L'aggravation du conflit opposant les deux factions kurdes irakiennes et l'entrée des chars irakiens, le 31 août à Erbil, capitale du Kurdistan irakien, ont suscité une sérieuse crise régionale et internationale. Intervenant à quelques semaines des élections américaines, l'intervention des troupes de Saddam Hussein dans la "zone de protection" kurde a été perçue comme une "provocation" par Washington qui a, dès le 1er septembre, promis une "punition" du dictateur irakien. Le général John Shalikashvili, chef d'état-major interarmes, s'est rendu dans plusieurs pays du Proche-Orient pour s'assurer du soutien des alliés américains. Le 1er septembre, le secrétaire général de l'ONU a annoncé la suspension de l'accord devant permettre à l'Irak d'exporter du pétrole contre l'achat des produits alimentaires et pharmaceutiques. Le 2 septembre, le président Clinton a écourté sa tournée électorale pour rentrer à Washington afin de discuter avec les responsables de son administration des représailles contre l'Irak. Le même jour Bagdad annonçait avoir retiré toutes ses troupes du Kurdistan.
Le 3 septembre, la "punition" de Washington est venue sous la forme d'une trentaine de missiles Tomahawk tirés contre des objectifs militaires dans le sud de l'Irak. Le lendemain, les forces américaines ont tiré une nouvelle salve de dix-sept missiles de croisière contre des objectifs militaires qui n'avaient pas été détruits lors de la première frappe. La Grande-Bretagne et l'OTAN ont exprimé une "total soutien" à cette opération de représailles tandis que d'autres alliés de Washington, dont Paris, Rome, Madrid, Bruxelles et Ankara, ont émis des "réserves". La France et la Russie en appellent "au respect de la légalité internationale", Moscou qualifie d'"inacceptable" et d'"inappropriée" l'opération militaire américaine. Celle-ci est également critiquée par l'Égypte et la Syrie, deux alliés arabes importants de la Coalition alliée contre Saddam Hussein. La plupart des autres pays arabes sont restés silencieux, seul le Koweït a "exprimé sa compréhension à l'égard de la fermeté des Etats-Unis". Une fermeté qu'approuvent aussi Bonn, Londres, La Haye, Copenhague et Oslo. Cependant les observateurs s'accordent à considérer que la Coalition alliée est désormais en voie de désagrégation. Et c'est là, la première conséquence internationale grave du conflit inter-kurdes qui a par ailleurs fait voler en éclats le fragile Congrès national irakien supposé regrouper les principales forces s'opposant à la dictature de Saddam Hussein.
En même temps que ces frappes aériennes Washington a étendu la zone d'exclusion aérienne du Sud irakien du 32ème au 33ème parallèle, soit pratiquement jusqu'aux faubourgs de Bagdad. Le président Clinton a, par cette extension, clairement indiqué les priorités de la politique américaine dans la région: rassurer les Émirats pétroliers et l'Arabie Saoudite contre toute agression irakienne. En refusant d'étendre la zone d'exclusion du Nord irakien à l'ensemble du Kurdistan Washington donne aux Kurdes un message sans équivoque: il refuse de prendre part au conflit inter-kurdes, et s'il est très mécontent de l'alliance de la faction kurde du PDK avec Bagdad, il n'apprécie pas pour autant l'autre faction, l'UPK, alliée à l'Iran, qui est l'autre bête noire des Américains dans la région.
Le 6 septembre, affirmant vouloir prendre le barrage de Dokan, sous contrôle de l'UPK, afin de rétablir l'électricité dans la capitale kurde Erbil, qu'il contrôle désormais, le PDK lance une offensive militaire contre les forces de l'UPK. Le 8 septembre, il s'empare de l'importante ville de Koy Sandjak. L'UPK semble encore espérer une intervention de l'aviation américaine. Constatant que son message n'est pas encore bien compris des chefs kurdes, Washington rappelle le même jour, par la voix du secrétaire à la défense que "les Etats-Unis ne s'engageront pas dans la guerre civile kurde".
Les événements se précipitent alors. Démoralisées les forces de l'UPK se débandent. Le 9 septembre, la ville de Suleimanieh, considéré comme un bastion de l'UPK, tombe aux mains du PDK, pratiquement sans combat. Celui-ci s'empare dans la foulée de Qala Tcholan, quartier général politico-militaire de l'UPK, situé à une vingtaine de km de la frontière iranienne. Le 10 septembre, le PDK, étend son contrôle à la quasi-totalité de la zone de protection kurde d'Irak et l'AFP, citant "des responsables des Nations-Unies" annonce que "les dirigeants de l'UPK, y compris, leur chef Jalal Talabani, ont tous fui en Iran". Plus de 70.000 habitants de Suleimanieh et de ses environs les suivent dans cette fuite vers l'Iran. Le même jour, célébrant sa victoire. M. Barzani décrète à Suleimanieh,"une amnistie générale" pour ses adversaires kurdes, précisant qu'elle inclut J. Talabani et appelle à "des élections générales libres".
