Les nominations très attendues des ministres de l'Intérieur et de la Défense irakiens ont enfin eu lieu. Le 20 mai, M. Maliki avait présenté un gouvernement incomplet au parlement. Les titulaires des ministères de l'Intérieur, de la Défense et le secrétaire d'État à la Sécurité nationale n'avaient pas été nommés faute d'un accord avec les coalitions chiite, sunnite et kurde. Outre le vice-Premier ministre kurde Barham Saleh, chargé de la coordination des ministères économiques. Le nouveau gouvernement irakien compte 6 ministres kurdes dont deux femmes. Voici la liste complète de ce gouvernement d'unité nationale, après l'investiture le 8 juin par le Parlement des trois derniers ministres (Défense, Intérieur, Sécurité nationale).
Les ministres kurdes sont : |
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Une fois le gouvernement au grand complet, le Premier ministre irakien, Nouri al-Maliki, a, le 25 juin, présenté un plan de réconciliation nationale pour tenter d'enrayer les violences confessionnelles. M. Maliki espère avec ce plan intéresser les factions restées en marge du processus politique, notamment une partie des sunnites. Il a ainsi promis d'amnistier ceux qui n'ont pas commis des crimes de sang, de respecter les droits de l'Homme, de soustraire les forces de l'ordre aux influences partisanes, et de placer sous le contrôle de la justice les purges contre les anciens membres du parti Baas dissous. De son côté, l'ambassadeur américain à Bagdad Zalmay Khalilzad a aussi appelé les insurgés à déposer les armes et à rejoindre le processus de paix présenté par le Premier ministre. « J'appelle tous les insurgés à déposer les armes et à rejoindre le processus politique et démocratique du nouvel Irak », a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse, quelques heures après la présentation d'un plan de réconciliation.
Les parlementaires, toutes tendances confondues, ont bien accueilli ce plan, à l'exception de quelques uns, comme le député arabe sunnite, Abdel Nasser al-Janabi qui a contesté la poursuite de la politique consistant à purger les institutions des responsables du parti Baas dissous. Le même député a demandé d'« arrêter les poursuites contre tous ceux qui combattent, les armes à la main, les forces d'occupation ». Un député de la mouvance chiite radicale de Moqtada Sadr, Falah Hassan Chanchal, a exigé la libération des membres de son courant en détention qui « n'ont pas tué d'Irakiens », dans une allusion à ceux emprisonnés pour leur participation à des combats contre les forces américaines. Le principal animateur du bloc de députés arabes sunnites, Adnane al-Doulaïmi, a demandé, dans une conférence de presse, de sévir avec une main de fer contre les milices chiites alors que le plan de réconciliation prévoit de trouver une « solution politique, économique et sécuritaire » à la question.
Des groupes armés irakiens, engagés dans des contacts indirects avec le président Jalal Talabani, ont exigé un calendrier de retrait des troupes étrangères pour adhérer au projet de réconciliation du Premier ministre Nouri al-Maliki, a, le 27 juin, affirmé le député kurde Mahmoud Osmane. « Selon des sources proches de la présidence, les contacts entrepris par des intermédiaires se poursuivent entre le président Jalal Talabani et (sept) groupes armés pour les amener à déposer leurs armes », a-t-il déclaré. Selon ces sources, a-t-il précisé, les groupes armés « ont mis des conditions pour accepter le plan de réconciliation, notamment un calendrier de retrait des forces étrangères et une reconnaissance de la légitimité de la résistance ». Le parlementaire kurde a affirmé également que des contacts, toujours par le biais d'intermédiaires, étaient en cours entre des groupes armés et les Américains, sans donner plus de précisions. Un influent député chiite, cheikh Jalal Edddine al-Saghir, a estimé qu'il y avait une volonté chez des chefs tribaux et de dignitaires de la région sunnite d'Al-Anbar, à l'ouest de Bagdad, de se joindre au processus de paix. Mais, selon lui, ces derniers en sont empêchés par des groupes extrémistes. Le numéro deux du Parti islamique, Iyad al-Samarraï a affirmé pour sa part que son parti était prêt à jouer les intermédiaires entre le gouvernement et des groupes armés. Selon lui, « la tendance générale dans l'ouest de l'Irak, et particulièrement dans la province d'Al-Anbar, est à la réconciliation ». « Mais les conditions de sécurité sont mauvaises d'autant plus qu'Al-Anbar connaît la plus importante implantation d'Al-Qaïda ». Dans le camp sunnite, l'institution gérant les biens religieux (Waqfs) a bien accueilli, dans un communiqué, le plan de M. Maliki en souhaitant toutefois la dissolution rapide des milices armées et la libération d'un plus grand nombre de détenus.
Les Etats-Unis ont indiqué le 25 juin que la réconciliation en Irak prendrait du temps et qu'ils soutenaient les efforts du Premier ministre irakien Nuri al- Maliki pour y parvenir. « Nous savons que la réconciliation doit être un processus irakien mené par les Irakiens. Bien entendu, nous sommes prêts à assister ces efforts si les Irakiens font appel à notre aide », a indiqué le porte-parole de la Maison Blanche, Ken Kisaius.
Le coût humain et financier de la guerre en Irak s'est alourdi avec l'annonce le 15 juin que 2.500 militaires américains y ont trouvé la mort et le déblocage par le Congrès d'une enveloppe supplémentaire de quelque 66 milliards de dollars. La barre symbolique des 2.500 soldats américains tués est un « triste point de repère», a souligné la Maison Blanche, mais George W. Bush pense qu'ils ne sont pas morts « pour rien», a précisé le porte-parole présidentiel, Tony Snow. « Le président aimerait que cette guerre soit terminée. Tout le monde aimerait que cette guerre soit terminée», a-t-il déclaré.
Selon le décompte du Pentagone, 1.972 soldats ont été tués en opération en Irak et 528 sont morts de causes non liées à des combats. Et 18.490 soldats ont été blessées en action, dont 8.501 qui n'ont pu reprendre le service. Selon certaines estimations, environ 4.800 policiers et membres des forces de sécurité irakiennes ont été tués et au moins 30.000 civils ont péri depuis le début de la guerre.
La Chambre des représentants a observé une minute de silence en hommage aux morts en combats, à l'initiative de l'opposition démocrate qui conteste la conduite de la guerre par l'administration Bush. Outre les pertes en vies humaines et les milliers de blessés, les Américains ont aussi débloqué jusqu'à présent 438 milliards de dollars pour la « guerre contre le terrorisme» engagée par l'administration Bush au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 - dont plus de 70% pour les trois ans de la guerre en Irak. Le Sénat presque unanime (98 voix contre 1) a définitivement adopté le 15 juin un collectif budgétaire destiné notamment à financer les opérations militaires en Irak et en Afghanistan à hauteur de 65,8 milliards de dollars, et fournissant 4 milliards de dollars d'aides diverses aux alliés de la « guerre contre le terrorisme». Par ailleurs, la pression monte contre l'armée américaine, qui est accusée d'avoir commis et parfois couvert des bavures durant ses opérations en Irak. Par exemple, les enquêteurs américains chargés de la bavure présumée de Haditha au cours de laquelle 24 civils auraient été tués par des Marines le 19 novembre 2005, en représailles à la mort de l'un des leurs dans un attentat, espèrent pouvoir exhumer des corps pour rechercher des preuves.
Le lourd bilan de la guerre en Irak, conjugué à la poursuite des violences, pèse sur les efforts du président George W. Bush pour tirer un profit maximum des bonnes nouvelles récentes que sont la formation complète du gouvernement irakien et la mort d’Abou Moussab al-Zarqaoui, qui a été tué le 7 juin dans une opération irako-américaine au nord de Bagdad. Selon le général américain George Casey, commandant la Force multinationale en Irak, Zarqaoui a été tué dans un raid aérien au nord de Baaqouba et les troupes américaines ont réussi à confirmer son identité grâce à « ses empreintes digitales, son visage et ses cicatrices ».
