Les élections parlementaires et présidentielle du 14 mai 2023 se sont déroulées dans un climat relativement calme, sans violences majeures. Les deux camps en compétition et les autres partis ont, jusqu’au dernier jour, multiplié meetings et rassemblements populaires pour tenter de convaincre et de mobiliser les élécteurs. De fait, la participation a été massive, 87%.
A l’issue du scrutin du 14 mai, l’Alliance des masses (Cumhur Itifaki) regroupant notamment l’AKP et le MHP (Parti de l’action nationaliste) a obtenu une majorité absolue de 322 sièges (sur 600) à l’Assemblée nationale turque, en perte de 22 sièges par rapport aux élections de 2018 où elle avait gagné 344 sièges. Le recul est assez net pour l’AKP dont le score passe de 42,56% en 2018 à 35,51% et le nombre de sièges de 295 à 267. Son allié d’extrême droite MHP enregistre un léger recul avec 10,07% des voix en 2023 contre 11,10% en 2018 mais 50 députés contre 49 en 2018. Les petits partis islamistes alliés obtiennent 5 sièges. L’Alliance nationale (Millet Itifaki) regroupant les partis de l’opposition, à l’exclusion du HDP pro-kurde, obtient au total 213 sièges. La principale composante de cette alliance, le vieux Parti républicain du peuple (CHP) fondé par Ataturk, avec 25,33% des voix contre 22,64 en 2018 et 169 députés contre 136 en 2018 progresse quelque peu. 32 de ces sièges sont réservés à des petits alliés du CHP : 9 députés pour le Parti du Futur (Gelecek) d’Ahmet Davudoglu, ancien Premier Ministre d’Erdogan, 14 députés pour le parti Deva (Remède) d’Ali Babacan, ancien ministre d’Erdogan et 9 députés pour le parti de la Félicité (Saadet) islamiste ; le CHP se retrouve ainsi avec une perte de 9 sièges par rapport à 2018. L’autre composante majeure de l’alliance le Bon Parti obtient 9,68% des voix contre 9,96% en 2018 et 43 sièges comme en 2018.
Le Parti démocratique des peuples (HDP) menacé d’interdiction et de mise au ban de la plupart de ses dirigeants avait, quelques semaines avant le scrtin, décidé de présenter ses candidats, pour la plupart peu connus, la majorité étant soit en prison soit en exil, sous l’étiquette du Parti de la Gauche Verte (YSP). Pratiquement banni des écrans de télévision et objet de menaces et pressions de toutes sortes et stigmatisé tout au long de la campagne électorale par le président sortant Erdogan comme « la vitrine politique des terroristes du PKK », le nouveau parti obtient 8,82% des suffrages où il s’était allié avec le TIP (Parti ouvrier de Turquie) qui obtient en 2023 1,7% de suffrages et 4 sièges et le HDP 61 sièges. Leurs voix additionnées représentent 10,52% des suffrages contre 11,7% en 2018 et 65 députés contre 67 en 2018. Malgré cette contre-performance dont les raisons multiples seront débattues dans les semaines et les mois à venir, le HDP demeure en nombre de députés la deuxième formation politique de l’opposition et le troisième groupe parlementaire de l’Assemblée nationale de Turquie.
La carte issue de ces élections législatives du 14 mai ressemble beaucoup à celle des élections de 2018. Les électeurs du littoral égéen et méditerranéen ont, avec ceux de Thrace (région européenne limitrophe à la Grèce et de la Bulgarie) ont majoritairement voté pour le CHP. Outre ces voix de « Turcs blancs », considérés comme occidentalisés et laïcs, les alévis d’Anatolie ont également voté pour le CHP qui, malgré un siècle d’existence, reste ainsi un parti régional. Dans le Kurdistan turc, où la compétition s’est jouée entre le parti pro-kurde YSP et l’AKP du président turc, les provinces à forte majorité kurde ont massivement voté pour le YSP. Le YSP a ainsi remporté 8 sièges à Diyarbakir, l’AKP 3 sièges et pour la première fois le CHP 1 siège gagné par l’ancien bâtonnier kurde la ville Sezgin Tanrikulu. A Van, le YSP a remporté 6 sièges, l’AKP 2, à Mardin le YSP 4 sièges, l’AKP 1, à Batman le YSP 4 sièges, l’AKP 1, à Sirnak le YSP 3 sièges l’AKP 1, à Agri le YSP 3, l’AKP 1, à Mus le YSP 2 sièges, l’AKP 1, à Bitlis le YSP 2 sièges, l’AKP 1. Dans la province natale du leader du CHP Kiliçdaroglu, Dersim (Tunceli), à majorité kurde alevie, le seul siège en jeu a été remporté par le YSP. Dans les provinces frontalières à populations mixtes kurdo-arabe (Urfa) ou kurde-turque (Kars), les sièges ont été partagées. Dans les grandes métropoles turques comptant d’importantes communautés kurdes, le YSP a obtenu 8 députés à Istanbul, 3 à Mersin, 2 à Izmir, 1 à Adana, 1 à Antalya.