Cependant, une partie de ces réfugiés reviennent dans leurs foyers. Le 11 septembre, l'Iran affirme avoir accueilli un total de "39 000 réfugiés kurdes irakiens qui ont fui les combats du Nord de l'Irak". Selon l'agence iranienne IRNA, Téhéran apporterait également une aide à "quelques 160 000 personnes de l'autre côté de la frontière".
Le 11 septembre, le tir d'un missile irakien contre deux avions américains survolant la nouvelle zone d'exclusion aérienne contestée par Bagdad conduit Washington à brandir la menace d'une "nouvelle opération en Irak".
Le 12 septembre, tandis que Washington s'apprête à évacuer près de 3000 Kurdes irakiens ayant travaillé pour les agences et les ONG américaines, M. Barzani, cité par l'AFP, affirme son "indépendance" vis-à-vis de l'Irak et promet au peuple kurde "la sécurité, les droits de l'homme, le pluralisme et la démocratie". Il s'engage à "réactiver le parlement kurde" et à dissoudre les milices pour les remplacer par "une armée du Kurdistan". Il réitère son offre d'amnistie à l'UPK, y compris à son chef, à condition qu'elle renonce à former des milices armées. Le même jour un porte-parole de l'UPK à Londres annonce que les forces de son parti sont en train de se regrouper dans les zones montagneuses de la province de Suleimaneih.
Le 14 septembre, au cours d'une conférence de presse donnée dans son quartier général de Salaheddine, M. Barzani appelle "les Etats-Unis et les pays d'Europe à assurer la sécurité des Kurdes en Irak". "Les Kurdes ont besoin d'une sécurité internationale et cette sécurité doit leur assurer une défense contre quiconque, car la prétendue défense mise en place a fait défaut lorsque nous avons fait face aux bombardement turcs et iraniens", ajoute encore le chef kurde. Par ailleurs, toujours selon l'AFP, il a annoncé la reprise "dès la semaine prochaine des activités des organismes autonomes kurdes et la nomination par le Parlement kurde, après consultation avec tous les principaux partis, d'un nouveau gouvernement autonome". Il a indiqué que "dans la prochaine étape, aucun parti, pas même le PDK, n'aura plus le droit d'avoir une force militaire. Une armée propre au Kurdistan irakien sera créée et toutes les milices seront démantelées". Il a enfin souligné "la nécessité du rattachement à la région autonome de la ville de Kirkouk, riche en pétrole dans tout projet de fédération".
Le 15 septembre, se référant à "des sources kurdes et iraniennes informées", l'AFP, dans une dépêche datée de Téhéran, affirme que "le chef kurde irakien hostile à Bagdad, Jalal Talabani et ses principaux collaborateurs militaires se trouvent en Iran où ils essayent de se réorganiser (...). Plusieurs journalistes et photographes iraniens ont affirmé avoir vu M. Talabani, dans la région de Baneh, dans le Kurdistan iranien".
Le 16 septembre, affirmant que "60.000 Kurdes irakiens se trouvent dans cinq camps en territoire iranien" Téhéran demande à l'ONU de "prendre ses responsabilités envers les Kurdes". De son côté, le Haut Commissariat des Nations-Unies aux Réfugiés fait état de "30.000 à 35.000 réfugiés kurdes" sur la base des observations dans les principaux camps. Le HCR souligne que la mobilité de ces réfugiés complique tout recensement exact.
Le même jour, à l'issue de la visite à Ankara du secrétaire d'État américain à la défense, William Perry, les Etats-Unis affirment que "la poursuite du renforcement de la zone d'exclusion aérienne du nord de l'Irak dans le cadre de l'opération Porvide Comfort est vitale aux efforts de la coalition pour contenir Saddam Hussein et prévenir d'autres agressions". Mais comme au même moment Washington déclare vouloir évacuer tous ceux qui ont travaillé dans cette région avec les Américains et que le départ d'un premier contingent de 2500 Kurdes vers l'île de Guam s'organise, la déclaration de W. Perry, faisant suite à l'appel de M. Barzani, ne rassure qu'à moitié la population kurde.
Le 17 septembre, tirant les coclusions de la tournée de W. Perry au Proche-Orient et devant le refus de Turquie et d'Arabie saoudite de s'associer à toute nouvelle opération militaire contre l'Irak. Le président Clinton, tout en "exigeant de Bagdad de démanteler ses rampes de missiles au Sud du 33ème parallèle" affirme "ne pas chercher l'affrontement avec l'Irak".
