Le président tchèque Vaclav Havel a effectué, du 10 au 12 octobre, une visite officielle très remarquée en Turquie. Au cours de cette première visite d’un chef d’Etat tchèque dans la République turque, V. Havel a rencontré à Ankara les principaux dirigeant turcs, dont le président Sezer, signé trois accords de coopération et de commerce puis s’est rendu à Izmir et à Istanbul. Dans cette dernière ville, qui reste la capitale culturelle et industrielle du pays, le président tchèque devait en principe rencontrer les hommes d’affaires turcs pour les encourager à s’intéresser davantage à la République tchèque.
Cependant, il a décidé d’inviter à déjeuner à sa résidence stambouliote du Palais Çiragan une douzaine de défenseurs de droits de l’homme, dont Akin Birdal et plusieurs personnalités kurdes. Selon le compte-rendu de l’agence tchèque CTK, le président Havel, après avoir interrogé ses convives sur le sort des Kurdes en Turquie, a exprimé son soutien à leur appel pour le respect et la reconnaissance de leur droits en tant que peuple distinct, y compris le droit d’utiliser leur langue dans tous les domaines de la vie.
Lors de ses entretiens avec le président et le Premier ministre turcs, le président tchèque a également plaidé en faveur " des droits de la minorité kurde " et de la libération des prisonniers d’opinion dont l’écrivain-avocat Esber Yagmurdereli.
Interrogé par la presse, dont le quotidien Milliyet du 13 octobre, sur l’usage du mot " minorité kurde ", le président tchèque a déclaré : " D’une manière générale je suis pour l’octroi aux minorités de certains droits. Je n’ai pas voulu que l’on interdise aux Tchèques et aux Slovaques le droit d’utiliser leur langue dans la Fédération tchécoslovaque. Je ne pense pas que la différence de langue entre les deux secteurs de Chypre soit un problème. C’est pourquoi je demande qu’on autorise les Kurdes à utiliser leur langue dans toute la Turquie ".
Vaclav Havel est connu pour son intérêt pour le peuple kurde depuis l’époque de la Charte 77. Arrivé au pouvoir à la suite de la révolution de velours il n’a pas, comme tant d’autres politiciens, mis ses convictions dans sa poche afin " de ne pas froisser la sensibilité " de tel ou tel Etat ou de ne pas compromettre des intérêts commerciaux. Il a, à plusieurs reprises, défendu le droit du peuple kurde à la survie, à la sauvegarde de son identité et à la maîtrise de son destin. En cela, il s’inscrit dans la lignée de Nelson Mandela qui avait refusé " le prix Atatürk des droits de l’homme " que le gouvernement turc voulait lui décerner et avait demandé à Ankara de cesser de persécuter le peuple kurde avant de parler des droits de l’homme.
La prise de position du président tchèque a, comme on pouvait s’y attendre, déclenché une campagne hostile bien orchestrée dans les media turcs. Ceux-ci avaient à l’époque abreuvé Mandela d’injures odieuses (" Sale nègre ", " nègre ingrat ", etc..). Le président Havel s’en tire finalement avec un blâme sévère infligé par le président du syndicat des journalistes turcs, Oktay Eksi, dans un éditorial à la Une du quotidien Hürriyet du 14 octobre au titre éloquent : " Havel a tout gâché ". Suit une longue diatribe sur le thème de l’ignorance de l’histoire turque, du traité de Lausanne qui ne reconnaît le statut de minorité qu’aux non musulmans, etc. et la conclusion : " Alors qu’avec sa jeune et jolie épouse le président tchèque auréolé de son passé de résistant " anti-communiste et de " son image d’image d’homme de culture " avait tout pour séduire le public turc, " il a tout gâché en s’attaquant à coup de hache au sujet le plus sensible de la Turquie ".
Après la visite de Jalal Talabani, chef de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), Massoud Barzani, leader du Parti Démocratique du Kurdistan (PDK), est arrivé en Turquie le 3 octobre pour s’entretenir avec le Premier ministre turc Bülent Ecevit des derniers développements dans sa région. Il s’est entretenu également avec le chef des services secrets turcs (MIT), Senkal Atasagun et le sous-secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères Faruk Logoglu.
M. Barzani a indiqué que la Turquie avait payé des compensations à des familles kurdes irakiennes, victimes d’un raid de l’aviation turque mené en août dans la région. La Turquie avait reconnu le 18 août y avoir mené trois jours auparavant des raids, ajoutant qu’elle étudiait les allégations selon lesquelles cette attaque avait tué plus d’une quarantaine de civils.
Le leader kurde irakien, après une escale de quelques jours à Vienne, s’est rendu à Londres à l’invitation du M. Peter Hain, ministre britannique des Affaires étrangères. Celui-ci avait également invité Jalal Talabani dans l’espoir d’organiser un sommet kurde irakien afin d’avancer dans l’application de l’accord inter-Kurdes de Washington du 17 septembre 1988. Cependant M. Talabani n’est pas venu.
