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Bulletin N° 233 | Août 2004

 

 

LA COMMUNAUTÉ CHRÉTIENNE CIBLE D’ATTENTATS MEURTRIERS À BAGDAD ET À MOSSOUL

Six églises chrétiennes ont, le 1er août, été la cible d'attentats en Irak, dont quatre à Bagdad et deux à Mossoul, faisant 10 morts et 50 blessés. C'est la première fois que des églises chrétiennes sont visées depuis l'intervention militaire américaine qui a entraîné la chute du régime de Saddam Hussein l'année dernière.

A Bagdad, au moins neuf personnes ont été tuées dans quatre attentats consécutifs et coordonnés contre trois églises et un séminaire. La première déflagration a eu lieu devant une église arménienne du quartier de Karrada, un quartier très fréquenté de la capitale irakienne où vivent de nombreux chrétiens. Les vitres de l'église ont été brisées et des morceaux de métal ont été projetés à plusieurs centaines de mètres. La deuxième explosion a eu lieu une quinzaine de minutes plus tard devant une église assyrienne située dans le même quartier. Le bruit de l'explosion a été très fort et les vitres de plusieurs bâtiments à proximité ont été soufflées. Deux autres explosions ont eu lieu à proximité d'autres églises chrétiennes de la capitale.

A Mossoul, une voiture piégée a explosé près d'une église chaldéenne. L'attentat, qui a eu lieu dans une zone très peuplée du nord de la ville, a également fait des dégâts importants et plusieurs blessés.

Par ailleurs, une importante explosion s'est produite à Kirkouk près de maisons appartenant à des chrétiens, mais il n'y a eu ni mort, ni blessé, la plupart des gens se trouvant à l'église pour les vêpres.

Le patriarche chaldéen, chef de la plus importante communauté chrétienne du pays, a appelé les chrétiens et musulmans d'Irak à l'union, au lendemain des attentats. “Nous devons collaborer, chrétiens et musulmans, pour le bien de l'Irak car nous sommes une seule famille”, a déclaré Mgr Emmanuel Delly, précisant que cet appel serait contenu dans un message qu'il prépare à l'adresse du gouvernement intérimaire irakien.

Ces attentats ont été condamnés sans réserves par toutes les autorités politiques et religieuses du pays, ainsi que par le Pape Jean Paul II, qui les a qualifié d'”agression injuste contre ceux dont le seul but est de collaborer pour la paix et la réconciliation dans le pays”. Le pape a exprimé sa condamnation dans un message adressé au patriarche chaldéen d'Irak, Emmanuel III, chef de la plus grande communauté chrétienne du pays. Le pape Jean Paul II a écrit et signé de sa main -- ce qui est assez rare -- un message à Mgr Delly, dans lequel il demande “à tous les croyants en un seul Dieu clément et miséricordieux” de s'unir “pour déplorer toute forme de violence”.

Le Conseil mondial des églises (WWC), qui représente les principales confessions chrétiennes à l'exception de l'Eglise catholique, a aussi fermement condamné “toutes les formes de violence qui visent des communautés religieuses ou tout groupe de personnes et qui cherchent à introduire une hostilité entre religions dans le conflit”.

La figure emblématique des chiites irakiens, le grand ayatollah Ali Sistani, a, de son côté, appelé à “travailler tous ensemble, le gouvernement et le peuple, afin de mettre un terme aux attaques contre les Irakiens”. Le chef radical chiite Moqtada Sadr a également condamné ces actes.

De son côté, le comité des oulémas sunnites irakiens a accusé “des parties étrangères” d'être à l'origine de ces attentats “qui visent à diviser le peuple irakien et veulent que le chaos perdure dans l'intérêt des occupants” de l'Irak.

Sur le plan politique, le président irakien Ghazi al-Yaouar a qualifié ces attentats d' “actes terroristes”, également considérés comme “un crime énorme et abominable” par le Premier ministre Iyad Allaoui.

Mouaffak al-Roubaïe, le conseiller irakien à la Sécurité nationale, a estimé que les attentats portent la marque d'Abou Moussab Zarkaoui, réputé proche du réseau islamiste Al Qaïda. “Zarkaoui et ses extrémistes essaient, en fait, de creuser un fossé entre les musulmans et les chrétiens en Irak”, a-t-il ajouté. Un site internet islamiste a attribué à un groupe jusque-là inconnu, le “comité de planification et de suivi en Irak”, un communiqué revendiquant les attentats.