Le Premier ministre irakien, Nouri al-Maliki, a annoncé sous les applaudissements lors d'une conférence de presse l' « élimination » de Zarqaoui, dont la tête avait été mise à prix pour 25 millions de dollars par Washington. Selon un responsable jordanien, des forces jordaniennes ont participé à l'opération contre Zarqaoui qui présidait une réunion de son groupe terroriste près de Baaqouba, à 60 km au nord de Bagdad. A l'annonce de sa mort, de nombreux Irakiens ont exprimé leur joie en distribuant des bonbons aux passants et des soldats irakiens ont commencé à danser dans le centre de Bagdad en agitant leurs fusils d'assaut, alors que les femmes en abaya noir lançaient des you-you de joie. Le président George W. Bush a déclaré qu'avec la mort de Zarqaoui « l'idéologie de la terreur a perdu un de ses chefs les plus visibles et les plus actifs. La mort de Zarqaoui est un coup dur porté à Al-Qaïda ». Mais il a aussi prévenu qu'il fallait « s'attendre à ce que les terroristes et les insurgés continuent sans (Zarqaoui) ». Le Premier ministre britannique Tony Blair a déclaré pour sa part que la mort de Zarqaoui « représente un coup pour Al-Qaïda. Mais ne nous faisons pas d'illusions. Nous savons qu'ils continueront à tuer ».
Par ailleurs, selon un rapport publié le 14 juin aux Etats-Unis, plus de 650 000 Irakiens ont fui leur pays pour se rendre en Jordanie ou en Syrie depuis début 2005. Selon le Comité américain pour les réfugiés et les immigrés, l'Irak est le troisième pays du monde en termes de réfugiés, avec 880 000 exilés. Le nombre de réfugiés irakiens n'est dépassé que par celui des réfugiés palestiniens et afghans. Le pays comptant le plus grand nombre de réfugiés internes est le Soudan, où 5,3 millions de personnes ont dû quitter leur lieu d'habitation, pour beaucoup victimes du conflit au Darfour, qui dure depuis trois ans. Le Soudan est suivi de la Colombie, qui compte 2,9 millions de réfugiés internes.
Avec la violence endémique en Irak arabe, de nombreux Irakiens cherchent par tous les moyens à quitter le pays. Quelque 130 Irakiens ont été arrêtés en six mois en tentant de quitter le pays, avec de faux documents, à l'aéroport d'Erbil, dans le Kurdistan, a annoncé le 26 juin le commandant Radouane Ayoub Saïd, chef des services de l'immigration à l'aéroport international d'Erbil, la capitale de la région autonome du Kurdistan d'Irak. « Ces six derniers mois, nous avons arrêté 130 Irakiens qui tentaient de se rendre en Europe avec de faux passeports ou de faux visas », a déclaré le commandant Saïd. « Tous ceux que nous avons interpellé sont originaires du centre et du sud du pays et voulaient profiter du fait que nous avons inauguré des vols internationaux pour se rendre dans des pays européens », a-t-il ajouté. Certains ont, selon lui, de faux visas et d'autres de faux passeports, notamment suédois, danois, allemands et finlandais. « Ils sont jeunes en majorité et il y a une bonne proportion de femmes ». Ces personnes ont été déférées aux services de sécurité kurdes en attendant d'être présentées à la justice, a ajouté le responsable de l'immigration.
Enfin, agissant à la demande du nouveau gouvernement de Bagdad, le Conseil de sécurité de l'Onu a, le 15 juin, autorisé la force multinationale sous commandement américain à rester en Irak jusqu'à la fin de 2006. Le Conseil a pris sa décision après avoir entendu des rapports de l'ambassadeur américain John Bolton, du ministre irakien des Affaires étrangères Hoshyar Zebari et de la secrétaire générale adjointe de l'Onu, Angela Kane. Une résolution adoptée en novembre prolongeait le mandat de la force multinationale jusqu'à la fin de 2006 mais engageait le Conseil de sécurité à faire le point de la situation au plus tard le 15 juin. Selon la résolution, le Conseil pouvait mettre fin à tout moment au mandat si le gouvernement irakien le lui demandait - ce qui imposerait le retrait de l'armée américaine.
Le président George W. Bush a, le 13 juin, effectué une visite surprise à Bagdad pour soutenir le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki, qu'il rencontrait pour la première fois. La rencontre entre MM. Bush et Maliki s’est déroulée au siège de l'ambassade américaine dans la Zone verte, le secteur ultra-protégé du centre de Bagdad où se trouvent également les bureaux du gouvernement irakien. M. Maliki était entouré par la majorité de ses ministres, notamment ceux de la Défense, Abdel Kader Mohammed Jassem, de l'Intérieur, Jawad Poulani, et du Pétrole, Hussein al-Chahristani. Il s'agit de la première visite en Irak de M. Bush, qui était accompagné du conseiller à la sécurité nationale Stephen Hadley, de son chef de cabinet Josh Bolten, de son conseiller Dan Bartlett et de quelques proches collaborateurs, depuis l'automne 2003, quelques mois seulement après l'invasion de l'Irak et le renversement de Saddam Hussein. Cette visite survient moins d'une semaine après la mort du chef d'Al-Qaïda en Irak, Abou Moussab al-Zarqaoui, dans un raid américain. L'objectif du déplacement de M. Bush est de rencontrer personnellement et d'avoir une idée sur les priorités de M. Maliki et des « moyens que le gouvernement américain peut apporter pour assurer le succès » de son action, selon M. Bartlett.
M. Bush a indiqué avoir assuré aux nouveaux dirigeants irakiens lors de son séjour d'environ cinq heures à Bagdad que les États-Unis ne les laisseraient pas tomber tant que les forces irakiennes ne seraient pas capables d'assumer la sécurité dans le pays. Selon M. Bush, les ministres irakiens ont exprimé «l'inquiétude que nous partions avant qu'ils ne soient capables de se défendre eux-mêmes et je leur ai assuré qu'ils n'avaient pas lieu de s'inquiéter». George W. Bush a espéré que la situation se sera considérablement améliorée en Irak quand il quittera ses fonctions en janvier 2009 mais a jugé «impossible» un arrêt total de la violence. «J'espère vraiment», a déclaré M. Bush aux journalistes qui lui demandaient à bord de l'avion le ramenant de Bagdad s'il pourrait se rendre en Irak dans deux ans et demi sans le luxe de sécurité qui a entouré sa visite surprise. «Si le critère, c'est qu'il n'y ait plus de violence, c'est un critère impossible à remplir», a indiqué M. Bush à bord d'Air Force One. «Si le critère, c'est un gouvernement (irakien) qui commence à gagner la confiance des gens parce qu'il agit sagement pour contribuer à un retour à la normale, alors je crois que ce gouvernement remplira ce critère», a-t-il ajouté.
Par ailleurs, George Bush avait, le 17 juin, appelé les pays donateurs à concrétiser leurs 13 milliards de dollars d'aides promises à l'Irak et réaffirmé que les Etats-Unis étaient allés trop loin pour abandonner maintenant le peuple irakien. Sur les 13 milliards de dollars promis par la communauté internationale, trois milliards seulement ont été versés. Mais certains bailleurs de fonds redoutent que les budgets consacrés à la reconstruction ne soient aspirés par le financement des opérations de sécurité.
Discriminé sous le régime de Saddam Hussein, le Kurdistan irakien a décidé de faire appel aux entreprises étrangères pour rattraper son retard dans tous les domaines. Pour cela, les autorités font valoir le calme qui y règne contrairement au reste du pays, sa proximité avec la Turquie, l'Iran et la Syrie et surtout une nouvelle loi favorisant largement l'investissement étranger, y compris dans le secteur pétrolier.
« Nous voulons faire du Kurdistan la porte du commerce vers l'Irak », a affirmé, le 23 juin, le Premier ministre du gouvernement régional, Nechirvan Barzani. « Le texte, qui sera adopté par le Parlement, ouvrira largement les portes à l'investissement étranger. Le Kurdistan est le meilleur endroit en Irak parce qu'il jouit de la sécurité et de la stabilité », a-t-il affirmé. Le Premier ministre a assuré que « ce texte garantit les droits des investisseurs et leur ouvre tous les secteurs ». La loi, de 26 articles, est extrêmement libérale et incitative. Elle autorise les étrangers à posséder des terres, à rapatrier leurs bénéfices et offre une exemption d'impôts durant 10 ans. Les sociétés peuvent en outre importer leur matériel sans droit de douane et faire venir du personnel étranger. Tous les domaines sont ouverts à l'investissement étranger, y compris l'industrie pétrolière, alors que dans le reste du pays, ce secteur reste nationalisé. « Cette loi va contribuer à la prospérité du Kurdistan car jusqu'à présent nous fonctionnons sur la base d'anciennes lois qui sont archaïques et contiennent de nombreuses restrictions », a déclaré avec enthousiasme, un entrepreneur kurde, Badram Sadik.