Selon un porte parole britannique la rencontre Barzani-Hain du 24 octobre a notamment porté sur des mesures de renforcement de la confiance. Londres a, à cette occasion, réitéré son engagement à défendre l’autonomie kurde de fait et à assurer à la région kurde le reversement de 13% des revenus générés par la résolution pétrole-contre-nourriture des Nations-Unies. M. Hain, s’est félicité que grâce à une meilleure administration et aux revenus du pétrole la région kurde a pu panser ses plaies, assurer une certaine prospérité dans un climat démocratique. C’est là un exemple pour tout l’Irak a-t-il assuré. Le ministre britannique a indiqué qu’il recevrait M. Talabani à une date ultérieure dans le cadre de l’effort de réconciliation et de paix entre les deux principales factions kurdes irakiennes.
M. Barzani a également été reçu au British Department of International Development où le sous—secrétaire d’Etat George Foulken l’a assuré que " le gouvernement britannique continuera ses projets humanitaires et de développement dans la région du Kurdistan ". Il a appelé à l’élaboration des projets agricoles et de lutte contre la sécheresse (voir plus loin notre revue de presse).
Par ailleurs, l’UPK, longtemps accusée par Ankara de soutenir le PKK, a fait état ces derniers temps de violents accrochages entre ses peshmergas et des maquisards du PKK, plus d’une vingtaine de peshmergas auraient été tués en deux semaines de combats. Le nombre de victimes du côté du PKK serait de 13. Le PKK annonce avoir déclaré un cessez-le-feu depuis déjà plusieurs jours et l’UPK nie toute offensive contre le PKK dans la région. Le PKK accuse son ancien allié de collaborer avec Ankara et trouve suspect le fait que les combats aient débuté à la suite de la visite en Turquie de Jalal Talabani en juillet dernier. La chaîne de télévision, Medya TV, proche du PKK, a montré un poids lourd, impliqué dans un accident de la route, transportant des armes et des munitions de la Turquie vers le Kurdistan irakien. L’UPK, quant à elle, joue sa propre existence puisqu’elle accuse le PKK, jusqu’alors toléré dans sa région, de vouloir s’emparer des villages pour sa propre cause.
Une délégation " des mères kurdes pour la paix ", toutes mères des combattants du PKK tombés dans ces combats, est allée rendre visite aux deux partis pour les convaincre d’arrêter " la lutte fratricide "
Le président turc, Ahmet Necdet Sezer a, le 1er octobre, de nouveau demandé des réformes législatives et constitutionnelles au cours de la cérémonie d’ouverture de la nouvelle session parlementaire. Les hauts commandants de l’armée turque, dont Hüseyin Kivrikoglu, chef d’état-major, ont assisté au grand complet à la cérémonie. Le quotidien turc Sabah du 2 octobre parle d’une " douche froide pour le gouvernement ", en précisant que le président avait donné des leçons de droit au gouvernement. Les observateurs n’ont pas manqué de noter la tension entre le gouvernement et le chef d’Etat ; aucun des membres du gouvernement n’a applaudi à l’entrée du président au Parlement et ni au cours de son discours. Voici un extrait de ce discours :
" Le concept d’Etat de droit est une particularité déterminante de la démocratie contemporaine. La démocratie et l’Etat de droit sont des notions de base qui ne peuvent se concevoir l’une sans l’autre (…) Le fait de croire que les règles sont établies pour les gouvernés et que les gouvernants disposent d’une liberté de s’y soumettre ou pas est la source de nombreux problèmes. Au bout du compte, la vie démocratique devient une sorte de compétition dont le prix est la liberté de ne pas se soumettre aux règles. C’est pourquoi il est important que la direction en premier lieu respecte les règles mais aussi surveille leur application. L’Etat de droit ou encore l’Etat attaché au droit, suppose l’attachement au droit des gouvernants comme des gouvernés. La première des conditions pour permettre la soumission au droit de la haute autorité étatique est que le contrôle juridique implique tous les organes de l’Etat "
À propos des décrets-lois, objet d’une sérieuse tension entre le gouvernement et le président ces derniers temps, M. Sezer a déclaré ceci : " Le pouvoir législatif appartient au Parlement. Le droit d’établir des décrets-lois octroyés au conseil des ministres, est un pouvoir propre limité quant à son but et son objet (…) D’autre part les décrets-lois sont autorisés à condition qu’il y ait une situation d’urgence et de nécessité (…) Dans le cas contraire (…) il y aurait un déséquilibre entre le pouvoir législatif et l’exécutif, l’organe exécutif se plaçant au-dessus du législatif, les décrets-lois, pourtant exceptionnels, devenant de ce fait un pouvoir fondamental ".