Le 18 septembre, visite à Ankara de Massoud Barzani, pour y rencontrer le secrétaire d'Etat-adjoint américain Robert Pelletreau et les principaux dirigeants turcs. Au cours de ces entretiens jugés "productifs", les Américains ont émis l'espoir que "l'alliance du PDK avec l'Irak n'a été que "ponctuelle" et qu'il prendrait ses distances vis-à-vis de Bagdad". Tout en rassurant les Américains sur ce point, le chef kurde a demandé à Washington de rester engagé dans le Kurdistan, de "reconnaître et de soutenir le gouvernement régional kurde" et affirmé que sa politique visait à "une réconciliation nationale au Kurdistan entre toutes les parties, y compris l'UPK". Selon l'AFP, M. Barzani a assuré l'émissaire américain "qu'il n'avait ni conclu un accord politique ni ouvert un dialogue politique avec Saddam Hussein et qu'il n'avait pas l'intention de le faire sauf s'il y était forcé. Il y serait forcé par le retrait de l'opération Provide Comfort et par un désengagement des Etats-Unis". De son côté, la Turquie, par la voix de son vice-Premier ministre Tansu Çiller, a appelé M. Barzani à "protéger les Turcomans d'Irak". Commentant cette rencontre, le porte-parole du département d'État, N. Burns, a déclaré que "les Etats-Unis souhaitaient que les négociations reprennent entre MM. Barzani et Talabani et que les deux dirigeants mettent fin à leurs relations avec Bagdad et Téhéran". M. Burns a indiqué que "de nouveaux entretiens auront lieu à l'avenir pour discuter des questions qui viennent d'être soulevées".
Le 19 septembre, tandis que l'Iran met en garde M. Barzani contre "toute alliance avec les État-Unis", à Paris, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères déclare que "tout règlement de la question kurde passe par un dialogue avec Bagdad". A Strasbourg, le Parlement européen adopte une résolution qui condamne l'intervention irakienne au Kurdistan et exige "le retrait complet de toutes les forces irakiennes, unités de services de renseignements comprises, de la zone de protection". Cette résolution "invite le Conseil et la Commission à prendre des initiatives pour une médiation entre partis kurdes rivaux (UPK et PDK)".
Alors que l'Iran menace Barzani et aide son rival Talabani à reconstituer ses forces en vue d'une revanche, la Turquie par son annonce de création d'une "zone de sécurité" le long de la frontière du Kurdistan irakien suscite un tollé général parmi les pays arabes réunis au Caire. Plusieurs pays européens dont la France, l'Allemagne et l'Italie s'opposent au projet turc. Le conflit interne kurde a fini par engendrer de vives tensions régionales et internationales aux conséquences durables.
Le procès des assassins du Dr. Sadegh Chérefkandi, secrétaire général du parti démocratique du Kurdistan iranien (PDKI) et de ses trois collaborateurs approche désormais de sa fin. Enquêtant sur les commanditaires de ce quadruple assassinat perpétré en septembre 1992 à Berlin, dans le restaurant Mykonos, en marge du Congrès de l'Internationale Socialiste, le parquet fédéral a acquis la conviction que c'est le ministre iranien des renseignements, Ali Fallahian, qui en est l'instigateur. Il avait, en mars dernier, lancé un mandat d'arrêt international contre ce haut dirigeant de la République islamique et organisateur des basses uvres de celle-ci.
Appelé à la barre en qualité de témoin, l'ancien président iranien, M. Abolhasan Banisadr, a accusé le président iranien Ali Akbar Rafsanjani et l'ayatollah Ali Kamenei, "guide de la République islamique", d'avoir ordonné personnellement ce quadruple assassinat et une série d'autres assassinats d'opposants iraniens à l'étranger. Selon lui, le ministre Fallahian n'a fait que faire exécuter ces ordres venant des plus hautes autorités du régime islamique. L'Iran mène ses opérations terroristes en Europe depuis le sol allemand a ajouté M. Banisadr qui a précisé que "les consulats d'Iran à Francfort et Hambourg sont des plaques tournantes du ministère iranien de la Sécurité et des renseignements, leurs consuls sont nommés directement par ce ministère". Les actions terroristes à l'étranger sont conçus et ordonnées par un "Conseil des affaires spéciales" a encore indiqué le premier président de la République islamique, bien placé pour connaître les rouages et les personnages de celle-ci. Il a affirmé avoir remis au parquet fédéral allemand une liste d'agents des services de renseignements iraniens actifs en Allemagne.
Les déclarations de M. Banisadr devant la justice allemande ont suscité la colère du gouvernement iranien qui a mis en garde l'Allemagne contre une dégradation des relations bilatérales. Tout en affirmant que M. Banisadr est "totalement discrédité" et que "ses propos ne trompent personne" le ministre iranien des Affaires étrangères, M. Ali Akbar Velayeti, a demandé à Bonn son extradition alors même qu'une telle demande n'a jamais été faite à la France où l'ancien président iranien vit en exil depuis 1981.