Les trois provinces kurdes s'étendent sur plus de 38.000 km2, une superficie équivalente à celle de la Suisse. Elles avaient été largement détruites durant le régime de Saddam Hussein mais elles ont pris leur essor économique après 1991, date à laquelle elles ont obtenu de fait leur autonomie sous protection internationale. Grâce à la sécurité et la stabilité de ses institutions, la région kurde est devenue attrayante. « Il y a actuellement 3.800 sociétés irakiennes et étrangères, dont 500 turques, installées au Kurdistan et je pense qu'après l'adoption de la loi, leur nombre doublera, car beaucoup de compagnies étrangères nous assurent qu'elles attendent cette loi pour venir », a affirmé pour sa part Aziz Ibrahim, directeur général du commerce au ministère kurde des Finances. Le ministre du Commerce, Mohammad Raouf, a affirmé ne pas « avoir jusqu'à présent de statistiques officielles sur les investissements au Kurdistan en raison de l'existence de deux ministères, l'un à Erbil et l'autre à Souleimaniyeh ». En mai, les deux administrations kurdes ont décidé de s'unifier. Le Kurdistan connaît un boom notamment dans la construction avec des projets de centres commerciaux, logements, hôtels et centres touristiques, d'un montant variant entre 300 et 500 millions de dollars. « Jusqu'à présent, les investissements se concentrent surtout sur la construction et les infrastructures mais nous voulons donner la priorité à l'industrie », a souligné M. Raouf.
Alors que l'ensemble de l'Irak s'inquiète des déplacements forcés de chiites et sunnites en raison des tensions intercommunautaires, la fuite de nombreux chrétiens de Bagdad n'a pas eu la même publicité. L'exode est pourtant réel avec l'arrivée à Inkawa, ville à majorité chrétienne de 30.000 habitants (Kurdistan irakien), en quelques semaines, de quelque 70 familles chrétiennes, selon des responsables kurdes. Ces chrétiens appréhendent la situation qui devient de plus en plus intenable dans la capitale avec les menaces de groupes armés et les attaques contre leurs commerces, débits de boissons, salons de coiffure ou boutiques de prêt-à-porter. Les autorités religieuses chrétiennes restent très discrètes sur les difficultés de leurs coreligionnaires en Irak, à l'instar du chef de l'Eglise chaldéenne, Mgr Emmanuel Dely. C'est le représentant de la Ligue arabe, le Marocain Mokhtar Lamani, nouvellement arrivé en Irak, qui a attiré l'attention sur ce problème. « Lors d'une récente visite au Kurdistan, j'ai appris que tous les membres de la communauté sabéenne de Bagdad, soit 20 à 25.000 personnes avaient présenté une demande collective pour émigrer au Kurdistan », a-t-il déclaré. « En outre, 3.500 familles chrétiennes ont émigré récemment de Bagdad vers le Kurdistan après avoir reçu des menaces », a-t-il ajouté.
Les Sabéens ou Mandéens sont environ 60.000 en Irak où ils pratiquent le baptême comme les chrétiens et le jeûne comme les musulmans. Fidèles de Saint Jean Baptiste, ils vivent principalement dans le sud du pays et à Bagdad. L'origine de cette religion date du 1er ou 2ème siècle après JC. Le baptême occupe une place centrale dans leur culte. Ce rituel a lieu le dimanche et les membres doivent s'y soumettre plusieurs fois par an. Les cérémonies funéraires sont aussi très importantes car durant trois jours ils récitent leur livre sacré, le « Ginza » (trésor).
L'afflux des réfugiés chrétiens à Inkawa a donné un coup de fouet à l'immobilier ce qui ne fait pas l'affaire des familles modestes. Impossible de louer un deux pièces à moins de 500 dollars par mois et il faut compter le double pour s'offrir un logement plus spacieux même si les autorités kurdes accordent une allocation de 100 dollars mensuels par famille. Le père Saliwa Hibi de l'église Saint-Joseph dit que sa paroisse tente d'aider les déplacés mais que ceux-ci ne cessent d'affluer en provenance de Bagdad mais également de Mossoul, grande ville mixte située au nord de la province fédérée du Kurdistan. Il reste environ 800.000 chrétiens en Irak, en majorité chaldéens (catholiques), installés principalement à Bagdad, Mossoul et au Kurdistan et beaucoup cherchent à quitter le pays depuis la chute du régime de Saddam Hussein en avril 2003. Selon le dernier rapport de l'Office international des Migrations, daté du 7 juin, il y aurait 97.224 déplacés mais selon le Croissant-Rouge irakien, ils seraient 102.622.
Tous les chrétiens d’Irak sont originaires du Kurdistan qui leur a servi de terre de refuge depuis les persécutions lancées dans la cadre des « croisades du la foi » par les califes de Bagdad à la fin du IXème siècle. Ils y ont vécu en symbiose avec les Kurdes musulmans et yézidis ainsi que les Juifs jusqu’au début des années 1950, date à laquelle certains d’entre eux ont émigré vers des villes arabes pour des raisons économiques.
Le Haut tribunal pénal irakien a, le 27 juin, annoncé que Saddam Hussein sera jugé à partir du 21 août pour génocide des Kurdes. « Le tribunal a fixé au lundi 21 août 2006 la date du début du procès », a indiqué un communiqué du tribunal qui juge Saddam Hussein, avec sept coaccusés, depuis le 19 octobre 2005 pour une autre affaire, le massacre de villageois chiites dans les années 1980. L'instruction sur le rôle de Saddam Hussein dans la campagne antikurde d'Anfal ayant fait près de 200.000 morts a été bouclée début avril. Saddam Hussein, ainsi que six coaccusés, ont été inculpés le 4 du même mois de génocide lors de cette opération, présentée par l'ancien régime comme une opération de contre-insurrection en temps de guerre. L'un des coaccusés, Ali Hassan al-Majid, le cousin de Saddam Hussein, dit « Ali le chimique », est au centre de l'affaire. Il fait l'objet de nombreuses accusations, notamment d'utilisation de gaz toxiques, d'exécutions massives, et d'établissement de camps de détention pour soumettre le Kurdistan irakien.
Selon l’organisation des droits de l’homme Human Rights Watch, en plus des 182.000 Kurdes tuées, plus de 4.000 villages ont été détruits pendant cette campagne qui a provoqué également un déplacement massif de la population kurde. Entre 1987 et 1989, des assauts avaient été lancés contre les Kurdes, avec notamment le gazage de la population de Halabja en 1988 qui avait fait 5.000 morts. Cependant, Halabja n'est pas inclus dans le procès. Vers 1986, de larges portions du territoire kurde avaient échappé au contrôle de Bagdad, soumis à des pressions croissantes en raison de la guerre avec l'Iran. Début 1987, Saddam Hussein avait chargé Ali Hassan al-Majid, de reprendre le contrôle de la région. Ce dernier avait déclaré des « zones interdites » dans la région, considérant tous ses habitants comme des insurgés. Selon Human Rights Watch (HRW), ces campagnes étaient plus que de simples opérations de contre-insurrection. Elles étaient destinées à exterminer le peuple kurde. « Il faut souligner que les meurtres n'ont pas été commis pendant les opérations de contre-insurrection: les détenus étaient tués plusieurs jours ou semaines après que les forces armées eurent atteint leurs objectifs », affirme HRW, dans un rapport détaillé sur la campagne Anfal, datant de 1993. « Finalement, il y a la question de l'intention, qui est au coeur de la notion de génocide », souligne le rapport, détaillant des documents et témoignages qui démontrent clairement cette intention. Le rapport intitulé « Génocide en Irak : La campagne d’Anfal contre les Kurdes » a été publié en version française chez Karthala en 2003.