En ce qui concerne la peine de mort : " Le sujet nécessite une révision constitutionnelle. Certains crimes punis par la peine de mort dans le code pénal turc, peuvent l’être par une peine plus lourde d’emprisonnement à perpétuité (…) "
" Il est temps d’entreprendre des améliorations répondant aux besoins de la nation turque dans notre Constitution et d’intégrer les normes universelles dans notre système de droit (…) Ces changements devront être établis non pas pour satisfaire l’Union européenne, mais bien parce que notre peuple le mérite (…) Certains problèmes de l’Etat de droit, faisant obstacle à la suprématie du droit, relatif au contrôle constitutionnel, n’ont toujours pas été surmontés à ce jour. Le provisoire article 15 de la Constitution en son dernier alinéa constitue le point principal de ces problèmes. Les lois et les règlements élaborés entre le 12 septembre 1980 [ndlr : date du coup d’Etat militaire] et le 7 décembre 1983 ne peuvent toujours pas faire objet de contrôle constitutionnel. Pour rejoindre les nations contemporaines, démocratiques, il faudrait réviser la Constitution et élaborer une Constitution libérale, pluraliste, participative, confiante, garantissant l’équilibre entre les missions et les fonctions des différents organes étatiques et ne laissant pas vide de sens le principe du droit ".
" Les relations et les coopérations internationales ne veulent pas dire la fin de l’indépendance et l’abandon de la souveraineté nationale. Le point essentiel pour l’indépendance et la souveraineté nationale est de maintenir l’équilibre, lorsque des affaires étrangères sont en cours, pour sauvegarder le pouvoir décisionnel de l’Etat ".
La Grande assemblée nationale turque (TBMM), chambre monocamérale du Parlement turc, a, au cours de sa session du 18 octobre, élu le député d’extrême droite Ömer Izgi du parti de l’Action nationaliste (MHP), à sa présidence. Sur les 550 députés, 533 ont pris part au vote. Ö. Izgi a obtenu 264 voix contre 262 à son rival Basesgioglu, du parti de la Mère-patrie (ANAP) de M. Yilmaz.
Les députés du parti de la Gauche démocratique (DSP) du Premier ministre et ceux du parti de la Juste voie (DYP) de Mme Çiller ont, conformément aux consignes de leur direction, dans leur très grande majorité voté en faveur du candidat d’extrême droite. Ceux d’ANAP et les islamistes pour son rival.
Ömer Izgi devient ainsi le deuxième personnage de l’Etat turc après le président de la République. Dès son élection, il a assumé l’intérim du président Sezer en voyage à l’étranger.
La MHP est un parti néo-faciste fondé par le colonel Türkes, condamné pour ses activités pro-nazies avant de devenir l’un des auteurs du coup d’Etat militaire de 1960. Prônant un empire turc allant de l’Adriatique à la muraille de Chine, militant pour la purification de la Turquie de ses populations non turques, ce parti est connu pour ses actions virulentes et meurtrières contre les Kurdes et les mouvements turcs de gauche. Ses milices armées, les " Loups gris ", ont été impliqués dans l’assassinat de milliers de démocrates turcs et kurdes en Turquie, dans des conflits du Caucase, dans la tentative d’assassinat du Pape ainsi que dans une série d’activités mafieuses. Sous le gouvernement de Mme Çiller, une grande partie de ces milices ont été enrôlées dans les sinistres " unités spéciales " chargées de casser du Kurde et de basses besognes de la police turque au Kurdistan.
Accédant au pouvoir sous l’aile protectrice du nationaliste de " gauche " Bulent Ecevit, ce parti, qui dans n’importe quelle démocratie digne de ce nom aurait été dissous pour ses activités criminelles et son apologie du racisme et de la violence, s’empare ainsi progressivement de rouages essentiels de l’Etat turc par une stratégie que son président D. Bahçeli qualifie lui même d’une " main de fer dans un gant de velours ".
Combien de temps, l’Union européenne et son Parlement vont-ils garder le silence sur cette situation intolérable dans un pays candidat ?
La Cour européenne des droits de l’homme, a, le 10 octobre, une nouvelle fois condamné la Turquie pour "violation du droit à la vie" d’un enseignant kurde, Zubeyir Akkoç, tué en 1993 et pour "torture" à l’encontre de son épouse, Nebahat, qui a osé porter l’affaire devant juridiction de Strasbourg.
Syndicaliste enseignant, Zubeyir Akkoç avait été abattu le 13 janvier 1993 par un escadron de la mort des forces spéciales turques qui, de 1992 à 1999, ont ainsi assassiné impunément plus de quatre mille intellectuels kurdes non impliqués dans des actions violentes dans le but de décapiter et de terroriser la population kurde. S’agissant d’une politique décidée par le sommet d’Etat turc les procureurs refusaient l’ouverture d’information judiciaire impliquant des membres "des forces de l’ordre". Devant un tel refus, Mme Akkoç avait, dès le 1er novembre 1993, déposé plainte devant la Cour européenne. Furieuse, la police turque l’a arrêtée en février 1994 et l’a placée en garde-à-vue. Celle-ci a duré dix jours pendant lesquels Mme Akkoç a été sauvagement torturée. Mise à nu, rouée de coups, soumise à des chocs électriques, plongée dans de l’eau glacée puis dans de l’eau bouillante, Mme Akkoç a également été exposée à des lumières aveuglantes et à des " musiques " assourdissantes. Ses tortionnaires exigeaient qu’elle retire sa plainte contre le gouvernement turc.