Pour M. Banisadr, interrogé par le Monde du 1er septembre, la vive réaction des dirigeants iraniens traduit leur affolement "parce qu'ils savent que j'ai des informations sur l'implication du régime, informations que le procureur allemand a qualifiées de 'très exactes'".
Recourant à une tactique qu'elles maîtrisent bien, les autorités iraniennes ont déclenché dans leurs média une virulente campagne contre l'Allemagne, qui est pourtant le principal partenaire commercial de l'Iran et un défenseur zélé du "dialogue critique" euro-iranien. Le ministre iranien des renseignements a accusé Bonn de "faire un procès politique à l'Iran" et averti que les conséquences en seraient graves pour les relations irano-allemandes. Le quotidien Iran News, proche du ministère des Affaires étrangères, a préconisé des poursuites contre l'Allemagne qui aurait, lors de la guerre Iran-Irak, livré de gaz chimiques à Bagdad.
Par des chantages de ce genre l'Iran avait pu obtenir de l'Autriche l'enterrement du procès des assassins du leader kurde iranien A. R. Ghassemlou et de deux de ses collaborateurs, abattus le 13 juillet 1989 à Vienne par des "émissaires" du président iranien en plein "pourparlers de paix". En 1994, des menaces brandies contre la France ont conduit le gouvernement Balladur a expulser vers Téhéran, à la veille de Noël, deux Iraniens dont l'extradition était demandée par la Suisse pour leur implication dans l'assassinat d'opposants iraniens sur le territoire helvétique.
L'Allemagne va-t-elle à son tout céder au chantage de la République islamique que Washington classe en tête des États coupables de terrorisme ?
Le Parlement européen, déçu par les promesses non tenues d'Ankara, vient d'arrêter une série de sanctions financières pour manifester son exaspération. Dans une résolution très critique, adoptée le 19 septembre par 319 voix contre 23, les eurodéputés rappellent les engagements non honorés par la Turquie depuis que le Parlement a donné son avis conforme à l'Union douanière avec la Turquie, le 13 décembre dernier, à savoir "la réalisation des améliorations promises par l'ancien Premier ministre Tansu Çiller en matière de démocratisation et de droits de l'homme, la réalisation de progrès dans l'affaire chypriote et un règlement pacifique du problème kurde". Or le constat dressé par les législateurs européens depuis l'entrée de l'Union douanière en vigueur, le 1er janvier, est amer: "la situation en matière de droits de l'homme en Turquie s'est visiblement détériorée et nul progrès notable n'est enregistré en matière de démocratisation, alors que les tensions extérieures telles que provocations en mer Égée et à Chypre et agression dans le nord de l'Irak, se sont multipliées" et que "malgré les appels qu'il (le Parlement européen) a lancés et les appels venus du monde entier, Leyla Zana, prix Sakharov, et trois autres anciens députés d'origine kurde du DEP sont toujours incarcérés".
Le Parlement européen se dit, par ailleurs, "profondément préoccupé par les opérations militaires récemment menées par les forces turques en Turquie orientale et par leur refus de rechercher les voies d'un règlement pacifique au conflit du Kurdistan" et "inquiet du projet des autorités turques de créer une zone de sécurité dans le nord de l'Irak en violation des accords internationaux".
Les eurodéputés demandent instamment au gouvernement turc, d'expliquer clairement à l'Union européenne son attitude sur les quatre points: "(droits de l'homme, démocratisation, question chypriote et problème kurde), que le Parlement a mentionnés dans sa résolution du 13 décembre 1995, à laquelle il liait fondamentalement son avis conforme sur l'Union douanière". Ils ajoutent "que les violations des droits de l'homme qui continuent d'être perpétrées en Turquie contreviennent à la lettre et à l'esprit dudit accord et sont inconciliables avec les instruments spécifiques d'aide financière et le programme MEDA".
Le Parlement européen va donc bloquer la tranche 1997 (53 millions d'écus, 1 écus vaut 6, 45 F) du programme spécial d'aide à l'économie turque (375 millions d'écus, environ $ 470 millions, sur la période 1996-2000). Les députés demandent, en outre, à la Commission européenne de "bloquer, avec effet immédiat, tous les crédits prévus dans le cadre du programme MEDA pour la réalisation des projets en Turquie, à l'exception de ce qui concerne la promotion de la démocratie et des droits de l'homme".
Hormis Le Parti populaire européen (regroupant les députés français du RPR) et Forza Europa, qui ont préféré s'abstenir, les principaux groupes du Parlement européen ont voté pour cette résolution.
Un eurodéputé, qui s'exprimait au nom du groupe socialiste français, a bien résumé le sentiment de la plupart des députés qui, il y a huit mois, en donnant leur avis conforme à l'Union douanière avec la Turquie, ont aujourd'hui l'impression d'avoir signé un chèque en blanc à un gouvernement peu digne de confiance, en lançant : "Nous nous sommes trompés pour ne pas dire qu'on (les Turcs) nous a trompés".
