Les Etats-Unis ont transféré le 28 juin avec deux jours d'avance le pouvoir à un gouvernement intérimaire irakien qui aura la lourde tâche de mater l’insurrection dans le Triangle sunnite et de mener le pays vers la démocratie avec l'aide d'une force multinationale. La cérémonie de passation du pouvoir, inattendue et préparée dans le plus grand secret, s'est tenue 48 heures avant la date prévue du 30 juin, à la demande du Premier ministre irakien Iyad Allaoui. Selon le secrétaire d'Etat adjoint Richard Armitage, le changement de date était destiné à “brouiller les plans” de ceux qui auraient voulu lancer des attaques pour marquer l'événement.
La passation, qui consacre sur le plan formel la restitution à l'Irak de sa souveraineté après 14 mois d'occupation, a eu lieu lors d'un échange de documents entre l'ex-administrateur américain Paul Bremer et M. Allaoui, en présence du président intérimaire Ghazi al-Yaouar, dans la Zone verte, abritant le QG de la coalition à Bagdad. L'ex-administrateur américain Paul Bremer a qualifié ce jour d' “historique”. Il a ensuite embarqué à bord d'un avion militaire pour les Etats-Unis après la dissolution de l'Autorité provisoire de la coalition qu'il a présidée pendant 13 mois. Paul Bremer avait choisi de consacrer deux de ses derniers jours en Irak à une tournée dans le Kurdistan où il était allé visiter ses “amis kurdes”. Beaucoup d'entre eux lui ont demandé de rester. “Je viens dire adieu aux amis que je me suis fait cette année”, avait affirmé M. Bremer, qui avait terminé le 23 juin son voyage dans le nord. A son arrivée à Souleimanieh, il avait été reçu par des enfants, vêtus d'habits traditionnels, qui chantaient “Welcome, welcome”. Lors de sa tournée d'adieu, M. Bremer s'était également rendu à Salaheddine, le fief du Parti démocratique du Kurdistan (PDK) pour y rencontrer notamment Massoud Barzani. Les deux hommes ont développé une solide relation en travaillant ensemble, ont indiqué des responsables de la coalition. Alors au lieu d'une cérémonie d'adieu formelle, les deux hommes avaient préféré effectuer une ballade champêtre en voiture dans cette région montagneuse.
Les nouveaux dirigeants irakiens ont prêté serment dans l'un des ex-palais de Saddam Hussein dans la Zone verte. M. Allaoui s'est engagé à faire juger les combattants étrangers et appelé les anciens baassistes à se tenir loin de la guérilla. Il a reconnu la lourdeur de la tâche qui l'attend, appelé à l'unité nationale et tendu “la main de la paix” aux pays voisins, dont l'Iran et la Turquie. Il a promis de bâtir des forces de défense, de relancer l'économie et demandé une aide étrangère à la reconstruction de son pays.
Signe concret de cette passation de pouvoir: l'ambassade américaine à Bagdad a publié le 28 juin un communiqué pour annoncer le rétablissement des relations diplomatiques entre les Etats-Unis et l'Irak, rompues depuis 1991 après le début de la première guerre du Golfe. L'ambassadeur américain John Negroponte est arrivé sur place le 28 juin, prenant la succession de Paul Bremer. M. Negroponte sera à la tête d'une énorme ambassade, comptant un personnel de 1.700 employés dont jusqu'à un millier d'Américains.
Avec quelque 130.000 soldats, les Américains continuent de représenter près des neuf dixièmes des forces étrangères en Irak, sans lesquelles le fragile gouvernement intérimaire n'aurait que de piètres chances de survie. Le président Bush a promis que ces forces resteraient en Irak “aussi longtemps qu'il le faudra pour assurer la stabilité” du pays, une perspective qui risque d'être encore lointaine. L'OTAN s'est engagée à aider à la formation des forces de sécurité irakiennes, mais aucun renfort significatif de soldats d'autres pays n'est attendu pour prêter main forte aux GI's en Irak. Après avoir prêté serment, M. Allaoui a annoncé que son gouvernement allait prendre une série de mesures d'urgence pour tenter de rétablir la sécurité. Il s'est engagé à traduire en justice tous les combattants étrangers et a demandé aux anciens membres du parti Baas de ne pas rejoindre les rangs de la guérilla.
Le transfert a été bien accueilli dans le monde mais à différents degrés: il a été applaudi avec ostentation par les membres de la coalition menée par les Etats-Unis mais salué plus sobrement par les pays opposés à la guerre qui a renversé la dictature de Saddam Hussein en avril 2003.
Fidèle allié de Washington en Irak, le Premier ministre britannique Tony Blair a estimé que ce transfert était “une étape importante dans le voyage du peuple irakien vers un nouvel avenir”. Pour la Pologne, qui commande une force multinationale dans le centre de l'Irak, “tout ce qui accélère le processus de transfert du pouvoir aux Irakiens (...) est très bien”, selon le ministre adjoint de la Défense, Janusz Zemke.
D'autres pays ayant soutenu les Etats-Unis en Irak ont fait part de leur satisfaction. Le ministre italien des Affaires étrangères Franco Frattini a souligné que son pays “a travaillé dur pour atteindre cet objectif (NDLR: le transfert de pouvoir) et ressent encore plus le devoir moral de soutenir le courageux gouvernement irakien dans ses efforts en faveur de la démocratie, de la sécurité et de la reconstruction”. Le Premier ministre australien John Howard a félicité le peuple irakien “pour cet acte de foi dans un avenir démocratique”. Trois autres pays ayant soutenu Washington sur l'Irak -le Japon, le Danemark et les Philippines- ont également fait part de leur satisfaction.
Pour la France, opposée à la guerre, “le transfert de souveraineté est un événement attendu et important”, selon la porte-parole du président Jacques Chirac, Catherine Colonna. De son côté, l'Allemagne a “salué” ce transfert. “Pour l'Irak, c'est une étape importante sur la voie du retour dans la communauté des Etats indépendants”, a souligné la porte-parole de la diplomatie, Antje Leendertse. Autres pays hostiles à la guerre en Irak, la Russie a promis de travailler avec le nouveau gouvernement alors que la Chine félicitait les Irakiens, espérant que leur pays serait “indépendant, en paix et prospère”. L'Union européenne a déclaré envisager l'envoi d'un représentant spécial à Bagdad. “Nous voulons établir le contact avec le nouveau gouvernement dès que possible”, a déclaré la porte-parole de l'UE Cristina Gallach. De son côté, l'ancien chef des inspecteurs en désarmement de l'ONU, Hans Blix, critique de la guerre contre l'Irak, a parlé d'un “jour important”.
Des pays arabes ont également salué le transfert de pouvoir. Le roi Abdallah II de Jordanie y voit une “étape importante dans l'histoire de l'Irak”. Pour le ministre égyptien des Affaires étrangères Ahmed Maher, cette étape est de nature à favoriser une accalmie des violences dans le pays. Le Koweït, les Emirats arabes unis et l'Iran ont également exprimé leur soutien. Au Caire, le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, a espéré que le gouvernement irakien pourrait “exercer sa souveraineté et son pouvoir d'une manière que lui apportera de la légitimité”. L'Indonésie, pays musulman le plus peuplé du monde, a fait part de sa satisfaction mais a averti qu'elle attendait de voir comment la restauration de la souveraineté “se matérialiserait sur le terrain”. L'Organisation de la conférence islamique (OCI), la plus grande institution musulmane inter-étatique, avait le 16 juin apporté son soutien au nouveau gouvernement intérimaire irakien et s'était engagée à lui fournir une “aide active” dans la transition. Les ministres des Affaires étrangères des 57 pays de l'OCI, en réunion en Turquie, avaient ainsi légitimé le nouveau gouvernement. L'OCI n'avait pas soutenu le Conseil intérimaire de gouvernement (CIG) auparavant installé en Irak par la coalition conduite par les Etats-Unis.
Le cheikh Ghazi al-Yaouar a été désigné le 1er juin premier président de l'Irak post-Saddam Hussein, après que son rival Adnane Pachachi, pressenti par les Américains, eut décidé de jeter l'éponge. Ibrahim Jaafari, un chiite du parti Al-Dawa, et le Kurde Roj Nouri Shawis, du Parti démocratique du Kurdistan, ont été nommés aux postes de vice-présidents. Ghazi al-Yaouar, 46 ans, sunnite, était le président en exercice du Conseil de gouvernement irakien Il est le neveu de cheikh Mohsen al-Yaouar, chef de la tribu des Chammar, qui compte trois millions d'âmes sunnites et chiites, des confins de la Syrie au nord à l'Arabie saoudite au sud en passant par l'Irak et le Koweït. Après des études d'ingénieur à l'université George Washington dans la capitale fédérale américaine, il s'est installé en Arabie où il a ouvert une entreprise de télécommunications prospère. Parfaitement anglophone, désireux de retenir dans chaque culture “ce qu'il y a de meilleur”, le cheikh est un partisan de l'intégrité de l'Irak, même s'il est favorable à une large autonomie pour les Kurdes. Il est resté 15 ans en exil et est rentré en Irak au printemps 2003. Sa candidature a été proposée et soutenue par les Kurdes en raison de ses positions fédéralistes alors que Pachachi était resté flou sur cette question cruciale.
Le chiite Ibrahim Jaafari et le Kurde Roj Nouri Shawish deux politiciens chevronnés, sont tous les deux nés en 1947, le premier à Kerbala, la ville sainte chiite du centre de l'Irak, le second à Souleimaniyeh, dans le nord du pays. Ibrahim Jaafari, qui a fait ses études de médecine à l'université de Mossoul, a rejoint le parti chiite al-Daawa en 1966. Ce parti jouit d'un prestige en raison de sa résistance à Saddam Hussein en Irak et à l’étranger ainsi que d'une légitimité procurée par des années de répression de ses membres. Il a commencé à mener des attaques contre des responsables du parti Baas dans les années 1970 mais s'est réellement engagé dans la résistance armée dans les années 80, époque à laquelle Jaafari a fui en Iran avant de rejoindre Londres en 1989. L'appartenance au parti Daawa était alors passible de la peine de mort. Et selon le parti, pas moins de 77.000 de ses membres ont été tués par le régime de Saddam Hussein, principalement entre 1982 et 1984. Après l'invasion de l'Irak par les troupes de la coalition, Jaafari a rapidement retrouvé une stature au sein de la communauté chiite. Il est l'un des rares membres du Conseil de gouvernement provisoire, dont il fut le premier président, à avoir été nommé à un poste au sein du nouvel exécutif irakien.
Issu d’une illustre famille de patriotes kurdes, Dr. Roj Nouri Shawis a fait des études d’ingénieur électrique à Mossoul avant de partir en Allemagne, où il a préparé son doctorat où il fut l’un des animateurs et le président de l’Association des étudiants kurdes en Europe. Il retourne en Irak en 1975 pour rejoindre la résistance kurde, au sein de laquelle il combattra pendant une décennie et accédera au rang du membre du Bureau politique du Parti démocratique du Kurdistan de Massoud Barzani. Premier ministre du gouvernement régional kurde à Erbil de 1996 à 1999, il devient ensuite le président du Parlement uni du Kurdistan irakien.
Le parlement du Kurdistan irakien a adopté le 11 juin une “position positive” envers la résolution du Conseil de sécurité de l'Onu, entérinant ainsi le maintien des sept ministres kurdes au sein du gouvernement intérimaire dirigé par Iyad Allaoui. “Le Parlement du Kurdistan a décidé d'adopter une position positive à l'égard de la résolution du Conseil de sécurité de l'Onu car tout le monde a affirmé son respect pour la Loi fondamentale”, a déclaré à l'issue de la réunion Roj Nouri Shawis, qui est à la fois vice-président d'Irak et président en exercice du parlement kurde. Il a souligné avec satisfaction que le président irakien Ghazi al-Yaouar et le Premier ministre Iyad Allaoui “avaient indiqué qu'ils étaient attachés à cette loi et le président américain George W. Bush, lors de sa récente tournée européenne, a dit avec franchise son attachement à cette loi”.
Au lendemain du vote le 8 juin par l'Onu de la résolution 1546, plusieurs responsables kurdes avaient exprimé leur déception car le texte ne faisait aucune référence à la Loi fondamentale, qui doit régir l'Irak durant 18 mois. Cette loi, adoptée en mars par le défunt Conseil de gouvernement transitoire irakien et chargée de jouer le rôle de Constitution provisoire, reconnaît le fédéralisme et l'autonomie du Kurdistan. Elle donne aussi un droit de veto aux Kurdes lors du référendum pour la Constitution provisoire.