Les minorités religieuses en Irak, notamment les chrétiens, représentent environ 3% de la population, soit quelque 700.000 personnes sur un total de 24 millions d'Irakiens, majoritairement musulmans chiites et sunnites. La récente série d'attaques contre des vendeurs d'alcool, la plupart chrétiens, avaient éveillé les craintes de la communauté, même si, contrairement aux mosquées déjà frappées par des attentats ces dernières années, les églises avaient jusqu'alors été épargnées. Les chrétiens d’Irak constituent l'une des plus anciennes communautés chrétiennes du Moyen-Orient puisqu'ils sont arrivés au Ier siècle après Jésus-Christ en Irak alors que l'Islam n'y a fait son apparition qu'au VIIe siècle.

LE PRÉSIDENT IRAKIEN GHAZI AL-YAOUAR EN VISITE EN TURQUIE

Le président irakien Ghazi al-Yaouar est arrivé le 16 août en Turquie pour une visite de deux jours, au cours de laquelle il a notamment évoqué avec les autorités turques les préoccupations sécuritaires en Irak.

M. al-Yaouar, accompagné de son ministre des Affaires étrangères Hoshyar Zebari, a rencontré le président turc Ahmet Necdet Sezer, le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan et le ministre des Affaires étrangères Abdullah Gul.

Parmi les sujets bilatéraux la question de la sécurité des camionneurs turcs, dont plusieurs sont actuellement détenus aux mains de groupes armés en Irak, a été évoquée, selon des sources diplomatiques turques. Le 2 août, des sites internet islamistes avaient diffusé une vidéo montrant l'assassinat par un groupe islamiste d'un otage turc, Murat Yuce, employé par une société turque et travaillant en Irak pour les Américains. Il s'agissait du premier otage turc tué en Irak.

Les autorités turques ont déjà fait savoir qu'elles réfléchissaient à une série de mesures pour sécuriser les conditions de travail en Irak, qui était le principal partenaire commercial de la Turquie avant la guerre du Golfe de 1991. Elles envisagent notamment de transporter les marchandises entre les villes de Zakho et Mossoul, dans le Kurdistan irakien, puis de laisser les Irakiens les acheminer jusqu'à leur destination finale.

La délégation irakienne a également discuté avec les responsables turcs de l'avenir politique du pays. La Turquie surveille particulièrement la situation des Kurdes irakiens craignant un phénomène de contagion qui relancerait les revendications des 15 à 20 millions de Kurdes en Turquie.

Les autorités turques ont aussi demandé aux Irakiens de collaborer pour chasser les militants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK/interdit, rebaptisé KONGRA-GEL), réfugiés à la frontière.

En octobre 2003, la Turquie et les Etats-Unis s’étaient mis d'accord sur un “plan d'action”, incluant des mesures militaires, contre le PKK, que les deux pays considèrent comme une organisation “terroriste”. Mais depuis Ankara s'est régulièrement plaint de l'inaction de Washington.

Tout en assurant vouloir chasser d'Irak les militants du Parti des travailleurs du Kurdistan, M. al-Yaouar a répondu qu'il ne souhaitait pas qu'Ankara s'ingère dans les affaires intérieures de son pays. “J'ai dit au président Yaouar que nous attendions (des autorités irakiennes) qu'elles mettent un terme à la présence du PKK/KONGRA-GEL en Irak et qu'elles fassent en sorte que le nouvel Irak ne soit pas un abri pour des organisations terroristes”, a déclaré le président turc Ahmet Necdet Sezer au cours d'une conférence de presse, après des entretiens avec son homologue. “Nous ne pouvons pas ignorer une formation qui met en danger la sécurité de nos voisins”, lui a répondu M. al-Yaouar.

Mais il a ajouté que Bagdad souhaitait développer ses liens avec la Turquie dans le cadre de “bonnes relations de voisinage, sans ingérence dans les affaires intérieures”.

Par ailleurs, le président turc a indirectement réitéré les craintes d'Ankara de voir les Kurdes irakiens prendre le contrôle de la ville pétrolière de Kirkouk, située à 255 km au nord de Bagdad. “J'ai dit au président Yaouar que les tentatives de n'importe quel groupe ethnique vivant à Kirkouk -- turkmène, arabe, kurde, assyrien ou autre -- de revendiquer la ville mettrait en danger la stabilité et l'ordre à Kirkouk et en Irak”, a déclaré M. Sezer.