La réaction de Mme. Çiller, aujourd'hui ministre des Affaires étrangères, nommée expressément dans la résolution, est venue immédiatement après le vote: "Je condamne fortement cette décision qui exprime une vision totalement erronée. Ceux qui attendent de nous d'agir selon des idées européennes erronées se trompent".
"Les gouvernements changent mais la répression continue". C'est en ces termes que le co-président de la Commission Helsinki du Congrès américain, le républicain Christopher H. Smith, a commencé le 10 septembre son intervention lors de l'audition consacrée à la situation des droits de l'homme en Turquie. Les événements qui se sont déroulés tout au long du mois de septembre illustrent avec force ces propos.
La machine judiciaire turque a, en effet, poursuivi les procès pour délit d'opinion. Le 29 août, Madame Aysenur Zarakoglu, la première femme à diriger une maison d'édition en Turquie, a été incarcérée après la confirmation par la Cour de cassation de sa condamnation à cinq mois de prison et à une amende de 42 millions de livres turques (environ $ 540). Le chef d'accusation retenu par la Cour de sûreté de l'État d'Istanbul contre Mme. Zarakoglu est "la propagande séparatiste" dont elle se serait rendue coupable en publiant un livre intitulé "Birakuji: guerre fratricide" sur le conflit intestin au Kurdistan irakien. A plusieurs reprises les livres publiés par la maison d'édition Belge que dirige Mme. Zarakoglu se sont trouvés sous le coup de l'article 8 de la loi anti-terreur en raison de leur contenu concernant la question kurde ou la question arménienne.
Le 12 septembre, la 9ème Chambre de la Cour de Cassation turque a rendu public son verdict sur le recours introduit par les avocats des 4 ex-députés kurdes. Ce verdict confirme la condamnation à 1 an 2 mois de prison pour "propagande séparatiste" de Mahmut Alinak, Sirri Sakik, Ahmet Turk, et Sedat Yurttas par la Cour de Sûreté de l'État d'Ankara en janvier dernier. Ces députés avaient été arrêtés en même temps que Leyla Zana en mars et juillet 1994 et poursuivis pour "trahison à la patrie". Le 8 décembre 1994, la Cour de Sûreté d'État d'Ankara avait condamné Ahmet Turk à 15 ans de prison et ses trois autres collègues à 7,5 ans. La Cour de Cassation, qui a confirmé les condamnations à 15 ans de Leyla Zana, Orhan Dogan, Hatip Dicle et Salim Sadak, avait infirmé, le 26 octobre 1995, celles d'Ahmet Turk, Mahmut Alinak, Sedat Yurttas et Sirri Sakik et demandé leur rejugement. C'est à la suite de ce rejugement que leurs peines furent finalement ramenées à 14 mois de prison. Ahmet Turk et Sedat Yurtas n'auront pas à retourner en prison car la durée de leur détention antérieure couvre leur peine. Mahmut Alinak devra séjourner un mois dans la prison d'Ankara.
Le 25 septembre, 41 dirigeants du Parti de la démocratie du peuple (HADEP) arrêtés le 23 juin dernier à Ankara et placés en détention préventive après une garde à vue de 12 jours, ont comparu devant la Cour de Sûreté de l'État N° 1 d'Ankara. Au cours du Congrès du HADEP, un jeune homme cagoulé avait décroché le drapeau turc hissé sur un mur de la salle et accroché à sa place le drapeau du PKK. Les dirigeants du HADEP ont dénoncé cette "provocation policière" et présenté leurs excuses au peuple turc pour cette "offense". Mais cela n'a pas suffi aux autorités turques qui ont décidé d'arrêter 70 dirigeants nationaux et régionaux de ce parti légal pro-kurde. Après des interrogatoires de police, 41 d'entre eux furent écroués et poursuivi pour le "crime collectif" de "liens avec une organisation terroriste". Au cours de deux jours d'audiences, le procureur a requis des peines allant jusqu'à 22 ans et demi de prison contre la plupart des dirigeants de ce parti légal pro-kurde pour "outrage au drapeau turc" et "appartenance à une bande armée" en vertu de l'article 168-2 du Code pénal turc. Le procureur, Nuh Mete Yuksel, a par ailleurs déclaré qu'"il y a seulement une identité en Turquie, c'est l'identité turque. Les revendications pour la reconnaissance d'une identité culturelle kurde visent à diviser la patrie". Plusieurs observateurs internationaux et des diplomates occidentaux étaient présents dans la salle d'audience. Sur les 28 prévenus encore en détention, 11 ont été libérés le 26 septembre, dont l'ancien député de Mus, Sirri Sakik. Les 17 autres prévenus, dont 10 membres de la direction du parti et son président M. Murat Bozlak, resteront en détention préventive. La prochaine audiance de leur procès est prévue pour le 23 octobre.