Le Parlement kurde a été fondé le 4 juin 1992 et compte 105 députés, dont 51 membres du Parti démocratique du Kurdistan (PDK, de Massoud Barzani), 49 de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK, de Jalal Talabani) et cinq chrétiens.
A Erbil, lors de la réunion à la quelle étaient invitées 25 autres formations, allant des islamistes aux communistes, ainsi que les Turcomans, la majorité des intervenants a estimé qu'il fallait rester au gouvernement. “L'Irak continuera son action conformément à la Loi fondamentale jusqu'aux élections, qui suivront le vote de la Constitution”, soit à la fin 2005, a souligné M. Shawis.
« En tant que Kurde et femme, je suis déçue qu'elle (la résolution) ne reconnaisse pas la loi fondamentale comme une future base de la Constitution », a déclaré la ministre des Travaux publics Nesrine al-Barwari, ajoutant craindre que les droits prévus par ce texte ne disparaissent de la future Constitution. La Loi fondamentale contient une déclaration des droits, prévoit un quota de 25% de femmes dans le futur Parlement et fait de l'Irak un Etat fédéral, une revendication fondamentale des Kurdes.
Le ministre des Transports du gouvernement kurde, Haïdar el-Cheikh Ali, a estimé pour sa part qu'il y avait “une grande déception dans la rue kurde alors que nous avons été les seuls à accueillir les Américains avec des fleurs. Mais ils nous ont déçus”. “Les Américains ne sont pas venus ici pour donner le fédéralisme mais pour leurs propres intérêts”. “Appelons les Kurdes à rester dans le gouvernement et à renforcer leurs alliances”, a-t-il néanmoins ajouté. Ahmad Charif, un membre de l'UPK, s'est dit “pessimiste quant au futur”. “J'ai peur des positions des partis arabes envers les Kurdes”, a-t-il ajouté. “Appelons à faire un référendum sur le Kurdistan pour que le peuple kurde décide de son destin”, a indiqué de son côté Rafour Mahmouri, un membre du PDK.
Par ailleurs, le vice-Premier ministre irakien, Barham Saleh, avait regagné Souleimanieh pour marquer son mécontentement devant le flou concernant ses prérogatives au sein du gouvernement. Selon un responsable au sein du gouvernement de Souleimaniyah, « M. Saleh a expliqué (au Premier ministre Iyad) Allaoui lors du Conseil des ministres qu'il n'avait pas l'intention de se satisfaire d'un poste honorifique juste pour occuper un siège au gouvernement ». « Je ne peux accepter…qu'un vrai poste ayant des pouvoirs juridiques clairs, qui représente les aspirations du peuple kurde et qui démontre que les Kurdes sont les égaux des Irakiens » des autres communautés, a indiqué M. Salih à l'adresse de M. Allaoui. « Il est hors de question d'accepter la manière dont étaient attribués les postes aux Kurdes par le passé », a-t-il encore souligné à M. Allaoui, selon le responsable.
M. Saleh qui exerçait la fonction de Premier ministre du gouvernement régional kurde basé à Souleimanieh, a rencontré à plusieurs reprises M. Allaoui pour parler de ses prérogatives en tant que vice-Premier ministre chargé de la Sécurité nationale. Il y a en effet des difficultés d'adaptation dans le mesure où le Premier ministre a placé la sécurité en tête de ses priorités et dirige le Comité ministériel pour la sécurité nationale, qui est chargé de la coordination avec la coalition.
Dans un communiqué commun publié le 8 juin, les deux dirigeants kurdes Massoud Barzani et Jalal Talabani avaient affirmé que « le peuple du Kurdistan ne pouvait pas accepter d'être traité en citoyen de seconde zone dans l'Irak de l'après-Saddam. Nous avions obtenu dans le passé le poste de vice-président et d'autres fonctions sans véritable pouvoir ». MM. Barzani et Talabani avaient insisté pour avoir les postes de président ou de Premier ministre, dans le gouvernement intérimaire mis en place il y a une semaine, mais l’envoyé spécial de l’ONU et l'administrateur américain Paul Bremer, pour « ménager les susceptibilités de certains pays voisins et du monde arabe » avait refusé, leur offrant le poste de vice-président. Les Kurdes ont sept ministres sur 33 dans le gouvernement central d'Irak.
Les deux dirigeants kurdes Massoud Barzani et Jalal Talabani avaient également adressé une lettre à M. Bush avant le vote de la résolution à l’ONU. « Nous demandons que la Loi fondamentale soit mentionnée dans la résolution ou qu'elle soit reconnue comme loi engageant le gouvernement intérimaire avant et après les élections », avaient affirmé MM. Barzani et Talabani dans cette lettre publiée sur des sites internet kurdes et datée du 1er juin. « Au cas ou la loi ne serait pas appliquée ou si elle était supprimée, il n'y aurait pas d'autres choix pour le gouvernement du Kurdistan que de cesser sa participation au gouvernement central et à ses institutions, de boycotter les élections et d'interdire l'entrée du Kurdistan aux membres du gouvernement central », ajoutaient MM. Barzani et Talabani.
Le projet de résolution sur le transfert de souveraineté à l'Irak a été voté à l'unanimité du Conseil de sécurité de l'Onu, après que les Etats-Unis et la Grande-Bretagne eurent accepté un ajout au texte levant les dernières réticences au sein de l'instance. La résolution vise à accompagner le transfert du pouvoir aux Irakiens le 30 juin en détaillant les étapes devant conduire à l'organisation d'élections générales d'ici à janvier 2005 et les conditions dans lesquelles les troupes de la coalition resteront en Irak après le 30 juin. La dernière version du projet s'engage à ce que le gouvernement irakien et la force multinationale (FMN) maintenue après le transfert de souveraineté le 30 juin, coopèrent sur les questions de sécurité, « y compris les mesures concernant les opérations offensives sensibles ». A l'Onu, le ministre irakien des Affaires étrangères Hoshyar Zebari avait demandé le 3 juin une “pleine souveraineté” pour son pays, devant le Conseil de sécurité. Le chef de la diplomatie irakienne avait jugé, qu'en matière de souveraineté, la résolution américano-britannique était “plutôt appropriée”. Mais il avait aussi souhaité que l'Irak ait “son mot à dire” sur la présence des troupes internationales sur son territoire, une fois le transfert réalisé. Reconnaissant que son pays ne peut encore maintenir seul sa sécurité, il avait cependant ajouté que les troupes internationales devront rester bien après le 30 juin. Selon lui, l'Etat a “besoin de l'assistance de la force multinationale pour oeuvrer avec les forces irakiennes afin de stabiliser la situation... Tout départ conduirait au chaos et à une réelle possibilité de guerre civile”.
La résolution a été bien accueillie par les partis irakiens, à l'exclusion notable des formations kurdes. « C'est un grand jour dont les générations futures se souviendront comme étant celui où l'Irak est passé d'une période d'occupation à une nouvelle période, et où il a retrouvé une totale souveraineté », a déclaré le Premier ministre Iyad Allaoui. « L'occupation fera partie du passé le 30 juin quand l'Irak sera un pays avec une souveraineté pleine et indépendante », a-t-il ajouté. M. Allaoui a par ailleurs indiqué que le nouveau gouvernement négocierait avec les forces internationales les « mécanismes » de leur déploiement, rejetant les critiques contre l'absence, dans la résolution, de droit de veto sur les opérations militaires.
Les responsables de la communauté chiite majoritaire se déclaraient en outre soulagés que la résolution n'ait pas mentionné la Loi fondamentale. « Dieu soit loué, la nouvelle résolution du Conseil de sécurité ne mentionne pas la Loi fondamentale », avait affirmé Laïth al-Moussaoui, qui dirige une fondation proche du haut clergé chiite. Un responsable chiite, l'adjoint de l'ex-membre du Conseil de gouvernement transitoire Mohammad Bahr al-Ouloum, avait abondé dans ce sens. L'ayatollah Ali Sistani, le plus influent dignitaire chiite du pays, reproche à la loi fondamentale de ne pas disposer que l'islam est la seule source de législation et d'accorder aux Kurdes un droit de veto lors du référendum pour l'adoption de la Constitution définitive.
Les sunnites du Parti islamique étaient plutôt satisfaits. « Il y a beaucoup de points positifs, d'abord la souveraineté pour le peuple irakien car c'est la première étape vers la fin de l'occupation », a affirmé le secrétaire général adjoint Ayad al-Samarraï.
A Bagdad, un porte-parole du gouvernement, Gurgis Sada, a affirmé que les dirigeants irakiens étaient engagés envers la Loi fondamentale et n'avaient pas besoin d'une résolution de l'Onu pour le prouver. « Le gouvernement est d'accord à 100% sur la loi. Le président, les vice-présidents et le Premier ministre travaillent conformément à la Loi », a affirmé M. Sada. Interrogé sur une possible démission de ministres kurdes, il a dit: « Je ne suis pas inquiet. Le gouvernement est au complet et nous avons eu une très bonne réunion il y a une heure ».
Leyla Zana, Hatip Dicle, Orhan Dogan et Selim Sadak, du parti pro-kurde de la Démocratie (DEP, dissous en 1994), ont été, le 9 juin, libérés par une cour d'appel après plus de 10 ans de prison. Les quatre ex-députés avaient été rejugés en avril mais le nouveau procès n'avait fait que confirmer la précédente condamnation, provoquant des réactions négatives de la part de l'Union européenne, que la Turquie espère intégrer. Un procureur avait demandé le 8 juin que le verdict soit cassé pour vice de procédure, ouvrant la voie à la libération des détenus.
La libération de Leyla Zana et de ses trois collègues parlementaires de la prison d'Ulucanlar d'Ankara, assiégée par une myriade de journalistes et par des milliers de militants kurdes jubilants, s'est faite dans une immense bousculade. Leyla Zana a failli tomber au sol, emportée par une vague de journalistes et par ses admirateurs dont certains agitaient des bouquets de fleurs. Sirri Sakik, un ancien député du parti pro-kurde de la Démocratie, lui-même inculpé à l'époque aux côtés de Leyla Zana, l'a attrapée d'un bras in extremis avant de la pousser vers une voiture alors que la foule criait “ le peuple kurde est fier de vous! ”.
Dès l'annonce par une cour d'appel que les quatre détenus seraient immédiatement libérés en attendant la révision de leur dernier procès, des proches et de nombreux Kurdes d’Ankara ont entamé une attente anxieuse devant l'établissement pénitentiaire situé dans un quartier populaire de la capitale turque.
Autour du bâtiment, de très nombreux policiers ont été déployés pour assurer l'ordre. Par moment, ils sont intervenus avec des mégaphones auprès des militants kurdes qui dansaient en ronde au rythme de chansons folkloriques kurdes en faisant le "V" de la victoire pour leur demander de ne pas scander des “ slogans interdits ”.
“Je suis très contente. J'ai hâte de revoir ma fille et de rentrer à Diyarbakir”, a affirmé Mme Hediye Dagli, la mère de Leyla Zana.
De son côté, Sirri Sakik a estimé que la décision de les libérer était “ tardive ”. “ Nous avons tous payé un lourd tribut pour obtenir plus de démocratie ”, a-t-il déclaré. “ Il y a 11 ans, nous avons été accusés de trahison. Mais les événements aujourd'hui nous donnent raison ”, a-t-il notamment déclaré.
Le principal avocat des quatre ex-députés, Yusuf Alatas, était la personne la plus convoitée par les nombreuses chaînes de télévision turques qui retransmettaient l'événement en direct. “ Nous sommes satisfaits ” de la décision de la cour d'appel, a-t-il annoncé. “ Mais nous espérons aussi que tous les prisonniers politiques, toutes les personnes emprisonnées pour leurs opinions politiques, seront très rapidement libérés ”, a ajouté l'avocat.
