200 personnes se sont rassemblées devant l’accès principal du champ pétrolifère de Nahr Bin Omar, d’autres manifestants bloquant un poste-frontière avec l’Iran (Kurdistan 24). Le 4, des sources locales ont fait, état de 5 morts et 16 blessés dans des heurts avec la police. Le 6, l’accès principal du port d’Oum Qasr, le principal point d’entrée maritime de l’Irak, a été bloqué (ISHM-Epic). Le même jour, alors que se tenait la première session du nouveau parlement, le leader de l’alliance Sayrûn, Moqtada Sadr, a littéralement convoqué au Parlement pour le 9 le Premier ministre et le gouverneur de Bassora afin de résoudre les problèmes de la province.
Le soir, les nouvelles concernant la mort de 11 manifestants depuis le début du mois et l’hospitalisation de 6.000 habitants intoxiqués par de l’eau non potable a provoqué une nuit d’émeute. Les manifestants ont incendié des locaux de partis politiques et des édifices gouvernementaux (Kurdistan 24). S’ils n’ont pas réussi à approcher le consulat américain, ils ont incendié le consulat iranien et ont pris brièvement en otage des travailleurs des champs de pétrole (Reuters). Le commandant militaire a décrété le couvre-feu. Suite à ces violences, le leader de l’alliance Fatah a appelé à la démission du premier ministre. Le 8, les opérations au port d’Oum Qasr ont repris, mais le même jour, l’aéroport de Bassora, où se trouve le consulat américain, a été visé par des tirs de roquettes, sans victimes… Le 18, le porte-parole adjoint du Parlement, Hassan Karim al-Kaabi, a présenté un rapport sur la situation de la province, confirmant que 30.000 habitants étaient malades à cause de l’eau trop saline. Le président du Parlement Mohammed Halbousi a assuré que des fonds avaient été débloqués. Mais le 25, un député de Bassora, Rami al-Sakini, a violemment critiqué le gouvernement pour n’avoir encore apporté aucune solution concrète, et le 27, Abadi démettait le commandant militaire de Bassora. Le 28, d’autres roquettes ont visé l’aéroport, toujours sans faire de victimes, et le 30, les États-Unis ont annoncé la fermeture de leur consulat (ISHM).
À Bagdad, les tractations politiques en vue d’installer enfin un nouveau gouvernement se sont intensifiées pour tenter d’aboutir avant le 3, jour où le nouveau Parlement devait élire son Président. Le 1er, une délégation kurde commune PDK-UPK est arrivée à Bagdad et, après une rencontre avec le président sortant Fouad Massoum, a tenu des réunions avec plusieurs listes pour négocier son soutien à un futur gouvernement en échange de réponses à ses demandes. Celles-ci incluent: le retour du budget du Kurdistan aux 17% constitutionnels du budget total, le retour des pechmergas dans les territoires kurdes «disputés» sous juridiction irakienne et la mise en œuvre de l’article 140 de la Constitution, c’est-à-dire un référendum dans ces territoires et notamment Kirkouk. Parallèlement, le leader du PDK, Massoud Barzani, recevait à Erbil une délégation de l’alliance multiconfessionnelle Wataniya, Iyad Allawi et 2 leaders sunnites.
Le 2, Sayrûn (alliance entre partisans de Moqtada Sadr et communistes), Nasr («Victoire») du Premier ministre sortant Abadi et 14 autres groupes politiques ont annoncé la formation du plus grand bloc parlementaire, avec 177 députés de 16 listes différentes, théoriquement capable de former le gouvernement, grâce au ralliement d’une partie de l'Alliance sunnite «Axis». Le même soir, le groupe rival, dirigé par le leader de l’organisation chiite Badr Hadi al-Amiri et l'ancien Premier ministre Nouri al-Maliki, affirmait à son tour avoir formé le plus grand bloc parlementaire, après avoir débauché 21 députés de l'Alliance Abadi, un changement de camp résultant de la brouille récente entre celui-ci et son conseiller à la sécurité, Falih al-Fayyadh, qui avait alors rejoint la liste Amiri. Aucun des deux blocs rivaux n'incluait PDK et UPK.
Affaiblis par leur propre manque d’unité, les Kurdes espéraient que cette rivalité intra-chiite renforcerait leur position dans les négociations. Le bloc PDK-UPK a appelé plusieurs fois les quatre partis kurdes d’opposition à le rejoindre pour former un bloc de 54 sièges, autant que l’alliance Sayrûn. Le parti kurde d’opposition «Nouvelle Génération» a préféré rejoindre la coalition Abadi. Par ailleurs, celui-ci s’est montré intransigeant sur Kirkouk, renvoyant toute discussion sur l’administration de la province à des négociations ultérieures «entre gouvernement central et Région [du Kurdistan]»… Le 3, alors que le nouveau Parlement, ne parvenant pas à élire son Président, s’ajournait au 15 (ISHM), le PDK a annoncé que faute de réponse claire à ses demandes, il ne rejoindrait aucun des 2 blocs chiites, l’UPK prenant le 5 la même position.
Le 13, Sadr comme l’ayatollah Sistani, la plus haute autorité chiite du pays, ont rejeté la candidature d’Abadi au poste de prochain Premier ministre, poussant celui-ci vers la sortie. Abadi a annoncé le soir respecter la décision de Sistani, et l’après-midi, Sadr et Amiri sont parvenus à un accord entre leurs deux alliances (Kurdistan 24). Le 15, le Parlement a réussi à élire comme Président le sunnite Mohammed al-Halbousi.