Femme de courage et de conviction, elle récidiva en déposant une nouvelle plainte contre la Turquie pour " tortures par agents de la force publique ".
Dans son verdict, intervenant sept ans après les faits, la Cour européenne a reconnu les actes de torture et jugé que les autorités turques n’avaient pas mené d’enquête efficace sur les circonstances du meurtre de M. Akkoç. Sans pouvoir établir avec des preuves formelles que des agents de l’Etat aient été impliqués dans ce meurtre, la Cour relève " la tendance des autorités turques à imputer la responsabilité de la violence politique au PKK ". Elle note également que dans des affaires similaires survenues à la même époque dans cette région kurde le procureur turc omettait " d’instruire les plaintes de personnes affirmant l’implication des forces de l’ordre dans des actes illégaux et avait attribué la responsabilité des incidents au PKK sur la base de preuves minimes ".
La Cour européenne a alloué à la requérante la somme de 35.000 livres sterling (59.049 euros) pour dommage matériel, de 40.000 livres (67.485 euros) pour préjudice moral ainsi que 13.648,80 livres (23.027 euros) au titre des frais et dépens.
Le même jour, dans une seconde affaire Ankara a également été condamné pour torture.
Au terme des enquêtes menées dans la ville kurde de Batman et dans les villes voisines de 1998 à 2000, la Commission des droits de l’homme du Parlement turc vient de rendre public un rapport fourmillant de témoignages insoutenables de victimes de tortures. Selon ce rapport, les personnes placées en garde-à-vue à Batman et dans les villes voisines ont subi d’une manière routinière les mêmes tortures. La routine consistait à " leur faire visiter les sites historiques et touristiques du pays " avec des musiques et des tortures adaptées à chaque étape de ce singulier tourisme. Les tortionnaires semblent avoir une prédilection particulière pour une marche des Janissaires ottomans partant en guerre contre les infidèles européens, Mehter Marsi, puisque toutes les victimes kurdes ont déclaré à la Commission avoir été torturées en compagne de cette musique jouée à fond où les tortionnaires se donnaient du cœur à l’ouvrage à chaque occurrence des strophes célèbres " marche en avant, le soldat turc, ne recule jamais ".
Présidée par Mme Piskinsut, députée du DSP de M. Ecevit, peu suspecte de sympathie pro-kurde, la Commission a consigné une série de témoignages d’où il ressort que la police est assurée de l’impunité et que la justice, au courant de la torture, a condamné les prévenus sur la base de dépositions arrachées sous la torture.
Rendant compte du rapport, le quotidien Milliyet, dans son édition du 14 octobre, cite le témoignage d’une victime comparaissant devant le tribunal à Batman. Alors qu’il rejette toutes les accusations portées contre lui, le juge lui dit : " mais vous les avez bien reconnues dans votre déposition à la police ", " J’ai dû signer ce texte sous la torture " affirme le prévenu. Et le juge de l’admonester : " vous ne pouviez donc pas résister deux jours de plus à la torture ? ".
D’autres victimes parlent des méthodes de tortures dénommées " voyages vers l’espace, vallée de la mort ", etc. Que parmi ces milliers de victimes de la torture quelques unes s’adressent à la Cour européenne et obtiennent après 7 ou 8 années de démarches une condamnation symbolique de la Turquie ne semble nullement déranger les policiers dans leur pratique quotidienne de la torture des Kurdes.
Les prises de position de Mme Piskinsut a déplu aux autorités. Elle a été écarté dans ménagement de ses fonctions. Elle y sera remplacée par un député d’extrême droit.
Voici la réaction de l’éditorialiste Fatih Altayli le 26 octobre dans le quotidien Hürriyet : " Ils ont encore trouvé le président de la commission en mettant une annonce dans la presse. Les qualités requises sont cela : Il doit être sourd pour ne pas entendre les victimes de la torture. Il doit avoir du savoir-vivre pour prévenir à l’avance les commissariats qui seront visités. Il doit être stupide pour croire que malgré l’annonce de sa visite un policier surpris de pratiquer le falaka ne fait en fait que carder le coton. Il doit résister aux chocs électriques pour ne pas être électrocuté lorsqu’il serrera la main des victimes. Il doit être retraité de la police, pour soumettre d’abord les rapports non pas au Parlement ou à la presse mais à son " chef " Tantan [ndlr : ministre de l’Intérieur]. De cette façon, la Turquie sera débarrassée de la honte de torture. Nous franchirons une étape de plus pour nous conformer à l’UE. Sema (Mme Piskinsüt) va partir et les accusations de tortures vont s’arrêter. Pour ce qui concerne les incidents provoqués par le mauvais œil après les interrogatoires ou les placements en détention, une nouvelle commission parlementaire pour la protection contre le mauvais œil sera créée. Ils mettront probablement un député étiqueté Fazilet (islamiste) à sa tête ".