Par ailleurs, lors de la 35ème audience du procès le 19 juin, le procureur général, Jaafar al-Moussaoui, après avoir longuement évoqué la répression à Doujaïl, village chiite au nord de Bagdad, a requis les « peines maximales », autrement dit la peine capitale, contre Saddam Hussein, son demi-frère Barzan al-Tikriti et l'ancien vice-président Taha Yassine Ramadan. Pour lui, les habitants de cette localité qui a connu en 1982 une attaque contre le convoi de Saddam Hussein, alors président de l'Irak, ont subi ensuite une « campagne de répression systématique » qui a coûté la vie à 148 d'entre eux. M. Moussaoui a affirmé que la peine de mort se justifiait pour les trois prévenus responsables, selon lui, notamment de meurtres prémédités, de tortures, d'emprisonnements et de graves privations. Pour arriver au réquisitoire, le juge qui préside aux débats a fait montre de fermeté pour éviter que le procès ne s'éternise en exigeant de limiter le nombre de témoins et en multipliant les expulsions de Barzan al-Tikriti, pour l'empêcher de se lancer dans de longs discours, souvent à caractère politique. La prochaine audience, consacrée aux plaidoiries de la défense a été fixée au 10 juillet.
Les principaux crimes imputés à l'ancien régime irakien sont:
Par ailleurs, les corps de victimes de la répression de l'insurrection chiite de 1991, sont petit à petit exhumés pour témoigner des crimes du régime de Saddam Hussein. 28 corps de victimes ont ainsi été soigneusement exhumés d'un charnier récemment découvert dans le sud de l'Irak pour être envoyés à Bagdad pour preuve des crimes commis par l'ancien régime de Saddam Hussein. La plupart des corps ont les mains liées derrière le dos et un bandeau sur le visage. On peut encore distinguer les trous laissés par des balles dans leurs vêtements. Michael Trimble, responsable de l'Organisation de liaison américaine en charge des crimes de l'ancien régime explique, le 4 juin : « Nous disposons à Bagdad d'un laboratoire médico-légal particulièrement sophistiqué, qui nous permettra de faire toutes les analyses nécessaires dans les meilleures conditions ». Financée par les Etats-Unis, cette organisation aide les autorités irakiennes dans la préparation des procès contre Saddam Hussein et les responsables de son régime, accusés de crimes contre l'humanité. Dans cette zone en plein désert au sud-ouest de Bagdad, une équipe de 11 personnes, parmi lesquels des spécialistes en archéologie et anthropologie criminelles, a établi un camp de fortune pour analyser des sites identifiés en 2003 comme des charniers potentiels datant de 15 ans.
En 1991, le régime de Saddam Hussein avait écrasé dans le sang une insurrection chiite dans le sud du pays, déclenchée après la défaite des armées irakiennes au Koweït, par la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis. « Des témoins nous ont montré près de 200 sites aujourd'hui recensés au ministère des droits de l'Homme », précise sur place le premier juge d'instruction près du Haut tribunal pénal irakien, Raëd Jouhi. « Mais en ce qui concerne la répression de l'insurrection chiite de 1991, le nombre de victimes dépasse 100.000 personnes, selon les documents dont nous disposons, et pourrait atteindre 180.000 selon des informations qui demandent encore à être vérifiées », affirme le juge Jouhi.
Contrairement aux immenses charniers de l'opération Anfal contre les Kurdes qui contiennent souvent plus de 200 cadavres, ceux du sud du pays sont plus modestes. « Les charniers sont plus petits dans le sud, où la répression a été moins organisée et plus lente que contre les Kurdes. Les forces de sécurité arrêtaient des petits groupes, principalement des hommes, ils les tuaient et puis les enterraient très rapidement », raconte Michael Trimble. Dans un rayon de 7 km autour du charnier, pas moins de 18 sites susceptibles d'abriter d'autres fosses communes ont été recensés et doivent encore être explorés.
De plus, des parlementaires américains républicains en citant un résumé d'un rapport des services de renseignement ont, le 21 juin, affirmé, que les forces de la coalition en Irak ont retrouvé « environ 500 munitions » contenant des agents chimiques, depuis l'invasion de 2003. « Depuis 2003, les forces de la coalition ont retrouvé environ 500 munitions contenant du gaz moutarde ou du sarin appauvri », établit ce document, révélé à la presse par le sénateur Rick Santorum et le président de la Commission du renseignement de la Chambre des représentants, Peter Hoekstra. « Malgré de nombreux efforts pour localiser et détruire des munitions irakiennes datant d'avant la guerre du Golfe (de 1991), on estime que des munitions chimiques, chargées et non-chargées, existent encore », selon ce document. « A mon avis, c'est une découverte incroyablement significative. L'idée que, comme le répètent mes collègues de l'opposition (démocrate), il n'y avait pas d'armes de destruction massive est en fait fausse », en a conclu M. Santorum.
L’Institut kurde de Paris, a, le 16 juin, organisé un colloque sur le thème de « Où va l’Iran ? » dans la salle Victor Hugo de l’Assemblée nationale. Des responsables politiques de différentes organisations politiques représentant toutes et les nationalités et cultures d’Iran ont pris part au colloque qui s’est déroulée en français et en anglais avec traduction simultanée.
Le colloque est parti du constat qu’au total les peuples non persans de l'empire iranien représentent plus de 45 millions d'âmes, soit, environ 65% d'une population iranienne évaluée actuellement à 70 millions. Aucun d'entre eux ne bénéficie d'un système éducatif public dans sa langue. De plus, ceux qui comme les Kurdes, les Baloutches et les Turkmènes sont majoritairement sunnites sont exclus par la Constitution iranienne des organes les plus importants du gouvernement. Victimes de discriminations nationale linguistique et religieuse, ces peuples qui ne se reconnaissent pas dans la représentation biaisée et dictatoriale de la République islamique revendiquent de plus en plus un Iran démocratique, laïc et fédéral.
Sur le thème de la « société iranienne d’aujourd’hui », la première table-ronde présidée par Dr. Hamit Bozarslan, co-directeur de l’Institut d’études des sociétés musulmanes à Paris, a permis de faire le point sur la situation politique et sociétale en Iran. Dr. Ali Nourizadeh, journaliste, écrivain à Londres et spécialiste des questions socio-politiques sur l’Iran et le Moyen-Orient, a dressé le tableau de l’Iran, véritable mosaïque de cultures, de langues et de confessions. M. Abdullah Mohtadî, secrétaire général de Komala, est revenu sur la répression systématique en Iran contre toutes dissidences politico-religieuses et la radicalisation du régime qui bascule dans une logique messianique et confrontationnelle.
« La question des nationalités non-persanes », sujet de la deuxième table-ronde, présidée par Kendal Nezan, président de l’Institut kurde de Paris, a réuni les responsables des principales forces d’opposition en Iran. Mansour Ahwazi, représentant des relations internationales du parti de la solidarité démocratique d’Ahwaz, venu spécialement des Etats-Unis, a exposé la situation des 5 millions d’Arabes en Iran. M. Nasser Boladaï, président du parti du peuple baloutche en Suède, a dressé le tableau du peuple baloutche en Iran. Les enfants baloutches ne peuvent recevoir une éducation en leur langue et éprouvent des difficultés en accéder aux universités iraniennes, qui font une sélection à partir des affiliations religieuses. « Les Baloutches en Iran se sentent dans un système d’apartheid » résume M. Boladaï et dénonce la réduction de son peuple à une minorité discriminée sur son propre territoire, riche en ressources naturelles. Cette analyse a été complétée par Mme Bettina Bouresh de l’Organisation de défense des droits du peuple turkmène. Dr. Zia Sadr, président du Centre pour la culture azérie, venu du Canada, a indiqué pour sa part que « l'Azerbaïdjan d'Iran (…) est actuellement secoué par de nombreuses manifestations à Tabriz mais aussi dans d'autres villes, telles Urmiah, Zangan, Ardabil, Maraga.... ». Dr. Sadr a souligné que « langue azerbaïdjanaise est la langue maternelle de plus de 23 millions de personnes » et a indiqué que « les peuples opprimés d'Iran, qui (constituent) 65% de la population du pays, c'est-à-dire près de 48 millions de personnes » doivent être soutenus pour contribuer « à l'émergence d'un vrai système démocratique dans ce pays ». De son côté, M. Mustafa Hejri, secrétaire général du parti démocratique du Kurdistan d’Iran (PDKI), a exposé la situation des Kurdes d’Iran en indiquant que le Kurdistan iranien inclut quatre provinces de l’Ouest iranien, Kermanshah, Ilam, Azerbaïdjan de l’ouest et le Kurdistan, avec 10 millions d’habitants sur 125 000 km2. Il a dénoncé le régime islamique qui a ordonné le meurtre des centaines de membres de son parti et des autres formations encore aussi bien en Iran et qu’à l’étranger en rendant hommage aux leaders de son parti, Dr. Abdulrahman Gassemlou, puis Dr. Sharafkandi, assassinés par le régime iranien respectivement en 1989 à Vienne et en 1992 à Berlin. Mustafa Hejri a préconisé fédéralisme ethnico-géographique pour consolider l’unité du pays tout en répondant aux aspirations démocratiques légitimes des peuples non persans du pays.
