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Liste
NO: 90 |
17/3/1998 PEINES DE PRISON POUR DEUX EX-DÉPUTÉS KURDES DU PARTI DE LA DÉMOCRATIEMehmet Emin Sever et Muzaffer Demir, deux ex-députés kurdes du Parti de la Démocratie (DEP-dissous) ont été condamnés jeudi 12 mars 1998 à 11 mois 20 jours et 10 mois de prison respectivement par une Cour de Sûreté de l'État "pour des déclarations publiques de soutien au Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) et pour propagande séparatiste". La sentence étant suspensive, les ex-députés devront purger leur peine s'ils commettent un autre délit. UN NOUVEAU PARTI KURDE (DKP) RISQUE L'INTERDICTION PAR LA COUR CONSTITUTIONNELLE TURQUEAprès la fermeture du Parti du Travail du Peuple (HEP), puis du Parti de la Démocratie (DEP) dont quatre de ces députés se trouvent condamnés à 15 ans de prison et dernièrement l'incarcération des responsables du Parti Démocratique du Peuple (HADEP) le 16 février 1998, le Parti de la Masse Démocratique (DKP) fait l'objet d'une procédure d'interdiction devant la Cour Constitutionnelle. La fermeture de ce parti récusant la violence, fondée en 1997, a été demandée par Vural Savas, procureur de la République turque qui a obtenu récemment l'interdiction du Parti de la Prospérité (Refah). Le DKP est accusé de "porter atteinte à l'unité de la République turque en s'appuyant sur des différences raciales et régionales". "Nous croyons qu'ils ont mal interprété notre approche du problème kurde. Nous voulons que les Turcs et les Kurdes vivent ensemble à l'intérieur des frontières de la Turquie. Nous voulons une solution juste au problème" a déclaré Naim Sabrioglu vice-président du DKP. Il a ajouté que son parti luttait pour l'obtention des droits culturels et du droit à la langue kurde refusés par les autorités turques aux 18 millions de Kurdes qui vivent en Turquie. AU MILIEU DE NOUVELLES RUMEURS D'INTERVENTION MILITAIRE LE ROLE DE L'ARMÉE MIS EN CAUSE PAR CERTAINS RESPONSABLES POLITIQUES TURCSUne vive polémique dénonçant l'ingérence de l'armée dans les affaires politiques turques a été déclenchée par Deniz Baykal, chef du Parti Républicain du Peuple (CHP), qui a souligné la menace d'un "régime intérimaire" en Turquie à la veille de l'anniversaire d'un des trois coups d'État ayant marqué son histoire récente, celui du 12 mars 1971. Les militaires avaient contraint M. Demirel, alors Premier ministre turc, à démissionner et avaient imposé la formation d'un gouvernement de transition dont la plupart des membres n'étaient pas issus du Parlement. "Un régime intérimaire constituerait une trahison de la démocratie" a déclaré M. Baykal. Le Président turc, M. Demirel, pourtant renversé à deux reprises (en 1971 et en 1980) par les militaires, s'est fait défenseur de l'armée en déclarant que "personne n'a le droit de présenter l'armée comme l'ennemi de la démocratie. L'armée ne menace pas la démocratieLancer une controverse sur l'éventualité d'un coup d'État ne sert qu'à détériorer l'image de la Turquie que nous tentons d'améliorer". La presse turque écrivait, jeudi 12 mars que l'armée était mécontente du manque d'efficacité de la lutte menée par l'actuel gouvernement de coalition du Premier-ministre Mesut Yilmaz contre les islamistes. Selon la même source, le Conseil national de Sécurité présenterait un rapport au gouvernement lors de la réunion mensuelle du 27 mars. "Nous ne pouvons pas abandonner les méthodes démocratiques en luttant contre le fondamentalismeSi quelqu'un se fait avocat d'une méthode qui soit hors du cadre de la loi pour lutter contre le fondamentalisme ou le terrorisme, il devient lui-même une menace pour le pays" a déclaré, quant à lui, le Premier ministre turc Mesut Yilmaz. Un responsable militaire a rétorqué que "l'armée turque ne veut pas de coup d'État, elle désire seulement l'application de toutes les lois contre le fondamentalisme religieux". A la demande de l'armée, le Président turc, Süleyman