Au chapître des tueries, l'événement le plus marquant fut le massacre à coups de gourdins et de barres de fer de 10 prisonniers politiques kurdes le 24 septembre dans la prison de haute sécurité de Diyarbakir au cours de la répression d'une "mutinerie".
Selon des témoins, tout a commencé vers 15 h, lors de la visite des familles aux prisonniers. Des éléments présentés par les autorités comme des "repentis" auraient d'abord agressé verbalement ces prisonniers, puis les auraient attaqués à coups de barres de fer et battus à mort. Selon d'autres témoins, dont la section locale de l'Association turque des droits de l'homme (IHD), une vingtaine de véhicules chargés de membres de JITEM (Service d'action et d'intelligence de la gendarmerie) auraient été vus vers 10h du matin dans la cour de la prison. Ce sont ces gendarmes armés de barres de fer qui auraient lancé vers 15h l'attaque meurtrière contre les prisonniers désarmés et perpétré le massacre. Pour Mahmut Sakar, vice-président de l'Association turque des droits de l'homme et président de sa section de Diyarbakir "Sans aucun doute, il s'agit d'un massacre organisé par l'État au moment même où le président Demirel séjournait à Diyarbakir. Excédé par les incessants mouvements de protestation et de grèves de la faim de ces prisonniers politiques déterminés, le gouvernement cherchait depuis plusieurs mois à éparpiller ces prisonniers à travers le pays et à briser leur résistance à tout prix". Les avocats s'attendent à ce que ce scénario d'émeutes suivies de répression meurtrière et de dispersion des prisonniers se répète dans les mois à venir dans d'autres prisons turques. Les prisonniers tués sur le coup sont : Edip Dönekci, Nihat Çakmak, Erkan Perisan, Ridvan Bulut, Hakki Tekin, Ahmet Çelik, M. Sabri Gümüs, Cemal Çan et Aydin Demir. Deux autres prisonniers sont morts à l'hôpital des suites de leurs blessures.
De son côté, le PKK, réagissant à la mort de ses militants, rappelle dans une déclaration citée par le quotidien Özgür Politika du 26 septembre que "dans un souci d'humanité et à la demande des organisations de la société civile, il avait, il y a quelques jours, remis à leurs familles les soldats turcs qu'il détenait tandis que l'État s'en prend, pour la deuxième fois en 6 mois, à des prionniers de guerre kurdes sans défense en violation de toutes les lois de la guerre et de toutes les conventions internationales" et menace l'armée turque de "représailles".
Quelques jours plus tôt, les corps de 9 personnes, tuées par balles après avoir été torturées avaient été découverts au bord de routes aux environs de Diyarbakir, capitale régionale du Kurdistan turc. Cette affaire révélée le 20 septembre, semble, selon la section locale de l'Association turque des droits de l'homme, être liée aux escadrons de la mort. Ces personnes, dont une femme, avaient disparu il y a environ un mois dans le centre de Diyarbakir et à Silvan, Bismil et Çinar, dans la même province. Cinq corps ont été découverts samedi 14 septembre au bord de la route reliant Bismil à Silvan. Les autres corps ont été trouvés un par un les jours suivants à Silvan et dans le village de Soganli. Seulement trois corps ont pu être identifiés, car les victimes avaient été brûlées avant d'être achevées par balles. Il s'agit de Faik Orak, Nasir Alan et Nuri Yigit. Par ailleurs, le 22 septembre le corps d'un autre civil kurde, Nezir Çiçek, 31 ans, employé municipal, a été trouvé dans une rue de Diyarbakir. La victime connue pour son engagement syndical et ses opinions pro-kurdes a été abattue d'une balle dans la tête.
Ces massacres interviennent alors que les troupes turques appuyées par les chars et l'aviation mènent une opération d'envergure contre les maquisards du PKK à Kinzir, dans la province kurde de Tunceli. 47 maquisards kurdes, 5 soldats turcs et 4 miliciens pro-gouvernementaux ont trouvé la mort suite à cette opération commencée le lundi 23 septembre. Selon le général Ismail Hakki Karadayi chef d'état major des armées turques, le bilan des pertes dans les rangs du PKK s'élèverait à 1000 morts depuis le 15 août. Ce bilan de 6 semaines, s'il était vérifié, serait le plus meurtrier depuis le début de la guerre du Kurdistan qui a, en 12 ans, fait plus de 23 000 morts.