Le colloque s’est complété avec la dernière table-ronde intitulée « les démocraties face au défi iranien », présidée par Gérard Chaliand, spécialiste de géopolitique. Cette dernière table-ronde a réuni Philippe Errera, directeur-adjoint du Centre d’analyse et de prévision (CAP) du ministère français des affaires étrangères et Hubert Védrine, ancien ministre français des affaires étrangères. Ils sont revenus sur le programme nucléaire iranien et sur la position de la France et de la communauté internationale face au défi lancé par le régime islamique qui impose son calendrier et ses désirs en jouant sur ses ressources naturelles et sur son influence dans la région aussi bien en Irak qu’au Liban.
Le colloque a été accueilli avec intérêt par la presse kurde, française et internationale puisque l’Institut kurde avait pu réunir des représentants politiques rarement entendus en France. Les textes des principales interventions sont disponibles sur le site de l’Institut kurde de Paris : www.institutkurde.org
Le parquet d'Ankara a, le 26 juin, lancé une instruction judiciaire contre le principal parti pro-kurde de Turquie, au lendemain d'un congrès où des effigies d’Abdullah Öcalan ont été déployées. Des responsables du parti sont notamment accusés d' « apologie du terrorisme ». L’instruction pourrait, à terme, aboutir à une interdiction du parti politique. Lors de son congrès le 25 juin dans la capitale turque, les dirigeants du Parti pour une société démocratique (DTP) ont voté l'abrogation du principe de coprésidence en vigueur depuis sa fondation en 2005 afin de rendre les statuts conformes à la loi, qui ne prévoit qu'un seul dirigeant. Seul candidat, son ex-coprésident Ahmet Türk, plusieurs fois député, a été élu président sans difficulté. Le premier congrès du DTP a été marqué par la présence d'invités étrangers tels que Gorka Elejabarrieta, du bureau international de Batasuna, bras politique du groupe indépendantiste basque armé ETA, et Philip McGuigan, du Sinn Fein, l'aile politique de l'Armée républicaine irlandaise (IRA).
L'ex-coprésidente du DTP Aysel Tugluk a profité de cette occasion pour appeler l'Etat turc à prendre modèle sur le gouvernement espagnol, qui doit entamer la semaine prochaine des discussions avec l'ETA, pour résoudre la question kurde. « Le dialogue assumé et accepté par le gouvernement espagnol et l'ETA est d'une importance vitale selon les conditions turques aussi », a déclaré Mme Tugluk, appelant implicitement à des discussions entre Ankara et le PKK. Plusieurs maires DTP du Kurdistan de Turquie sont sous le coup de poursuites judiciaires, notamment pour « apologie du terrorisme ». Le DTP, qui n'est pas représenté au Parlement, milite pour les droits des Kurdes en Turquie et la levée du seuil de 10% des voix nécessaire aux législatives pour envoyer des députés à l'Assemblée nationale. Le DTP a été créé par d'anciens députés kurdes dont la plus connue, Mme Leyla Zana, emprisonnée pendant dix ans.
Par ailleurs, cinquante-six maires kurdes dont Osman Baydemir, le maire populaire de Diyarbakir, ont été inculpés par une Cour de Diyarbakir pour une lettre envoyée au Premier ministre danois Anders Fogh Rasmussen, l'exhortant à résister aux demandes d'Ankara de fermer une chaîne de télévision kurde, ont indiqué le 20 juin les sources judiciaires turques. Les maires risquent jusqu'à 10 ans de prison aux termes de l'acte d'accusation qui les incrimine de « soutien délibéré » au PKK à cause de cette lettre en anglais datant de décembre dernier. Ankara a demandé aux autorités danoises d'abroger la licence de diffusion accordée à Roj TV, basée au Danemark où elle émet depuis 2004, au motif que la chaîne a des liens avec le PKK. L'acte d'accusation affirme que Roj TV cite régulièrement les dirigeants du PKK et rapporte des déclarations du PKK incitant à la violence « conformément à la propagande du PKK ». La date de l'ouverture du procès est encore inconnue. Les autorités turques considèrent que la chaîne « incite à la haine en soutenant ouvertement le PKK ». Washington a également demandé à Copenhague de fermer cette chaîne. Cependant, l'instance danoise de surveillance de l'audiovisuel a pourtant estimé au début de l'année que les programmes de Roj TV ne contenaient pas d'incitation à la haine. Selon la radio publique danoise Danmarks Radio (DR), l'ambassade américaine à Ankara a contacté celle du Danemark en Turquie le 7 avril, et a qualifié Roj TV de porte-parole du PKK. Et le 10 avril, le ministère danois des Affaires étrangères a reçu une missive de Washington intitulée « Appel renouvelé des Etats-Unis à fermer Roj TV ».
De plus, le maire kurde de la ville de Cizre, a, le 9 juin, été condamné à un ans et trois mois de prison pour des déclarations considérées comme un éloge d’Abdullah Ocalan. Aydin Budak, maire de cette ville située dans la province de Sirnak, avait dans un discours prononcé à Cizre, critiqué l'isolement auquel est soumis A. Ocalan dans l'île-prison d'Imrali (nord-ouest). Il avait notamment reproché aux autorités d'avoir restreint les visites de sa famille.
La Finlande, qui assurera la présidence tournante de l'Union européenne à partir de mois de juillet, a évoqué le 30 juin une éventuelle suspension des pourparlers avec la Turquie si Ankara ne se pliait pas aux exigences requises pour l'adhésion à l'Union. « Il est toujours possible d'arrêter les négociations. Je suis certain que la Turquie ne l'ignore pas », a déclaré devant des journalistes le Premier ministre Matti Vanhanen alors que son pays s'apprête à prendre la présidence de l'UE pour six mois après l'Autriche. Le commissaire européen à l'élargissement, Olli Rehn, a déclaré de son côté que l'Union européenne pourrait suspendre complètement les négociations d'adhésion avec la Turquie en raison de son refus d'ouvrir ses ports et ses aéroports au trafic en provenance de Chypre, rapporte le 28 juin l'agence finlandaise STT. « C'est une possibilité. J'espère que nous ne devrons pas y recourir, mais il n'y a aucune raison de ne pas y recourir s'il y a lieu de le faire », a indiqué M. Rehn à STT qui lui demandait si l'UE pourrait arrêter les discussions. L'interview a été donnée le jour où les ambassadeurs de l'UE ont décidé pour la première fois de passer à la vitesse supérieure dans les discussions d'accession avec la Croatie plutôt qu'avec la Turquie en raison du blocage concernant Chypre. Lors d'un premier échange de vues en commission des affaires étrangères du Parlement européen sur un rapport parlementaire relatif aux progrès de la Turquie vers l'adhésion, M. Rehn avait le 20 juin confié aux députés qu'il était préoccupé par la baisse de rythme des réformes en Turquie. « La Turquie, si elle veut éviter des problèmes majeurs cet automne, doit tenir parole (...) et respecter les obligations résultant tant de l'accord d'association que du partenariat pour l'adhésion. Tout manquement aura un effet négatif sur les négociations », avait prévenu M. Rehn. Il a pressé la Turquie de prendre des mesures en vue de la normalisation de ses relations avec Chypre, comme « ne plus exercer son veto à l'adhésion de Chypre aux organisations internationales ».