Cependant, les relations PDK-UPK se sont tendues en fin de mois autour de la question de la Présidence irakienne. Depuis 2003, celle-ci revenait par accord tacite à l’UPK, qui seul présentait un candidat, le PDK assumant la présidence de la Région du Kurdistan. Ce partage a fonctionné jusqu’à la démission le 1er novembre 2017 du Président Massoud Barzani, dont les pouvoirs ont été répartis entre Parlement, GRK et système judiciaire en attendant qu’une décision règle le statut de cette fonction. En effet, les partis kurdes sont en désaccord à ce propos, le PDK défendant une Présidence forte avec élection au suffrage universel, Goran préférant un Parlement fort qui élirait le Président de Région. Enfin, l’élection du Président irakien par le Parlement de Bagdad coïncide avec les législatives kurdes qui, après 2 reports et 11 mois de retard, se tiennent le 30 septembre…
À la recherche d’un «présidentiable», l’UPK s’est tourné vers son ancien responsable Barham Salih, qui l’avait quittée en septembre 2017 pour créer la Coalition pour la Démocratie et a Justice (CDJ). Après plusieurs réunions CDJ-UPK, Salih a accepté de revenir et d’être le candidat de son parti d’origine. De son côté, le PDK, accusant l’UPK d’avoir choisi Salih sans le consulter, a déclaré l’ancien accord caduc, revendiquant la présidence irakienne suite à son bon score aux dernières législatives irakiennes. Aucun des 2 partis n’étant prêt à céder, PDK et UPK ont chacun présenté leur propre candidat: Barham Salih pour l’UPK, et pour le PDK, Fouad Hussein, ancien Directeur de cabinet de Massoud Barzani. Cette rivalité inédite a poussé le parlement irakien à retarder l’élection du Président, originellement prévue le 25, au 2 octobre – après les législatives au Kurdistan. Le 26, le PDK a proposé que les députés des partis kurdes à Bagdad désignent un candidat unique. Si le 29 l’alliance Wataniya a soutenu cette proposition, le candidat UPK l’a rejetée, préférant aller au vote devant l’ensemble du Parlement irakien (Kurdistan 24). Pour obtenir les 210 votes nécessaires, tout candidat devait avoir le soutien des deux blocs chiites. Ceux-ci se sont mis d’accord pour voter pour le même candidat, mais ont refusé de choisir entre les deux candidats kurdes. Lançant un ultimatum au PDK et à l’UPK, ils ont menacé d’élire un candidat de leur choix si ces deux partis ne s’accordaient pas sur un candidat unique…
Dans les territoires disputés entre Kurdistan et gouvernement fédéral repris par les Irakiens en octobre 2017, l’insécurité due à Daech est demeurée forte tout le mois. La nuit du 3, une bombe a explosé dans Khanaqin, heureusement sans faire de victime. L’attaque n’a pas été revendiquée. Après 3 explosions et des enlèvements ces derniers mois, les habitants ne cessent de demander le retour des pechmergas (Rûdaw). Le 4, les Asayish (Sécurité) de Suleimaniyeh ont annoncé avoir démantelé une cellule dormante de Daech comprenant 6 hommes et une femme qui projetaient des attentats. À Kirkouk, les djihadistes ont tué 10 habitants du village de Yaychi, tandis qu’une attaque-suicide tuait 2 policiers dans le district d’Abasi. Le 9, les djihadistes ont enlevé 6 Kurdes qui pique-niquaient au sud de Kalar et en ont décapité 4, les 2 derniers parvenant à s’enfuir (WKI); d’autres djihadistes ont détruit un oléoduc reliant Kirkouk à Dubiz, et une bombe a fait une victime la même nuit dans la région de Halabja (Rûdaw). Le 13, des djihadistes ont attaqué un centre de santé près de Daqouq (Kirkouk), volant médicaments et équipement médical et enlevant 2 hommes dont un ambulancier. Le 17 au matin, Daech a attaqué un village arabe chiite de Khanaqin, Qaya. Échangeant des tirs avec la police durant 30 mn, les assaillants ont incendié 3 maisons et 3 véhicules et blessé 7 personnes, dont 2 femmes et 3 enfants. La nuit du 23, des frappes aériennes irakiennes près de Jalawla ont tué au moins 8 djihadistes, auteurs présumés de cette attaque… Une autre opération la même nuit a tué 2 djihadistes près du Mont Hamrin (Rûdaw).
À côté de l’insécurité djihadiste, que les forces de sécurité irakiennes semblent incapables de maîtriser, les résidents de ces territoires souffrent aussi d’un manque de services publics similaire à ce qui a causé l’instabilité à Bassora: le 6, les habitants de Kirkouk ont protesté contre la pénurie d’eau potable due aux fréquentes coupures d’électricité. Dans certains quartiers, où l’eau est coupée depuis 3 semaines (Rûdaw), les habitants achètent à prix d’or à des camions-citernes une eau parfois saumâtre au point d’être toxique… D’autres préoccupations incluent la poursuite de la politique d’arabisation et la brutalité des forces de sécurité irakiennes, particulièrement envers les Kurdes. Le 12, le leader du bloc Brayetî («Fraternité») au Conseil provincial de Kirkouk, Mohammed Kamal, a accusé sur le site du PDK la police fédérale et les milices Hashd al-Shaabi d’avoir arrêté à Daqouq et torturé la semaine précédente une quinzaine de pechmergas kurdes du PDK et de l’UPK et de civils arabes, forcés de confesser des crimes imaginaires (Kurdistan 24). Le 19, malgré les dénégations de la police, le ministre de l’Intérieur Qassim al-Araji a annoncé l’ouverture d’une enquête (ISHM). Les plaintes continuent aussi à viser le gouverneur intérimaire de la province, Rakan al-Jabouri, qui poursuit le remplacement de responsables kurdes par des Arabes, arguant qu’il s’agit de donner à la province une répartition «égalitaire», «32% des postes à chaque communauté et le reste aux Chrétiens». Les partis kurdes ont rejeté l’argument et exigé une répartition reflétant les derniers résultats électoraux: UPK 6 sièges, Arabes et Turkmènes 3 sièges chacun (le PDK avait boycotté les législatives, considérant la province comme «occupée») (Kurdistan 24).
