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Liste
NO: 133 |
13/5/1999 SEPT ÉTUDIANTS KURDES D'IRAN ONT ÉTÉ EXÉCUTÉS PAR LES SOLDATS TURCSSept kurdes iraniens originaires du village de Zargheh situé près de la frontière turque et âgés entre 13 et 25 ans, ont été arrêtés le 6 mai 1999 par les forces de sécurité turques et exécutés sur le champ. Les victimes, tous étudiants en vacances scolaires, s'étaient rendues dans le village Katuna en Turquie, pour le commerce ainsi que pour rendre visite à une partie de leurs familles dans ce village. Près de 5 000 personnes de la région de au Kurdistan iranien Margavar ont participé à l'enterrement le 8 mai 1999. Ils ont demandé aux autorités iraniennes de mettre tout en uvre pour éclaircir cette affaire et punir les auteurs du crime. LE DANEMARK PORTE PLAINTE CONTRE LA TURQUIE POUR PRATIQUE DE LA TORTUREBien qu'accoutumée aux bancs des accusés à la Cour européenne des droits de l'homme, la Turquie sera pour la seconde fois traduite devant cette juridiction à la demande d'un Etat - la première demande émanant des autorités chypriotes. Le Danemark a en effet décidé de saisir la juridiction européenne en accusant la Turquie d'avoir torturé Kemal Koç un de ses ressortissants d'origine kurde. Au cours d'un voyage en Turquie en 1996, ce dernier avait été torturé par les autorités l'accusant d'être un membre du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK). De retour au Danemark, le Centre de Recherche et de Réhabilitation pour les Victimes de la Torture a effectivement confirmé dans un rapport les accusations de M. Koç. Interpellée sur la question par les autorités danoises, la Turquie a tout simplement nié les faits allégués. C'est alors que le Danemark a saisi la Cour européenne en janvier 1997. Evénement rarissime puisque non seulement c'est à l'appui d'un cas individuel qu'un Etat réagit en saisissant la Cour mais aussi invoque la pratique courante et systématique de la torture en Turquie et pas seulement le cas individuel limité à l'affaire Kemal Koç Pour sa défense, Ankara ne peut qu'invoquer des vices de procédure, telles que le non épuisement de la procédure interne en Turquie. INQUIET DU DÉROULEMENT DU PROCÈS D'ABDULLAH OCALAN, LE PARLEMENT EUROPÉEN A APPELÉ LA TURQUIE À " GARANTIR " LA SÉCURITÉ DE SES AVOCATSLe Parlement européen a adopté, le 6 mai 1999, une résolution sur le procès d'Abdullah Ocalan et " le traitement futur de la question kurde en Turquie ". Inquiet des menaces et des " intimidations " dont font l'objet les avocats du leader du PKK, le Parlement a appelé Ankara à " garantir " leur sécurité. Il s'est déclaré d'ailleurs " vivement préoccupé par le fait que recours soit fait à une Cour de Sûreté d'État pour juger M. Öcalan, dans la mesure où la participation de juges militaires compromet l'indépendance du procès " et que la Cour de justice pour les droits de l'homme a " suspendu à plusieurs reprises les jugements de [cette cour] au motif que la formation et la compétence de ces tribunaux d'exception ne garantissent pas une procédure légale de jugement. À ce titre, le Parlement européen a demandé aux autorités turques de " permettre à des observateurs internationaux de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe d'assister au procès " et réitère " sa ferme opposition à la peine capitale". Plus largement, le Parlement européen a demandé au gouvernement turc qui n'est pas encore constitué de s'attaquer " aux causes du conflit en Turquie en encourageant les réformes, urgentes et nécessaires, du système politique et juridique ainsi que le développement économique et social des régions kurdes en Turquie ". LE PARTI ISLAMISTE DE LA VERTU MENACÉ D'INTERDICTIONLe procureur de la Cour de cassation turque, Vural Savas a lancé, le 7 mai 1999, une procédure d'interdiction contre le parti islamiste de la Vertu (Fazilet), troisième formation au Parlement issue des législatives du 18 avril 1999 avec 111 sièges sur 550 [ndlr : 110 depuis qu'Adnan Menderes, le vice-président du FP a démissionné du parti en désapprouvant l'attitude de sa formation]. La procédure est basée sur les mêmes chefs d'accusation que ceux qui avaient entraîné l'interdiction par la Cour constitutionnelle du parti Refah (RP) en janvier 1998 pour " activités anti-laïques ". Néanmoins la procédure a été précipitée par le scandale créé autour du foulard islamique lorsqu'au cours de la session inaugurale du parlement, une députée islamiste, Merve Kavakçi s'est présentée avec un foulard pour prêter serment. Vural Savas qui compare le parti islamiste à " une tumeur cancéreuse maligne qui produit des métastases " réclame l'interdiction de politique pendant cinq ans de tous les cadres de ce parti, y compris de son président Recai Kutan, et le retrait du mandat de tous les députés du Fazilet en affirmant que ses activités sont contraires aux articles 2 et 24 de la Constitution relatifs aux " caractères de la République de Turquie laïque " et aux " libertés de la religion et de la foi ". Vural Savas a décrit les partis islamistes successifs " comme des vampires qui se nourrissent exclusivement de sang, exploitent le sentiment religieux de leurs compatriotes en totale connaissance du conflit