Pour l’élection présidentielle sur les 4 candidats en lice, l’un Muharem Ince, victime de menaces et de chantage a dû se retirer quelques jours avant le scrutin. Le candidat Erdogan a utilisé tous les ressorts de l’appareil d’Etat pour multiplier promesses et cadeaux électoraux aux diverses catégories de la population, procéder à l’inauguration avec des discours sur l’avenir radieux du siècle turc retransmis en direct par 21 chaînes de télévision à son service avec aussi des menaces et anathèmes contre ses opposants qualifiés d’alliés du terrorisme. Le principal candidat de l’opposition Kemal Kiliçdaroglu, n’a eu droit qu’à une couverture médiatique ad minima sur les deux ou trois chaînes de télévision encore indépendante mais à l’audience limitée car sous-financées et peu attractives. L’ONG Reporters sans frontières a calculé que pendant cette campagne le candidat Erdogan a eu 60 fois plus de présence sur les écrans que son chalenger Kiliçdaroglu. Pour favoriser ce dernier et battre Erdogan, le HDP n'a pas présenté de candidat pour l’élection présidentielle. En 2015, son candidat Selahettin Demirtas avait obtenu 13,5% des voix.
A l’issue de ce scrutin « libre » mais très inéquitable le candidat Erdogan, pour la première fois mis en ballotage et a obenu 49,52% des suffrages contre 44,88% pour Kiliçdaroglu et 5,17% pour un candidat ultra nationaliste laïc Sinan Dogan. Ce dernier après quelques marchandages avec Erdogan, a appelé ses électeurs à voter au second tour pour le président sortant.
Dans l’espoir de gagner une partie des voix de l’extrême-droite nationaliste et xénophobe, Kiliçdaroglu a nettement droitisé son discours, promettant le renvoi vers la Syrie des millions de réfugiés syriens, s’engageant à « ne jamais s’asseoir à la table avec des terroristes » reprochant ainsi tacitement à Erdogan le processus de paix au cours duquel des négociations avaient été engagées entre les émissaires du gouvernement et les dirigeants du PKK. Ce discours a été mal perçu par une partie de l’électorat kurde ainsi que par certains démocrates turcs, qui malgré leur hostilité à Erdogan, ont choisi de ne pas aller voter. Ainsi la participation du second tour a été de 84,15% contre 86,98% au 1er tour. Au Kurdistan, elle a baissé de plus de 5%. Malgré cette désaffection relative l’électorat kurde a voté à plus de 72% pour Kiliçdaroglu mais cela n’a pas suffit pour le faire élire.
A l’issue de ce deuxième tour annoncé serré, le président sortant a été réélu avec 52,18% des suffrages contre 47,82% pour Kiliçdaroglu pour un troisième mandat de 5 ans alors que la Constitution turque limite à deux le nombre de mandats présidentiels. Elle exige aussi que le président soit diplômé d’université, qui n’a jamais produit le diplôme de la Faculté des Sciences économiques qu’il prétend avoir obtenu. Il habite un palais construit sans permis de construire, donc en toute illégalité. Pour Erdogan « l’Etat c’est moi » et « la loi c’est moi » car « Je suis sorti victorieux des urnes ». Telle est la conception de la démocratie.
Un mémorial dédié au général Mustafa Barzani, leader emblématique de la résistance kurde depuis les années 1930 jusqu’à 1975, a été inauguré le 11 mai dans son village natal de Barzan, près de sa tombe. En retrait de celle-ci le complexe mémorial bâti à flanc de colline comprend notamment un musée retraçant la vie de Barzani, sa traversée du siècle avec des images et des documents évoquant sa résistance contre les armées irakiennes soutenues par l’aviation britannique, sa participation à la République kurde de 1946 fondée par Qazi Mohammed dont il fut le commandant en chef des armées , sa longue marche à travers les frontières de l’Irak, de l’Iran et de la Turquie pour rejoindre l’Union soviétique en 1947, son exil soviétique qui dura jusqu’en 1958, son retour après la révolution du 14 juillet 1958 mettant un terme à la monarchie hachémite mise en place par les Britanniques où il fut accueilli comme un héros national par les Kurdes mais aussi par les Irakiens, sa longue résistance armée de 1961 à 1975 contre les dictatures irakiennes successives et enfin son ultime exil à Washington où il décéda en 1979. Le musée comprend aussi des objets qui lui ont appartenu témoignant de la grande simplicité et de la sobriété de sa vie. Le musée est flanqué d’un grand auditorium - salle de conférences où furent accueillis plus de 300 invités triés sur le volet venant de toutes les parties du Kurdistan, de la diaspora kurde de l’Europe, des Etats-Unis, du Caucase, de l’Asie centrale ainsi que des représentants de tous les partis politiques du Kurdistan, ceux des cultes et les principaux dirigeants irakiens. Outre le président irakien, Latif Rashid, le Premier ministre al-Soudani, le président du Parlement irakien Mohammed al-Haboussi, le ministre de la Défense, celui des Affaires étrangères Fuad Hussein, le leader chiite al-Hakim, ont fait le déplacement tout comme la Maire de Paris, Anne Hidalgo et l’ancien ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner et de nombreux ambassadeurs et diplomates. L’Institut kurde était représenté par Joyce Blau, Nazand Begikhani et Kendal Nezan.