Trois villageois kurdes, autorisés par la gendarmerie de Hakkari à aller cueillir des noix de leurs villages vidés par la force il y a déjà quelques années, ont, le 22 octobre, été tués par les soldats turcs venus de la province voisine de Sirnak. [ndlr : Selon les statistiques officielles, plus de 3400 villages kurdes ont été évacués par les militaires turcs]. Une des victimes blessées, seul rescapé de l’opération, est arrêtée et les corps des trois autres ne sont toujours pas rendus à leurs familles. Aussi, Macit Piruzbeyoglu, député de la Mère patrie (ANAP) de Hakkari, est-il intervenu auprès du ministère de l’intérieur afin que les victimes aient au moins une sépulture décente. Mais, les corps restent introuvables jusqu’à présent et les familles accusent les soldats de les avoir dissimulés.
Mehmet Kurt, Cevher Orhan, Salih Orhan et Kemal Tekin, domiciliés au village de Marunis (Yoncali en turc), dans la province de Hakkari, avaient été déplacés en 1993 à Xacort dans la province de Van par les militaires turcs. Après avoir obtenu l’autorisation de la gendarmerie centrale de Hakkari, les quatre villageois étaient venus le 19 octobre dans leur village pour la récolte annuelle des noix. Des soldats en poste dans la région ont alors ouvert le feu en pleine journée sur les villageois. Bilan de l’opération, M. Kurt, C. Orhan, S. Orhan, sont morts sur le coup alors que K. Tekin, blessé et réfugié auprès des protecteurs de villages de la tribu de Beytushebat Pirusi, a été remis aux escadrons de Sirnak. M. Piruzbeyoglu a dénoncé le fait que Kemal Tekin ait été contraint par les soldats de Sirnak d’affirmer que le massacre avait été perpétré par le parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).
Les organisations de défense des droits de l’homme ont vivement critiqué la tuerie et Sabahattin Savagci, responsable du parti de la démocratie du peuple à Hakkari (HADEP) a déclaré ceci : " Nous pensons que des initiatives comme le pont artistique Istanbul-Hakkari [ndlr : initiative culturelle des artistes kurdes originaires d’Hakkari et d’ailleurs ayant pour but de faire connaître la région et de la rendre plus dynamique et pacifique], contribue à la réalisation de la démocratie et de la paix. Tout juste après cette initiative marquée par la paix, un tel massacre démontre qu’il y a encore des forces puissantes contre la paix en activité en Turquie. Ce genre de démarche provocatrice ne réussira pas à ébranler notre foi en la paix. Nous n’avons par ailleurs aucune nouvelle de la victime sortie blessée de l’opération. Pourquoi est-ce qu’il reste tout ce temps placé en garde-à-vue alors que le délai légal est depuis longtemps dépassé ? Je ne crois pas qu’il puisse sortir aisément et tout à fait indemne de là-bas ".
101 membres du Congrès américain ont, le 20 octobre, soutenu la résolution 461 de la Chambre des représentants appelant à la libération immédiate et inconditionnelle de Leyla Zana, Orhan Dogan, Hatip Dicle et de Selim Sadak, quatre députés kurdes du Parlement turc emprisonnés et ont également demandé la levée des interdictions sur la langue et la culture kurdes.
En 1999, 153 membres du Congrès américain avaient signé une lettre adressée au président Clinton, lui demandant d’œuvrer pour la libération des députés kurdes. Les autorités turques n’avaient pas cédé à la demande, mais avaient offert à Leyla Zana la possibilité de la libérer si elle faisait une demande pour raison de santé. L. Zana avait refusé de se prêter à ce genre de manœuvre et avait préféré rester solidaire de ses collègues. Les quatre députés kurdes se trouvent depuis mars 1994 incarcérés à la prison Ulucanlar d’Ankara.
Le 11 octobre, 462 clandestins dont, 345 Kurdes irakiens, abandonnés en pleine mer sur un cargo turc, ont pu débarquer dans le port italien d’Otrante. L’équipage de ce vieux cargo turc Diler avait laissé ses passagers à leur sort à vingt mille des côtes italiennes. Repéré par des gardes-côtes italiens le navire a été conduit à Otrante par un équipage italien. Ses passagers épuisés de fatigue ont été conduits dans un centre d’accueil pour être identifié et soignés.