Le Conseil provincial ne s’est pas réuni depuis octobre 2017, mais la situation pourrait évoluer car, le 11, ses membres kurdes se sont rencontrés dans les locaux du Parti communiste, au quartier de Qara Hanjir, pour discuter la reprise de ses activités, et pour la première fois, ses membres PDK ont participé à la réunion. D’autres réunions se tiendront régulièrement pour défendre la population kurde de la province dans les prochaines élections provinciales et un communiqué commun a déclaré que si les partis kurdes croient en la coexistence pacifique des groupes ethniques à Kirkouk, les Kurdes, la principale composante de la province, «ne se laisseront pas marginaliser en termes de gouvernance civile et militaire». Il a aussi été question d’une liste kurde commune pour les élections provinciales du 22 décembre, les premières depuis 13 ans en raison des tensions interethniques… L’élection d’un nouveau gouverneur remplaçant Jabouri, nommé par Abadi après le limogeage de Najmaddine Karim, relève constitutionnellement du Conseil provincial…
Parmi les dernières décisions du gouverneur intérimaire, l’installation de trois postes de douane devant collecter des taxes sur les routes Erbil-Kirkouk et Sulaimaniyeh-Kirkouk a été qualifiée d’illégale par le Conseil provincial, qui a déclaré ne pas avoir été consulté. Le 30, suite à la réouverture de l’aéroport, le vol inaugural Bagdad-Kirkouk a amené sur un avion Iraqi Airways le gouverneur intérimaire accompagné du Ministre irakien des Transports et d’autres officiels irakiens…
Concernant les décisions douanières, enfin, le 24, la Turquie et le Kurdistan ont finalisé leur accord de 2014 par lequel un 3e point de passage, Zete, sera prochainement ouvert près de Mergasor. L’ouverture avait été suspendue par l’émergence de Daech. Ceci n’a pas empêché la Turquie de prolonger le même jour de 3 nouveaux mois son interdiction des vols à destination de l’aéroport de Suleimaniyeh, dont le directeur, Tahir Abdullah, a indiqué: «Bagdad n'a rien fait pour aider les vols vers la Région à reprendre» (Kurdistan 24).
Le Kurdistan a entamé en début de mois la préparation de ses élections législatives, qui se tenaient au 30. Le 2, Barham Salih, alors encore à la tête de la CDJ, a annoncé que celle-ci n’y participerait pas, contestant la validité de la liste électorale (après le retour de Salih à l’UPK, certains membres de la CDJ ont annoncé leur participation) (Kurdistan 24). Le 5, la Commission électorale a décidé de retarder le début de la campagne du 5 au 11, car certains partis, comme Goran, contestant aussi la liste électorale, demandaient un report – même si le Premier ministre du Gouvernement régional du Kurdistan (GRK), Nechirvan Barzani (PDK), a indiqué qu’aucune demande officielle de report n’avait été faite.
La campagne électorale, commencée le 11 à minuit, a impliqué 673 candidats et 29 partis pour 111 sièges, dont 30 réservés à des femmes et 11 aux minorités (Turkmènes 5, chrétiens 5, Arméniens 1). Le parlement actuel (et le gouvernement actuel) sont dominés par le PDK (38 sièges), suivi de Goran (opposition, 24 sièges) puis de l’UPK (18 sièges, aussi au gouvernement). Suivent l’Union islamique (Yekgirtû) 10 sièges, et la Jamaa Islamiya 6. L’UPK espère reprendre la 2e place, perdue en 2013 au profit de Goran, né d’une scission UPK.
La Commission électorale a annoncé le 21 que les 2.500 prisonniers admis au vote (ceux condamnés à moins de 5 ans) et les employés du ministère de la Santé ne pourraient voter, les ministères concernés ayant transmis leurs listes trop tard, ainsi que les résidents à l’étranger, par manque de fonds pour l’organisation du scrutin. Le 27, le Bureau des Droits de l’homme a indiqué qu’il déposerait plainte contre la Commission pour cette «privation de droits». Le 28, les forces de sécurité (170.000 membres) ont voté en avance, avec un taux de participation très élevé: Dohouk 93%, Erbil 92%, Sulaimaniyeh 89%, et pour la nouvelle province d’Halabja 93% (Rûdaw). Selon Kurdistan 24, le PDK a obtenu environ 50% des voix: PDK 79.764 votes; UPK 56.887; Goran 10.543, autres partis environ 16.000 (chiffres non-officiels).
Le 30, le scrutin principal, dont les résultats définitifs ne seront connus qu’en octobre, s’est déroulé dans le calme, malgré quelques incidents isolés (des personnes armées ont tenté de voter sans les documents requis). La participation a été de 61% à Dohouk, 58% à Erbil et 53% à Souleimaniyeh. Il faut saluer cet événement qui, dans le contexte de violence prévalant en ce moment au Moyen-Orient, et alors que les désaccords entre les différents partis kurdes sont importants, constitue une réelle victoire pour la démocratie.