S’adressant à ce parterre exceptionnel rassemblé grâce à la figure fédératrice de Mustafa Barzani et par la solidarité avec le peuple kurde et son long combat pour sa liberté, l’ancien président Massoud Barzani a évoqué l’engagement de sa famille depuis la fin du XIXème siècle dans la lutte de libération nationale kurde. Première figure marquante de cette saga, son oncle le Cheikh Abduselam qui fut un grand réformateur, établissant des relations égalitaires entre les communautés musulmanes, chrétiennes et juive de la vallée « parce que nous sommes tous frères en humanité », interdisant les mariages forcés ou arrangés, prônant la propriété commune de la terre et des ressources naturelles, banissant la chasse et l’abattage des arbres. Considéré comme une menace pour l’ordre établi, il fut pendu par l’empire ottoman en 1914 Son successeur le cheikh Ahmed pour qui l’argent souillait les relations humaines, qui déconseillait les manifestations ostentatoires de la religion, y compris le pèlerinage à la Mecque dont le coût peut être mieux utilisé en assistance aux voisins indigents, fut le maître à penser de la vallée de Barzan jusqu’à sa mort, dont le bras armé et le leader politique fut son jeune frère Mustafa Barzani.
Barzani a souligné que tout au long de ces décennies de lutte, les Kurdes n’avaient fait que se défendre pour sauvegarder leur identité, leur culture, leur mode de vie et leurs valeurs humanistes menacées par des régimes nationalistes et dictatoriaux. « Notre combat a été contre ces régimes jamais contre les peuples voisins qui ont, eux aussi, souffert de ces tyrannies sanguinaires », a-t-il souligné. Dans cet esprit conciliateur, il a affirmé que les différends contentieux qui subsistent entre Erbil et Bagdad peuvent et doivent être réglés par le dialogue dans un esprit de respect mutuel. Il s’est félicité des avancées enregistrées depuis la prise de fonctions du nouveau gouvernement irakien de Mohammed Shia al-Soudani. Il également appelé les partis kurdes irakiens à surmonter leurs dissensions et à ouvrir un nouveau chapitre dans leurs relations en réglant par le dialogue leurs problèmes en ayant toujours à l’esprit les intérêts supérieurs du Kurdistan et en respectant le vivre-ensemble de toutes ses communautés.
Dans son discours en kurde le président irakien, Latif Rashid, a également souligné l’importance d’un dialogue sincère pour régler les problèmes en souffrance et rappelé que l’Irak sera plus fort et en paix si le Kurdistan est fort et en paix. Lui succédant, le Premier ministre irakien a évoqué « la résistance héroïque contre la tyrannie » du peuple kurde qui a ainsi rendu un grand service à tout le peuple irakien. Il s’est engagé à appliquer toutes les clauses de l’accord signé avec les Kurdes pour la formation de sa coalition gouvernementale.
Quelques jours après cette inauguration les bureaux politiques du PDK et de l’UPK se sont réunis pour discuter de la préparation des élections parlementaires kurdes de novembre prochain. Après 6 mois de boycott, les ministres issus de l’UPK ont décidé de participer à nouveau aux réunions du Conseil des Ministres. Malgré le nouvel esprit d’entente, fortement encouragé par la Coalition internationale contre Daech, notamment les Etats-Unis, il reste encore des nombreux litiges à régler notamment sur la loi électorale. De son côté, l’Iran multiplie les menaces d’intervention contre les camps des partis politiques kurdes iraniens réfugiés au Kurdistan irakien. Il manipule aussi certaines institutions irakiennes contrôlées par ses partisans, comme la Cour Suprême fédérale, pour saboter le rapprochement entre Erbil et Bagdad. Ainsi, celle-ci a jugé « inconstitutionnelle » la décision prise en octobre 2022 par le parlement du Kurdistan de proroger son mandat d’un an ajoutant ainsi à la crise politique récurrente de l’insécurité juridique. La même Cour, créée à titre provisoire en 2005, dont la légalité même est contestée, n’a à ce jour pas jugé opportun de se prononcer sur la non application de certains articles de la Constitution, notamment l’article 140 prévoyant la tenue d’un referendum dans les territoires kurdes dits « contestés » contrôlés par le gouvernement fédéral pour savoir si ses populations souhaitent rejoindre la Région du Kurdistan.
Par ailleurs, la reprise des exportations du pétrole du Kurdistan vers la Turquie annoncée à de multiples reprises n’a toujours pas eu lieu. Ankara multiplie les prétextes « techniques » et semble attendre les résultats des élections pour engager une négociation qui s’annonce très serrée avec l’Irak sur les conditions d’acheminement de ce pétrole. Depuis la décision d’interruption de ces exportations, le 22 mars dernier, l’Irak aurait, selon l’agence Reuters, déjà perdu plus de 1,5 milliards de dollars de recettes.