Le ministre italien de l’Intérieur, Enzo Bianco, a affirmé que les malheureux passagers, dont près de la moitié des femmes et des enfants, " allaient vers une mort certaine ". Selon lui, les passeurs appartiennent à " une organisation criminelle des plus dangereuses et sont d’une violence inouïe ".
Ils avaient embarqué à Izmir, en Turquie, et payé 2500 dollars par adulte et la moitié par enfant pour le voyage. L’embarquement à Izmir s’est déroulé au vu et au su des autorités portuaires et policières turques, et sans doute avec leur complicité. Avoir le moins de Kurdes possible dans la région est l’une des lignes de force de la politique turque. En plus ce trafic sur une vaste échelle rapporte beaucoup d’argent aux divers services turcs. C’est pourquoi le souhait formulé par M. Bianco d’une " meilleure coopération avec la police turque " pour endiguer cet afflux de réfugiés risque de rester un vœu pieux tout comme les autorités turques n’ont jusqu’ici pas fait preuve d’empressent pour la coopération policière européenne contre le trafic de drogue, car ce trafic rapporte bon an mal an de 35 à 40 milliards de dollars à l’économie " grise " turque.
Par ailleurs, le 18 octobre, la police italienne a trouvé sur une route près de la frontière albanaise les corps de six Kurdes irakiens asphyxiés qui, selon toute vraisemblance, venaient de Grèce à bord d’un poids lourd. Après le passage de la frontière le chauffeur a jeté sur le bord de la route les cadavres de ses passagers clandestins.
Le procès de Mme Cihan Sincar, maire HADEP de la ville de Kiziltepe, accusée de porter atteinte à l’intégrité territoriale de la Turquie sur le fondement de l’article 8 de la loi anti-terreur turque, s’est ouvert le 24 octobre devant la Cour de sûreté de l’Etat (DGM) de Diyarbakir. Il lui était reproché entre autres d’avoir prononcé le mot " Kurdistan " au cours d’une interview accordée le 12 avril au quotidien suédois Dagens Nyheter mais aussi d’avoir déclaré que des paysans kurdes avaient dû fuir après la destruction de leurs villages par les militaires.
L’intérêt du procès était double, car non seulement il s’agit une nouvelle fois d’une représentante élue directement par le peuple poursuivie pour ses propos mais également par le fait que Per Jonsson, journaliste suédois du quotidien en question, soit cité comme témoin à décharge. Ce dernier a déclaré qu’il ne se souvenait pas vraiment si Mme Sincar avait employé le mot " Kurdistan " dans une interview de deux heures et demi, réalisée à l’aide d’un interprète, mais que pour les lecteurs suédois, il était naturel d’appeler Kurdistan cette région de la Turquie aussi bien que le nord de la Suède la Laponie et l’ouest de la Turquie la Thrace. Le président de la Cour a demandé ensuite : " Est-ce que Cihan Sincar a déclaré que l’Etat turc a détruit 3 000 villages kurdes ? ". Ce à quoi, le journaliste a rétorqué qu’il était le seul responsable de ce propos et que seuls les mots mis entre guillemets pouvaient être attribués à Mme Sincar. Le verdict est prévu pour le 21 novembre.
La Cour de sûreté de l’Etat d’Istanbul a, le 23 octobre, ouvert une instruction contre Akin Birdal, vice-président de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) et ancien président de l’Association turque des droits de l’homme (IHD), pour " incitation à la haine " sur le fondement de l’article 312 du code pénal turc. Le parquet d’Istanbul reproche à M. Birdal les propos qu’il a tenus au cours d’un débat, le 21 octobre, à Bremerhaven (Allemagne) ayant pour thème " Les droits de l’homme en Europe-la Turquie est-elle un nouveau partenaire de l’UE ? ".
Les propos incriminés sont les suivants : " Le président Sezer n’a pas voulu ouvrir le débat sur la question arménienne en déclarant qu’il faut laisser cela " aux historiens et à l’histoire ". Personne n’ignore ce qui a été fait contre les Arméniens. La Turquie devra demander pardon pour le génocide contre les Arméniens et contre les autres minorités, accompli au cours de l’histoire turque. Ismail Cem [ndlr : ministre turc des affaires étrangères], est juif, il devrait annoncer cela ". Akin Birdal encourt une peine d’un à trois ans de prison.
La Turquie en colère et frustrée a fait monter la pression, le 4 octobre, sur les Etats-Unis, son allié privilégié, après l’adoption d’un projet de loi par une commission du Congrès reconnaissant le génocide arménien.
Le chef d’état-major de la puissante armée turque, le général Huseyin Kivrikoglu, a repoussé une visite bilatérale prévue mi-octobre aux Etats-Unis dans la foulée de l’adoption du projet, qui qualifie de génocide les massacres d’Arméniens perpétrés sous l’Empire ottoman entre 1915 et 1923, a indiqué un porte-parole de l’état-major.