Demirel a convoqué pour le 17 mars 1998 une réunion exceptionnelle du Conseil national de Sécurité pour discuter de cette nouvelle crise. DES POLICIERS TORTIONNAIRES D'ADOLESCENTS ACQUITTÉSLes 10 policiers accusés d'avoir torturé 14 adolescents lycéens de Manisa, soupçonnés d'appartenance à un mouvement gauchiste, ont été acquittés mercredi 11 mars par décision de justice. Le Tribunal, qui a changé de juges à six reprises , a estimé qu'il n'y avait pas de preuves suffisantes démontrant la culpabilité des prévenus, jugés pourtant pour avoir mis à nus les jeunes, puis les avoir sodomisés avec des matraques, arrosés avec de l'eau à grande pression et torturés à l'électricité. Un rapport du 2 janvier 1996 signé du docteur Emine Keskin, médecin légiste et de Kenan Güler, directeur du Bureau de la Médecine Légale, avait établi que les lycéens avaient bien été torturés. Acquittés alors même que le procureur avait requis contre les accusés des peines de trois mois à trois ans de prison en affirmant qu'"il y a des preuves démontrant les sévices". Lorsque l'affaire de Manisa a éclaté en 1995, la Turquie était en pleine campagne électorale-période durant laquelle les responsables politiques turcs crient haut et fort l'indépendance de la Justice. Firuz Çilingiroglu, alors ministre de la Justice, avait à ce titre affirmé devant le Parlement turc qu'"il y avait des preuves de l'usage de la torture" et ces propos ont été enregistrés dans le procès verbal du jour. Les plaignants ont d'ores et déjà déclaré qu'ils feront appel de la décision et s'ils n'obtiennent pas justice ils saisiront la Cour européenne des droits de l'homme de Strasbourg. A Washington Lawyers Committee for Human Rights a vivement critiqué cet acquittement. "La Turquie se tire dans les pattes en acquittant dix policiers accusés d'avoir torturé des adolescents" affirme dans un communiqué la LCHR qui ajoute que "cela donne un coup aux prétentions du gouvernement turc qui se dit engagé dans un effort sérieux pour améliorer la situation des droits de l'homme". POURSUITES CONTRE DES JOURNALISTESLa Cour de Sûreté de l'État a commencé mercredi 4 mars le procès de Namik Durukan, journaliste accusé par les autorités turques de sympathie envers le PKK. Le correspondant du quotidien Milliyet et du service turc de la BBC risque au minimum cinq ans de prison pour ses écrits. Selon l'agence de presse Anatolie, l'accusation est largement inspirée par les aveux d'un informateur de la police, qui accuse M. Durukan d'avoir été chargé par emdin Sakik- dit "Zeki sans doigts", un des responsables du PKK- "de rapporter que les troupes turques évacuent de force les villages kurdes afin d'empêcher les habitants de soutenir les rebelles kurdes". Le prévenu, quant à lui, déclare que les allégations sont fausses et qu'il n'a jamais rencontré Sakik. L'accusation des procureurs turcs est d'autant plus tragi-comique que les autorités turques reconnaissaient elles-mêmes l'évacuation et la destruction des villages kurdes. Il s'agit en fait de faire taire l'un des rares journalistes qui se permettent de s'écarter de la version officielle de l'armée, que la BBC juge partielle et peu crédible. Jeudi 5 mars, une autre cour a condamné Aydin Koral, journaliste au quotidien pro-islamiste Selam à deux ans de prison pour avoir "menacé la sécurité nationale". M. Koral avait critiqué dans ses écrits les relations israelo-turques à la suite des manuvres militaires communes en janvier 1998 dans la Méditerranée. Le juge a également condamné le journal à cesser toute publication pendant deux semaines. Les deux reporters du quotidien Ülkede Gündem, arrêtés au cours de la manifestation de la Journée internationale des Femmes le 8 mars dernier ont été présentés devant une Cour de Sûreté d'État mercredi 11 mars. LA LICENCE DE MED-TV MISE EN DANGER EN ANGLETERRELa Commission Indépendante de la Télévision britannique (ITC) a officiellement donné un avertissement à la chaîne