Depuis 1995, les «Mères du samedi» d’Istanbul manifestent, comme les «Mères de la Place de Mai» en Argentine pour exiger la vérité sur le sort de leurs proches disparus dans les années 1980 et 1990. Ces «disparus» ont été le plus souvent victimes d’exécutions extra-judiciaires de l’appareil d’État, au plus fort de sa lutte contre la guérilla du PKK… Aucune enquête sérieuse n’a jamais été menée sur ces affaires. Les «mères» se rassemblent chaque samedi devant l’université francophone de Galatasaray avec des photos de leurs proches. Mais le samedi 25 août, la police les a brutalement dispersées à coups de canons à eau et de grenades lacrymogènes et a interpelé 50 personnes, dont l’une des initiatrices du mouvement, Emine Ocak, 82 ans… Le 1er septembre, la manifestation suivante a aussi été de fait interdite, la police ayant érigé des barricades place Galatasaray et sur l'avenue Istiklal. Prétexte: l'évènement était «exploité par des groupes terroristes» proches du PKK (AFP). 300 personnes, dont des députés du parti «pro-kurde» HDP et du CHP (opposition kémaliste) ont bravé les policiers pour lire une déclaration critiquant l’interdiction. Dans la Turquie de M. Erdoğan, toute opposition doit être réduite au silence…
Le 3, la police d’Ankara a empêché des députés HDP de déposer une couronne mortuaire devant l’ambassade d’Iran pour protester contre l’exécution imminente du prisonnier politique kurde Ramin Panahi. La députée HDP d’Ankara Filiz Kerestecioğlu a été brutalisée, des banderoles arrachées, et 4 personnes arrêtées. Comme l’a fait remarquer Kerestecioğlu, malgré leurs divergences politiques, Turquie et Iran s’entendent sur un point: réprimer les Kurdes (Kurdistan 24). Le 5, cinq étudiants de l’université d’Amasya ont été inculpés pour «légitimation ou encouragement de méthodes violentes d’organisations terroristes». Ils avaient partagé des chansons kurdes, des tweets de l’ancien coprésident du HDP Selahettin Demirtaş ou des pages Facebook de magazines d’opposition comme Özgür Gündem… Ils passeront en jugement en novembre. Le 11, la police a arrêté 11 personnes dans la province d’Izmir, dont un cadre du HDP, et a incarcéré les coprésidents du HDP de la province du Hatay après avoir mené des raids à leurs domiciles d’Iskenderun.
La répression a aussi visé tous ceux qui protestent contre les injustices sociales dont se rend coupable l’État ou osent critiquer les projets pharaoniques du président turc, comme le nouvel aéroport d’Istanbul. Le 21, les ouvriers du chantier se sont rassemblés sur le site par milliers pour dénoncer leurs conditions de travail (38 morts dans des accidents du travail qui selon Human Rights Watch «auraient pu être évités») et le non-paiement de leurs salaires depuis des mois, scandant «Les ouvriers ne sont pas des esclaves». La police les a attaqués au gaz lacrymogène et matraqués, et a incarcéré 400 d’entre eux quatre jours. 43 des ouvriers incarcérés, majoritairement des Kurdes, ont été inculpés entre autres de «destruction de propriété publique» et de «résistance à la police». La police a aussi empêché des membres du HDP venus soutenir les travailleurs d’accéder à la manifestation. Le 29, le HDP a présenté dans une conférence de presse son rapport sur ce chantier, qui confirme les morts et pointe les conditions de travail inacceptables, ainsi que son impact environnemental désastreux (Ahval).
Le site Ahval, créé par des journalistes turcs exilés, a attiré l’attention le 4 sur les méthodes de la police de Nusaybin, qui n’hésite pas à placer des documents compromettants de sa propre fabrication dans les bagages des personnes visées. C’est ainsi qu’a été arrêtée en janvier dernier Sara Kaya, la maire de la ville, ce qui a permis au gouvernement de placer la mairie sous le contrôle d’un administrateur pro-AKP. L’officier qui a «découvert» les preuves (une lettre au commandant local du PKK de plus d’un an mais semblant bizarrement avoir été imprimée la veille…) a depuis été arrêté pour fabrication de fausses preuves, extorsion et torture, mais Kaya n’a pas été libérée.
C’est aussi le 4 que s’est tenue dans la prison de Silivri, près d’Istanbul une nouvelle audience d’une des 34 affaires opposant l’État turc à l’ancien coprésident du HDP Selahattin Demirtaş, détenu depuis novembre 2016 et contre lequel 102 enquêtes différentes sont en cours. Cette fois il s’agissait de l’accusation de «direction d’une organisation terroriste». Demirtaş s’exprimait depuis sa cellule d’Edirne par le système vidéoconférence SEGBIS, connu pour sa mauvaise qualité, mais son co-accusé Sirri Süreyya Önder était physiquement présent. Demirtaş et Önder, poursuivis pour leurs discours du Newrouz 2013, ont été condamnés respectivement à 4 ans et 8 mois et 3 ans et 6 mois de prison, «parce qu’ils ont défendu la paix», a déclaré le HDP sur Twitter (AFP). L’observatrice internationale Margaret Owen a témoigné des graves irrégularités dénoncées par les avocats de la défense, comme la non-lecture des charges à l’audience, privant ainsi les accusés de la possibilité de les réfuter. Par ailleurs, alors que le juge et le procureur originels de l’affaire sont maintenant eux-mêmes emprisonnés pour complicité avec le coup d’État de juillet 2016, les accusations se basent sur une transcription volontairement erronée des propos incriminés, qui transforment des plaidoyers pour la reprise du processus de paix en appel à la violence! Demirtaş a indiqué n’avoir reçu les «preuves» contre lui que deux jours avant l’audience, afin de l’empêcher de préparer sa défense. Mais depuis sa cellule, Demirtaş, montrant article de journal après article de journal reproduisant ses vraies paroles, comme Önder, montrant en pleine audience sur son ordinateur portable les vidéos des vrais discours de Demirtaş, obtenues de Haber TV, ont démontré la fausseté des accusations et surtout des transcriptions faites par la police. La Cour a pourtant conclu par un scandaleux verdict de culpabilité, qui fait honte à la justice turque. Pour une peine inférieure à 5 ans, aucun appel n’est possible devant la Cour constitutionnelle… Le HDP a publié un communiqué dénonçant un verdict politique, rappelant que les activités reprochées aux accusés avaient été menées dans le cadre du processus de paix initié par le gouvernement lui-même. Annexé au communiqué, le vrai texte du discours de Demirtaş pour Newrouz 2013.