Au cours d'une brève allocution dans les locaux du Parti démocratique du peuple (Dehap) à Ankara, Leyla Zana a appelé à la réconciliation entre la Turquie et sa minorité kurde et a invité la population à “ envisager l'avenir avec espoir ”. “ Je pense que nous sommes arrivés à un tournant, qu'une page nouvelle s'est ouverte où les Kurdes, les Turcs (...) vont pouvoir se tendre la main et s'ouvrir au monde ”, a déclaré Mme Zana. “ J'appelle tout le monde à abandonner les animosités et l'amertume et à unir leurs efforts pour résoudre leurs problèmes ”, a-t-elle poursuivi.
Leyla Zana, qui est revenue sur ses dix ans d'emprisonnement “ terriblement douloureux ” mais “ surmontés dans la dignité ”, a rappelé que, durant cette épreuve, elle a toujours continué de croire que “ si le pays résout ses problèmes intérieurs, il deviendra l'étoile de la région ”. “ Nous avons une chance de transformer ce pays en un jardin d'Eden en travaillant de concert dans cette ère nouvelle (...) comme des citoyens égaux et libres (...) et en mettant nos efforts en commun pour assurer la paix intérieure du pays ”, a déclaré l'ex-députée.
Leyla Zana a par ailleurs remercié Mme Mitterrand, présidente du CILDEKT, et tous ceux qui à travers le monde se sont mobilisés pour sa défense et celle de ses collègues. Notre libération doit beaucoup aux efforts constants et conjugués de ces défenseurs des droits de l’homme et de la démocratie, a-t-elle ajouté.
Les dirigeants turcs se félicitaient le lendemain de cette libération estimant que cette mesure levait une des dernières hypothèques à l'ouverture de négociations d'adhésion avec l'Union européenne. Pour le président du Parlement, Bulent Arinc, la libération de Leyla Zana et de trois autres anciens députés kurdes et le lancement d'émissions en langue kurde à la radio-télévision d'Etat vont aider la Turquie à obtenir des dirigeants européens, en décembre, un feu vert à des négociations d'adhésion. “ Je pense que la crédibilité de la Turquie aux yeux de l'UE va vraiment connaître un bond en avant, les réformes adoptées par la Turquie étant à présent mises en œuvre sur le terrain ”, a affirmé M. Arinc à l'agence de presse turque Anatolie.
Pour le ministre de la Justice, Cemil Cicek, cette libération “ est une décision très importante qui va alléger la pression sur la Turquie sur le plan intérieur et extérieur ”. Il a affirmé que l'UE n'avait désormais plus d'excuses pour refuser l'adhésion de son pays. “ Ceux qui cherchent des prétextes pour refuser à la Turquie l'adhésion à l'UE ont perdu leur dernier atout ”, a affirmé le ministre.
La Commission européenne et le président du Parlement européen, Pat Cox, s'étaient félicités la veille de l'annonce de la libération de Leyla Zana. “ La décision d'aujourd'hui constitue un signe que l'application des réformes politiques que la Turquie a engagées ces deux dernières années progresse ”, avait commenté pour sa part le commissaire européen à l'Elargissement, Guenter Verheugen. Le Parlement européen considérait les quatre comme des prisonniers politiques, emprisonnés pour leurs opinions après que leur parti de la Démocratie (DEP) eut été interdit. Le gouvernement allemand a salué la libération estimant qu'il s'agissait d'un « pas important » sur la voie des réformes en Turquie. « Aujourd'hui est un bon jour pour la démocratie et l'Etat de droit en Turquie », a affirmé Walter Lindner, le porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères. Peter Schieder, président de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe cité dans un communiqué daté du 10 juin, a rappelé pour sa part que « Notre Assemblée parlementaire insiste depuis des années pour obtenir cette libération », en ajoutant que « récemment encore, en avril, j'avais exprimé ma consternation à la suite de la décision de condamnation rendue par la Cour de sûreté d'Etat d'Ankara ». « Avec la décision d'hier, la Turquie se montre à la hauteur de nos attentes et de l'image qu'elle donne d'elle-même, notamment à travers l'ambitieux train de réformes mis en œuvre », a-t-il conclu.
En France, le parti socialiste s’est « réjoui de la libération de ces personnalités » et a souhaité que « les quatre anciens députés retrouvent très rapidement la plénitude de leurs droits pour pouvoir poursuivre leur combat politique sous la forme qu’ils choisiront ». « C’est une très bonne nouvelle, et un moment attendu depuis bien longtemps par le Parti socialiste, qui n’a pas cessé au fil des années de témoigner de sa solidarité avec les quatre députés détenus…et a toujours soutenu leur combat pour la démocratie et les droits de l’homme », a indiqué le Parti socialiste dans un communiqué daté du 10 juin. « Nous sommes nombreux, aujourd’hui, militants des droits de l’homme, à nous réjouir de cette décision…le respect des droits de l’homme doit être une valeur fondamentale et permanente pour l’Union européenne et donc pour ceux qui aspirent à la rejoindre » a indiqué pour sa part Mme Khédidja Bourcart, adjointe au maire de Paris, chargée de l’Intégration.
« La libération de Leyla Zana confirme l'engagement de la Turquie en faveur des droits de l'homme », a commenté pour sa part le président en exercice du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe, Jan Petersen, ministre norvégien des Affaires étrangères, cité dans un autre communiqué.
L'annonce de cette libération, tout comme la diffusion sur une chaîne publique turque pour la première fois d'une émission en kurde sont « des pas importants vers le rapprochement de la Turquie à l'UE et sur la voie des mises en oeuvre des réformes lancées par le gouvernement turc ».
Pour le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, en visite aux Etats-Unis pour le sommet du G8, la libération des anciens députés va contribuer à un retour de la paix dans les provinces kurdes du pays. “ J'espère que cette mesure va mettre fin aux prétextes avancés pour menacer la paix dans notre pays ”, avait le 9 juin déclaré M. Erdogan. Le 13 juin, au cours d'une conférence de presse à l'aéroport d'Istanbul, à son retour des Etats-Unis, il a affirmé être prêt à rencontrer Leyla Zana. « Il n'y a aucune raison pour que je refuse de la rencontrer », a déclaré M. Erdogan. Le Premier ministre, qui a rappelé que Mme Zana s'était déjà entretenue avec le ministre des Affaires étrangères Abdullah Gul à sa sortie de prison, s'est en revanche déclaré peu favorable à l'adoption d'une loi d'amnistie pour les combattants kurdes, préconisée pour permettre à ces derniers de rendre les armes. « Le gouvernement a pris toutes les mesures prévues dans son programme, et s'il y a des gens qui ont du mal à comprendre ces mesures, je n'ai rien à ajouter », a indiqué M. Erdogan. « L'actuel gouvernement a pris des mesures sans précédent dans l'histoire de la République turque. Sans le cadre des critères de Copenhague, il les a prises avec courage, en dépit des risques. Nous sommes affligés de voir qu'il y a néanmoins encore des gens qui se lèvent pour dire 'il y a encore un problème (à régler) ici, il y a un autre là », a-t-il poursuivi.
La presse turque, dans son ensemble, affichait le 10 juin son optimisme sur les chances du pays, officiellement candidat à l'UE depuis 1999, d'engager prochainement des négociations d'adhésion. “ Une journée historique pour la Turquie ”, titrait ainsi le quotidien Radikal pour qui les mesures prises la veille constituent “ deux pas de géant sur la route vers l'Union européenne ”. “ La route vers l'UE est ouverte ”, affirme pour sa part le quotidien à grand tirage Milliyet, tandis que son confrère Hurriyet “derniers prétextes ” avancés par ceux qui ne veulent pas voir la Turquie rejoindre l'UE étaient désormais levés.
Les dirigeants européens doivent décider en décembre si la Turquie a fait suffisamment de progrès en matière de respect des droits de l'Homme et de démocratisation pour justifier l'ouverture de négociations d'adhésion avec Ankara. La journée avait débuté avec les premières émissions en langue kurde diffusées à la radio-télévision d'Etat, une mesure symbolique mais qui brisait un vieux tabou. Evoquer l'existence même d'une minorité kurde dans les années 1980 était interdit et l'utilisation de cette langue en public a longtemps été réprimée.
En attendant ce verdict, Leyla Zana veut profiter de sa liberté retrouvée pour se rendre rapidement en pays kurde. “ Après tant d’années d’enfermement derrière les barreaux, j’ai besoin d’aller me ressourcer, de rencontrer les gens, de les écouter. Le monde a tellement changé en ces dix ans, la société kurde aussi a dû beaucoup changer. J’ai besoin de m’y plonger, de renouer mes liens avec mon peuple ” nous-a-t-elle déclarée. Elle ne pourra malheureusement pas encore revoir son mari, Mehdi Zana, ancien maire de Diyarbakir, qui après 14 années passées dans les prisons turques pour délit d’opinion, vit en exil en Suède en raison de nouvelles condamnations à 8 ans de prison pour ses recueils de poèmes et ses livres de souvenirs. Le fils de Leyla Zana, Ronay, menacé par des procédures judiciaires et les commandos turcs de la mort, a dû lui aussi s’exiler en Europe. Seule sa fille Ruken qui vit à Ankara a pu aller l’accueillir à sa sortie de prison.
Le 13 juin, des dizaines de milliers de Kurdes [20 000 selon la police], dont nombre criaient “paix”, et d’autres scandaient « fin à la politique de violence et d'anéantissement », se sont rassemblés à Diyarbakir pour accueiller les anciens députés. Après avoir été reçus par les représentants locaux du Parti démocratique du peuple (Dehap, kurde), dont le maire de Diyarbakir, Osman Baydemir, les quatre ex-parlementaires ont été hissés sur la terrasse d'un bus chargé de les acheminer jusqu'au centre de la ville. Le véhicule a mis près d'une heure et demie pour effectuer un trajet de 3 km à travers une foule dense, qui arborait des drapeaux vert, rouge et jaune -les couleurs des mouvements kurdes-, et sous une pluie de fleurs jetées depuis les balcons et les fenêtres. Arrivés sur la Place de la Gare, où les attendaient des dizaines de milliers de supporteurs, les anciens détenus ont adressé à la foule, en kurde et en turc, des messages de paix et de réconciliation. « Nous avons montré notre patience pendant des siècles. Si nous devons une fois encore faire preuve de patience et d'abnégation, nous le ferons, (car ces qualités) sont la marque des grands peuples », a déclaré Leyla Zana qui a demandé aux Etats-Unis et à l'Europe d'aider la Turquie à ne pas devenir « une autre Palestine, un autre Liban ». Mme Zana a également lancé un message au Kongra-Gel -le nouveau nom du PKK-, l'invitant à « ne pas rompre le cessez-le-feu pendant au moins six mois ».
Hatip Dicle s'est pour sa part adressé au gouvernement, lui recommandant de poursuivre ses efforts en vue d'une résolution pacifique de la question kurde et lui demandant de faire un geste en direction des 5.000 prisonniers politiques encore emprisonnés.
D'autres manifestations pour « la paix et le dialogue » ont eu lieu dans plusieurs villes turques à l'instigation du DEHAP. A Istanbul, plusieurs milliers de manifestants ont répondu à l'appel de ce parti. Leyla Zana a effectué avec ses trois compagnons une tournée dans 12 villes kurdes qui s'est achèvée le 17 juin.
Cependant, la procédure judiciaire visant Leyla Zana et ses collègues poursuit son cours. La Cour de cassation devrait se prononcer le 8 juillet sur le pourvoi des anciens parlementaires. Si l’arrêt de la cour de sûreté de l’Etat est confirmé par la cour suprême turque les députés devront réintégrer la prison. Leyla Zana avait purgé presque toute sa peine puisqu’elle aurait dû être libérée dans tous les cas le 4 juin 2005, Orhan Dogan et Hatip Dicle le 2 juin 2005 et Selim Sadak le 1er octobre 2005.
Fidèle à sa tradition de capitale des Arts et de la Culture et soucieuse de mieux faire connaître la richesse et la diversité des patrimoines de ses habitants originaires d’autres régions du monde, Paris réserve cette année un accueil exceptionnel à la culture et à l’histoire kurde. La Mairie de Paris, pour la première fois dans son histoire, a célébré, en mars dernier le Newroz, le nouvel an kurde et iranien.
Dans la suite de cet événement, sous le haut patronage de Mme Khédidja Bourcart, adjointe au Maire de Paris, chargée de l’intégration et des étrangers non communautaires, le prestigieux Salon des Tapisseries de l’Hôtel de Ville accueillera du 22 juin au 24 juillet 2004 une exposition de photographies collectées par Susan Meiselas, intitulée «Kurdistan dans l’ombre de l’histoire»
Cette exposition retrace l’histoire tumultueuse et souvent dramatique du peuple kurde depuis les tout débuts de la photographie à nos jours. Elle présente des documents, pour la plupart, inédits ou inaccessibles, rassemblés au terme de plusieurs années de recherche au Kurdistan et dans les archives internationales.