Un nouveau point de passage entre le Kurdistan irakien et turc a été inauguré le 10 mai dans le district de Mergasor d’Erbil, frontalier avec la province de Hakkari. Le commerce entre la Turquie et le Kurdistan dépasse désormais un volume de 12 milliards de dollars par an. Il profite aux grandes compagnies turques d’agro-alimentaire et de construction mais aussi aux marchands kurdes des deux côtés de la frontière.
Englué dans une crise économique et sociale qui s’aggrave sans cesse, le régime iranien tente d’améliorer se relations avec les pays du Golfe arabo-persique et envoie aussi quelques imides signes d’apaisement en direction de l’Europe.
La réconciliation avec l’Arabie saoudite grâce aux bons offices de la diplomatie chinoise est en bonne voie. La reprise des relations diplomatiques avec la réouverture des ambassades respectives est annoncée pour le mois de juin. Les autres pétro-monarchies du Golfe s’engagent aussi dans un processus de rapprochement et de développement des relations commerciales malgré les sanctions occidentales. La coopération sécuritaire avec la Russie et les relations « stratégiques » avec la Chine se développent aussi. Tout cela procure au régime assez de ressources pour sa survie sans toutefois porter remède à la profonde crise économique que traverse le pays et qui suscite des vagues de contestation des couches paupérisées de la population.
Dans l’espoir de parvenir enfin à conclure avec les Occidentaux sur le nucléaire et obtenir une levée des sanctions qui frappe durement son économe, le régime iranien a, en mai, libéré quelques otages occidentaux dont les Français Benjamin Brière et Bernard Phellan et un humanitaire belge en contrepartie de la libération d’un diplomate iranien condamné à 20 ans de prison en Belgique pour tentative d’attentat contre un rassemblement d’opposants iraniens en France. Le « deal » a été négocié grâce à la médiation du Sultanat d’Oman et on s’attend à d’autres libérations d’otages dans les mois à venir.
Sur le plan intérieur, le pays connait depuis début mai, une vague de grèves. Début mai, plus d'une douzaine de syndicats ont publié une déclaration exprimant leur soutien aux grèves en cours dans diverses industries iraniennes pour protester contre les bas salaires, l'inflation et les mauvaises conditions de vie. Les autorités iraniennes ont averti les syndicats, en particulier ceux du Kurdistan iranien, de s'abstenir de toute manifestation lors de la Journée internationale des travailleurs, qui a lieu chaque 1er mai. Le régime a également fait pression sur l'Assemblée consultative islamique pour qu'elle limoge le ministre iranien de l'Industrie, des Mines et du Commerce, Reza Fatemi Amin. Les partis d'opposition kurdes exilés d'Iran ont publié une déclaration soutenant les grèves et détaillant les problèmes auxquels les travailleurs sont confrontés en Iran. Les partis ont blâmé le régime actuel et le Shah pour le manque « d'infrastructures et de projets industriels » du Kurdistan iranien, ce qui contribue à son taux de chômage exorbitant et à son statut de région la plus pauvre d'Iran, après le Bélouchistan. Pendant ce temps, de nouvelles attaques au gaz toxique ont visé cinq écoles de filles à Sinneh, Kermanshah et Téhéran. Par ailleurs, un tribunal pénal de Bokan a condamné deux Kurdes à deux ans de prison pour « coopération » avec un parti kurde. Enfin, un prisonnier politique kurde du nom de Melad Zahrawand risque d'être exécuté à Malayer après avoir été arrêté pour avoir participé à des manifestations antigouvernementales en novembre dernier.
L'Organisation Hengaw pour les droits de l'homme a rapporté que les autorités iraniennes ont arrêté 31 Kurdes, dont des jeunes, des enseignants, des médecins et des personnalités religieuses, pour des accusations liées à leurs activités en avril. En outre, un tribunal de Dewalan a condamné un imam kurde à sept mois et demi de prison et 70 coups de fouet et une personnalité religieuse de Jwanro (Javanrud) à trois ans de prison pour « propagande contre le régime » pour avoir soutenu des manifestations antigouvernementales. Un tribunal de Piranshahr a condamné trois Kurdes à 11 mois de prison pour des accusations liées aux manifestations. A Mahabad, un membre du Croissant-Rouge a été condamné à sept ans et demi de prison. À Sinneh, un militant du nom de Muslim Saedpour a été condamné à un an de prison pour avoir organisé une cérémonie publique commémorant Newroz. Enfin, le régime a exécuté deux personnes pour blasphème et a pendu 25 Baloutches au cours des premières semaines de mai.