Au beau milieu d'un mois chargé en événements dramatiques du Kurdistan, et comme pour rappeler la pérennité du peuple kurde au-delà des drames de l'actualité un colloque international intitulé : "Les Kurdes et la Cité, les villes au Kurdistan, les Kurdes dans la ville" s'est tenu les 19,20 et 21 septembre à Sèvres, près de Paris. Une trentaine d'universitaires spécialisés dans les études kurdes venus de plusieurs pays d'Europe, d'Amérique du Nord, des républiques ex-soviétiques et du Proche-Orient ont présenté des communications sur les divers aspects de la civilisation urbaine kurde dans l'histoire et à l'époque contemporaine ainsi que sur les communautés kurdes expatriées vivant dans les villes du Proche-Orient, du Caucase, d'Europe et d'Asie centrale. Ces communications ont été suivies de débats riches auxquels environ 150 chercheurs et étudiants ont pris part pour tenter de mieux comprendre les facettes et dimensions multiples des structures urbaines kurdes, leurs liens avec le monde rural, leurs relations à la politique et à la religion. Concluant ces journées, le kurdologue Martin van Bruinessen a, à juste titre, estimé que ce premier colloque sur une question aussi méconnue avait apporté beaucoup de questions et ouvert de multiples pistes de recherches pour les chercheurs. L'effort de réflexion ainsi amorcé doit se poursuivre avec des études sur le terrain sur l'histoire de chaque ville kurde, ses caractéristiques, ses particularismes afin de parvenir un jour à établir un tableau d'ensemble de la civilisation urbaine kurde, a-t-il souligné.
Les actes de ce colloque co-organisé par le CNRS, l'Université d'Utrecht, l'Institut kurde de Paris et l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO), avec le concours de la Fondation Soros (États-Unis) seront publiés dans quelques mois.
A l'issue de son XXème Congrès organisé au siège des Nations Unies à New York, l'Internationale socialiste (IS), a adopté une résolution finale affirmant les positions de cette organisation sur les questions internationales d'actualité. Dans cette résolution, l'IS lance un "appel aux autorités turques pour qu'elles ouvrent un dialogue constructif avec ses citoyens kurdes et leurs représentants qui ont renoncé à la violence" et demande "la libération de tous les prisonniers politiques, notamment les députés du DEP". Elle "proteste contre la persécution de la population kurde en Iran, en particulier du Parti démocratique du Kurdistan iranien (PDKI)". Elle se déclare "profondément inquiète des opérations militaires dans les régions à population kurde du nord de l'Irak" et "soutien tous les efforts entrepris par les Nations unies pour amener une solutions durable au conflit".
Les relations turco-américaines traversent une certaine crise. L'administration américaine qui misait sur Tansu Çiller pour faire rempart à l'arrivée au pouvoir du Refah islamiste a essuyé un revers sérieux lorsque celle-ci, pour sauver sa tête, a rompu la coalition avec le conservateur Mesut Yilmaz et servi de marchepied à l'accession au pouvoir de l'islamiste Erbakan. Fidèle à sa réputation, le nouveau Premier ministre turc n'a pas hésité à effectuer sa première visite officielle en Iran, où il a signé un contrat gazier de 23 milliards de dollars narguant ainsi ostensiblement la politique américaine de "containment" de la République islamique. Dans la foulée il a dépêché 3 de ses ministres en Irak et deux autres en Libye pour "développer la coopération" avec ces deux autres régimes abhorrés et mis à l'index par Washington.
Lorsque Saddam Hussein a envoyé ses troupes dans le Kurdistan irakien, les États-Unis ont entamé avec leurs alliés une série de consultations pour décider d'une riposte à la provocation du dictateur irakien, ils ont ostensiblement ignoré la Turquie. Le président Clinton qui a parlé avec John Major, Jacques Chirac, Hosni Mobarak et d'autres dirigeants arabes n'a pas jugé utile de s'entretenir avec le président turc et son secrétaire d'État n'a pas davantage appelé ni le Premier ministre turc, ni Tansu Çiller, ministre des Affaires étrangères. Soucieuse de se mettre en valeur, celle-ci a affirmé avec un aplomb inouï que le président Clinton l'avait appelée le 2 septembre pour l'informer de la riposte américaine. Elle a été rapidement démentie par la Maison Blanche, par l'ambassadeur américain à Ankara et par le porte-parole de son propre ministère. On a appris par la suite que le seul contact turco-américain dans cette affaire avait été la visite-éclair du chef d'état major américain, le général Shalikashvili, qui, le 2 septembre vers 12 h, a rencontré pendant une heure dans le plus grand secret son homologue turc, le général Karadayi, dans une base militaire près d'Izmir. Celui-ci n'avait pas jugé nécessaire d'informer les dirigeants civils de ce rendez-vous secret et de la teneur de l'entretien. Cet épisode en dit long sur le rôle respectif des civils et des militaires turcs dans le système turc et sur le pragmatisme américain sur cette question.
La presse a pendant 2 jours égratigné un peu Tansu Çiller, qualifiée de "menteuse de la décennie" et révélé que le chancelier Kohl venait de lui refuser un rendez-vous lors de la visite officielle qu'elle envisageait d'effectuer à Bonn. Dépitée, celle qui se vantait d'être la coqueluche des dirigeants occidentaux, a annulé sa visite en Allemagne.