La Turquie, qui a envahi Chypre en 1974 en réaction à un coup d'Etat mené par la junte alors au pouvoir en Grèce, ne reconnaît pas le gouvernement chypriote grec de Nicosie. L'UE réclame de la Turquie qu'elle ouvre ses ports et ses aéroports au trafic en provenance de Chypre dans le cadre d'un accord signé l'an dernier étendant son union douanière aux 10 nouveaux membres de l'Union, dont Chypre. Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a, le 16 juin, déclaré qu'il préférait suspendre les discussions que faire certaines concessions à la République de Chypre. « Tant que les Chypriotes turcs resteront isolés, nous n'ouvrirons ni nos ports ni nos aéroports. Tant pis si les négociations (avec l'UE) s'arrêtent », a-t-il déclaré dans un discours prononcé devant la chambre d'industrie d'Istanbul et retransmis à la télévision. Les Turcs rappellent que les Chypriotes turcs avaient par référendum voté « oui » en 2004 au plan, soutenu par l'Onu, de réunification de l'île, alors que les Chypriotes grecs, plus nombreux et bien plus riches, l'ont rejeté à une nette majorité. « Nous avions fait ce que nous avions à faire (en soutenant le plan de l'Onu). Nous ferons preuve de bonne volonté envers ceux qui feront preuve de bonne volonté envers nous », a indiqué M. Erdogan.
Dans un projet de rapport qui doit être rendu public en octobre ou en novembre sur l'état d'avancement des efforts d'Ankara pour adhérer à l'UE, l’UE relève également un ralentissement des réformes politiques, la poursuite de l'influence de l'armée dans les institutions politiques. Il préconise une plus grande indépendance de la justice et l'octroi de droits aux femmes et aux minorités. Il conclut que les conditions se sont dégradées dans le Kurdistan de Turquie où la lutte a repris entre l’armée turque et le PKK. En outre, le rapport critique l'état actuel des relations entre Ankara et la Grèce et l'Arménie, deux pays qui ont longtemps été les « ennemis » traditionnels de la Turquie. La Turquie, pays candidat à l'UE depuis 1999, a entamé ses négociations d'adhésion en octobre dernier après avoir mis en oeuvre une série de réformes dans les domaines politiques et des droits de l'homme. Le pays ne devrait pas adhérer à l'UE avant 2015 au plus tôt. Cette semaine, il a conclu ses négociations sur le premier, et le moins délicat des 35 volets qui doivent être passés en revue avant de pouvoir adhérer à l'UE.
L'Iran a agité le 25 juin la menace de l'arme du pétrole « si ses intérêts » étaient « attaqués » à cause de son programme nucléaire, tout en rejetant toute suspension de son enrichissement d'uranium comme condition à la reprise de négociations sur ce dossier. « Si les intérêts du pays sont attaqués, nous utiliserons toutes nos capacités (pour répondre) et le pétrole est l'une d'elles », a déclaré le ministre du Pétrole, Kazem Vaziri-Hamaneh, cité par la télévision d'Etat. A ce sujet, le ministre a averti qu' « en cas de sanctions contre le secteur pétrolier de l'Iran (...), le prix du pétrole bondira d'au moins cent dollars » le baril. De telles mesures seraient « déraisonnables et impossibles » car « le remplacement du quota pétrolier (de l'Iran) et de sa forte présence dans l'industrie du pétrole ne serait pas facilement réalisable », a-t-il jugé. L'Iran est le quatrième producteur mondial de pétrole, et le deuxième au sein de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). Les grandes puissances (Allemagne, Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie) lui ont présenté le 6 juin une offre visant à le convaincre de suspendre l'enrichissement. Elle comporte des mesures incitatives, notamment d'ordre économique, mais est liée à la condition préalable d'une suspension de l'enrichissement. Or Téhéran rejette cette condition, comme l'a rappelé dimanche le porte-parole de la diplomatie iranienne Hamid Reza Assefi. « La question de la suspension de l'enrichissement est un pas en arrière, nous pensons que l'Europe devrait négocier sans condition préalable », a déclaré M. Assefi lors d'un point de presse.
Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a à nouveau expliqué que la réponse iranienne n'interviendrait pas avant la mi-août. « L'Iran examine avec une approche positive et dans le cadre de ses intérêts nationaux l'offre des grandes puissances et donnera sa réponse après examen à la fin du mois de Mordad (finissant le 22 août) », a-t-il déclaré le 21 juin selon l'agence iranienne Isna. Le président a tenu ces propos en recevant le chef de la diplomatie turque Abdullah Gül qui lui a remis un message de son Premier ministre Recep Tayyip Erdogan. M. Gül a déclaré à la presse que la question de la suspension de l'enrichissement « devait être réglée de façon pacifique et politique ». Peu après, son homologue américain a réagi à l'annonce du délai iranien en déclarant que « cela semble affreusement long pour une réponse raisonnable (...) Examiner une offre raisonnable ne devrait pas prendre aux Iraniens autant de temps ».
Dans ce contexte tendu, les 57 pays membres de l'Organisation de la conférence islamique, réunis à Bakou, ont apporté leur soutien à l'Iran en appelant le 21 juin à la reprise de pourparlers sur le dossier nucléaire iranien « sans conditions préalables ». L'OCI a aussi « fait part de sa préoccupation face aux pressions exercées sur l'Iran et aux répercussions qu'elles pourraient avoir sur la paix et la sécurité dans la région et en dehors ».
L'Iran a annoncé le 11 avril avoir procédé à son premier enrichissement d'uranium, à un niveau de 3,5%. Il a refusé depuis de mettre un terme à ses activités dans ce domaine, malgré une déclaration présidentielle du Conseil de sécurité de l'ONU adoptée le 29 mars. L'ancien chef des inspecteurs de l'ONU Hans Blix a, le 19 juin, estimé que l'Iran pourrait être en mesure de fabriquer une bombe atomique d'ici cinq ans si on l'autorise à enrichir de l'uranium à une échelle industrielle. « D'ici 2010, 2011, ils pourraient avoir l'arme nucléaire, s'ils le veulent », a observé Hans Blix après avoir remis aux autorités indonésiennes une copie du rapport publié en début de mois par la Commission sur les armes de destruction massive. Selon lui, c'est la raison pour laquelle les pays occidentaux devraient rester fermes sur leurs positions et refuser tout enrichissement à l'échelle industrielle de l'uranium.
De son côté le ministre turc des Affaires étrangères Abdullah Gul s’est, le 24 juin, rendu à Téhéran pour une visite de travail afin de briser l'impasse due à la question nucléaire iranienne conformément à des demandes de la communauté internationale. M. Gul a rencontré le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, le négociateur en chef Ali Larijani et l'ancien président Hashimi Rafsanjani. « Une évaluation a été conclue lors des entretiens actuels avec toutes les parties concernées par le programme nucléaire iranien et l'objectif de cette visite est de partager cette évaluation avec la partie iranienne au plus haut niveau », a, le 23 juin, indiqué le ministre turc des Affaires étrangères dans une déclaration. Après sa visite en Iran, M. Gul se rendra en visite du 4 au 7 juillet aux Etats-Unis avant de regagner Téhéran pour effectuer du 8 au 9 juillet une visite en Iran.
Le Front de salut national en Syrie (FSN, opposition en exil) a clôturé le 5 juin à Londres son congrès fondateur en appelant les Syriens et les forces armées du pays à «briser les barrières de la peur» pour renverser le régime de Damas et établir la démocratie dans le pays. «Il n'y a pas de doute (sur le fait) que le régime va tomber», affirme le FSN dans sa déclaration finale. «Donc, chers concitoyens, brisez les barrières de la peur qui ont été mises en place pendant des décennies, comme l'ont fait vos aïeux lorsqu'ils ont obtenu l'indépendance de la Syrie». Le FSN appelle également «les forces armées (syriennes) à assumer leurs responsabilités nationales et historiques en étant l'armée du peuple». Il «invite les forces de sécurité, particulièrement les officiers employés par le régime pour infliger des injustices aux citoyens (...) à prendre leurs responsabilités morales et nationales et à refuser d'obéir aux ordres du groupe que vous tous savez corrompu et oppressif», à savoir le régime du président syrien Bachar al-Assad.