Kirkouk est le théâtre de troubles fréquents entre Kurdes, Arabes et Turcomans depuis la fin du régime de Saddam Hussein en avril 2003. Les Kurdes revendiquent son contrôle, soulignant que la ville était majoritairement kurde jusqu’aux années 60, avant que le régime de Bagdad n'y engage une politique d’arabisation forcée.

BARHAM SALEH, VICE-PREMIER MINISTRE IRAKIEN, EN VISITE À TÉHÉRAN POUR APAISER LES TENSIONS

Barham Saleh, vice-Premier ministre irakien, d’orignie kurde, s’est rendu à Téhéran le 29 août, afin de tenter d’apaiser la tension croissante entre les deux pays voisins, après les accusations d'immixtion de l'Iran dans la rébellion chiite irakienne. Barham Saleh est arrivé, accompagné de ses collègues de l'Intérieur et des Transports, à bord du premier vol direct Bagdad-Téhéran en 25 ans. “Je suis porteur d'un message d'amitié du gouvernement et de la nation irakiennes pour le peuple et le gouvernement d'Iran”, a déclaré Barham Saleh, qui souhaitent “le renforcement des liens fraternels” entre les deux pays.

M. Saleh a notamment rencontré le chef de la diplomatie iranienne Kamal Kharrazi, pour des entretiens largement consacrés au sort de Faridoun Jihani, consul d'Iran à Kerbala, enlevé il y a trois semaines.

La visite de M. Saleh avait également pour but de préparer celle du Premier ministre irakien intérimaire Iyad Allaoui, a fait savoir le porte-parole de la diplomatie iranienne, visite dont la date n'a pas encore été précisée.

Le ministre irakien de la Défense Hazem Shaalam avait été jusqu'à qualifier l'Iran d'”ennemi principal” de l'Irak, Bagdad accusant Téhéran de soutenir la milice chiite de l'Armée du Mahdi, afin d'influencer le processus politique chez son voisin. Des accusations rejetées par le régime des Mollahs. Les relations se sont également tendues après une série de disparitions de ressortissants iraniens en Irak, y compris l'arrestation de quatre journalistes de l'agence de presse iranienne IRNA, qui ont finalement été libérés le 27 août.

DAMAS CONTINUE SA POLITIQUE DE REPRESSION DES KURDES

Deux militants kurdes et un islamiste ont été condamnés en Syrie à des peines de prison par la Cour de sûreté de l'Etat, une juridiction d'exception dont les verdicts sont sans appel, a indiqué, le 30 août leur avocat, Anouar Bounni. “La cour a condamné les activistes kurdes, Farhat Ali membre du parti Yakiti et Ibrahim Naassan, du Parti de l'unité kurde à trois ans de prison pour appartenance à une organisation secrète” et de “tentative d'amputation d'une partie du territoire syrien pour l'annexer à un Etat étranger”, a précisé Me Bounni, un défenseur des droits de l'Homme. La Syrie est farouchement opposée à la création d'un Etat kurde indépendant en Irak.

La cour a en outre reporté à fin octobre le procès de 15 autres Kurdes arrêtés lors des affrontements qui ont opposé à la mi-mars des Kurdes aux forces de l'ordre et à des tribus arabes dans le Kurdistan syrien et qui se sont soldés par 40 morts, selon des sources kurdes, 25 morts selon un bilan officiel syrien.

D'autre part, cette cour a condamné Mahmoud Nabhane à 14 ans de prison pour appartenance à la confrérie des frères musulmans et a reporté le procès d'un adolescent Massab Hariri (14 ans) accusé d'appartenir à la confrérie interdite, a ajouté Me. Bounni. “Les autorités syriennes continuent, malgré leurs promesses, à violer les droits de l'Homme en Syrie et à réprimer les activistes et les militants politiques”, a-t-il indiqué.

M. Bounni a demandé la suppression de la Cour de sûreté de l'Etat et la remise en liberté de tous ceux qui ont été condamnés par cette cour.