Autre revers pour la diplomatie turque: le monde arabe et la plupart des pays européens se déclarent hostiles au projet turc d'instaurer une zone de sécurité d'une profondeur de 15 à 20 km à l'intérieur du Kurdistan irakien. Devant l'hostilité de nombre de pays et des menaces de représailles "par tous moyens" de l'Irak, dont une délégation a été dépêchée à Ankara, les Turcs hésitent pour l'instant à franchir le pas. Leurs troupes restent pour le moment sur la ligne frontalière, sans franchir le Rubicond.
Pour la première fois, la Cour européenne des droits de l'homme a rendu un jugement, lundi 17 septembre, concernant la destruction d'un village kurde dans une affaire liée à la guerre du Kurdistan et à la destruction des villages kurdes par les troupes turques. La Cour a donné raison aux sept plaignants kurdes du village de Kelekci, dans la province de Diyarbakir, qui accusaient les soldats turcs d'avoir rasé leur village, en 1992-93, en représailles après une attaque contre un poste de la milice pro-gouvernementale. La Cour européenne a estimé que l'incendie délibéré par les forces de sécurité turques des maisons des plaignants constituait une "grave violation de leurs droits à la propriété et à la vie familiale". Elle a en conséquence condamné la Turquie à payer une somme correspondant aux dommages causés par l'attaque des militaires turcs et recommandé d'entamer des négociations pour l'évaluation des réparations pour le préjudice subi.
Le tribunal de Strasbourg a par ailleurs reproché à Ankara d'avoir failli à ses obligations européennes qui l'engagent à ne pas entraver le recours individuel de ses ressortissants devant la Cour européenne. Cette autre accusation devrait toutefois faire l'objet d'une enquête sur place.
Le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Victor Posuvalionk, dans une interview au journal "Argumenti I Fakti" accuse les États-Unis de pratiquer une politique de "deux poids deux mesures" sur le problème kurde. A la question "Pourquoi le Conseil de Sécurité de l'ONU ne se saisit pas de la question kurde en Turquie alors que l'armée turque anéantit les Kurdes qui vivent sur son territoire et qui sont privés d'autonomie, pourquoi les États-Unis ne recourent pas à des représailles militaires et économiques contre la Turquie ?" le vice-ministre russe répond: "Nous sommes opposés à cette politique de deux poids deux mesures qui consiste à punir l'Irak et à épargner la Turquie alors que ces deux États persécutent également leurs populations kurdes. La Russie souhaite que les persécutions à l'encontre du peuple kurde prennent fin et que ce peuple puisse jouir de son autonomie partout où il vit". Le vice-ministre russe n'a pas indiqué si son pays allait saisir le Conseil de Sécurité de l'ONU du sort du peuple kurde en Turquie.
L'opinion turque vient d'apprendre que la Cour de sûreté de l'État N° 2 d'Ankara avait autorisé par une décision secrète du 10 janvier 1995 les écoutes téléphoniques. La Direction générale de la Sûreté procède ainsi avec une "couverture légale" à l'écoute des téléphones mobiles et des téléphones de voiture afin "d'empêcher les activités des forces criminelles menaçant l'unité de la patrie et de la nation". Cette autorisation signée du juge militaire Ülkü Coskun concernait d'abord les 7 départements relevant du ressort de cette Cour. Elle a été ensuite étendue à l'ensemble du pays rapporte le quotidien Turkish Daily News du 20 septembre. Le quotidien Hürriyet du 16 septembre qui confirme cette information et relève que cette pratique "constitue une infraction grave de l'article 22 de la Constitution garantissant la liberté de communication et la confidentialité de celle-ci", souligne qu'aucun des ministres concernés (Intérieur, Justice, Communication) de l'époque ne semble avoir été mis au courant de cette décision. Celle-ci permet à la police d'enregistrer l'ensemble des communications téléphoniques de qui elle veut car l'autorisation n'est pas nominative, elle donne à la police carte blanche et oblige les PTT ainsi que les opérateurs privés de téléphone mobile à coopérer avec elle. Les citoyens turcs, qui n'ont guère d'illusions sur leur État, se doutaient que leurs téléphones classiques pouvaient être écoutés à tout moment. Ils pensaient cependant que les téléphones mobiles étaient hors de portée de la police et c'était sans doute la raison principale de leur engagement pour cette innovation. Les voilà informés des prouesses techniques de leur police se vantant de pouvoir enregistrer 23 000 communications par minute, et du caractère policier de leur État. Même Mme. Çiller qui, de son bureau de Premier ministre, préférait utiliser son "mobile" de peur que ses autres téléphones ne soient sur table d'écoutes doit maintenant déchanter en apprenant que les chefs de la police, et leurs commanditaires de l'armée, n'ignoraient rien de ses petits secrets.