Le FSN, qui avait organisé son congrès fondateur les 4 et 5 juin à Londres, regroupe une cinquantaine de personnalités de l'opposition syrienne, dont l'ancien vice-président syrien, Abdel Halim Khaddam, et le chef des Frères musulmans de Syrie, Ali Sadreddine al-Bayanouni. Il s'est donné pour programme «la construction d'un État moderne, civil et démocratique, fondé sur la pluralité, le transfert pacifique du pouvoir» pour un système politique fondé sur des élections libres sans «violations des droits» d'aucun groupe, religieux ou ethnique. Dans sa déclaration finale, le FSN accuse le régime syrien de «prise de pouvoir illégale et de coercition» et d'avoir «perdu toute raison d'être». Mais il a pris soin de ne pas se distinguer de l'opposition «de l'intérieur», regroupée au sein de la «Déclaration de Damas». Lancée en octobre 2005, cette dernière réunit plusieurs partis (communiste, nationaliste, libéral et kurdeS) et appelle à un «changement démocratique radical» en Syrie. Enfin, le FSN a désigné MM. Khaddam et Bayanouni respectivement aux postes de numéro un et numéro deux du FSN. « La Syrie fait face à un double choix », a déclaré M. Khaddam dans son discours inaugural prononcé en arabe lors du congrès. « Le premier est le maintien de la situation actuelle, et alors sa destinée serait de disparaître. L’autre est le retour au peuple et la constitution d’un nouveau régime, un régime démocratique » dans lequel « l’alternance politique se ferait au travers d’élections libres et qui garantirait la liberté des citoyens, la liberté de la société et la liberté des individus ». « Le changement pacifique et démocratique exigé (...) demande à tous d’être prêts au sacrifice et au changement sur le chemin de la liberté et de la souveraineté », a déclaré le chef des Frères musulmans de Syrie, Ali Sadreddine al-Bayanouni. Cette réunion, à laquelle participent notamment des partis kurdes, des indépendants et des communistes, représente « le point de départ unique sur le chemin de la fin du régime » de Bachar el-Assad, a-t-il ajouté.
Abdel Halim Khaddam, est l'une des principales figures de la «vieille garde» du parti Baas, il vit en exil à Paris depuis l'été 2005. Il accuse Bachar al-Assad d'avoir ordonné l'assassinat de Rafic Hariri. La justice de son pays l'accuse, elle, de «haute trahison» et de «corruption». Sadreddine al-Bayanouni vit pour sa part en exil à Londres. La révolte des Frères musulmans, qui constituait la force d'opposition la plus structurée contre le régime, avait été violemment réprimée au début des années 1980 à coups de canons, faisant plus de 20 000 morts.
Par ailleurs, les autorités syriennes ont affirmé le 6 juin avoir déjoué une «opération terroriste» à proximité du siège de la radio-télévision d’Etat en plein coeur de Damas, tuant quatre assaillants, la dernière d’une série d’attaques annoncées ces derniers mois par la Syrie. «Les forces de sécurité ont mis en échec (le 2 juin) une opération terroriste qui a visé des bâtiments inhabités derrière le complexe de la radio-télévision d’Etat», a indiqué l’agence officielle Sana, citant une source au ministère de l’Intérieur. L’opération s’est déroulée à quelques mètres de la Place des Omeyyades où se trouvent, outre le siège de la télévision, plusieurs bâtiments publics dont la Bibliothèque nationale Assad et l’Opéra national. Les bâtiments abandonnés visés se trouvent également près du complexe des douanes et du quartier général de l’état-major de l’armée. C’est la première fois depuis des décennies, depuis le conflit armé qui avait opposé les Frères musulmans au pouvoir syrien dans les années 80, qu’une opération de ce genre se déroule à proximité de bâtiments officiels.
L'Organisation nationale des droits de l'homme en Syrie (ONDHS) a pour sa part annoncé qu’un Syrien, Mohammad Oussama Al-Sayess, accusé d'être membre des Frères musulmans, a, le 25 juin, été condamné par la Cour de sûreté de l'Etat à la peine capitale ensuite commuée en douze ans de prison. « Mohammad Oussama Al-Sayess a été condamné aujourd'hui à la peine capitale conformément à la loi 49 (qui punit de mort les membres des Frères musulmans). Mais le tribunal a commué cette peine en 12 ans de prison », a indiqué le président de l'ONDHS, Ammar Qorabi dans un communiqué. Al-Sayess, 27 ans, avait été expulsé de Grande-Bretagne vers la Jordanie il y a un an et demi. Mais les autorités belges l'avaient arrêté, lors d'une escale de son avion en Belgique, et extradé vers la Syrie, a indiqué M. Qorabi. Depuis le milieu des années 1990, les Frères musulmans condamnés à mort ne sont plus exécutés, leur sentence étant commuée en longue peine de prison. La loi 49 « constitue une barrière importante à la transition de la Syrie vers un Etat de droit », a affirmé M. Qorabi. « Il est temps que les autorités syriennes revoient les lois arbitraires, lèvent l'Etat d'urgence en vue d'un changement démocratique », a-t-il ajouté.
L'Organisation nationale des droits de l'Homme en Syrie (ONDHS) avait également indiqué dans un précédent communiqué que l'écrivain syrien Mohammad Ghanem a été condamné le 20 juin à six mois de prison ferme par un tribunal militaire pour «offense au président de la République». «Le tribunal militaire à Raqqa a condamné l'écrivain Mohammad Ghanem à six mois de prison pour avoir offensé le président de la République, porté atteinte à l'image de l'État et incité à des dissensions confessionnelles», selon le président de l'ONDHS, Ammar Qorabi. Mohammad Ghanem a été arrêté le 31 mars à son domicile après avoir publié sur Internet des articles critiques sur la situation intérieure en Syrie. M. Qorabi a estimé que ce jugement «entre dans le cadre de la campagne lancée depuis plusieurs mois par les autorités contre les militants» des droits de l'Homme en Syrie. Par ailleurs, les autorités ont arrêté le 18 juin Merhi Omrane devant la Haute cour de sûreté de l'État, pour avoir pris en photo son frère, détenu, qui sortait du tribunal à la fin d'une audience, selon M. Qorabi.
Un groupe kurde répondant au nom de Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK) a récemment revendiqué plusieurs attentats dans des centres urbains, dont Istanbul, et menacé de prendre pour cible des objectifs touristiques. Les autorités turques assimilent les TAK au PKK, estimant que celui-ci préférait changer de nom pour des opérations visant des civils et pouvant à ce titre encourir la réprobation de l'opinion publique internationale. Le TAK a revendiqué ainsi une explosion dans une station balnéaire méditerranéenne du sud de la Turquie qui a tué quatre personnes. L'attentat à la bombe a été revendiqué au nom des Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK) par une personne qui a appelé l'agence de presse Firat, dont le siège est en Europe alors que l’explosion semblait être accidentelle. Quatre personnes -un Hongrois, une Néerlandaise, une Norvégienne et un Turc- avaient été tués et 25 autres blessés dans l'explosion survenue le 25 juin aux cascades de Manavgat. Le TAK a une nouvelle fois appelé les touristes étrangers à ne pas passer leurs vacances en Turquie. Selon les autorités locales, une bonbonne de gaz d'un restaurant est à l'origine de l'explosion, mais le presse turque a affirmé le 27 juin que trois « terroristes », dont une femme, ont été filmés par des caméras de surveillance en train de poser l'engin dans une poubelle 20 minutes avant qu'il n'explose. Le TAK avait également revendiqué un attentat à l'explosif faisant 15 blessés le 3 juin à Mersin. « Tant que la torture se poursuivra au Kurdistan, aucune région de la Turquie ne sera en paix », précise l'organisation qui menace de nouveaux attentats de « vengeance ». L'explosion est survenue devant un petit commerce de la ville de Mersin, qui compte une diaspora kurde chassée de ses terres par l’armée turque. L'explosion provenait d'un réfrigérateur dans lequel étaient entreposées des glaces, selon les autorités locales. Citant des sources sécuritaires, l'agence de presse Anatolie a affirmé qu'une grenade actionnée à distance par un téléphone portable était à l'origine de l'explosion.