Susan Meiselas, photographe américaine de réputation mondiale, est membre de Magnum depuis 1980 et vit à New-York. Elle enseigne la photographie et a travaillé pour la presse, notamment New York Times. Elle est lauréate de plusieurs prix internationaux tels la Robert Capa Gold Medal, le Prix Leica et le Prix Hasselblad.
L’exposition «Kurdistan dans l’ombre de l’histoire» a été présentée pour la première fois à la Menil Collection à Houston (Texas). Elle a été exposée à l’Impressions Gallery de York (Angleterre), puis au Nederlands Foto Instituut de Rotterdam (Pays-Bas), l’Hellenic-American Union d’Athènes (Grèce), au Musée d’Ethnographie de Hambourg (Allemagne), au Conde Duque Photo de Madrid (Espagne) et au Centre régional de la photographie à Cherbourg-Octeville, en France.
Le vernissage a eu lieu le mardi 22 juin à 19h00 à l’Hôtel de Ville de Paris en présence de Mmes Khédidja Bourcart et Susan Meiselas et de M. Kendal Nezan, qui ont prononcé un discours enthousiaste et chaleureux. À l’initiative de l’Institut kurde de Paris, le vernissage a ainsi réuni plusieurs centaines de personnes dans le salon des Tapisseries et la salle des Prevosts, animé par le musicien kurde Issa. Des affiches de 3 m de long ont été disposées sur le parvis de l’Hôtel de Ville tout au long de l’exposition pour signaler cet événement, couvert notamment par la chaîne francophone TV5, Kurdistan-Tv, puis Arte, mais également par l’hebdomadaire Le Monde 2 et le quotidien Libération.
La Turquie espérait le 9 juin avoir fait sauter un dernier verrou à l'ouverture de négociations d'adhésion avec l'Union européenne en lançant des é missions radio-télévisées en langue kurde, une mesure symbolique mais qui brisait un vieux tabou. Evoquer l'existence même des Kurdes dans les années 1980 était interdit et même l’usage oral de cette langue en public était interdit par la loi turque jusqu’en 1991.
La société nationale turque de radio et de télévision (TRT) a commencé pour la première fois à diffuser des émissions en langue kurde dans le but de remplir une des conditions avancées par l'Union européenne pour l'ouverture de négociations d'adhésion avec Ankara.
Les émissions en kurmandji -- dialecte kurde le plus parlé en Turquie -- ont commencé par 35 minutes à la radio, suivies par un programme d'une demi-heure à la télévision. Elles font partie d'émissions qui ont débuté avec un format quasi-identitique le 7 juin dans des langues d'autres minorités, le bosniaque et l'arabe le lendemain. Des émissions en tcherkesse et en zaza, un autre autre dialecte kurde, sont également prévues les jeudis et les vendredis réciproquement.
Les nouvelles émissions, sous-titrées en turc et baptisées « notre richesse culturelle », ont traité en vrac de l'actualité nationale et internationale, du sport, de la faune et de la flore, entrecoupées de quelques clips de musique kurde. Même si la Turquie a brisé un tabou en diffusant des programmes en kurde, les émissions ont été critiquées par la presse qui estime qu'il s'agit d'une mesure purement symbolique sans véritable contenu. « L'UE ne sera pas dupe », soulignait le journal libéral Milliyet, critiquant le fait que les émissions sont toutes les mêmes, clips d'actualité inclus, avec un simple changement de langue. Les spots d'actualités étaient anachroniques, l'un d'eux traitant par exemple des chiffres de l'inflation annoncés le 3 juin. Des associations de Bosniaques ont dénoncé la décision de diffuser dans leur langue, affirmant n'avoir jamais demandé de telles émissions, alors que des organisations ultra-nationalistes affirmaient que la diffusion d'émissions dans une langue autre que le turc va porter atteinte à l'unité du pays.
Osman Baydemir, le maire de Diyarbakir, s'est félicité de la mesure, se gardant pour l'instant d'en critiquer le contenu. « Il ne s'agit que d'un début (...) le fait qu'une phobie est en train d'être surmontée constitue un pas important », a-t-il déclaré à la chaîne d'information NTV Mais « si les émissions ne sont pas rapidement développées, on pourra alors dire que la montagne a accouché d'une souris », a-t-il également averti.. Le Parti démocratique du peuple (DEHAP) a également salué les émissions. « C'était absolument vide de contenu, mais ces émissions sur la TRT m'ont beaucoup enthousiasmé (...) c'est l'écroulement de l'idéologie officielle » qui niait les droits des Kurdes, a déclaré Kemal Avci, un porte-parole.
Dans le cadre de réformes législatives visant à rapprocher Ankara des normes de l'UE, le parlement turc avait donné son feu vert en 2002 à la diffusion d'émissions en kurde à la télévision d'Etat, mais la mise en œuvre de cette réforme s'est heurtée à de nombreuses difficultés bureaucratiques, notamment au sein de la TRT. Ce n'est qu'après une mise en garde lancée par le gouvernement du parti de la Justice et du Développement (AKP) que la TRT a annoncé la semaine dernière le début de ces émissions, sans toutefois commencer par le kurde.
Saddam Hussein et 11 anciens hauts dirigeants de son régime ont été présentés le 30 juin à un juge irakien qui doit les inculper en vue de leur jugement pour divers crimes alors que le gouvernement intérimaire envisage de rétablir la peine de mort. “Aujourd'hui à 10h15 (06h15GMT), la République d'Irak a pris la responsabilité légale de la détention de Saddam Hussein”, indique un communiqué laconique du cabinet du Premier ministre du gouvernement intérimaire, Iyad Allaoui.
L'ancien dictateur et 11 de ses anciens proches collaborateurs ont été remis à la justice irakienne près de quinze mois après l'invasion du pays par les forces de la coalition américano-britannique qui a mis un terme à son règne. Ils resteront sous la garde de l'armée américaine. “Saddam a dit "bonjour" et demandé s'il pouvait poser quelques questions”, a déclaré Salem Chalabi, le juge, formé aux Etats-Unis, qui présidera le tribunal chargé de juger l'ancien homme fort de l'Irak. “Il lui a été répondu qu'il devrait attendre jusqu'à demain” a déclaré Chalabi après avoir assisté à la cérémonie de remise de Saddam Hussein et de ses onze collaborateurs à la justice irakienne.
“Je suis Saddam Hussein al-Majid, président de la République d'Irak”, a lancé l'ancien dictateur au juge d'instruction et au directeur général du Tribunal spécial irakien (TSI), Salem Chalabi, venus lui présenter un mandat d'arrêt. Habillé d'une dichdacha (robe masculine arabe) grise, visiblement amaigri, portant une moustache, il a lancé un “bonjour” froid à l'assistance, puis a demandé: “Allez-vous m'interrogez aujourd'hui, oui ou non ?”, a raconté un assistant du TSI qui a été témoin de la scène. Pour marquer son mépris à ses visiteurs, il s'est assis alors que l'assistance restait debout. “Il paraissait en bonne santé, hautain et ne ressentant aucun remords”, a ajouté cet assistant. L'entrevue n'a guère duré plus de cinq minutes. Le deuxième à pénétrer dans la pièce après le départ de Saddam Hussein a été Ali Hassan al-Majid, alias “Ali le Chimique”, conseiller et cousin de l'ancien président, arrêté le 21 août 2003. Il s'est borné à dire: “Je suis fatigué, je suis fatigué”. Puis Tarek Aziz, ancien vice-Premier ministre, est apparu. “Il n'a rien dit, comme d'autres qui se sont bornés à donner leur nom”, a souligné l'assistant de M. Chalabi. Quant à Taha Yassine Ramadane, ancien vice-président, arrêté le 18 août 2003, “il semblait avoir grossi en prison”, a-t-il noté. Abed Hamid Mahmoud, ancien secrétaire du président déchu, arrêté le 16 juin 2003, a lancé: “Je suis innocent. Un jour viendra où vous le découvrirez”. “Toute la procédure n'a duré qu'un quart d'heure et à 09H15 (05H15 GMT) tout était terminé”, a souligné l'assistant de M. Chalabi.
Accusés par les Irakiens d'avoir ordonné de tuer ou de torturer des milliers de gens au cours de ses 35 années au pouvoir, Saddam Hussein était considéré comme un prisonnier de guerre depuis sa capture par l'armée américaine dans une cache située à proximité de sa ville natale de Tikrit, le 13 décembre dernier. Il relève désormais du droit pénal irakien et ne peut plus se prévaloir du statut de prisonnier de guerre, protégé par la Convention de Genève. Son procès ne devrait toutefois pas se dérouler avant plusieurs mois. Le responsable de la sécurité nationale irakienne a indiqué qu'il serait retransmis en direct à la télévision.
Le président irakien a declaré que la peine de mort, suspendue pendant l'occupation du pays par les forces de la coalition, pourrait être rétablie et le responsable de la sécurité intérieure a estimé qu'elle pourrait être appliquée à Saddam Hussein. Selon Chalabi, l'ancien dirigeant irakien devrait être inculpé de crimes contre l'humanité en raison de l'utilisation de gaz contre la population kurde en 1998 et en liaison avec l'invasion du Koweït en 1990 et les huit années de guerre contre l'Iran entre 1980 et 1988.
L'avocat français Emmanuel Ludot, l'un des 20 avocats mobilisés par la femme de Saddam Hussein pour assurer sa défense, a indiqué que l'ancien président contesterait la légitimité du tribunal et de ses juges. “Ce sera un tribunal de la vengeance et des règlements de comptes”, a déclaré Ludot sur France Info, ajoutant que le président du tribunal serait soumis à une forte pression pour établir la culpabilité de Saddam Hussein.
Parmi les dignitaires du régime baasistes remis à la justice irakienne figuraient l'ancien vice-Premier ministre Tarek Aziz ainsi que trois demi-frères de Saddam Hussein.
Ces anciens hauts responsables et d'autres parmi les 55 que comptaient la liste noire établie par Washington devraient aussi être des témoins clés pour reconstituer la chaîne de commandement permettant d'établir la responsabilité de Saddam dans des crimes contre l'humanité.
La Cour européenne des droits de l'homme a indiqué qu'elle n'avait pas donné suite à une demande des avocats de Saddam Hussein qui réclamaient une mesure conservatoire interdisant à la Grande-Bretagne de le remettre à la justice irakienne. La Cour a toutefois autorisé les défenseurs de Saddam Hussein à plaider devant elle leur dossier sur la base du droit à la vie et de l'abolition de la peine de mort en s'appuyant sur la Convention des droits de l'homme.
Le sommet des 26 chefs d'Etat et de gouvernement de l'Otan s'est ouvert le 28 juin à Istanbul alors qu'à Bagdad se déroulait le transfert de pouvoir au gouvernement intérimaire irakien. Le sommet de l'Otan, dominé par le dossier irakien, s'est ouvert vers 09H30 locales (06H30 GMT) dans un centre de conférences placé sous très haute surveillance. Celui-ci a réuni quelque 7.000 personnes, dont plus de 3.000 délégués et 46 chefs d'Etat ou de gouvernement, à commencer par le président américain George W. Bush.
Plus de 26.000 policiers ont été chargés de la sécurité, des unités militaires d'élite mobilisées --y compris des spécialistes de protection contre les armes de destruction massive-- le survol de la ville a été interdit et des avions de surveillance AWACS de l'Otan ont patrouillé 24 heures sur 24. Le détroit du Bosphore, qui sépare les deux rives de la ville a été fermé aux pétroliers et aux navires transportant des produits dangereux, tandis qu'un périmètre de 10 kilomètres en plein coeur de la ville a été interdit à la circulation et les déplacements des habitants de cette zone, baptisée "vallée de l'Otan", contrôlés. Lors des contrôles, les autorités turques ont découvert un stock d'armes perfectionnées à bord d'un cargo se rendant d'Ukraine en Egypte et ont ouvert une enquête à ce sujet. Deux conteneurs remplis d'armes, parmi lesquelles un lance-roquettes, des missiles et des munitions avaient été retrouvés quand le navire s'étaient arrêté le 2 juin près d'Istanbul pour ravitailler en carburant.