Le ministère turc des Affaires étrangères a regretté dans un communiqué que les "messages" lancés par la Turquie après l’adoption de la résolution en sous-commission n’aient "pas été suffisamment compris". Ankara a averti que l’adoption de cette loi par la Chambre des représentants aurait de graves répercussions sur leurs relations, aggraverait la tension dans le Caucase, ainsi qu’entre Ankara et Erevan, qui n’entretiennent pas de relations diplomatiques.
La presse turque était glacée: "Notre pire peur s’est concrétisée", titrait le quotidien populaire Sabah. "Le scandale attendu a éclaté", soulignait le journal Milliyet, tandis que Yenibinyil titrait : "Le piège arménien".
Le journal à grand tirage Hurriyet mettait en exergue le "bon sens" du Sénat français, qui a le même jour repoussé la mise à son ordre du jour d’une proposition comparable : "Calculs électoraux aux Etats-Unis, bon sens en France".
Les Arméniens affirment qu’un million et demi d’Arméniens ont été tués entre 1915 et 1917 lors d’un génocide sous le régime des Jeunes turcs. La Turquie parle de 300 à 500.000 morts lors de massacres et de déportations forcées, mais réfute la thèse d’un génocide. Elle met en avant que des Turcs sont aussi tombés victimes des Arméniens, dont certains collaboraient avec l’ennemi russe. La question arménienne est un tabou qui ne souffre pas de discussion en Turquie, où toute tentative pour faire reconnaître un génocide, en France ou aux Etats-Unis, est mise sur le compte d’Erevan.
Ainsi, le directeur du Centre de Recherches sur les relations turco-arméniennes et le génocide, qui ouvrait ses portes précisément le 4 octobre à l’Université d’Erzurum a indiqué qu’il allait travailler "sur le génocide que les Arméniens ont tenté de perpétrer contre les Turcs".
Le Département d’Etat américain se démène de son côté pour arrêter la progression de la résolution au Congrès, soulignant l’importance géostratégique de la Turquie, fidèle alliée de l’OTAN dans une région troublée, voisine du Caucase, de l’Irak et de l’Iran. Quoi qu’il en soit des tensions entre les deux pays, elles ne devraient pas remettre en cause leur partenariat stratégique : le ministère turc des Affaires étrangères a prévenu qu’une riposte à l’éventuelle adoption du projet de loi sur le génocide par la Chambre "ne portera pas atteinte aux intérêts nationaux turcs, ne fera pas le jeu de l’Arménie et des cercles arméniens, et prendra en compte la relation spéciale entre Ankara et Washington".
La classe politique et les médias turcs mènent une leur croisade contre le projet de résolution sur le génocide arménien en examen devant la Chambre des représentants du Congrès américain.
Le gouvernement turc laisse entendre qu’en cas d’adoption de ce projet, il pourrait exercer des représailles allant de la dénonciation des contrats d’énergie signés ave les compagnies américaines d’un montant de 11 milliards de dollars, à l’interdiction d’usage de la base aérienne d’Incirlik utilisée par les aviations américaine et britannique dans leurs opérations de surveillance du territoire irakien, à la normalisation avec le régime de Saddam Hussein et à l’exclusion de firmes américaines du marché des hélicoptères militaires. De quoi faire trembler Washington, croit-on, dans les milieux officiels.
Le chef de l’opposition, Mme Çiller, va plus loin dans la surenchère. Elle demande qu’en cas d’adoption de cette résolution la Turquie expulse tous ses citoyens arméniens vers l’Arménie et qu’elle fasse payer cher celle-ci par des mesures les plus efficaces, économiques, sans doute, mais aussi militaires.
Les 30.000 Arméniens rescapés du génocide qui sont encore tolérés à Istanbul se sentent particulièrement exposés et otages. Magnanime, Mme Çiller veut leur donner une chance de prouver leur loyauté envers la Turquie en signant personnellement une lettre adressée au Congrès américain " pour dénoncer les agissements des milieux hostiles à la Turquie qui à l’instigation de l’Arménie veulent détruire le climat de paix, de stabilité et de fraternité qui règnent dans notre pays ".
Cette lettre a été publiée in extenso dans le quotidien Hürriyet du 11 octobre.
Cette prise de position raciste et belliqueuse de Mme Çiller n’a, bien sûr, donné lieu à aucune poursuite judiciaire dans un pays où pourtant un ancien Premier ministre, N. Erbakan, a été condamné à un an de prison pour " incitation à la haine raciale ", pour une simple phrase : " Si l’idéologie officielle affirme : ‘Heureux celui qui se dit Turc, comment empêcher nos frères Kurdes de se dire fiers d’être Kurdes’".