Mi-mai nn tribunal d'Ilam a condamné l'artiste kurde Mohammed Abbaszadeh à un an de prison pour avoir chanté "femme, vie, liberté" lors de manifestations anti-gouvernementales. En outre, trois jeunes Kurdes de Piranshahr ont chacun été condamnés à plus de huit ans de prison pour des accusations liées à des manifestations antigouvernementales, et un imam kurde de Sewilawa, Jalal Akbara, a été condamné à deux ans de prison pour « diffusion de propagande ». Le régime a également arrêté plusieurs autres Kurdes, dont une mère de prisonnier âgée de 67 ans, un athlète kurde à Sinneh, une lutteuse kurde à Khorram et cinq autres à Saqqez, Mahabad, Dewalan et Diwandarah. Simultanément, le régime a ignoré les critiques des Nations Unies (ONU) concernant son recours massif à la peine de mort et a pendu trois autres personnes pour avoir participé à des manifestations. Trois autres manifestants à Ispahan attendent d'être exécutés d’un jour à l’autre.
L’actualité du mois de mai a aussi été marquée par la crise interne dans l’une de composante de l’opposition iranienne, l’Alliance pour la liberté et la démocratie. Outre le leader du parti kurde Abdullah Mohtadi, des personnalités comme la Prix Nobel de la Paix Shirine Ebadi, Nazanin Boniad et Masih Alinejad ont annoncé leur démission de cette alliance formée lors des protestations populaires de la « révolution Jîna Mahsa Amini ». Dans leur lettre de démission, ces personnalités indiquent que la situation « rend difficile la poursuite de notre solidarité ». Elles affirment que « la Charte Mahsa est au cœur de la révolution des femmes, de la vie et de la liberté et elle ne perdra pas son sens jusqu’à la victoire ». Leur démission serait due au mécontentement suscité par le rôle dominant du prince héritier iranien Reza Pahlavi dans la coalition et son soutien aux ultra-nationalistes iraniens en exil.
Par ailleurs, le conseiller irakien à la sécurité nationale, Qasim al Araji, s’est rendu en Téhéran pour une visite officielle afin de discuter du récent accord de sécurité entre l'Irak et l'Iran, sur la « sécurité des frontières » visant à désarmer et à éliminer les partis d'opposition kurdes iraniens du Kurdistan irakien. Al Araji a rencontré Mohammad Pakpour, le commandant des forces terrestres du Corps des gardiens de la révolution islamique iranienne (CGRI), qui a déclaré à un média d'État qu'ils « attendent que le gouvernement irakien remplisse ses obligations en vertu de la politique de sécurité accord." Pakpour a juré de poursuivre les attaques contre l'opposition kurde si l'Irak ne respecte pas l'accord. Le CGRI a déjà mené plusieurs frappes de missiles et de drônes sur le siège de l'opposition kurde au Kurdistan irakien. L'accord de sécurité Irak-Iran a été officiellement signé le 19 mars.
Enfin, les États-Unis ont annoncé leur intention de déployer des forces supplémentaires dans le golfe Persique en réponse à la saisie par le Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) de plusieurs pétroliers marchands dans le détroit d’Ormuz
Signe de la normalisation progressive de ses relations avec les pays arabes, le président syrien Bashar al-Assad a, pour la première fois depuis 2010, assisté au sommet de la ligue arabe réunie le 19 mai à Djeddah en Arabie Saoudite sur l’invitation du roi Salman ben Abdel Aziz. Ce retour au bercail par la grande pompe et solennelle après plus de 12 ans de mise au ban pour cause de guerre civile, marque un tournant politique et diplomatique actant la « victoire » du régime syrien qui grâce au soutien indéfectible de ses alliés iraniens et russes a pu survivre à une guerre civile qui a fait près de 500.000 morts et plus de 11 millions de déplacés. Le régime contrôle désormais « la Syrie utile » incluant Damas, Alep, Homs et le littoral méditerranéen soit plus de deux-tiers du territoire. Les 6 provinces du nord et de l’est sont sous contrôle des Forces démocratiques syriennes, à majorité kurde, avec le soutien de la coalition internationale contre Daech. La province d’Idlib, à la frontière turque, est le dernier bastion de l’opposition syrienne contrôlé par la branche syrienne al-Qaida rebaptisée Haya Tahrir al-Sham ou sous protection turque. Les Turcs occupent aussi les cantons frontaliers kurdes d’Afrin, Serê Kaniyê (Ain al-Arab), Girê Spî (Tell Abyad) ainsi que le canton à majorité arabe d’Azaz où, avec des capitaux qataris, elle construit des dizaines de milliers de logements pour y installer des déplacés arabes et poursuivre l’arabisation de la région.
Dans son discours devant ses pairs arabes réunis pour ce sommet, Assad a souligné l’engagement de la Syrie envers l’arabisme affirmant que « son passé, son présent et son futur sont enracinés dans l’identité arabe. Il considère le sommet comme une occasion importante d’aborder les affaires intérieures du monde arabe avec « une ingérence étrangère minimale ». L’émir du Qatar a boycotté la séance mais son homologue des Emirats arabes unies a invité Assad à la conférence sur le climat qui doit se tenir du 30 novembre au 12 décembre à Dubai, une initiative visant à faciliter le retour du dictateur syrien sur la scène internationale.