Le 10, six personnes ont été condamnées à la prison à vie pour l’attentat-suicide à la voiture piégée contre un convoi militaire, revendiqué par les «Faucons de la liberté du Kurdistan» (TAK), qui avait fait 29 morts le 17 février 2016 à Ankara. 68 accusés étaient jugés dans le cadre de ce procès, et 50 autres doivent passer en jugement séparément (AFP).
La répression vise toujours aussi les médias, journalistes comme éditeurs. Le 12, Ragip Zarakolu, le responsable de la maison d’édition turque Belge, exilé en Suède depuis 2013, a été visé par un mandat d’arrêt international pour un discours qu’il avait prononcé en 2011 lors d'un congrès du BDP (Barış ve Demokrasi Partisi, Parti de la paix et de la démocratie, branche régionale du HDP). Le même jour, trois nouveaux livres de la maison d’édition Avesta ont été interdits pour «incitation à la haine»: les traductions en turc de Chris Kutschera, Le mouvement national kurde, A-R. Ghassemlou, Les Kurdes et le Kurdistan, et Celîlê Celîl, Vostaniyé Kurdov 1880 goda (La révolte des Kurdes en 1880). Ces interdictions succèdent à 10 autres cette année, incluant une Histoire des Kurdes d’époque soviétique ou encore un ouvrage sur le génocide anti-kurde de l’Anfal en Irak… (SCF)
Toujours le 12, un tribunal d’Istanbul a décidé le maintien en détention jusqu’à leur procès de 5 journalistes d’Özgürlükçü Demokrasi, fermé par décret le 8 juillet dernier, et, malgré l’avis contraire du procureur, la libération sous contrôle judiciaire de leur collègue Pinar Tarlak. 8 autres employés du titre comparaitront libres à la prochaine audience le 6 décembre. Les 14 professionnels des médias sont tous accusés d’«appartenance à une organisation terroriste». Des députés HDP et des membres de l’Union des journalistes turcs (TGS) et du syndicat DISK, ainsi que des journalistes de Mesopotamya et JINNEWS se sont rassemblés devant le tribunal en solidarité.
Le 18, un tribunal a ordonné la libération du journaliste Metin Duran, de Nusaybin, pour raison de santé. Duran avait travaillé pour la station Radyo Rengîn, fermée par décret après la tentative de coup d’État. Placé en soins intensifs après une attaque cardiaque, il avait été condamné à 3 ans 3 mois et 15 jours de prison. Arrêté en convalescence dans sa famille, sa maison ayant été détruite durant le couvre-feu, il avait été envoyé purger sa peine à Ankara… Selon l'Association des droits de l'homme turque (İHD), au 2 mars 2018, 1.154 prisonniers étaient malades dont 401 dans un état critique (SCF).
Le 19, les propriétaires et le rédacteur en chef de Hayatin Sesi, une chaîne de télévision de gauche très critique envers Erdoğan, fermée après la tentative de coup d’État, ont été condamnés à 3 ans et 9 mois de prison, selon Erol Önderoglu, représentant en Turquie de Reporters Sans Frontières. Mustafa Kara, Ismail Gökhan Bayram et Gökhan Cetin sont accusés de «propagande terroriste» pour le PKK et Daech… (AFP).
Plusieurs étrangers ont également été arrêtés ou inculpés ce mois-ci, notamment deux Autrichiens d’origine turque ou kurde: un candidat HDP aux élections de juin 2015, et une mère de 3 enfants, tous deux accusés de propagande pro-PKK (SCF). Le 9, la police a incarcéré pour «terrorisme» le journaliste autrichien Max Zirngast après un raid matinal sur son appartement d’Ankara. Travaillant pour deux journaux de gauche, Re:volt (Autriche) et Jacobin (USA) et ayant le tort de s’intéresser aux Kurdes, Zirngast a le douteux privilège d’être le premier Autrichien arrêté sans être d’origine kurde ou turque… L’arrestation a été condamnée par ses employeurs comme par le gouvernement autrichien, Reporters sans frontières et l’OSCE, dont la Turquie est membre (Kurdistan 24). Elle pourrait être liée à l’expulsion récente d’imams du Diyanet turc par l’Autriche… Le 14, l’agence de presse privée DHA a annoncé qu’un ancien soldat britannique d’Afghanistan, Joe Robinson, arrêté en juillet 2017 durant ses vacances à Aydın, avait été condamné à sept ans et demi de prison pour «appartenance à une organisation terroriste». Venu en Syrie en 2015 pour travailler au service médical des YPG, il avait publié des photos le montrant en tenue de camouflage avec leurs combattants. Robinson a fait appel et le Foreign Office britannique s’est déclaré prêt à l’assister (AFP). Le 24, la chanteuse germano-kurde Hozan Cane, emprisonnée depuis fin juin en Turquie, où elle s’était rendue pour chanter à des meetings du HDP, a écrit à la chancelière allemande pour lui demander de soulever sa situation avec le Président turc durant la visite de celui-ci. Exilée à Cologne depuis les années 90, Cane est accusée d’appartenir au PKK suite à ses «posts» sur les réseaux sociaux (Kurdistan 24).