Le PKK a, quant à lui, appelé le 10 juin les Kurdes de Turquie à fuir le service militaire obligatoire alors que deux de ses combattants ont été abattus dans des heurts avec l'armée à Silvan, sous-préfecture de Diyarbakir. Dans un communiqué cité par l'agence pro-kurde Firat, le PKK a exhorté les Kurdes de Turquie à ne pas accomplir leur service militaire. « Tout jeune patriote kurde doit refuser d'aller faire son service dans ces conditions ou au moins refuser de participer aux opérations » dans le Kurdistan de Turquie, souligne le document. Tout citoyen turc est appelé sous les drapeaux à partir de 18 ans pour servir de six à 15 mois selon son niveau d'éducation. La Turquie ne reconnaît pas le droit à l'objection de conscience, les réfractaires pouvant encourir jusqu'à cinq ans de prison.
Ces derniers mois, les affrontements s’intensifient au Kurdistan. Ainsi, deux gendarmes ont été blessés le 24 juin dans la province d'Elazig par l'explosion d'une mine posée selon les autorités par le PKK. La veille, onze combattants kurdes du PKK ont été tués dans des affrontements avec l'armée turque près de la ville de Cukurca, province de Hakkari. La police turque avait annoncé le 21 juin avoir arrêté deux combattants kurdes supposés en possession de 5,7 kilos d'explosif devant servir à des attentats à Istanbul. Les deux membres supposés du PKK ont été arrêtés la semaine précédente lors d'une opération conjointe avec les services de renseignement. Le 18 juin, l'armée turque avait tué trois combattants kurdes peu après le déraillement d'un train de marchandises provoqué par le PKK selon les sources militaires turques. Ils ont été abattus au cours d'un accrochage avec des soldats turcs dans la région montagneuse de Tunceli. Le même jour, les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), ont par ailleurs revendiqué sur leur site internet l'attentat à la bombe qui avait blessé quatre personnes dans le centre d'Istanbul le 15 juin.
Au cours de la journée de 16 juin, trois bombes ont explosé, faisant trois blessés, selon les sources locales. Le premier engin, disposé sous une voiture dans la ville de Van, a causé des dégâts matériels. Une deuxième bombe commandée à distance et cachée dans une poubelle métallique a explosé plus tard dans la journée près d'un bâtiment de la météorologie nationale à Baskale, une localité proche de Van, faisant trois blessés légers. Le troisième engin a explosé au passage d'un convoi militaire dans la province de Hakkari, sans faire de victimes, selon des sources locales, qui ont précisé qu'une dizaine de kilos d'explosif plastic de type C4 avaient été retrouvés sur les lieux. Par ailleurs, un membre supposé du PKK s'est tué à Van le 16 juin en faisant tomber à ses pieds une grenade qu'il tentait de lancer contre des policiers venus l'arrêter à son domicile, selon des sources de police. De plus, deux soldats turcs ont été tués et cinq autres blessés le 11 juin lorsque leur convoi a été pris dans une embuscade dans la localité montagneuse de Geyiksu, dans la province de Tunceli. A Cizre, dans la province de Sirnak, une personne a été tuée et quatre blessées le 8 juin dans une explosion. L'explosion est partie d'une voiture garée dans le centre-ville de Cizre. Par ailleurs, dans une embuscade et une attaque à la mine attribuée au PKK, deux soldats turcs ont, le 6 juin, été tués et quatre autres blessés. Les deux soldats ont perdu la vie lorsqu'une patrouille armée a essuyé des tirs à Semdinli. Deux militaires ont été blessés. A Pülümür, à 650 km au nord-ouest de Semdinli, deux soldats qui faisaient partie d'une unité assurant la sécurité d'un véhicule de ramassage scolaire militaire ont été blessés par l'explosion d'une mine activée à distance à leur passage. A Bingöl, un soldat turc a été tué et huit autres blessés dans une embuscade tendue le 4 juin. Selon le gouverneur, Vehbi Avuç, le PKK a attaqué avec des fusils mitrailleurs un convoi militaire qui voyageait sur la route entre Bingöl et Elazig. Le gouvernorat de Bingöl avait indiqué dans un précédent communiqué que les forces de sécurité turques ont abattu deux combattants kurdes dans la nuit de 2 juin près de la bourgade de Suveren lors d'une vaste opération de ratissage organisée après que deux soldats eurent été blessés le 31 mai dans la région par l'explosion d'une mine posée par le PKK. Les autorités turques ont également annoncé le 2 juin qu’un soldat turc et quatre combattants kurdes armés ont été tués au cours d'opérations militaires dans les régions montagneuses de Cudi et Gabar ainsi que dans les régions de Bestler-Dereler dans la province de Sirnak.
La bataille diplomatique que livre le Canada à l'Iran a gagné en intensité, le 23 juin, alors que le gouvernement fédéral a réclamé l'arrestation du procureur général de Téhéran, Saïd Mortazavi, impliqué dans la mort d'une Canadienne. Ottawa souhaite que des accusations soient portées contre le procureur général de Téhéran qui a été lié à l'arrestation de Zahra Kazemi, une journaliste canadienne torturée puis tuée à Téhéran, en 2003. Le premier ministre Stephen Harper a confirmé que son gouvernement avait demandé aux autorités allemandes qu'elles procèdent à l'arrestation de Saïd Mortazavi s'il faisait escale en Allemagne à son retour en Iran depuis Genève, où il a prononcé une allocution devant le Conseil des droits de l'homme de l'ONU. Le procureur général n'est finalement pas passé par l'Allemagne, mais M. Harper a affirmé que le Canada n'entendait pas abandonner. «Nous demandons à la communauté internationale d'utiliser tous les moyens légaux possibles afin de détenir cet individu et de le traduire en justice», a déclaré M. Harper, en marge d'une réunion de son cabinet.
Selon certaines rumeurs, Saïd Mortazavi, connu pour avoir ordonné la fermeture de quelque 80 journaux en faveur d'une réforme en Iran, pourrait devenir ministre iranien de la Justice. Le ministre des Affaires étrangères du Canada, Peter MacKay, a condamné le 21 juin la présence du procureur général de Téhéran à la réunion inaugurale du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, en Suisse. Deux enquêtes menées par le gouvernement iranien ont conclu que Saïd Mortazavi avait ordonné l'arrestation de Mme Kazemi alors qu'elle photographiait une prison, affirme Ottawa. Elle est morte après avoir été apparemment battue et torturée tandis qu'elle était en détention. Le ministre MacKay a également accusé Saïd Mortazavi d'avoir ensuite procédé à la falsification de documents afin de camoufler son implication dans cette affaire.
Par ailleurs, le journaliste dissident iranien Akbar Ganji, a reçu le 6 juin à Moscou la Plume d'or de la liberté, prix décerné par l'Association mondiale des journaux (AMJ) en présence de quelque 1.700 patrons de presse et rédacteurs en chef du monde entier avait forcément joué en sa faveur. Il a déclaré qu'il ne comptait pas quitter l'Iran et qu'il continuerait à critiquer le régime des ayatollahs malgré le risque de « retourner en prison ». S'exprimant pour la première fois en public depuis sa libération en mars après six ans de prison, il a répondu « oui, je retournerai en Iran » à un journaliste qui lui demandait s'il allait rentrer dans son pays ou s'exiler, lors du Forum mondial des rédacteurs en chef (World Editors Forum) à Moscou. Tout en se disant opposé au régime iranien actuel, M. Ganji a tenu à préciser que « l'Iran n'est pas un régime fasciste et totalitaire comme l'était celui de Staline ». Enfant de la Révolution islamique avant de devenir tardivement critique à l'égard du régime, M. Ganji a été arrêté en avril 2000 lorsqu'il travaillait au quotidien Sob-e Emrouz, puis condamné l'année suivante, après des articles mettant en cause plusieurs dignitaires dans une série de meurtres d'intellectuels et d'écrivains.