De même, les appels quotidiens des journalistes, des hommes politiques " des mères de martyrs " demandant " aux Kurdes qui refusent l’assimilation, qui n’aiment pas Atatürk, qui n’aiment pas notre drapeau de s’en aller ailleurs, de quitter le pays, y compris le sud-est (lire le Kurdistan) que nous, Turcs, avons conquis par la force " diffusés par les chaînes de télévision publiques et privées ne sont pas considérés comme des incitations à la haine raciale et ne donnent lieu à aucune poursuite judiciaire.
La fraude et le trucage affectent tous les domaines de la vie politique et économique turque. Il y a quelques semaines, un plier de l’establishment, Kamuran Inan, ancien ministre et actuel président de la Commission des Affaires étrangères du Parlement, avait dénoncé les statistiques officielles turques. Voilà que la fraude touche un domaine a priori fondamental, celui du recensement de la population. En effet, le quotidien turc Hürriyet dénonce le 28 octobre en sa Une les supercheries du recensement du 22 octobre en titrant " Le choc : La population turque est de 71,9 millions, 5 millions de personnes ont été inscrites en plus ". Le quotidien qualifie le recensement d’ " escroquerie historique " et annonce que Tunca Toskay, ministre d’Etat chargé de l’affaire, a convoqué les spécialistes et démographes en leur demandant de revoir leur copie.
Ertugrul Özkök, rédacteur en chef du quotidien continue ainsi " La population turque était de 56 473 000 en 1990, sept ans après le chiffre était de 62 865 000. Ce qui veut dire que la population turque avait augmenté de 6 millions en sept ans (…) Aujourd’hui en trois ans, il y a une augmentation de 9 millions de personnes. Ceci est impossible ". Le quotidien annonce clairement une fraude organisée – les subventions étatiques sont accordées selon la population municipale ; 35 millions par habitants–et souligne que les résultats définitifs ne seront publiés qu’après vérification. Le Premier ministre Bülent Ecevit a été saisi de l’affaire.
Le sort de l’avocat-écrivain turc aveugle qui a déjà passé 17 de ses 55 années d’existence dans les geôles turques pour délit d’opinion suscite une émotion grandissante dans l’opinion publique internationale.
Le 29 septembre, le barreau de Bordeaux, au cours d’une cérémonie émouvante à l’Ecole nationale de la magistrature en présence de nombreuses personnalités a remis son prestigieux Prix Ludovic Trarieux des droits de l’homme au fils de Me Yagmurdereli.
Le 13 octobre, 11 ONG occidentales dont la Fédération Internationale des journalistes, Human Rights Watch, la Fédération Internationale des association et institutions des bibliothèques, le PEN International, les PEN américain et canadien, ont adressé une lettre commune au Premier ministre turc Bülent Ecevit lui " demandant avec force, de décréter, à l’occasion de la fête nationale turque du 29 octobre, une vaste amnistie et afin de démontrer la détermination du gouvernement turc de se conformer aux normes internationales des droits de l’homme et aux principes de libre expression de libérer immédiatement et inconditionnellement de prison Esber Yagmurdereli ".
Les signataires rappellent que E. Yagmurdereli " aveugle depuis l’âge de dix ans a poursuivi sa campagne pour faire connaître le sort des Kurdes et autres violations des droits de l’homme en Turquie tout au long de son procès et de son emprisonnement en dépit des risques pour lui-même et a gagné respect et admiration à la fois en Turquie et à l’étranger. A mesure que se prolonge l’emprisonnement de Yagmurdereli croît l’outrage dans la communauté mondiale des droits de l’homme et des artistes ".
Plus de 250 écrivains, issus d’une douzaine de pays, ont signé un appel international en faveur de la libération de Me Yagmurdereli. Parmi les signataires de cet appel adressé au Premier ministre turc un fort contingent d’écrivains américains, scandinaves, britanniques et tchèques.
Lors de sa visite officielle en Turquie le président tchèque s’est fait le porte-parole de cette mobilisation internationale en demandant au président turc la libération rapide de l’écrivain-avocat emprisonné.
Un film documentaire intitulé La Espalda del Mundo (Le dos du monde) réalisé par le cinéaste péruvien résidant en Espagne avec le concours de la télévision espagnole TVE et de nombreuses ONG de droits de l’homme dont le CILDEKT et l’Institut kurde, vient d’obtenir le prix de la critique au Festival international de films de San Sebastian.
Ce documentaire retraçant la vie de Leyla Zana, de son époux Mehdi Zana, ancien maire de Diyarbekir qui après 17 années passés dans les prisons turques vit actuellement en exil en Suède, s’attire les foudres de la presse turque. Donnant l’alerte, le quotidien Hürriyet, dans son édition du 16 octobre, qualifie ce documentaire " hostile à la Turquie " de " deuxième Midnight-Express ",du nom du célèbre film américain sur la vie dans les prisons turques. A défaut de pouvoir exercer la censure turque jusqu’en Europe occidentale, la presse turque joue sur la corde de " la patrie en danger " pour mobiliser ses lecteurs afin qu’ils envoient des lettres de protestation aux représentations espagnoles.