Le 4, les juges de la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) ont invité à l’unanimité la Turquie à modifier l’article de son Code pénal punissant le dénigrement de l'État ou de ses institutions. C’est à l’occasion de la condamnation d’Ankara pour violation du droit à la liberté d'expression de l’éditeur Fatih Tas que la CEDH a pris cette position, accordant aussi à Tas 2.500 euros en réparation de son préjudice moral. L’éditeur avait été poursuivi en 2004 pour avoir publié un livre où il accusait les forces de contre-guérilla d’avoir fait «disparaître» un journaliste. Parmi les 47 États membres du Conseil de l'Europe, la Turquie était en 2017 le plus condamné pour entrave à la liberté d'expression, avec 16 condamnations sur un total de 44 (Reuters).
Le 14, le maire de Villeurbanne, Jean-Paul Bret, a organisé une cérémonie de parrainage d’élus kurdes emprisonnés en Turquie, au cours de laquelle il a rencontré le représentant du HDP en Europe, Eyyup Doru, ainsi que Thierry Lamberthod, président d’Amitiés kurdes Lyon (Viva, Villeurbanne).
Enfin, 10 jours avant la visite controversée du Président turc en Allemagne, prévue du 27 au 29, une polémique a démarré entre les autorités et la communauté kurde à propos des manifestations que celle-ci souhaite organiser pour dénoncer cette venue. En effet, un rassemblement le 29 devant la Porte de Brandebourg à Berlin a été interdit. Accusée de soutenir Erdoğan, la police a répondu que l’interdiction était due à la construction en cours de tribunes pour la Fête nationale allemande qui se tiendra le 3 octobre. Finalement la communauté kurde a décidé d’un défilé pour le 28. Le Président turc est arrivé en Allemagne le 27 avec certains de ses gardes du corps connus depuis Washington en mai 2017 pour leur brutalité envers des manifestants pacifiques, dont certains s’étaient vus interdire l’entrée en Allemagne pour le G20 de 2017 (Rojinfo). Le 28 s’est tenue une manifestation rassemblant des milliers de participants, organisée par le Collectif «Erdogan Not Welcome», et le soir, le dîner d’État organisé à Berlin en son honneur par son homologue allemand, Frank-Walter Steinmeyer, a été boudé par une partie de la classe politique allemande, jugeant excessive cette visite d’État avec les honneurs qui y sont attachés. Mme Merkel n’y a pas non plus assisté. Le 29, le Président turc a inauguré à Cologne la plus grande mosquée d’Europe, financée par l'Union des affaires turco-islamiques (Ditib), étroitement liée au pouvoir turc. Comme le banquet de Berlin, l'inauguration a été boudée par une partie des dirigeants politiques du Land (Etat régional).
Les opérations militaires turques se sont poursuivies dans les régions kurdes du pays comme au Kurdistan d’Irak voisin. Fin août, les militaires ont interdit l’entrée du Dersim à une délégation HDP venue examiner les incendies de forêt qui durent depuis des semaines… Le 3, l’armée a imposé des couvre-feux sur plusieurs villages du district de Lice (Diyarbakir) tandis que des hélicoptères bombardaient celui de Hazro (WKI). Le 12, des couvre-feux illimités ont été imposés sur au moins 116 villages et hameaux kurdes de Diyarbakir en raison de la préparation d’une offensive contre le PKK, notamment à Lice, Hazro, Kulp, Silvan and Kocaköy. Le 17, le gouverneur de Siirt a annoncé un couvre-feu sur 5 villages, qui a été levé le 19 au matin. L’armée a en parallèle lancé une opération près du Mont Cudî (Şırnak), provoquant là aussi selon plusieurs témoignages des incendies de forêt.
Au Kurdistan d’Irak, des avions de chasse turcs ont bombardé le 9 pour la 3e fois en une semaine la région d’Amêdî, provoquant d’autres incendies (Rûdaw). Le 16, l’armée a annoncé avoir «neutralisé» un cadre du PKK, Murat Akdoğan (pseudonyme Ali Gever) dans une frappe aérienne menée le 14 sur Avasin-Basyan. Enfin, le 30, un communiqué de l’état-major a annoncé la neutralisation de 6 combattants PKK à Gara et de 8 autres à Avasin-Basyan et Metina, ainsi que la mort d’un soldat et 4 blessés par l’explosion d’une bombe artisanale.
Le 19, l’organisation de défense des Droits de l’homme Human Rights Watch (HRW) a dans un rapport lancé un avertissement à la Turquie concernant ses raids aériens sur le Kurdistan d’Irak. Examinant 4 opérations différentes menées entre mai 2017 et juin 29018, HRW a indiqué que les morts civils (au moins 6) qu’elles avaient causés étaient injustifiables en l’absence de cibles militaires légitimes, et que la Turquie avait probablement enfreint le droit international en n’avertissant pas préalablement les autorités locales. HRW a appelé la Turquie à mener une enquête et à verser une compensation aux familles (Rûdaw).