Selon la presse turque, plus de 300 personnes ont été interpellées ces dernières semaines -- des islamistes, des militants d'extrême-gauche, mais aussi des journalistes et employés d'associations culturelles kurdes.
Peu avant l'ouverture du sommet, de violents affrontements ont eu lieu entre des policiers et quelques 2.000 manifestants qui protestaient contre la tenue de ce sommet. Les manifestants, dont certains étaient armés de lance-pierres et casqués, ont notamment lancé des cocktail Molotov et cherché à franchir les barrières de sécurité avant d'être dispersés par la police anti-émeutes.
Les chefs d'Etat et de gouvernement, dont George W. Bush, Jacques Chirac et le Premier ministre britannique Tony Blair, ont été accueillis par le président turc Ahmet Necdet Sezer et le secrétaire général de l'Otan Jaap de Hoop Scheffer. Le président français Jacques Chirac a célébré, à l'ouverture du sommet, “l'esprit d'amitié et de fraternité” qui unit les membres de l'Alliance atlantique en dépit de leurs divergences sur le dossier irakien.
Au dernier jour du sommet, le 29 juin, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'OTAN ont accueilli le président afghan Hamid Karzaï, après avoir décidé la veille de renforcer la présence alliée en Afghanistan. Les Alliés ont décidé de faire passer la force de l'OTAN déployée sur place de 6.500 à 10.000 hommes d'ici les élections prévues pour septembre. Sur cette force, 1.300 militaires resteront cependant postés hors du pays, censés n'intervenir qu'en cas d'urgence. Aux 26 membres de l'OTAN s'étaient par ailleurs joints au matin les 20 pays partenaires d'Asie centrale, d'Europe, ainsi que la Russie et l'Ukraine, qui forment le Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA).
Par ailleurs, le Parti démocratique du peuple (DEHAP) avait annoncé le 9 juin que 34 membres d'organes de presse et d'associations culturelles kurdes avaient été placés en garde à vue lors d'opérations de police menées la veille pour assurer la sécurité du sommet de l'Otan. « A Istanbul, les locaux d'une agence de presse et d'un nombre important de centres culturels, d'associations et de magazines ont été perquisitionnés hier par des policiers en civil sur décision d'une Cour de sûreté de l'Etat dans le cadre de mesures visant à assurer la sécurité du sommet de l'Otan », avait déclaré à la presse Cemal Kavak, vice-président de la section stambouliote du Dehap. Au total, 34 personnes avaient été placées en garde à vue, selon M. Kavak, qui avait précisé que les perquisitions avaient duré plusieurs heures, que des journalistes, des employés ainsi que des gens de passage avaient été arrêtés et que dans certains cas, la police avait utilisé des grenades lacrymogènes. Outre l'agence de presse Dicle, fondée en 2002 et diffusant des informations en langues turque et kurde, au moins quatre revues et cinq associations culturelles militant pour les droits des Kurdes ont été visées par les opérations policières. Le Dehap a condamné les opérations de police et demandé la libération des personnes arrêtées.
De plus, une vingtaine de membres du DEHAP, soupçonnés d'être liés à une « organisation terroriste » avaient été placés en garde à vue le 9 juin à Elazig à l'issue d'une conférence de presse. « Il apparaît que les messages (du gouvernement) sur la démocratisation, les réformes du droit et surtout la résolution démocratique du problème kurde sont mensongers », a déclaré M. Kavak, pour qui « ces attaques avaient pour objectif de faire taire la presse et les associations d'opposition ».
Amnesty international a appelé le 29 juin à la “libération immédiate” de sept Kurdes condamnés à des peines de prison par un tribunal d'exception en Syrie, dénonçant un “jugement injuste”. “Amnesty condamne le jugement injuste de la Cour de sûreté de l'Etat de sept Kurdes” syriens, selon un communiqué. L'organisation appelle “les autorités syriennes à annuler les peines de prison et à libérer immédiatement” les condamnés. Elle accuse Damas de “violation des droits d'expression” reconnus par la Constitution syrienne et la Convention des droits civils et des partis ratifiés par la Syrie.
La Cour de sûreté de l'Etat en Syrie a condamné le 27 juin quatre Kurdes à un an de prison et trois autres, dont un avocat, Mohammad Moustapha, à deux ans de prison, a annoncé l'Association des droits de l'Homme en Syrie (ADHS). Les sept Kurdes étaient accusés d' “appartenance à une organisation secrète” et de “tentative d'amputation d'une partie du territoire syrien pour l'annexer à un Etat étranger”. La Syrie est farouchement opposée à la création d'un Etat kurde indépendant dans le Kurdistan irakien.
Des diplomates étrangers dont ceux des Etats-Unis, de l'Union européenne et du Canada, ainsi que dix avocats ont assisté à la séance du tribunal.
Les sept Kurdes avaient été arrêtés fin juin 2003 lors d'une manifestation à proximité du siège du Fonds de l'Onu pour l'enfance (Unicef) à Damas à l'occasion de la journée mondiale pour la protection de l'enfance, le 25 juin. Durant cette manifestation, les protestataires avaient réclamé “la nationalité syrienne ainsi que la reconnaissance des droits culturels du peuple kurde”, selon des associations des droits de l'Homme.
Par ailleurs, les autorités syriennes ont signifié récemment à des dirigeants de partis kurdes syriens que leurs mouvements étaient interdits, a affirmé le 3 juin l'avocat et militant des droits de l'Homme, Anouar Bounni dans un communiqué. “Les services de la sécurité militaire ont convoqué des dirigeants kurdes pour leur signifier que leurs partis politiques étaient interdits et qu'ils devaient cesser toute activité politique”, a indiqué le communiqué.
Il a été signifié aux dirigeants kurdes Fouad Alliko (Yakiti), Aziz Daoud (Parti démocratique progressiste kurde) et Saleh Kaddo (Parti socialiste kurde) qu'ils “devraient attendre la promulgation d'une nouvelle loi sur les partis” pour pouvoir reprendre leurs activités. Me Bounni s'est demandé si cette mesure n'était pas “le début d'une campagne de répression contre les partis de l'opposition, les organisations des droits de l'Homme et de la société civile non autorisées (officiellement) mais présents” en Syrie.
Un dirigeant kurde, Aziz Daoud, a appelé le 6 juin les autorités de Damas à promulguer une nouvelle loi sur les partis politiques. “La décision d'interdire par la répression les mouvements kurdes ne garantira ni la sécurité ni le calme. La solution serait de promulguer une loi” qui autorisera la création de partis politiques en Syrie, affirme M. Daoud, secrétaire général du Parti démocratique progressiste kurde, dans un communiqué. “Les partis politiques kurdes sont des mouvements patriotiques présents en Syrie depuis l'indépendance (1946). Ils ne cesseront pas leurs activités politiques”, poursuit le communiqué. “Leur présence en Syrie est similaire à celle des partis du Front national progressiste” (FNP, coalition de sept partis au pouvoir dirigés par le Baas), et leur interdiction relève d'une politique discriminatoire à l'encontre du peuple kurde”, estime le communiqué.
La Syrie compte près de 1,5 millions de Kurdes. Outre la reconnaissance de leur langue et de leur culture, ils demandent à être traités comme des citoyens à part entière “dans le cadre de l'intégrité territoriale du pays”.
Le directeur de l'Institut culturel kurde de Téhéran, Bahram Valibeyghi, a été le 22 juin libéré quatre jours après avoir été arrêté par la police alors qu'il se rendait au Kurdistan irakien. Bahram Valibeyghi, directeur de l'Institut culturel kurde, qui dirige également le quotidien bilingue persan et kurde “Achti” (Paix) s'est rendu en compagnie d'un groupe d'amis au poste-frontière de Khosravi pour aller en Irak, mais il a été arrêté sur ordre du parquet général de Téhéran. Aucune explication n'a été fournie sur les raisons de cette arrestation.
Le directeur d'un hebdomadaire kurde iranien avait été, le 21 juin, libéré contre une caution de 70 millions de rials (environ 8.100 dollars) une semaine après avoir été arrêté pour des articles favorisant “les idées indépendantistes”. Mohammad Sadigh Kaboudvand avait été arrêté le 15 juin pour “trouble à l'ordre public, publication d'articles favorisant les dissensions religieuses et ethniques et les idées indépendantistes”. La justice reproche notamment à son journal, Message du peuple, d'avoir publié des informations sur Ghazi Mohammad, président de la République kurde de 1946 et fondateur du PDK iranien, pendu en 1947 et chef historique kurde, et Abdullah Ocalan, chef du parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).
Le Message du peuple, publié à Sanandaj, chef-lieu de la province iranienne du Kurdistan, paraissait en persan et en kurde depuis début 2004. L'Iran, où la communauté kurde est estimée à dix millions de personnes, combat sans merci toute revendication démocratique ou autonomiste kurde sur son territoire. Le Kurdistan iranien fait l’objet d’un quadrillage militaire et policier serré. Les partis politiques et les écoles kurdes son interdits. Une douzaine de journalistes iraniens sont actuellement emprisonnés, ce qui fait du pays la plus grande prison pour journalistes au Moyen-Orient, selon Reporters sans frontières.
La justice iranienne, contrôlée par les conservateurs, est parvenue ces dernières années à faire taire l'opposition par la détention et la torture d'écrivains, de dirigeants étudiants et de militants politiques et en muselant les journaux réformateurs, affirme un nouveau rapport de l'organisation américaine de défense des droits de l'homme Human Rights Watch, publié le 7 juin.
Il y a peu d'espoir que la tendance actuelle s'inverse, ajoute Human Rights Watch dans ce rapport de 73 pages, intitulé “Comme des morts dans leur cercueil : torture, détention et la répression de la dissidence en Iran”, fruit d'entretiens avec d'anciens prisonniers politiques, menés hors d'Iran. Ces anciens prisonniers, dont peu ont accepté de laisser publier leur nom ou de parler ouvertement en Iran, affirment avoir été battus, ou encore longuement enfermés dans des cellules sans fenêtres et insonorisées, décrites comme des “cercueils”. “Il y a un accord général pour dire que l'environnement politique est de plus en plus oppressant et déterminé par la force”, ajoute le rapport.
Pour Human Rights Watch, le système judiciaire, fermement tenu par les “durs” du régime, est “au centre des violations des droits de l'homme” mentionnées dans le rapport.
“Les autorités iraniennes sont parvenues, en quatre ans, à pratiquement réduire au silence l'opposition politique dans le pays, par un usage systématique de l'isolement indéfini des prisonniers politiques, la torture physique des militants étudiants et le déni des droits fondamentaux à un procès équitable pour tous ceux qui sont détenus pour avoir exprimé des opinions dissidentes”, affirme le rapport. “Un petit groupe de juges non élus et responsables uniquement devant le guide suprême de la Révolution, Ali Khamenei, a muselé toute dissidence politique”, ajoute le rapport, qui précise que ces juges disposent de milices et d'agents de sécurité pour arrêter, détenir et interroger les dissidents, dissimuler leurs activités dans des prisons secrètes, et fermer les journaux qui se sont exprimés en faveur des prisonniers politiques.
Interrogé le 6 juin sur les rapports faisant état de violations des droits de l'homme, le porte-parole du ministère iranien de la Justice, Nasser Hosseini, a affirmé que le recours à la torture avait sensiblement diminué dans le pays depuis que le ministre de la Justice, l'ayatollah Mahmoud Hachemi Sharoudi, avait en avril dernier interdit celle-ci dans les interrogatoires. Cette interdiction avait constitué la première reconnaissance publique de l'existence de la torture dans le pays.
Dans un autre développement, le dissident iranien Hachem Aghajari a appris qu’il n’encourait plus la peine de mort, la justice ayant formellement abandonné le 28 juin contre lu l'accusation d'apostasie. “Les accusations d'insulte au prophète et de négation des principes religieux toutes deux considérées comme constitutives d'apostasie et passibles de la peine de mort, ont été levées”, a annoncé son avocat Saleh Nikhbakht. Hachem Aghajari doit à présent répondre “d'insulte aux principes sacrés”, punie d'une à cinq années d'emprisonnement, a-t-il ajouté, se déclarant confiant à présent que son client “ne sera pas condamné à mort”. L'intellectuel et universitaire Hachem Aghajari a été condamné en 2002 à la peine capitale pour apostasie par un juge de Hamédan (ouest), malgré sa stature de combattant de la première heure de la Révolution islamique et de vétéran de la guerre Iran-Irak (1980-1988). Cette sentence a soulevé une protestation nationale et internationale considérable, poussant le Guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, à ordonner la révision du verdict. Celui-ci a été cassé une première fois par la Cour suprême, puis une seconde après que le même juge de Hamédan, devant lequel le dossier avait été renvoyé, eut confirmé son jugement.