kurde par satellite MED TV pour le contenu de ses programmes. "Ces derniers jours MED TV a reçu un avertissement formel de la part de l'ITC à cause d'un programme où un commandant du PKK se livrait à l'incitation à la violence" a déclaré un responsable britannique. Il a ajouté qu'"à la fin du mois de janvier, l'ITC a condamné MED TV à une peine d'amende car cette chaîne déroge à son devoir d'impartialité". Selon l'agence de presse turque Anatolie, Med TV a été sommée de payer £ 90 000 à la Commission à la suite des plaintes du ministère turc des affaires étrangères. Les autorités turques exercent une forte pression pour faire cesser les émissions de MED TV, unique chaîne de télévision en kurde très regardée au Kurdistan. RÉPRESSION SANGLANTE LORS DE LA JOURNÉE INTERNATIONALE DES FEMMES EN TURQUIEMatraques et bombes lacrymogènes étaient présentes à la journée internationale des femmes en Turquie. Samedi 8 mars 1998, près de 2000 personnes, selon la police, ont marché sur une des avenues principales de la partie européenne de la ville, vers la place Taksim. Interdite d'accès et sommée de se disperser, la foule rejointe par d'autres manifestants et forte de 3000 personnes a affronté la police. Les forces de l'ordre ont matraqué et jeté des bombes lacrymogènes sur les manifestants qui ont lancé des pierres en réponse. Les autorités turques ont accusé le Parti Démocratique du Peuple (HADEP-pro-kurde) dont sept de ses responsables sont menacés de 15 ans de prison, d'être la cause des incidents car parmi les protestants, il y avait des femmes habillées aux couleurs nationales kurdes; rouge, vert et jaune. Pourtant on ne pouvait lire sur les bannières en turc et en kurde que; "vive le 8 mars" ou encore "Halte à la torture dans les prisons". La police a procédé à au moins cinquante interpellations, dont celles de deux reporters du quotidien pro-kurde Ülkede Gündem, Faruk Aktas et Bülent Acar. Par ailleurs, plusieurs manifestants ont été blessés au cours de l'incident. Selon la police, une autre manifestation organisée à l'appel d'associations et syndicats rassemblant plus d'un millier de femmes dans le quartier de Sisli a pris fin dans le calme. A Diyarbakir, chef-lieu du Kurdistan, une marche de femmes a été interdite par la police. Les manifestantes se sont pacifiquement dispersées à la demande des forces de l'ordre, selon l'agence de presse Anatolie. UN MÉDECIN ÉCHAPPE À UNE PEINE DE TROIS ANS DE PRISON POUR AVOIR ÉTABLI L'EXISTENCE DE LA TORTURE SUBIE PAR SIX DÉTENUSAccusée par la police militaire de "tentative de déstabilisation de l'autorité de l'État", alors qu'elle avait reconnu la torture subie par six détenus d'Aydin, Dr. Eda Güven a été acquittée mardi 10 mars 1998 par décision judiciaire. Poursuivie, elle risquait trois ans de prison pour avoir "abusé" de sa fonction de médecin en rapportant que ses patients emmenés à elle pour un traitement médical, avait été torturés. LA TURQUIE ET LA FRANCE SIGNENT UN ACCORD DE 441 MILLIONS DE DOLLARS POUR DES MISSILES ANTICHARSUn accord préliminaire d'une valeur de $441 millions a été signé jeudi 12 mars 1998 par le ministère turc de la Défense et la société française Aérospatiale pour la production conjointe de missiles antichars Eryx, d'une portée de 600 mètres, très efficace contre toutes sortes de blindage. Après l'accord intervenu l'an dernier entre Ankara et le consortium franco-allemand Eurocopter pour la production de 30 hélicoptères Cougar AS-532, c'est le second accord commercial franco-turc dans le domaine de la défense en terme de valeur. Par ailleurs, un contrat de $50 millions avait également été signé entre les deux pays en septembre dernier pour la vente à la marine turque de cinq dragueurs de mines de la classe Circé de la marine française. MESUT YILMAZ S'EN PREND À NOUVEAU À L'ALLEMAGNE QU'IL ACCUSE DE CHERCHER À INSTAURER SON "ESPACE VITAL" À TRAVERS L'UEToujours pas remis de la décision de l'Union européenne au sommet de