Toujours en butte à la résistance de la population et aux actions de guérilla des YPG auxquelles ils semblent incapables de mettre fin, les Turcs et leurs alliés djihadistes à Afrîn poursuivent leurs exactions. Le 15 l’Observatoire Syrien des Droits de l’Homme (OSDH) a publié un rapport (->) qui en brosse un tableau effrayant, avec des enlèvements contre rançon, l’interdiction pour les agriculteurs de travailler sur leurs terres, l’empêchement de rentrer chez eux des personnes déplacées, l’extorsion de droits au passage de points de contrôle… Un second rapport daté du 24 (->) poursuit la description des exactions, mentionnant par exemple la mort sous la torture d’un homme âgé, insistant sur le fait que ces actes sont accomplis dans l’indifférence totale des forces d’occupation turques, pourtant responsables de la sécurité des civils, mais qui ne font rien pour contrôler leurs supplétifs. L’OSDH «a documenté l’arrestation de plus de 2.300 citoyens dont plus de 800 se trouvent toujours en détention, les autres ayant été relâchés après que la plupart ont payé la rançon imposée par les membres de l’opération «Rameau d’olivier», se montant parfois à plus de 10 millions de livres syriennes; le nombre de victimes a augmenté au cours des six derniers mois, atteignant 364 civils, dont 55 enfants et 36 femmes, et des dizaines de civils morts dans des explosions de mines ou sous la torture par les factions de «Rameau d’olivier» […]». Se poursuivent également les pillages des biens et les destructions dans les plantations d’oliviers, dont 75% ont été saisies par les milices occupantes qui prétendent maintenant en recevoir des loyers où y faire travailler pour eux des journaliers! Les djihadistes contrôlent aussi la majorité des savonneries, et les «Conseils locaux» qu’ils ont créés à leurs ordres doivent organiser la récolte et le pressage. Bien loin de tout engagement politique (et encore plus des idéaux révolutionnaires syriens…), on est là dans le banditisme pur et simple de la part de ces mercenaires au service de la Turquie.
Dans la ville même d’Afrîn, tandis que des combats éclataient entre factions rivales Ahrar al-Sharqiyah et «Rameau d’Olivier», toutes deux soutenues par la Turquie (WKI), l’explosion d’un véhicule, non revendiquée, a fait des victimes civiles. Les YPG se sont désolidarisés de ce type d’actions, ainsi que de faits de torture contre les civils, dont ils accusent des groupes, voire les services de renseignements turcs, qui cherchent à les discréditer auprès de la population.
Le 3 au soir, les YPG ont attaqué à 1 km de la ville un point de contrôle tenu par le Front al-Shamiya et tendu une embuscade contre des combattants de la même organisation au sud d’Afrîn, tuant au total 6 hommes et un commandant. Ils ont revendiqué pour l’ensemble du mois d’août l’élimination de 50 combattants ennemis dont 2 commandants, plus 7 soldats turcs, dans 18 opérations différentes. De son côté, l’Observatoire syrien des Droits de l’homme (OSDH) a donné une évaluation de 112 rebelles et soldats tués depuis mars (Kurdistan 24). Le 9, les YPG ont revendiqué la mort de 2 autres combattants dans des embuscades, le 7 un membre des brigades al-Hamza, et le lendemain de Ahrar al-Sharqiyah (al-Masdar News / AMN). Causée par les attaques des YPG comme par leurs propres dissensions, la dégradation de la sécurité pour les occupants est telle que ceux-ci ont décidé le 11 au soir d’imposer un couvre-feu sur la ville jusqu’au jour. Malgré un niveau d’alerte élevé, une dizaine de combattants supplémentaires ont été tués dans des attaques entre le 11 et le 17 (AMN), et le 25, les YPG ont de nouveau annoncé avoir infligé des pertes aux occupants: 7 morts du 19 au 21, dans 3 embuscades distinctes, dont l’une a permis de détruire un char T-55 de la Légion al-Sham dans le district de Jandaris.
Le 18, trois civils de Tell Rifaat, tenue par le PYD, à 10 km à l’est d’Afrîn et au sud d’Azaz, ont été blessés dans une attaque au mortier des djihadistes sur la ville, que la Turquie menace toujours d’occuper. Mais les menaces turques concernent en fait l’ensemble du Rojava: le 4, le ministre turc de la Défense, Hulusi Akar, a déclaré au Représentant spécial américain, l’ambassadeur James Jeffrey, que la Turquie voulait que les milices kurdes quittent la zone frontalière… Les Turcs souhaitent notamment entrer dans Manbij, mais les Américains ont réitéré le 10 que la «feuille de route» turco-américaine conclue en juin dernier ne le prévoyait pas. M. Erdoğan accuse à demi-mot les Américains de gagner du temps et de ne pas respecter leur engagement de faire quitter la ville aux «terroristes». Par ailleurs, Manbij ne cesse d’être visée par des attentats. Le 1er septembre, une bombe a blessé deux habitants, le 12, une autre explosion a tué un enfant, et le 14, une autre encore a blessé au moins 6 civils et endommagé l’hôpital local (Kurdistan 24). Si les observateurs envisagent la possibilité de cellules dormantes de Daech (comme celle démantelée par les FDS à Raqqa en milieu de mois), ils remarquent également que Damas comme la Turquie ont tous deux intérêt à déstabiliser la ville, et on connait les liens de ce dernier pays avec les mouvements djihadistes syriens… Le 24, arrivant à New York pour participer à l’Assemblée générale des Nations-Unies, le Président turc a d’ailleurs renouvelé ses menaces d’une nouvelle opération turque dans le Nord syrien. Le 27 au matin, des membres des FDS et des miliciens de l’«Armée syrienne libre» soutenue par la Turquie ont échangé des tirs nourris dans une ville située au Nord de Manbij (AMN). Le 28, le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlüt Çavuşoğlu, a publié dans le Washington Post une tribune intitulée «Les États-Unis doivent arrêter d'armer les terroristes en Syrie».