Selon le juge qui l'a condamné à la mort, Hachem Aghajari a remis en cause les fondements de la religion et de la République islamique, à commencer par la prééminence d'un Guide spirituel sur le politique, en plaidant en public pour une sorte de protestantisme de l'islam et en affirmant que les musulmans n'étaient pas des “singes” pour “suivre aveuglément un chef religieux”.
La Cour suprême a dessaisi le magistrat et confié l'affaire à un tribunal de Téhéran devant lequel Hachem Aghajari a été convoqué le 28 juin pour s'entendre notifier les nouvelles charges. Selon son défenseur, le tribunal a ordonné le maintien en détention du prisonnier en invoquant “certains problèmes, tels que des menaces pour sa vie”.
Hachem Aghajari est emprisonné depuis le 8 août 2002. Il est actuellement enfermé à Téhéran. La décision de la justice ne faisait plus guère de doute. L'ayatollah Khamenei estime lui-même que Hachem Aghajari ne s'est pas rendu coupable d'apostasie et ne mérite pas la mort, a expliqué récemment le chef adjoint de l'autorité judiciaire, Abdolreza Izadpanah. L'ultra-conservatrice justice iranienne, qui a fait enfermer de centaines de dissidents, opposants, journalistes, étudiants etc. et qui s'était crispée dans les premiers mois de l'affaire, s'est employée à apaiser les esprits après la confirmation de la condamnation à mort par le juge de Hamédan. Elle a rapidement souligné que cette peine n'était pas définitive.
La Turquie reste opposée à l'autonomie des Kurdes en Irak, a déclaré le Premier ministre turc Recep Erdogan le 19 juin, démentant qu'Ankara ait modifié sa politique concernant le statut de cette minorité. “La politique de la Turquie sur ce sujet est identique à celle d'hier. Il n'y a pas de changement”, a assuré M. Erdogan à la presse à Istanbul. La Turquie est opposée à l'autonomie des Kurdes en Irak mais respectera toutefois la volonté des Irakiens sur le système futur de leur Etat, a affirmé, le 21 juin pour sa part le ministre turc des Affaires étrangères Abdullah Gul. “Nous souhaitons que la période de transition mène à la paix et la stabilité (...) et à la sauvegarde de l'unité politique et territoriale de l'Irak”, a-t-il déclaré. Le chef de la diplomatie turque a expliqué que l'une des priorités de son pays en Irak était le maintien de l'intégrité (territoriale) de son voisin. “Nous n'approuverons pas des structures (administratives) dangereuses qui provoqueraient des divisions et un éclatement”, a-t-il souligné. Il a cependant indiqué que la Turquie respecterait la décision du peuple irakien sur le système administratif futur du pays, à condition que celui-ci ne porte atteinte à l'unité de l'Irak.
Ces déclarations font suite à des proppos du chef du parti démocratique du Kurdistan (PDK) Massoud Barzani ayant assuré la veille que la Turquie l'avait informé ne plus être opposée à un statut fédéral pour le Kurdistan d'Irak, dans le cadre d'un Etat unifié. “Une délégation turque de haut niveau nous a rendu visite le 9 juin, et nous a informés d'une position extrêmement positive selon laquelle la Turquie n'est pas opposée au statut fédéral du Kurdistan dans le cadre de l'Irak”, a déclaré M. Barzani à la télévision satellitaire qatariote Al-Jazira. Le chef du PDK avait ajouté que la délégation l'a assuré que la Turquie “est disposée à avoir les meilleures relations avec la province du Kurdistan, aux côtés de ses relations avec le gouvernement irakien” et indiqué que la délégation lui avait également transmis une invitation à se rendre à Ankara, qu'il avait acceptée.
M. Barzani avait également souligné que “nos frères” kurdes en Turquie, en Syrie et en Iran “observent avec optimisme et soutiennent” les développements concernant le statut des Kurdes en Irak. “Ces pays doivent comprendre que les Kurdes sont une nation (...) qui a des droits et qui a été victime d'une injustice historique”, avait déclaré. “Ces pays doivent faire preuve de compréhension à l'égard de ces droits et se comporter d'une manière civilisée et démocratique et cela renforcer l'unité nationale” de chaque Etat, avait encore ajouté M. Barzani. “Si ces droits sont ignorés et si les Kurdes sont traités d'une manière policière et non-civilisée, les problèmes seront au contraire amplifiés”, avait-il conclu.
La Loi fondamentale, adoptée en mars et qui doit régir l'Irak durant 18 mois, reconnaît le fédéralisme et l'autonomie du Kurdistan.
Malgré le calme retrouvé à Najaf après plus de deux mois de combats entre miliciens chiites et armée américaine, trente-neuf personnes ont été tuées en moins de 48 heures en Irak début juin. Treize personnes ont été tuées et 10 autres blessées dans une attaque perpétrée le 5 juin contre un poste de police de Moussayeb (50 km au sud de Bagdad), selon un responsable de l'hôpital de la ville. Selon un témoin, “sept hommes, habillés en policiers et armés, sont arrivés samedi à 15h15 (11h15 GMT) à bord de deux voitures”. “Ils sont entrés dans le poste de police avec des boîtes qui contenaient (vraisemblablement) des explosifs. Ils ont ouvert le feu et tué tous les policiers à l'intérieur puis ont continué à tirer en sortant dans la rue”, avait-il déclaré. Le 10 juin, six Irakiens avaient été tués le dans le premier grand heurt entre miliciens du chef radical Moqtada Sadr et la police à Najaf. Un policier, trois miliciens et deux civils ont été tués, alors que 10 policiers, deux enfants et 17 adultes, dont des miliciens, ont été blessés, affirmait le directeur adjoint de l'hôpital Hakim dans la ville sainte de Najaf. Les échanges de tirs avaient commencé quand des policiers ont tenté d'arrêter des miliciens dans le cimetière de la ville, où ces derniers sont retranchés depuis plusieurs semaines, et dans les rues, selon Ali Moqtada Mohsen, responsable administratif de l'hôpital de Najaf. Le 4 juin, les miliciens avaient fait disparaître toute présence armée des rues de Najaf et de la ville voisine de Koufa, sans pour autant s'en retirer. La milice du chef radical chiite Moqtada Sadr a, le 25 juin, annoncé une trêve dans ses “opérations militaires” à Bagdad et s'est dite prête à collaborer à la protection des installations vitales de l'Irak des attaques terroristes.
Dans le reste du pays, les affrontements ont continué à avoir lieu. Le 6 juin, six civils irakiens ont été tués et au moins 68 autres avaient été blessés par l'explosion d'une voiture piégée à l'entrée d'une base américaine à Taji, à la sortie nord de Bagdad, selon des sources médicales. Un communiqué attribué à un groupe dirigé par l'islamiste jordanien Abou Moussab Al-Zarqaoui, lié au réseau terroriste Al-Qaïda, a revendiqué cet attentat. De plus, cinq civils irakiens ont été tués et 19 blessés dans des combats entre miliciens chiites et forces américaines au cours des dernières 24 heures à Sadr City. 12 autres personnes ont trouvé la mort en Irak dans des attaques. Deux Polonais et deux Américains avaient été tués par les insurgés qui avaient ouvert le feu sur leurs véhicules appartenant à la société de protection Blackwater, sur la route de l'aéroport de Bagdad. A Mossoul, un Britannique a été tué et trois autres blessés lorsque des assaillants ont tiré sur leurs véhicules, selon le Foreign Office.
Le Comité national de débaassification a, le 10 juin, annoncé, de son côté, la réintégration de 12.000 anciens membres du parti Baas dans tous les domaines de l'administration, sur les 30.000 qui avait été chassés en 2003.
Les attentats et attaques ciblées se sont multipliés en Irak, du 13 au 15 juin, au moins 37 civils irakiens et sept étrangers, dont quatre civils occidentaux et un soldat américain ont été tués. Au moins, seize personnes, dont cinq agents de sécurité étrangers, ont été tuées et 60 blessées dans un attentat suicide à la voiture piégée perpétré à Bagdad. L'explosion a eu lieu devant un débit de boisson et la foule en colère s'est emparée des bouteilles d'alcool pour les jeter sur les voitures en feu. Cinq Irakiens ont été par ailleurs tués et sept autres blessés dans des affrontements le 14 juin entre combattants armés et soldats américains à Ramadi, a indiqué une source hospitalière de cette ville sunnite à l'ouest de Bagdad.
Deux nouveaux attentats dirigés le 17 juin contre les forces de sécurité ont fait 41 morts et 145 blessées, tandis que deux otages, un Egyptien et un Turc, ont été libérés. Selon le ministère de la Santé, 35 personnes ont été tuées et 141 autres blessées dans un attentat suicide le 17 juin devant un centre de recrutement de l'armée dans le quartier Allaoui, dans le sud-est de Bagdad. Les personnes qui attendaient devant le centre étaient soit des chômeurs ou des anciens militaires qui venaient quasiment tous les jours, depuis trois semaines, pour savoir si leur dossier avait été retenu. Dans un deuxième attentat à la voiture piégée, perpétré quelques heures plus tard dans le nord de Bagdad, six membres du Corps de la défense civile (ICDC - auxiliaire de l'armée) ont été tués et quatre autres blessés dans la localité de Yathrib. Au nord de Bagdad, cinq insurgés ont été tués le 17 juin dans un accrochage avec les forces américaines près de Baqouba, a indiqué un porte-parole de la coalition, alors que l'hôpital de la ville a fait état de trois Irakiens tués et de 12 blessés. La Hongrie a annoncé, de son côté, avoir perdu son premier soldat en Irak, dans une explosion survenue à As-Souwayrah (sud-est de Bagdad).
Par ailleurs, des chasseurs américains ont largué 14 bombes le 24 juin à Falloujah et Baqouba, deux des cinq villes visées par des attaques simultanées. Les villes de Mossoul, Baaqouba et Ramadi ont connu des attaques contre des postes de police et de violents combats. Falloujah (ouest de Bagdad) a été le théâtre de rudes combats entre insurgés et soldats américains, qui se sont poursuivis sporadiquement la nuit. Ces violences ont fait quelque 90 tués dont trois soldats américains et près de 300 blessés, en majorité des civils. Le groupe de l'islamiste jordanien Abou Moussab al-Zarqaoui, lié au réseau terroriste Al-Qaïda, les a revendiquées dans un communiqué qui lui est attribué sur un site internet islamiste. Il s'agit de la journée la plus meurtrière en Irak depuis le 2 mars dernier, lorsque 171 personnes avaient péri et 400 autres avaient été blessées dans des attentats suicide à Kerbala et Bagdad lors des processions chiites de l'Achoura. A Mossoul, ville la plus touchée, plusieurs attentats à la voiture piégée ont frappé des bâtiments de la police, tuant au moins 62 personnes et en blessant plus de 200, selon le ministère de la Santé. Au moins sept explosions importantes ont été dénombrées à Mossoul où la police a instauré un couvre-feu nocturne et mis en place des barrages routiers sur les grandes artères, pendant que la télévision demandait à la population de rester chez elle. Des fusillades ont éclaté dans la ville entre insurgés d'une part et policiers irakiens et soldats américains d'autre part.
Les Kurdes ont également été la cible de nombreuses attaques dans le pays. Au moins trois personnes ont été tuées et 34 autres ont été blessées dans un attentat à la voiture piégée devant le siège de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK) à Bagdad. L'explosion s'est produite le 1er juin non loin du Q.G de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), près du ministère irakien des Affaires étrangères et d'une entrée de la "Zone verte" où les Américains ont leur Q.G dans le centre de la capitale irakienne. L'hôpital Karama a reçu deux tués et 28 blessés, l'hôpital Yarmouk a accueilli un tué et cinq blessés, l'hôpital Kindi un blessé. “L'explosion de la voiture piégée s'est produite alors que les gens sortaient du siège où ils avaient assisté à une cérémonie commémorant l'anniversaire de la fondation du parti en 1974”, a affirmé un garde de l'UPK Hamid Gaeb Saedulla, précisant que trois de ses collègues avaient été tués. “A la fin de la cérémonie, nous sommes sortis du bureau et en arrivant à la porte, une voiture piégée qui se trouvait devant a explosé”, a affirmé Ali Toufic, chef de l'UPK à Kout (sud), hospitalisé à Karama.