Par ailleurs, un prisonnier kurde de Syrie, arrêté il y a deux semaines par les autorités de Damas, est mort en prison sous la torture, avait affirmé le 3 août un communiqué du parti d'opposition kurde, Yakiti. “Le citoyen Ahmad Hussein, habitant de la ville de Hassaké (à la frontière syro-turque), a été tué sous les tortures des services de sécurité militaire (...) qui ont prétendu qu'il était mort d'un infarctus”, précise le communiqué, signé par Fouad Aaliko, membre du Comité central du parti Yakiti. “Son corps a été remis dans la nuit [du 2 août] à sa famille et les autorités concernées ont refusé d'établir un rapport médical sur les raisons du décès et fait pression afin qu'il soit inhumé au plus vite sous bonne garde”, ajoute le communiqué. Selon le texte, Ahmad Hussein, accusé d'appartenir au parti de l'Union démocratique -récemment créé- avait été arrêté le 17 juillet.

Les partis kurdes de Syrie, qui regroupent onze formations interdites, dont Yakiti, avaient annoncé en avril la mort de deux Kurdes “torturés de manière barbare”.

La Syrie compte plus d'un million et demi de Kurdes, principalement dans ses provinces septentrionales contiguës au Kurdistan turc. Plus de 150 000 d’entre eux avait été déchus de la nationalité syrienne lors du recensement de 1962, ce qui les a privés, ainsi que leurs descendants, au total plus de 300 000 personnes aujourd’hui, de toute citoyenneté, de véritables “sans papiers” dans leur propre pays.

HUMAN RIGHTS WATCH APPELLE LA COALITION EN IRAK À RÉGLER LE DROIT À LA TERRE ENTRE KURDES ET ARABES

L'organisation de défense des droits de l'Homme, Human Rights Watch, dans un rapport de 78 pages publié le 2 août, fait état d'une frustration qui augmente parmi les milliers de Kurdes et Turcomans qui vivent dans des “conditions désespérées” alors qu'ils attendent des réponses concernant leurs droits à la terre.

La coalition en Irak a échoué à régler les conflits concernant le droit à la terre entre Kurdes et Arabes dans le nord, laissant une situation potentiellement explosive, avertit Human Rights Watch. “Si ces conflits pour la terre ne sont pas traités en urgence, des tensions entre Kurdes rentrant et colons arabes pourraient exploser rapidement en violence ouverte” a averti Sarah Leah Whitson, directeur général de Human Rights Watch pour la division Moyen Orient et Afrique du Nord.

Les Kurdes, les Turcomans et d'autres groupes non arabes ont été chassés de chez eux, sous le régime de Saddam Hussein, en vertu d'un programme d'arabisation, qui, estime Human Rights Watch, “était en fait une campagne de nettoyage ethnique visant à modifier de façon permanente la composition ethnique du nord de l'Irak”.

Le rapport décrit comment “l'Autorité provisoire a échoué à prendre des mesures pour y remédier y compris quand la situation est devenue encore plus volatile”, ajoute l'organisation ayant son siège à New York.

Human Rights Watch appelle l'actuel gouvernement irakien, à qui les Américains ont tranféré le pouvoir le 28 juin dernier, à mettre en œuvre “d'urgence” un système judiciaire pour résoudre ces questions de droit à la terre et de fournir une aide humanitaire aux Kurdes déplacés et aux autres populations non arabes.

Après la chute de Saddam Hussein en avril 2003, des Kurdes et d'autres groupes non arabes sont rentrés dans le nord pour faire valoir leur titres de propriété, indique le rapport, ajoutant que les familles arabes contraintes de partir à leur tour, ont également besoin d'être aidées.

AINSI QUE...

OSMAN OCALAN CRÉE SON PARTI


Osman Ocalan, frère du chef de l’ex-Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), Abdullah Ocalan, a récemment créé son propre parti politique, après s'être séparé de du PKK, rebaptisé Kongra-Gel, rapporte le 14 aôut la presse turque. Le parti démocratique patriotique (PDP) a été fondé par Osman Ocalan et une quarantaine de cadres dissidents du PKK, dont l’ancien responsable pour l’Europe du parti, Kani Yilmaz, et se trouve actuellement au Kurdistan irakien.

Osman Ocalan s'était brouillé l'an dernier avec son frère qui purge une peine de prison à vie en Turquie depuis 1999, notamment après s'être marié à une jeune Kurde, alors que le mariage reste “une pratique déconseillée” dans les rangs du PKK.

Il était l'homme de confiance du chef du PKK, Abdullah Ocalan, alias "Apo", et avait pendant un temps co-dirigé les combattants kurdes après l'arrestation et la condamnation de son frère par la justice turque pour les 15 ans de lutte armée du PKK pour la création d'un Etat kurde indépendant en Turquie.