La déclaration de clôture du sommet souligne l’importance de créer des conditions favorables au retour des réfugiés syriens et de sauvegarder « l’unité et l’intégrité territoriale de la Syrie ». Le retour des réfugiés syriens est également au centre de la nouvelles politique turque de normalisation avec la Syrie. La Turquie vise à renvoyer vers la Syrie une grande partie de plus de 3 millions de syriens réfugiés en Turquie. Le Liban, au bord du naufrage, qui abrite plus d’un million de réfugiés syriens et la pauvre Jordanie qui en accueille autant, aimeraient aussi les renvoyer chez eux au plus vite. Le régime syrien compte négocier le retour contre des investissements massifs des pétro-monarchies du Golfe, lesquelles espèrent aussi contre-balancer l’influence écrasante de L’Iran sur Damas. Elles veulent aussi contraindre la Syrie à cesser sa fabrication et l’exportation des drogues de synthèse comme Captagon qui, selon l’hebdomadaire français l’OBS du 18 mai « fait des ravages au Moyen-Orient ». Autrefois, plaque-tournante du trafic des drogues comme l’héroïne ou l’opium vers l’Europe via les milices libanaises à son service. La Syrie, à court de cash, est devenue une usine à fabrication à l‘échelle industrielle des amphétamines comme Captagon dont le trafic rapporterait 3 à 4 milliards de dollars par an au régime.
Les Etats-Unis, la France et nombre d’Etats occidentaux sont hostiles à la réhabilitation du régime syrien mais ne disposent guère de moyen pour s’y opposer.
Avant sa participation au sommet de Djeddah, Assad a reçu à Damas le 3 mai en grande pompe, le président iranien pour discuter de la « coopération stratégique entre les deux pays ». Malgré la grande crise économique qu’il traverse, l’Iran continue d’investir dans ses relations avec la Syrie et le Liban afin d’avoir un accès aux ports méditerranéens et de disposer de moyens d’interventions conséquents aux confins d’Israël, ennemi principal du régime iranien avec lequel un conflit majeur reste de plus en plus probable.
Par ailleurs, tout au long du mois de mai, les affrontements entre les FDS et les commandos errants de Daech et les bombardements intermittents des positions kurdes par des drônes et l’artillerie turcs se sont poursuivis. Ainsi Daech a mené une attaque à l'engin explosif improvisé (EEI) contre un véhicule des FDS le 27 avril, une deuxième attaque à l'engin explosif improvisé contre un véhicule militaire des FDS au sud d'Al-Raqqa qui a tué deux membres des FDS et trois blessés le 28 avril et un assaut contre le chef du Conseil militaire de Deir Ez Zor, Tayesir al Sarhid, le 29 avril.
Le 30 avril, les gardes-frontières turcs ont tué un Syrien et en ont blessé cinq autres qui tentaient de franchir illégalement la frontière turque à l'ouest d'Idlib. Un jour plus tard, les gardes-frontières turcs ont agressé 12 Syriens qui traversaient la frontière vers Afrin occupée. Le 26 avril, Human Rights Watch a publié une liste non exhaustive des violences turques contre les réfugiés à la frontière syrienne qui montrait que les autorités turques avaient attaqué des réfugiés traversant la frontière turco-syrienne 277 fois entre octobre 2015 et avril 2023. Parallèlement, l'Observatoire syrien des droits de l'homme Rights a déclaré que les autorités turques ont tué au moins 11 réfugiés et en ont blessé au moins 20 autres pour avoir tenté de traverser la frontière turque depuis le 1er janvier 2023.
La Ligue arabe a mis fin à la suspension de 12 ans du gouvernement syrien pour avoir réprimé les manifestants et l'a réadmise le 7 mai. Les États-Unis ont critiqué cette décision, mais de nombreux États de la région, dont l'Arabie saoudite, ont encouragé la "nation arabe" à accueillir le président syrien. Le régime de Bachar al Assad de retour, ont agi rapidement pour rétablir les relations et rouvrir les ambassades. Parallèlement, le Conseil démocratique syrien (CDS) a salué « tout intérêt international et arabe pour la question syrienne si de tels efforts pouvaient être considérés comme la tragédie des Syriens, qui ne peut se terminer sans un processus politique intégré ». De plus, le président turc Recep Tayyip Erdogan et son adversaire aux élections, Kemal Kilicdaroglu, ont tous deux annoncé leur intention de normaliser les relations avec le régime d'Assad. Enfin, le président iranien Ebrahim Raisi a rencontré Assad à Damas pour discuter de la coopération stratégique en cours entre les deux nations.
Les Forces démocratiques syriennes (FDS) ont signalé l'arrestation de trois terroristes de l'EI (Daech) et d'un suspect dans deux opérations distinctes, avec le soutien de la coalition dirigée par les États-Unis. Les FDS ont également annoncé la mort de deux de ses membres en raison d'une frappe de drônes turcs près de Tel Hamis le 5 mai.
A Afrin, sous occupation turque depuis 2018, une nouvelle colonie de 500 maisons, construites sur des terres kurdes grâce à des fonds qatari et palestiniens, a ouvert ses portes. Pendant ce temps, des groupes armés soutenus par la Turquie continent d’arrêter des Kurdes et d’exiger des rançons.