L'explosion a fait un grand trou sur le sol près du bâtiment. L'attentat a eu lieu au moment où des obus tombaient dans le périmètre de la Zone verte, où se trouve le quartier général de la Coalition, pendant que le Conseil de gouvernement procédait à la nomination de Ghazi al-Yaouar, comme premier chef de l'Etat après Saddam Hussein.
Par ailleurs, cinq recrues kurdes de la nouvelle armée irakienne ont été tuées et leurs corps brûlés par des inconnus au nord de Bagdad, a annoncé le 14 juin un responsable kurde à Kirkouk. “Les cinq tués sont affiliés à des partis kurdes et ils suivaient un entraînement dans la région de Taji (10 km au nord de Bagdad)", a déclaré à la presse Jalal Jawhar, responsable de l'UPK dans dans la ville de Kirkouk. “Il s'agit de cinq Kurdes qui ont été tués samedi [le 12 juin] entre Berjil (25 km au nord de Bagdad) et Samarra (75 km plus au nord) par des inconnus qui ont placé leurs corps dans leur voiture avant de la brûler", a-t-il ajouté. Selon lui, leur voiture était tombée en panne dans cette zone et ils s'étaient adressés à un garage pour la réparer avant d'être attaqués sur place.
D’autre part, Ghazi Talabani, le chef de la sécurité des champs pétrolifères de la ville de Kirkouk a été assassiné le 16 juin au matin devant sa maison. Il a été attaqué par des hommes en armes devant sa maison située à côté du siège du gouvernement régional. M. Talabani, dirigeait la sécurité de la Compagnie de pétrole du Nord de l'Irak (NOC) qui dirige la production dans cette partie du pays. La victime servait de lien entre les forces américaines, la Compagnie de pétrole du Nord de l'Irak et la firme privée de surveillance Erinys lorsqu'elles ont tenté de sécuriser les champs pétrolifères du Nord de l'Irak. Talabani, 54 ans, un Kurde, ancien ingénieur à la NOC, avait été chargé de la surveillance de la compagnie après la chute de Sadam Hussein.
Cet assassinat est le troisième du week-end après celui de deux hauts fonctionnaires. Le directeur des relations culturelles du ministère de l'Education, Kamal Jarrah, 60 ans, a été assassiné par balle le 13 juin. La veille, le sous-secrétaire aux Affaires étrangères chargé des organisations internationales, Bassam Koubba, avait été assassiné par un inconnu qui a tiré sur lui à Bagdad.
Le 26 juin, une personne a été tuée et 18 blessées, dont le ministre de la Culture, Mahmoud Mohammad du gouvernement régional d’Erbil, dans l'explosion d'une voiture piégée à Erbil. Karim Sinjari, ministre de l'Intérieur du gouvernement régional d’Erbil a accusé le groupe extrémiste d'Ansar al-Sunna d'avoir perpétré l'attentat.
A Mossoul, deux peshmergas ont été tués et deux autres blessés le 29 juin dans la troisième attaque antikurde dans la région. “Des inconnus, à bord d'une voiture, ont ouvert le feu sur des peshmergas circulant dans un véhicule, en tuant deux et en blessant deux autres”, a indiqué un commandant de police, Zaid Issam Sabri. Cinq peshmergas ont été grièvement blessés le 27 juin dans l'explosion d'une bombe près de Mossoul alors qu'un autre a été tué et deux autres blessés, un jour auparavant dans la ville, dans des attaques armées. Les combattants des deux principaux partis kurdes, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) et l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), ont pris le contrôle à Mossoul de plusieurs bâtiments, dont des permanences du parti Baas dissous de l'ancien dictateur Saddam Hussein.
Le parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), rebaptisé Congrès du peuple du Kurdistan KONGRA-GEL, a mis fin le 1er juin au cessez-le-feu unilatéral décrété cinq ans plus tôt, après l'arrestation de son chef, Abdullah Ocalan, qui purge une peine de prison à vie.
La Turquie a fait peu de cas de l'annonce d'une reprise des hostilités, estimant que les “terroristes” devaient se rendre et que les pays occidentaux devaient l'aider dans sa lutte. La décision de mettre fin à la trêve “constitue une preuve évidente que le Kongra-Gel est une organisation terroriste armée”, a souligné le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Namik Tan à l'occasion d'une première réaction officielle. “Le discours de cette organisation contient des éléments contre l'unité et la sécurité de la Turquie. Ce que nous attendons des terroristes est qu'ils se livrent avec leurs armes aux forces de sécurité pour être jugés”, a-t-il indiqué. M. Tan a appelé les Etats-Unis et l'Union européenne --qui ont inclus le KONGRA-GEL sur leurs listes d'organisations terroristes-- à “renforcer leur solidarité avec la Turquie dans la lutte contre le terrorisme international”.
Les affrontements en sommeil pendant cinq ans ont repris en intensité depuis le 1er juin. Quatre combattants du PKK ont été tués et un soldat blessé dans deux affrontements qui ont eu lieu à Ovacik, dans la province de Dersim, le 4 juin, les premiers après l'annonce de l'arrêt de la trêve unilatérale du PKK. A Elazig, dans un deuxième affrontement, un soldat a été blessé par des tirs d'un groupe de Kurdes qui auraient pris la fuite.
Le 9 juin, trois combattants kurdes du PKK ont étés tués lors d'affrontements avec les forces de sécurité turques et onze gendarmes ont été blessés. Un groupe de quatre combattants a été pris en chasse par des unités de la gendarmerie dans la zone rurale de Kayaonu, près d'Adiyaman. Trois d'entre eux ont été abattus. L'agence de presse turque semi-officielle Anatolie a fait par ailleurs état d'affrontements dans la région de Bingöl. Une opération disposant d'un "soutien aérien" a été lancée. Le poste de gendarmerie du village de Yayla a été attaqué à la roquette dans la nuit du 9 juin.
Le 10 juin, un groupe de combattants kurdes a attaqué la résidence du sous-préfet de Gercus, tuant deux policiers qui étaient en faction. Les deux agents de sécurité ont été tués sur le coup au cours de l'attaque réalisée avec des armes automatiques qui visaient également les résidences d'autres responsables de cette petite ville qui dépend de la province de Batman.
Evénement sans précédent depuis des années au cœur d'une agglomération, le 13 juin, deux combattants kurdes du PKK ont été tués au cours d'affrontements avec les forces de sécurité turques en plein centre-ville de Bingöl. Les combattants auraient tiré à la roquette sur un bâtiment de la garnison de gendarmerie de Bingöl, situé au coeur de la ville, sans faire de victimes. Deux d'entre eux ont été abattus dans les combats qui ont suivi cette attaque. Le lendemain, trois “gardiens de village” --supplétifs kurdes de l’armée turque ----ont été tués à Hatay. Un combattant kurde et un soldat ont été tués ainsi que deux autres militaires blessés dans deux affrontements qui se sont produits près du petit village de Kacarlar, dans la province de Dersim. Dans un deuxième incident à Beytussebap, un soldat a été tué, alors que deux autres, dont un sous-officier, ont été blessés.
Le 14 juin, dans un message publié à l'occasion de l'anniversaire de la création de la gendarmerie, le chef d'état-major de l'armée turque, le général Hilmi Ozkok, a fait état de la “détermination des forces armées turques de poursuivre comme toujours sa lutte contre l'organisation terroriste séparatiste” kurde.
Le 16 juin, un militaire turc a été tué et deux miliciens gouvernementaux blessé lors d'accrochages dans la province de Sirnak. Lors d'un autre accrochage dans la province de Mus, deux miliciens locaux ont été blessés par des militants du PKK. Cinq combattants du PKK ont été tués et un soldat blessé lors de violents affrontements dans la nuit du 21 juin toujours dans la province de Dersim. Selon les autorités turques, des militants de l'ex-parti du PKK auraient attaqué un poste militaire dans la zone rurale de Mazgirt, et les militaires les auraient ensuite pris en chasse.
Par ailleurs, selon les autorités turques, trois soldats turcs ont été tués et trois autres blessés dans l'explosion le 28 juin d'une mine posée sur une route près de Gurpinar. La mine, activée à distance au passage d'un véhicule militaire qui patrouillait dans la zone, à une centaine de km de la frontière iranienne, aurait été placée par des militants du PKK. Trois paysans ont été blessés le même jour à Yuksekova par l'explosion d'une mine au passage d'un engin agricole.
Le Parti démocratique du peuple (DEHAP) a appelé le 12 juin les combattants kurdes du PKK à reprendre le cessez-le-feu qu'ils avaient décrété unilatéralement il y a cinq ans. Le secrétaire général du Dehap, Tuncer Bakirhan, a lancé cet appel au président du Kongra-Gel, Zubeyir Aydar, lors d'une conférence de presse au siège du DEHAP à Ankara. « Cher M. Aydar, président du Kongra-Gel, je vous demande de reprendre le cessez-le-feu pour que le dialogue puisse continuer, pour que les démarches sur la voie d'une résolution démocratique et juste du problème kurde puissent gagner en force », a déclaré M. Bakirhan. Il a estimé que le cessez-le-feu décrété unilatéralement avait été l'occasion d'un « grand apaisement » pour la société turque et avait permis certains développements positifs dans les domaines social, économique et culturel pour les Kurdes. Le dirigeant du DEHAP a plaidé pour la paix à l'heure où la Turquie « vit des moments historiques », faisant référence à la première diffusion, de programmes en langue kurde sur des chaînes de télévision et de radio publiques et à la libération le même jour de quatre ex-députés kurdes, dont Leyla Zana, emprisonnés depuis 10 ans. « Le lancement de programmes en langue kurde sur les télévisions et radios d'Etat est un pas des plus importants qui met fin à près de cent ans de dénégation (de l'identité kurde) », a déclaré M. Bakirhan, qui a par ailleurs estimé que la libération des quatre ex-parlementaires était « porteuse d'un espoir de paix et de démocratie ».
Le DEHAP qui affirme vouloir défendre les droits des Kurdes par des voies pacifiques et démocratiques, n'avait jusqu'à ce jour jamais appelé directement le PKK à mettre fin à la lutte armée. M. Bakirhan a par ailleurs rappelé aux autorités turques que son parti et la population attendaient toujours « une amnistie générale et inconditionelle » pour les combattants du PKK.
De son côté, Zubeyir Aydar, président du Kongra-Gel, a appelé le 30 juin les Etats-Unis à encourager la Turquie à dialoguer avec les Kurdes. “Nous demandons à l'Amérique de fonder ses relations avec la Turquie non pas sur la destruction du mouvement kurde, mais en l'encourageant à dialoguer pour trouver une solution à la question kurde”, a-t-il déclaré. Zubeyir Aydar a estimé qu'un “rapprochement” entre Ankara et Washington risque d'affecter la cause kurde. “Ce n'est pas bon pour les Kurdes et pour la région parce que ce rapprochement ne va pas déboucher sur la stabilité mais sur plus de violence”, a-t-il ajouté. “Nous ne sommes pas un parti terroriste mais une force qui milite pour la démocratie et pour la paix. Nous avons proposé à maintes reprises de négocier avec le gouvernement turc pour trouver une solution pacifique à la question kurde, mais Ankara a toujours refusé de donner une suite favorable à nos demandes”, a souligné le responsable du Kongra-Gel.
M. Aydar a enfin a appelé les Etats-Unis “à ne pas aider la Turquie à exterminer les militants kurdes en Turquie. Cette aide ne résoudra pas le problème et ne mettra pas fin à la violence en Turquie. Bien au contraire, elle va accentuer les souffrances du peuple kurde”.