Avec le soutien aérien et d’artillerie de la coalition internationale, les FDS ont lancé le 10 la phase finale de l’opération Roundup, l’assaut contre la dernière poche tenue par Daech dans la province de Deir Ezzor sur la rive Est de l’Euphrate, tout près de la frontière irakienne. Il s’agit de prendre la ville de Hajin, fortifiée par les 3.000 djihadistes, majoritairement étrangers, qui y sont retranchés, ainsi que sa voisine al-Shaafa. Les combats ont été très violents, selon l’OSDH, qui rapporte la mort de 17 djihadistes. Le lendemain, tandis que l’AFP faisait état d’au moins 27 morts djihadistes et 10 FDS à Hajin, au Sud-Est de Damas, dans la région majoritairement druze de Soueida, 21 soldats du régime étaient tués dans une embuscade de Daech. Le 14, le bilan à Hajin s’établissait à 46 djihadistes et 15 FDS tués, toujours selon l’OSDH, avant qu’une embuscade des djihadistes dans une tempête de sable ne tue au moins 20 combattants des FDS (AFP). Puis le 18, les SDF ont annoncé, après une nuit de combats, la prise du pont sur l’Euphrate en aval de Hajin, entre Baghouz, sur la frontière irakienne, et Abou-Kamal. Les FDS ont finalement pris cette dernière ville, libérant deux Yézidis, avant le 20 de prendre Baghouz où elles ont saisi de nombreuses armes légères, et d’annoncer l’élimination de 31 djihadistes. Le 26, Daech a lancé une contre-attaque sur Baghouz avec des commandos-suicide et des bombes artisanales (AMN). Le 30, les FDS ont annoncé avoir tué 49 djihadistes et poursuivre leur remontée vers Hajin le long de l’Euphrate…
Les discussions avec Damas du Conseil démocratique syrien (CDS, émanation politique des FDS et institution élue de la Fédération du Nord Syrien) se sont poursuivies, le CDS s’opposant surtout au «décret 107» pris par le Président syrien en 2011 (après le début des manifestations), qui renforce le pouvoir du gouvernement central sur les provinces syriennes (VOA). Dans la même ligne, le ministre de la «Réconciliation», Ali Haydar, a déclaré le 4 que les régions à majorité kurde ne bénéficieraient d’aucun traitement particulier pour réintégrer la Syrie, et que «les groupes kurdes liés à l’Amérique devaient à présent s’en détourner» (Reuters). Le coprésident du CDS, Riad Darar, a déclaré à VOA que les discussions n’avaient encore guère avancé, mais que les deux parties s’étaient accordées pour établir des comités conjoints devant superviser le redémarrage des services publics dans les zones sous le contrôle du CDS – sur le modèle de l’accord passé en juillet sur la gestion du barrage de Tabqa. Le 8, des affrontements entre forces du régime syrien et Asayish (police kurde) ont éclaté à Qamichli et fait 11 morts et 2 blessés parmi les premières et 7 morts chez les seconds (OSDH). Les explications divergent sur le déroulement des faits, les miliciens du régime auraient refusé de descendre de leur véhicule à un point de contrôle des Asayish qui auraient alors ouvert le feu, ou bien auraient tenté d’appréhender des civils en zone tenue par les Kurdes. L’agence syrienne officielle SANA a dénoncé une «embuscade», alors que les Asayish ont accusé les soldats d’avoir ouvert le feu…. Le CDS a dès le 9 exprimé ses «regrets», dénonçant l’incident comme une tentative pour saboter les discussions en cours. Sa responsable, Ilham Ahmed, a réaffirmé sa volonté d’arriver à une résolution pacifique, mais a averti que le CDS ne capitulerait pas après les sacrifices faits pour établir la Fédération. Après que le Gouverneur de Hassaké ait le 11 menacé d’une attaque militaire, le porte-parole des YPG, Nouri Mahmoud, appelant au calme de part et d’autre, a officiellement le 14 annoncé l’ouverture d’une enquête sur ce «malheureux incident». Le 30, le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Muallem, a attribué, dans une interview à Russia Today donnée en marge de l’Assemblée générale des Nations-Unies, l’absence de progrès des discussions avec le CDS au «facteur américain».
Au chapitre des relations entre la Fédération du Nord Syrien et le régime de Damas, il faut ajouter les élections municipales organisées le dimanche 16 par le régime dans les régions qu’il contrôle et qui concernent 18.500 sièges. La plupart des 40.000 candidats appartiennent au parti Ba’ath et à ses alliés, mais on trouve aussi des milliers d’indépendants et quelques dizaines de membres de l’opposition tolérée par le régime (RFI). Boycotté par l’opposition armée, ce scrutin l’a aussi été par la Fédération, qui n’a pas autorisé leur organisation sur les territoires qu’elle contrôle. Mais il a eu lieu dans les zones où le contrôle est partagé, comme justement Hassaké et Qamichli. Ces élections ont pris place alors que les forces pro-gouvernementales, après des bombardements intensifs de la région, se concentraient autour d’Idlib, dernière zone encore tenue par les rebelles…
Enfin, à l’intérieur de la Fédération du Nord Syrien, les autorités se sont trouvées confrontées à la grogne d’une partie des chrétiens syriaques qui, paradoxalement, s’opposent au changement du programme d’enseignement de leurs écoles qui donnent plus d’importance à leur langue maternelle. L’enjeu était la reconnaissance internationale des cursus, au nom de laquelle certains syriaques ont exigé le respect du programme scolaire de Damas, basé sur l’arabe (et la propagande nationaliste). D’autres chrétiens ont au contraire bien accueilli le fait que l’histoire, la géographie ou les maths soient maintenant enseignées en syriaque… En fin de mois, les discussions se poursuivaient entre les deux camps.