Dans une lettre publiée récemment sur un site pro-kurde, Abdullah Ocalan l'avait qualifié de “frère lâche” et étalé au grand jour les divisions qui sapent le PKK depuis plusieurs années.

Le Kongra-Gel, dernière émanation du PKK, a mis fin en juin à une trêve unilatérale déclarée en 1999. Depuis lors, les incidents se sont multipliés avec plus de 50 embuscades ou accrochages avec les forces de sécurité dans le Kurdistan turc. L'aile dure du Kongra-Gel, divisé en plusieurs factions, a menacé de rallumer le conflit.

L’ARMÉE TURQUE CONTINUE SA POLITIQUE D’ÉVACUATION FORCÉE DANS LES VILLAGES KURDES


L’Association turque des droits de l'Homme a accusé le 24 aôut les forces de sécurité d'avoir évacué de force un village kurde, une pratique largement répandue par le passé au plus fort de la lutte contre le parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Les gendarmes ont fait irruption au mois de juillet 2004 dans le village d'Ilicak, près de Beytussebap, et ont ordonné aux habitants de quitter leurs foyers “pour des raisons de sécurité”, a indiqué l'Association des droits de l'Homme (IHD) dans un communiqué publié après une enquête de l'organisation sur les lieux.

“Les soldats ont dit que si les villageois continuaient d'occuper leurs maisons ils pourraient être amenés à ravitailler les combattants kurdes”, a déclaré Reyhan Yalcindag, une porte-parole de l'IHD, avocate et membre de la cette commission d'enquête. Me Yalcindag a expliqué que les forces de sécurité souhaitaient que les villageois quittent la région. Elle a appelé les autorités locales à autoriser le retour des villageois chassés, indiquant que des poursuites judiciaires seraient menées à l'encontre des responsables de l'évacuation.

Les 343 habitants d'Ilicak vivent actuellement dans des conditions précaires dans des tentes installées prés du village, selon l'IHD.

Selon des chiffres officiels, plus de 3.600 villages ont été évacués de force dans les années 1980 et 1990, plus de 3 millions de personnes ont été forcées de quitter leur village, selon l’association turque des doits de l’homme.

Par ailleurs, deux personnes ont été tuées et cinq autres, d'une même famille, blessées dans l'explosion le 27 août d'une mine posée une route près du village kurde de Pervari. La camionnette transportant une famille qui regagnait son village de Bilgili depuis la ville d'Adana (sud) a sauté sur la mine, activée à distance, selon le gouverneur régional, Nuri Okutan.

BRUXELLES INVITE LE PREMIER MINISTRE IRAKIEN AU PROCHAIN SOMMET DE L’UE, ALORS QUE LES RELATIONS DE CE DERNIER SE TENDENT AVEC LA FRANCE


L'Union européenne a invité Iyad Allaoui, le Premier ministre intérimaire irakien, à assister au prochain sommet de l'UE en novembre pour parler du rôle de l'Europe dans la reconstruction de son pays. Selon les responsables européens, cette invitation a été transmise le 29 août, coïncidant avec la visite à Bagdad du chef de la diplomatie néerlandaise Ben Bot, dont le pays assure actuellement la présidence tournante de l'UE.

L'Union n'a pas encore reçu confirmation de la présence d'Allaoui à cette rencontre du 5 novembre. A ce jour, l'UE a promis 305 millions d'euros en aide humanitaire et à la reconstruction pour cette année. Un engagement qui devrait être répété l'année prochaine.

Par ailleurs, le ministère français des affaires étrangères a réagi aux propos du chef du gouvernement irakien, qui a déclaré dans une interview que l'Hexagone ne serait pas épargné par le terrorisme, en rappelant que “victime elle-même d'attaques terroristes”, la France menait “sans relâche une action résolue contre ce fléau”.

“Les autorités françaises ont, depuis longtemps, affirmé la nécessité et l'urgence de se mobiliser contre toute forme de terrorisme”, souligne le porte-parole du Quai d'Orsay, Hervé Ladsous, dans un communiqué publié le 30 août. La France “a toujours apporté son soutien et sa contribution à toutes les initiatives de la communauté internationale dans ce domaine”.

Dans un entretien à plusieurs journaux occidentaux dont Le Monde, le Premier ministre irakien par intérim, Iyad Allaoui, a déclaré que “des attentats se produiront à Paris, à Nice, à Cannes ou à San Francisco”. Pour lui, “les Français, ainsi que tous les pays démocratiques, ne peuvent pas se contenter d'adopter une position passive”, car “le terrorisme ne connaît aucune limite. (...) Eviter la confrontation n'est pas une réponse”.