Luxembourg écartant la Turquie du plan d'élargissement de l'UE, Ankara n'hésite pas à attaquer violemment les pays qui s'y sont opposé. Ainsi, dans une interview publiée par le Financial Times du vendredi 13 mars, le Premier ministre turc Mesut Yilmaz a comparé l'approche allemande d'expansion de l'Union européenne au fameux "Lebensraum" (l'espace vital) d'Adolf Hitler. "Les Allemands continuent la même stratégie qu'avant. Ils croient à l'espace vital Cela veut dire que les pays de l'Europe centrale et de l'est sont d'une importance stratégique pour l'Europe et pour l'Allemagne comme dans son passé Leur but à terme est d'inclure ces pays dans l'OTAN et l'UE et de diviser l'Europe entre la Bulgarie et la TurquieLa Turquie devrait être un bon voisin pour l'Europe mais non un membre de l'UE" a-t-il déclaré au quotidien. La réaction allemande ne s'est pas fait attendre. L'Allemagne a rejeté ces propos les qualifiant "de calomnies inexcusables" et "d'insultes". Sur fond de crise avec Bonn, la visite en Allemagne du ministre turc du Travail, Nami Cagan a été annulée par la Turquie, après que son homologue allemand Norbert Bluem eut réduit sa participation aux rencontres prévues à partir de dimanche 15 mars à un simple déjeuner avec M. Cagan. "J'ai assez à faire moi-même et je ne pense pas que la visite serait très utile dans le contexte actuel" a déclaré M. Bluem. Par ailleurs, selon l'agence BTA, le Premier ministre Mesut Yilmaz a déclaré samedi 14 mars lors d'un voyage en Bulgarie qu'"à l'Union européenne il y a des milieux qui voient son avenir comme un club chrétien La Turquie poursuivra sa voie européenne malgré les erreurs commises à son égard. Tant que ces erreurs ne seront pas réparées, il n'est pas question pour nous de changer notre attitude". En attendant la Turquie a boycotté la conférence européenne qui s'est réuni le 12 mars à Londres et à laquelle elle était invitée. De son côté, le ministre allemand des affaires étrangères, Klaus Kinkel, a déclaré que "la route qui mène la Turquie à l'Europe comprend des obstacles importants: primo, l'occupation du nord de Chypre par les troupes turques, qui contrevient à une résolution de l'ONU, secundo, la situation des droits de l'homme en Turquie, et tertio, le problème kurde". LE PARLEMENT RUSSE DEMANDE À LA TURQUIE DE S'ASSEOIR À LA TABLE DES NÉGOCIATIONS AVEC LES KURDESLe Parlement russe, la Douma, a demandé à la Grande Assemblée turque de s'asseoir à la table des négociations avec les Kurdes. A ce titre, la Douma a adopté une résolution sous le titre d'"un appel pour une solution au problème kurde". La résolution en question souligne que le refus turc d'une solution pacifique au problème fait courir à toute la région des risques incalculables. "La solution la plus intelligente passe par l'octroi d'un statut politique particulier à la région kurde" a déclaré la Douma. Pour que le sang cesse de couler, elle a appelé les parlementaires turcs à user de leur autorité pour s'asseoir à la table des négociations de la paix avec les Kurdes. "A l'origine du problème réside le refus du droit à l'autodétermination pour le peuple de la région et l'application d'une politique génocidaire et discriminatoire contre le peuple kurde" a ajouté le Parlement russe. Les autorités et médias turcs désignent la récente réunion tenue à Istanbul avec les pays du Caucase pour la promotion d'un oléoduc Bakou-Ceyhan comme la cause principale de la politique russe. La Russie est mécontente de voir le pétrole de la Caspienne transiter par la Géorgie et la Turquie. Elle souligne qu'un tel oléoduc traversant le Kurdistan turc et donc vulnérable aux attaques de la guérilla kurde, active dans cette région. Le territoire russe serait, selon Moscou, beaucoup plus sûr pour un oléoduc. De son côté, Washington favorise les projets renforçant l'indépendance des ex-républiques soviétiques du Caucase et d'Asie centrale de façon à les détacher définitivement de la Russie. |