Hamit Bozarslan, Histoire de la Turquie Contemporaine, coll. Repères, La Découverte, Paris 2004, 123 p.- Irak, An 1, Un autre regard sur un monde en guerre, sous la direction de Pïerre Rigoulot et Michel Taubmann, éd. du Rocher (Jean-Paul Bertrand), Paris 2004, voir en particulier : Ismail Kamandar Fattah, "La guerre, unique issue pour sauver le peuple irakien de la République des fosses communes", pp. 183-194 ; Kendal Nezan "Choses vues et entendues en Irak", pp. 221-246.- Seymus Dagtekin, A la source, la nuit, éd. Robert Laffont, Paris 2004, 230 p., 18 euros- Sheerin Ardalan, Les Kurdes Ardalân entre la Perse et l'Empire ottoman, coll. Société d'Histoire de l'Orient, Geuthner, Paris 2004, 226 p., 29 euros.- Etudes Kurdes, revue semestrielle de recherches, n° 6, janvier 2004, publ. Fondation Institut Kurde de Paris et l'Harmattan, 158 p., 14,50 euros- Giuseppe Campanile, Histoire du Kurdistan (Storia della Regione Kurdistan et delle sette di religione ivi esistenti), Naples 1818, trad. de l'italien par le R.P. Thomas Bois, Hors série 1, revue Etudes Kurdes, Fondation Institut Kurde de Paris et l'Harmattan, Paris avril 2004, 140 p.- Kurdische Studien, revue semestrielle, 3ème année, n° 1 et 2, Berliner Gesellschaft zur Förderung der Kurdologie e.V. Berlin 2004, 267 p., 12,50 euros.
Le Sénat américain et la Commission des finances de la Chambre des représentants ont approuvé le 2 juin l'enveloppe de 25 milliards de dollars demandée par le président américain George W. Bush pour couvrir les opérations militaires en Irak et en Afghanistan pendant les premiers mois de l'exercice budgétaire 2005.
Le Sénat a voté par 95 voix, aucune voix contre n’a été prononcée, pour ajouter ces 25 milliards de dollars au budget des programmes de défense 2005, portant ce budget à 447 milliards de dollars.
Les sénateurs n'ont toutefois pas accordé à George W. Bush toute la latitude qu'il souhaitait. Alors que le chef de la Maison Blanche demandait pouvoir utiliser ces 25 milliards de dollars à sa guise après en avoir simplement informé le Congrès, le Sénat ne l'a autorisé à dépenser que 2,5 milliards de dollars sans avoir de compte à rendre devant les parlementaires.
Par ailleurs, la Commission des finances de la Chambre des représentants a approuvé une enveloppe de 416 milliards de dollars, incluant les 25 milliards pour l'Afghanistan et l'Irak, pour le Pentagone.
Sur ces 25 milliards, elle en a assigné 22 à des programmes spécifiques et a autorisé George W. Bush à transférer un milliard sans rendre de compte. Il pourra transférer jusqu'à deux milliards, mais devra pour cela obtenir l'accord des parlementaires.
Ces 25 milliards de dollars sont destinés à couvrir les opérations militaires américaines en Afghanistan et en Irak pour les premiers de l'exercice budgétaire 2005, qui débute le 1er octobre. Au total, l'administration américaine pourrait demander une enveloppe de 50 milliards de dollars, rien que pour ces deux pays.
Le dirigeant kurde irakien Jalal Talabani a démenti une information parue dans la presse américaine selon laquelle des agents israéliens se trouvent au Kurdistan irakien pour monter des opérations contre l'Iran. “Ces informations sont des chimères”, a-t-il déclaré le 21 juin, à son arrivée à Ankara où il s’est entretenu avec le ministre turc des Affaires étrangères Abdullah Gul. “J'invite ceux qui rapportent (ces informations) à venir voir de leur propres yeux”, a ajouté M. Talabani, chef de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), qui gouverne le Kurdistan irakien avec le Parti démocratique du Kurdistan (PDK).
Selon un article du journaliste américain Seymour Hersh paru dans l'édition du 20 juin du magazine New Yorker, des agents israéliens opèreraient au Kurdistan irakien et auraient fait des incursions en Iran pour surveiller des installations nucléaires. Ces agents, parmi lesquels figureraient des membres du service secret israélien Mossad, entraîneraient des commandos kurdes, affirme le magazine.
L'ambassade d'Israël à Washington a démenti ces informations, selon le New Yorker, mais elles auraient été confirmées par un haut responsable, non identifié de la CIA (la centrale américaine du renseignement).
La presse turque reprenait le 22 juin à la Une l'article du New Yorker et rappelait que des informations de ce genre circulent déjà depuis plusieurs mois. Selon le quotidien Radikal, les services de renseignements turcs (MIT) ont informé le gouvernement des “activités secrètes” d'Israël dans le Kurdistan irakien. Ankara a demandé des explications aux autorités israéliennes qui ont démenti, selon le journal.
La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a condamné le 29 juin la Turquie pour avoir, en 1994, expulsé une quinzaine de villageois de leur maison du Kurdistan du fait de l'état d'urgence alors en vigueur dans la région, et pour les avoir empêchés de reprendre possession de leurs biens.
Cette décision est la première portant sur l'impossibilité pour des Kurdes expulsés de retourner dans leur village. Quelques 1.500 requêtes similaires ont été déposées auprès de la Cour, soit un quart environ du nombre total de requêtes introduites contre la Turquie.
Les juges européens ont estimé à l'unanimité que la Turquie avait enfreint le droit à la protection de la propriété et au respect de la vie familiale des requérants, expulsés en 1994 de Boydas, un village proche de Hozat, pendant les affrontements entre forces de l'ordre et partisans du PKK. Les villageois, qui se sont vu refuser tout accès à leurs biens jusqu'en juillet dernier, “ont été privés de toutes les ressources qui constituent leur gagne-pain”, relève la Cour. De plus, les autorités turques “ne leur ont pas fourni de logements de remplacement”.
“Les autorités avaient le devoir primordial et la responsabilité d'assurer les conditions - et de fournir les moyens - permettant aux requérants de regagner de leur plein gré, en sécurité et avec dignité leur domicile (...), ou de s'installer volontairement dans une autre région du pays”, estiment les juges des droits de l'homme.
La Cour relève enfin qu'un projet de loi sur “l'indemnisation de dommages résultant d'actes terroristes ou de mesures prises pour lutter contre le terrorisme” est actuellement à l'étude à Ankara, mais que ce projet “n'est pas en vigueur”, et qu'en conséquence il “n'offre aucun remède quant aux griefs des requérants”.
La Cour européenne des droits de l'Homme avait le 1er juin condamné la Turquie pour la destruction de la maison d'un ressortissant d'origine kurde lors d'une opération des forces de sécurité qui avaient incendié des maisons du village d'Akdoruk en 1993. La cour avait alloué au requérant, 71 ans, qui dénonçait “la politique officielle concernant le traitement réservé aux personnes d'origine kurde”, 36.500 euros de dommages et intérêts et 15.000 euros pour frais et dépens. Les soldats, munis d'une liste de noms, avaient incendié le 13 novembre 1993 un certain nombre de maisons dont celle d'Abdullah Altun dont tous les biens, y compris son bétail, avaient été réduits en cendres. La Cour avait condamné la Turquie au titre de la violation des articles 3 (interdiction des peines ou traitement inhumain ou dégradants), 8 (droit au respect de la vie familiale), 13 (droit à un recours effectif) et 1 (protection de la propriété) de la Convention européenne des droits de l'Homme.
Par ailleurs, la Turquie avait été condamnée le 22 juin par la Cour européenne des droits de l'Homme pour “traitements inhumains ou dégradants” sur deux hommes arrêtés en 1995 pour leurs relations avec le parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK). Abdulrezzak Aydin et Abdullah Yunus avaient été arrêtés en avril 1995 dans le cadre d'une opération de police menée contre le PKK, interdit comme organisation terroriste en droit turc. A l'issue de leur garde-à-vue, aucune trace de violence n'avait été constatée sur eux mais quelques jours plus tard, à la prison où ils avaient été placés en détention provisoire, les médecins avaient constaté qu'ils souffraient tous les deux d'un oedème et d'ecchymoses aux testicules et de douleurs aux jambes. Les plaintes déposées par les deux hommes contre les policiers responsables de leur garde-à-vue avaient abouti à un non-lieu et la procédure entamée contre les deux requérants par la justice turque pour assistance à une bande armée est toujours en cours.
La Cour européenne a estimé que le gouvernement turc n'avait pas été en mesure de fournir “une explication plausible ni concernant la discordance existant entre ces rapports, ni à propos de l'origine des blessures constatées sur les corps des deux requérants, alors qu'en tout état de cause, les violences à leur origine ne peuvent être survenues que pendant leur détention”. “Pareille situation relève d'un manquement de l'Etat à son obligation de protéger tout personne en situation de vulnérabilité et détenue notamment par des fonctionnaires de police”, ont continué les juges, estimant qu'il y avait eu violation de l'article 3 (interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants) de la Convention européenne des droits de l'Homme. La Cour a également condamné la Turquie à verser à chacun des deux requérants 20.000 euros pour dommage moral.
Le président irakien Ghazi al-Yaouar s'est dit opposé le 22 juin à un changement de la composition ethnique de la ville pétrolière de Kirkouk, qui a connu une arabisation forcée sous le régime de Saddam Hussein aux dépens des Kurdes. “Kirkouk doit être une ville de coexistence pacifique et le nouvel Irak n'obligera personne à quitter son foyer”, a déclaré M. Yaouar qui a visité la ville en compagnie de l'administrateur civil américain Paul Bremer.
Le président intérimaire, issu de la grande tribu arabe des Chammar, a violemment réagi à une demande du vice-gouverneur de la ville, Hassib Rouj Bayani, un Kurde en charge du dossier des déplacés, qui a recommandé de “chasser les étrangers de la ville”. “Je refuse ce genre de qualification, il s'agit quand même d'Irakiens. Vos propos sont durs et je ne peux les accepter”, a répondu M. Yaouar durant une rencontre avec les responsables de la ville.
Sous le régime de Saddam Hussein, des milliers d'Arabes ont été encouragés à s'installer dans la ville pétrolière, revendiquée par les Kurdes, qui militent aujourd'hui le départ des colons arabes. Cette question crée une tension permanente dans la ville où les heurts armés entre les membres des deux communautés se sont multipliés. M. Bremer a de son côté évoqué la reconstruction de la ville, indiquant qu'une enveloppe de 500 millions de dollars avait été consacrée à 90 projets dans les secteurs de l'électricité, de l'eau et des routes. La visite de deux heures a été entourée d'un strict dispositif de sécurité assuré par les forces américaines et la police irakienne.
Le Koweit a annoncé le 29 juin, au lendemain du transfert du pouvoir en Irak, le rétablissement des relations diplomatiques avec ce pays, rompues depuis l'invasion de l'émirat par l'armée de Saddam Hussein en 1990. Après la passation des pouvoirs par les Etats-Unis à un gouvernement intérimaire irakien, “l'Etat du Koweit annonce le rétablissement de ses relations diplomatiques avec la République arabe sœur”, a déclaré un porte-parole du ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.
Le Koweit “accréditera ultérieurement un ambassadeur” à Bagdad, a-t-il ajouté, soulignant que cette initiative témoignait du “souci du Koweit de coopérer (avec l'Irak) dans l'intérêt des deux pays frères pour consolider les fondements de la sécurité et de la stabilité dans la région” du Golfe.
L'émirat, qui a servi de tête de pont pour les forces américaines et britanniques ayant envahi en mars 2003 l'Irak pour renverser le président Saddam Hussein, a établi de bonnes relations avec les autorités intérimaires irakiennes ayant succédé au régime baassiste de l'ex-dictateur.
En saluant le transfert du pouvoir, le Premier ministre koweitien Sabah Al-Ahmad Al-Sabah a répété que la réouverture de la chancellerie avait été “retardée pour des raisons sécuritaires et non politiques”. Mais comme pour exprimer ses bonnes intentions à l'égard des nouvelles autorités de Bagdad, il a affirmé que le dossier des frontières, à l'origine de l'invasion de l'émirat en 1990, “était clos” depuis une résolution adoptée par le Conseil de sécurité de l'Onu en 1993.
En décidant de rétablir les relations avec Bagdad qu'il conditionnait jusque là au retour de la sécurité en Irak, le Koweit aura immédiatement emboîté le pas aux Etats-Unis qui ont rétabli le 28 juin leurs liens diplomatiques avec ce pays, rompus en février 1991 à l'initiative de Saddam Hussein en pleine guerre du Golfe.