Pour le Quai d'Orsay, ces propos ne sont “pas acceptables” car ils semblent “jeter un doute sur la détermination de la France dans la lutte contre le terrorisme”.

L’ONU VOTE À L’UNANIMITÉ LA PROROGATION D’UN AN DU MANDAT DE LA MISSION D’ASSISTANCE DES NATIONS UNIES POUR L’IRAK (MANUI)


Le Conseil de sécurité des Nations unies a voté le 12 août à l'unanimité une résolution prorogeant d'un an le mandat de la MANUI, la mission de l'ONU pour l'Irak. Une mission dont les opérations restent réduites dans l'attente d'une amélioration des conditions de sécurité dans le pays.

Dans cette résolution sur la MANUI (Mission d'assistance des Nations unies pour l'Irak), le Conseil de sécurité réaffirme que les Nations doivent jouer un rôle majeur dans pour aider le peuple irakien et le gouvernement intérimaire dans la formation d'institutions ouvrant la voie à un gouvernement représentatif.

Mais le secrétaire général des Nations unies Kofi Annan a clairement fait savoir au Conseil de sécurité, dans un rapport présenté le 6 août, que les Nations unies demeurent une “cible de choix” dans l'avenir prévisible “pour ceux qui veulent mener une attaque terroriste retentissante en Irak”. Des risques qui limitent considérablement le personnel que les Nations unies peuvent envoyer dans le pays.

Le nouvel émissaire de Kofi Annan, le Pakistanais Ashraf Jehangir Qazi, doit prendre son poste à Bagdad cette semaine avec une petite équipe, donnant à l'ONU une présence officielle en Irak pour la première fois depuis le mois d'octobre dernier.

Kofi Annan avait ordonné le départ de tous les personnels étrangers de l'ONU après les deux attentats contre les Nations unies à Bagdad et une vague d'attaques contre des personnels humanitaires. Le premier attentat, le 19 août 2003, avait fait 22 morts, dont le représentant spécial de l'ONU en Irak, Sergio Vieira de Mello.

Le siège de la MANUI doit rester à Amman en Jordanie, jusqu'à l'amélioration des conditions de sécurité en Irak. Les programmes humanitaires de l'ONU se poursuivent avec du personnel local.

LYNCHAGE MÉDIATIQUE ET VIVES CRITIQUES DE L’ARMÉE TURQUE APRÈS LA VISITE DU MAIRE DE DIYARBAKIR AUX FAMILLES DES VICTIMES TUÉES LORS D’UN ACCROCHAGE AVEC L’ARMÉE


Osman Baydemir, le maire de Diyarbakir, est au centre d'une controverse depuis qu'il s'est rendu le 7 août, accompagné d'autres maires pro-kurdes, au domicile familial d'un militant de l'ex-Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK)) pour présenter ses condoléances à la famille d'un combattant kurde tué dans un accrochage avec l'armée provoquant la vive réaction des milieux politico-médiatique turques. Le maire avait rendu la même visite à la famille du gardien de la paix tué au cours des mêmes accrochages mais la presse n’a pas voulu délibéremment relater ce fait.

Le ministère de l'Intérieur a envoyé des inspecteurs à Diyarbakir dans le cadre d'une enquête officielle qui pourrait éventuellement aboutir à la révocation de M. Baydemir et des autres élus.

Le 10 août, le nouveau commandant de l'armée de terre, le général Yasar Buyukanit, avait également fustigé M. Baydemir, parlant d'une “attitude très laide et ignoble”. Le chef de l'armée turque, le général Hilmi Ozkok, s'en est publiquement pris le lendemain au maire en déclarant qu’ “il s'agit d'une attitude inappropriée. La procédure nécessaire a été lancée par le ministère (de l'Intérieur)”.

LES AFFRONTEMENTS SE MULTIPLEMENT DANS LE KURDISTAN TURC


Dans le cadre des opérations de ratissage de grande envergure dans le Kurdistan turc, les affrontements se multiplient. Le gouverneur de la province d’Hakkari, Erdogan Gurbuz, a annoncé,que onze combattants kurdes et deux soldats ont été tués le 31 août dans de violents accrochages dans la province. Le 21 août, deux policiers turcs avaient été blessés au cours d'une attaque contre leur poste de police dans la ville de Semdinli, selon les autorités turques.