Selon l‘observatoire syrien des droits de l’homme (SOHR) des factions soutenues par la Turquie dans les régions occupées d’Afrin et d’Azaz ont libéré cinq civils kurdes après avoir reçu des rançons. Le rapport indique que chaque civil à dû payer 4000 USD à ces milices islamistes supplétives de l’armée turque.
Qubad Talabani, vice-Premier ministre de la région du Kurdistan, a participé le 26 mai a une émission de Rûdaw TV où il a répondu aux questions des étudiants de l'Université du Kurdistan sur la situation intérieure de la région du Kurdistan, les relations entre Erbil et Bagdad, et les questions régionales concernant la région du Kurdistan.
Extraits :
En réponse à une question d'un jeune sur la loi pétrolière et gazière du Kurdistan, Talabani a souligné qu'un changement fondamental avait eu lieu après la décision de la Cour fédérale irakienne du 15 février 2022.
Talabani a déclaré que selon la décision de la Cour d'arbitrage international basée à Paris en mars 2023 et l'accord ultérieur entre Erbil et Bagdad, la Compagnie de commercialisation du pétrole de l'Irak (SOMO) était responsable de la vente du pétrole du Kurdistan. Il a déclaré : "Cet accord peut aider à résoudre complètement la question du pétrole entre l'Irak et la région du Kurdistan."
Talabani a rappelé que la question de la reprise des exportations pétrolières était maintenant un problème entre l'Irak et la Turquie, et a souligné que l'Irak attendait une réponse d'Ankara concernant la reprise des exportations.
En réponse à la question de Bestoon Khalid : "La raison pour laquelle Ankara n'a pas encore répondu est-elle liée au récent tremblement de terre et aux élections en Turquie, ou y a-t-il d'autres raisons ?", Talabani a déclaré : "En tant que région du Kurdistan, nous avons fait notre part après l'accord. Comme vous le savez, la situation dans notre région est complexe. Il y a des élections en Turquie et il y a eu un tremblement de terre. Ce dossier est maintenant hors de notre contrôle, il attend une résolution entre Bagdad et Ankara. Nous, nous sommes en faveur de la reprise des exportations dès demain."
Lorsqu'on lui a rappelé ses propos lors du "Forum MERI" selon lesquels "il n'importe pas qui vend le pétrole du Kurdistan", Talabani a commenté : "Si SOMO peut vendre le pétrole du Kurdistan à un prix plus élevé qui profitera à l'Irak et à la région du Kurdistan, qu'il le fasse. Cela n'a aucun sens sur le plan économique. Pourquoi vendre quelque chose que vous pouvez vendre pour deux dollars pour seulement un dollar ?"
Talabani a également déclaré que la Turquie accepterait les conditions de prix de SOMO.
En répondant à une question d'un jeune sur les attaques menées par des drones par la Turquie et l'Iran sur le territoire du Kurdistan, Talabani a déclaré que la région du Kurdistan était impuissante face à l'Irak, à l'Iran et à la Turquie dans ce domaine.
"Notre espace aérien n'est pas sous notre contrôle. D'une manière ou d'une autre, nous contrôlons notre territoire. Avons-nous le pouvoir d'empêcher un pays de bombarder l'un de nos villages avec ses drones, ou de cibler les Kurdes de Rojava et du Nord ? Mis à part les condamnations, avons-nous autre chose ? Honnêtement, je suis fatigué de condamner. Nous condamnons encore et encore. Cela fait partie de la souveraineté de l'Irak. Nous faisons partie de l'Irak, et cela devrait avoir un avantage pour nous. Si cela nous fait du mal, où est passée la souveraineté de l'Irak ? L'aéroport de Souleimanieh a été bombardé et personne n'a rien dit. Ceux qui parlent auraient mieux fait de ne rien dire. Je suis allé à Bagdad, ils ont inventé mille excuses. La conclusion que j'en tire, c'est que tout le monde, sauf les Kurdes, a le droit de violer la souveraineté de l'Irak. L'Iran le fait selon ses propres règles et personne ne dit rien. La Turquie le fait et personne n'en parle. Parfois, même nos alliés respectables le font, et encore une fois, personne ne dit rien. Mais dès que les Kurdes commencent à remettre en question un peu la souveraineté de l'Irak, on dit que c'est du séparatisme. Ils n'ont pas encore compris ça."
Ces propos de Talabani ont été salués par des applaudissements de l’auditoire.
Lorsqu'on lui a demandé si Mazlum Kobani (commandant général des Forces démocratiques syriennes) était venu à Souleimanieh à l'invitation des Américains, Talabani a répondu : "Il n'est pas venu à l'invitation de l'Union patriotique du Kurdistan. Nous sommes alliés avec les Kurdes de Rojava dans la lutte contre l'État islamique, et nous ne le cachons à personne. Nous l'avons dit à tout le monde. La coalition internationale et la Turquie le savent aussi. Nous n'en avons pas honte, nous ne le cachons pas, au contraire, nous en sommes fiers. Dans le cadre de la lutte contre l'État islamique."
Talabani a ajouté : "Le Parlement du Kurdistan a pris une décision pour aider nos frères à Rojava avec tous nos moyens."