qu'elles pourraient déclencher ". Dès le mois de mars 1999, à quelques semaines des élections générales en Turquie, le procureur de la Cour de Sûreté de l'Etat d'Ankara, Nuh Mete Yuksel, avait également demandé pour " avoir agi en violation de la loi sur les partis politiques " l'interdiction du Fazilet à M. Savas. Le président turc Suleyman Demirel n'était pas moins inspiré en accusant la députée Merve Kavakçi d'"agent provocateur " et de " séparatiste " au service de la " subversion étrangère ". Le Premier ministre turc Bulent Ecevit avait surenchéri, le 9 mai 1999, en accusant l'Iran d'encourager les mouvements islamistes en Turquie. " Bien que nous n'intervenions pas dans les affaires intérieures de l'Iran, l'Iran poursuit malheureusement ses efforts en vue d'exporter sa propre idéologie " avait-il déclaré à cette occasion. Il avait par ailleurs accusé Téhéran de soutenir le PKK " notamment dans la région proche de la frontière turque ". Aux accusations des différentes instances exécutives et judiciaires turques s'ajoutent également le déballage médiatique à coup de révélations non vérifiées sur Merve Kavakçi. Le Haut comité électoral (YSK) a d'ailleurs ouvert une enquête sur la nationalité de la députée, dont la presse ne désigne plus que par le mot " l'Américaine ". Ayant terminé ses études aux Etats-Unis, elle aurait reconnu disposer de la nationalité américaine. Le YSK s'interroge dès lors sur la régularité de son élection à l'Assemblée turque. Recai Kutan, président du parti de la Vertu (FP) a dénoncé la procédure en déclarant que " la teneur de l'acte d'accusation est plus politique que juridique " et en ajoutant qu'" on veut réduire la société au silence par des pratiques de ce genre ". Le numéro deux du parti, Abdullah Gul a quant à lui soutenu que " cela portera atteinte à la démocratie en Turquie et à l'image de la Turquie à l'étranger et prouvera qu'il existe un régime autocratique dans ce pays ". Depuis son établissement en 1963, la Cour constitutionnelle turque a dissous 22 partis politiques. Le procès du parti pro-kurde HADEP, également à l'initiative du procureur Vural Savas, est toujours en cours. MME. ECEVIT S'EN PREND VIVEMENT AU MHP ET EXPRIME SES DOUTES SUR LA PERTINENCE DE FORMATION D'UNE COALITION AVEC CE PARTIConsidérée comme fondatrice et co-présidente du Parti de la gauche démocratique (DSP), l'épouse du Premier ministre turc, dans une interview au quotidien Milliyet du 15 mai, a jeté un gros pavé dans la mare politique turque en rappelant le passé peu ragoûtant du Parti de l'action nationaliste (MHP). Extraits : «Un jour nous avons vu émerger des gens disant 'nous sommes des Turcs issus de l'accouplement d'un Turc avec une louve appelée Asena, c'est pourquoi il nous revient de sauvegarder le dernier État turc' (Turquie). Ils ont créé leurs associations et leurs partis fondée sur cette assertion. Ils ont organisé des enfants, des jeunes, exercé des pressions sur eux et les ont même armés. 'Vous serez avec nous ou mort' leur ont-ils dit. Pendant des années il ont fait du mal à d'innombrables personnes ils en ont tué beaucoup. Est-ce facile d'oublier le mal qu'ils ont fait? Ceux qui en prétendent 'Nous descendons de la louve dite Asena, nous sommes venus ici d'Asie centrale, la souveraineté sur ce pays est notre droit' et tentent de faire de la politique, de surcroît par la force brute, ne sauraient être considérés comme un 'parti' au sens démocratique du pays ni renforcer l'union nationaliste (). De plus, ils ont usé de la violence pas seulement pour s'organiser politiquement mais pour des intérêts matériels; ils se sont imbriqués avec des mafias et des gangs». Après ce rappel sans aménité du passé et de la nature du MHP Mme. Rahsan Ecevit se montre sceptique sur l'évolution de ce parti vers plus de modération. «Depuis que l'éventualité d'un gouvernement avec le MHP est venue à l'ordre du jour, certains milieux optimistes affirment que ce parti a désormais changé. Faut-il croire ceux qui pensent comme cela ou bien croire les leaders de ce parti qui disent, eux, 'nous, nous n'avons pas changé' je ne puis le savoir». Mme. Ecevit semble, tout au long de cet entretien, peu enthousiaste de voir son parti s'associer au MHP dans une coalition gouvernementale. Ses déclarations ont crée une grande agitation dans les milieux politiques turc. Le MHP a demandé des excuses publiques que M. Ecevit, pressenti pour former le cabinet a refusées en affirmant respecter par ailleurs par la plupart des élus et électeurs de son parti. Sur ce, le MHP a annulé la rencontre au sommet MHP-DSP qui devait discuter de la formation du cabinet. Celle-ci annoncée comme imminente risque de prendre plus de temps. L'intervention du président Demirel appelant les partis à «dépasser le passé» et à former une coalition DSP-MHP-ANAP n'a pas eu d'effet. Cependant les grands media turcs continuent de plaider en faveur de cette formule donne du MHP une image «soft» et rassurante. Le quotidien Hürriyet du 17 mai affirme même le MHP bénéficie désormais du soutien de 31,2% des électeurs qui le voient comme principale force politique de droite et que le DYP de Mme. Çiller et l'ANAP disparaîtraient du Parlement en cas de nouvelles élections. |