Par ailleurs, un commissaire de police a été tué le 13 août lors d'une opération menée par les forces de sécurité turques dans la région de Hatay. Le commissaire Mehmet Kose, qui a été grièvement blessé lors de l'opération, menée conjointement par des forces de police et de gendarmerie dans une région frontalière de la Syrie, a succombé à ses blessures après avoir été transporté dans un hôpital. Dans la province de Van, mais le même jour, un gendarme turc a été tué et un autre blessé lors d'affrontements avec des combattants kurdes.

Au début du mois, un combattant kurde avait été tué lors d'affrontements avec les forces de sécurité turques dans une zone boisée proche de la ville de Karliova, dans la province de Bingol. Et trois autre combattant kurdes avaient été tués au cours d'une opération d'envergure menée dans les pâturages de montagne de Pulumur par la gendarmerie turque dans la province de Tunceli.

Les mines font également de plus en plus de victimes dans la région. Ainsi, dix soldats et un conducteur de train avaient été été blessés le 30 août à la suite d'attentats à l'explosif imputés au PKK. Les soldats ont été blessés lorsque le véhicule militaire qui les transportait a sauté sur une mine sur une route de la province de Sirnak et dans la province kurde de Bingol, une bombe a explosé au passage d'un train de marchandises blessant l'un des deux conducteurs. Trois militaires et deux supplétifs de l'armée turque avaient été blessés le 8 août par l'explosion d'une mine télécommandée au passage de leur véhicule dans la même province de Bingöl. Dans la province de Siirt, deux personnes ont été grièvement blessées le 28 août lorsque leur camion a heurté une mine. La veille, deux autres personnes avaient été tuées et cinq autres, d'une même famille, blessées dans l'explosion d'une mine sur une route dans la même région. Près de Cukurca, deux soldats turcs ont été tués et un sous-officier a été blessé dans l'explosion le 9 août d'une mine sur une route. La mine a été activée à distance au passage d'un véhicule militaire qui patrouillait dans la zone, à une cinquantaine de kilomètres de la frontière irakienne. De plus, deux personnes ont été blessées, dont un soldat en faction, lorsqu'une bombe à retardement a explosé le 8 aout au soir d'un complexe militaire turc à Yuksekova, près des frontières iranienne et irakienne. Le complexe abritait un bureau de recrutement militaire dont les vitres ont été soufflées par la déflagration.

Par ailleurs, un homme a été tué et un autre grièvement blessé dans l'explosion d'une bombe qu'ils tentaient de poser devant un poste de contrôle de la police. L'explosion s'est produite le 7 août au soir près de l'aéroport de Van. La chaîne de télévisoin CNN-Turc cite le gouverneur de Van, Hikmet Tan, selon lequel l'attentat le visait peut-être étant donné qu'il était censé passer dans le secteur quelques heures plus tard pour aller à la rencontre du Premier ministre Tayyip Erdogan, dans une ville voisine. L'homme blessé par l'explosion s'est caché pendant huit heures après la déflagration et a négocié avec la police en kurde avant de se rendre aux autorités.

La violence n’a pas épargné Istanbul où des attentats ont été commis dans la nuit de du 13 août contre deux hôtels touristiques, faisant deux morts et onze blessés. Les attentats ont été revendiqués par deux groupes: une organisation se disant proche d'Al Qaïda, “les moudjahidine des brigades Abou Hafs (al-Masri)”, puis un groupe kurde inconnu, les “Faucons de libération du Kurdistan”. Les attentats ont visé deux hôtels des quartiers touristiques de Laleli et de Sultanahmet et un complexe gazier s'établissait.

La première organisation avait précédemment affirmé être responsable de plusieurs attentats, dont ceux du 11 mars dernier à Madrid, sans que son implication ne soit officiellement confirmée. La revendication des Faucons de libération du Kurdistan a été rendue publique par l'agence de presse mésopotamienne, un canal souvent utilisée par le PKK pour diffuser ses communiqués.

Dans les milieux diplomatiques, on estime que la culpabilité du PKK reste à prouver. “(Les Turcs) en semblent très convaincus. Attendons de voir quelles preuves ils avancent”, a déclaré l'un d'eux sous couvert d’ananymat. De plus, les attaques constitueraient un tournant dans la stratégie du PKK, qui frapperait désormais au coeur des grandes villes turques.