Sur les relations entre le PDK et l'UPK, Qubad Talabani a déclaré qu'après avoir décidé de participer à nouveau aux réunions du Conseil des ministres du gouvernement régional du Kurdistan, il s'était entretenu avec le Premier ministre Mesrur Barzani et qu'ils avaient réussi à résoudre la plupart des problèmes entre les deux parties.
Talabani a déclaré : "Nous sommes parvenus à un accord avec le Premier ministre et le Conseil des ministres sur la façon de faire face aux menaces auxquelles la région du Kurdistan pourrait être confrontée à l'avenir."
Talabani a exprimé sa conviction que grâce à l'accord entre les parties et à l'accord pétrolier et budgétaire conclu avec l'Irak, les problèmes financiers du Kurdistan seraient résolus.
Dans une interview accordée au site turc Gerçek News, publiée le 31 mai, le leader kurde emprisonné Selahattin Demirtaș commente les résultats des récentes élections en Turquie il exhorte les responsables du parti à entreprendre des réformes stratégiques tout en faisant face aux défis multidimensionnels auxquels sont confrontés à la fois le parti et le peuple.
L’ancien co-président du Parti démocratique des peuples (HDP), souligne la nécessité d'un examen attentif de la situation actuelle et du développement de mesures efficaces pour faire face aux défis auxquels est confronté le parti. Au lieu de céder à la complaisance, il souligne que les résultats des élections devraient servir de signal d'alarme clair pour le HDP.
Extraits édités par le site Gerçek News
Demirtaș a déclaré que le bloc au pouvoir a pris le contrôle de l'État et a utilisé toutes ses ressources sans considération éthique, a lancé une vaste campagne de diffamation et a utilisé des tactiques manipulatrices. Cependant, il serait simpliste d'attribuer uniquement le manque de succès du HDP lors des élections parlementaires à ces facteurs, critiquant la campagne électorale du parti comme étant trop faible et trop tardive.
"Compte tenu de la situation générale, si vous déclarez : 'Nous dépasserons les 15 % aux élections parlementaires et nous veillerons à ce que le candidat de l'opposition dépasse les 50 % aux élections présidentielles', dans un pays de 63 millions d'électeurs, et si vous lancez votre campagne électorale un mois avant le jour des élections avec une approche non professionnelle et amateuriste ressemblant à une campagne d'une association locale, vous ne pouvez pas espérer réussir", a-t-il ajouté.
Demirtaș a également attiré l'attention sur les dynamiques internes au sein du HDP, révélant les défis auxquels il a été confronté en essayant de combler le fossé avec divers segments de la société.
"Pendant les cinq dernières années, j'ai essayé de transmettre cette réalité à travers des lettres, des messages et des articles au siège du HDP, mais chaque fois, ma voix me revient en écho", a affirmé Demirtaș.
Il a ajouté : "Il se passe de nombreux incidents, mais je m'abstiens de les exposer au public car je crois au fonctionnement des institutions. Malheureusement, les institutions échouent souvent à fonctionner. Il y avait un grand vide, et personne d'autre ne cherchait à le combler, et même s'ils essayaient, ils n'arrivaient pas à réussir.
"Cependant, certains amis de notre quartier, au lieu d'essayer de comprendre ces efforts, se sont concentrés sur moi en pensant que j'essayais de me mettre en avant. S'il y a des lacunes ou des insuffisances, elles ne peuvent être corrigées que par la critique et les suggestions, pas par des attaques infidèles."
Demirtaș souligne également la désillusion et le déclin vécus par la classe moyenne kurde en raison d'un manque d'orientation politique claire et de craintes de perdre leurs moyens de subsistance. Il a critiqué l'émergence d'individus qui, en l'absence d'approches politiques substantielles, se sont adonnés à des sujets futiles, dominant les espaces politiques et sociaux sans apporter de contributions significatives.
"Personne ne peut progresser avec de simples slogans. Si nous ne pouvons pas expliquer la modernité démocratique à un peuple qui a été tellement exposé à la modernité capitaliste et si nous ne pouvons pas présenter des modes de vie alternatifs, beaux et honorables avec nos institutions, l'effondrement de la société devient inévitable", a-t-il déclaré.
En conclusion, Demirtaș a identifié le "coup d'État de soi-même" du 20 juillet 2016 comme un moment décisif où le gouvernement a fermé et usurpé les institutions politiques, culturelles, médiatiques, féminines, jeunes et locales, établissant un système dégradant.
Il a souligné les difficultés socio-économiques auxquelles le peuple est confronté, notamment le chômage et la pauvreté, ainsi que l'augmentation alarmante de la toxicomanie et de la prostitution forcée, en particulier chez les jeunes vulnérables.
"Malgré tout, il y a encore une lutte difficile menée avec beaucoup d'efforts, de sacrifices et de coûts. Je crois qu'en évitant les approches qui nuiraient à cette lutte et en entreprenant plutôt un effort de renouvellement majeur, nous pouvons répondre efficacement au processus", a-t-il déclaré.